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8.novembre.20158.11.2015 // Les Crises

David Graeber : « Le néolibéralisme nous a fait entrer dans l’ère de la bureaucratie totale »

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PAR AGNÈS ROUSSEAUX, RACHEL KNAEBEL 19 OCTOBRE 2015

Source : Bastamag

 

Paperasse et formulaires ont envahi nos vies, et de plus en plus de gens pensent que leur travail est inutile, n’apportant aucune contribution au monde. Malgré ce que martèlent les ultralibéraux, ce n’est pas la faute de l’Etat et de ses fonctionnaires, mais celle des marchés et de leur financiarisation. « Toute réforme pour réduire l’ingérence de l’État aura pour effet ultime d’accroître le nombre de règlementations et le volume total de paperasse », explique ainsi David Graeber, anthropologue états-unien et tête de file du mouvement Occupy Wall Street, dans son nouvel ouvrage Bureaucratie. Il appelle la gauche à renouveler sa critique de cette « bureaucratie totale » avec laquelle nous nous débattons au quotidien.

Basta ! : Vous dites que nous sommes désormais immergés dans une ère de « bureaucratie totale ». Quels en sont les signes ?

David Graeber [1] : Il suffit de mesurer le temps que nous consacrons à remplir des formulaires. Quelqu’un a calculé que les citoyens états-uniens passent en moyenne six mois de leur vie à attendre que le feu passe au vert. Personne n’a calculé combien de temps nous passons à remplir des formulaires ! Peut-être une année entière… C’est la première fois dans l’histoire que nous atteignons ce niveau de bureaucratie.

Le nombre d’occurrences du mot « bureaucratie » augmente dans les livres jusqu’en 1974, puis diminue. Mais les mots que l’on associe généralement aux procédures bureaucratiques, comme « paperasse », « documents à fournir », ou « évaluation de rendement », augmentent de manière continue et dramatique. Nous sommes donc encerclés par des procédures bureaucratiques, mais nous ne les identifions plus comme telles. C’est ce que j’ai essayé d’analyser dans mon livre.

Le sociologue Max Weber affirmait déjà que le 19e siècle avait inauguré l’ère bureaucratique. En quoi la situation est-elle nouvelle ?

La différence, c’est que la bureaucratie est si totale que nous ne la voyons plus. Dans les années 1940 et 1950, les gens se plaignaient de son absurdité. Aujourd’hui, nous n’imaginons même plus une manière d’organiser nos vies qui ne soit pas bureaucratique ! Ce qui également nouveau, c’est la création de la première bureaucratie planétaire. Un système d’administration que personne n’identifie pourtant comme une bureaucratie, car il est surtout question de libre-échange. Mais qu’est-ce que cela signifie réellement ? La création de traités internationaux et d’une classe entière d’administrateurs internationaux qui régulent les choses, tout en appelant ce processus « dérégulation ».

La bureaucratie n’est plus seulement une manière de gérer le capitalisme. Traditionnellement, le rôle de l’État est de garantir les rapports de propriété, de réguler pour éviter l’explosion sociale. Mais la bureaucratie est désormais devenue un moyen au service des structures d’extraction de profits : les profits sont extraits directement par des moyens bureaucratiques. Aujourd’hui, la majorité des profits n’ont rien à voir avec la production, mais avec la finance. Même une compagnie comme General Motors fait plus de profits en finançant l’achat de voitures par le crédit, que par la production de voitures. La finance n’est pas un monde irréel complètement déconnecté de l’économie réelle, où des gens spéculent et font des paris, gagnent de l’argent à partir de rien. La finance est un processus qui extrait des rentes pour certains, en se nourrissant de la dette des autres. J’ai essayé de calculer la part des revenus des familles états-uniennes directement extraite pour alimenter le secteur de la finance, des assurances et de l’immobilier. Impossible d’obtenir ces chiffres !

Tout cela est permis par la fusion progressive de la bureaucratie publique et privée, depuis les années 1970 et 1980. Cela s’opère par une collusion bureaucratique entre le gouvernement et la finance privée. Les 1% (les plus riches) dont parle le mouvement Occupy Wall Street, sont des gens qui accaparent les profits tout en finançant également les campagnes électorales, influençant ainsi les responsables politiques. Le contrôle du politique est aujourd’hui essentiel dans cette dynamique d’accaparement des profits. Et la bureaucratie est devenue un moyen au service de ce processus, avec la fusion de la bureaucratie publique et privée, saturée de règles et de règlements, dont l’objectif ultime est d’extraire du profit. C’est ce que j’appelle l’ère de la « bureaucratie totale ».

Les gens opposent souvent bureaucratie étatique et libéralisme économique. Mais « il faut mille fois plus de paperasse pour entretenir une économie de marché libre que la monarchie absolue de Louis XIV », écrivez-vous. Le libéralisme augmente donc la bureaucratie ?

C’est objectivement vrai. Regardez ce qui se passe ! La statistique la plus impressionnante concerne la Russie après la chute de l’Union soviétique. D’après la Banque mondiale, entre 1992 et 2002, le nombre de fonctionnaires a augmenté de 25 % en Russie [2]. Alors que la taille de l’économie a substantiellement diminué, et qu’il y avait donc moins à gérer. Les marchés ne s’auto-régulent pas : pour les maintenir en fonctionnement, il faut une armée d’administrateurs. Dans le monde néolibéral actuel, vous avez donc davantage d’administrateurs. Pas seulement dans le gouvernement, mais aussi dans les compagnies privées.

Ce qu’on entend souvent par bureaucratie, ce sont aussi des structures sociales fiables et pérennes, qui font que le société fonctionne, comme la Sécurité sociale…

Beaucoup d’institutions sociales que l’on associe aujourd’hui à l’Etat-Providence ont été créées « par le bas ». Je l’ai découvert en discutant avec des Suédois : aucun des services sociaux suédois n’a été créé par le gouvernement. Toutes les cliniques, bibliothèques publiques, assurances sociales, ont été créées par des syndicats, des communautés de travailleurs. Le gouvernement a ensuite voulu les gérer à un niveau centralisé, bureaucratique, expliquant que ce serait plus efficace. Évidemment, une fois que l’État en a pris le contrôle, il peut privatiser ces services. C’est ce qui arrive.

Vous faites aussi le lien entre le développement de la bureaucratie et celui des bullshits jobs (« job à la con » ) [3] que vous avez analysés dans un précédent travail. Tous les « bureaucrates » font-ils des « jobs à la con » ?

Pas tous ! Mon idée sur les bullshit jobs est de demander aux gens quelle est la valeur de leur travail. Je ne veux absolument pas dire à quelqu’un : « Ce que vous faites n’est pas utile ». Mais si une personne me dit que son travail n’apporte rien d’utile, je la crois. Qui peut mieux le savoir qu’elle-même ? Suite à mon travail sur les bullshit jobs, l’agence anglaise de statistique YouGov a fait un sondage. Résultat : 37 % des gens interrogés pensent que leur travail est inutile et n’apporte aucune contribution au monde [4].

J’ai été étonné d’un tel résultat ! Le plus grand nombre de personnes qui pensent que leur travail est inutile se trouve dans le secteur administratif. Peu de chauffeurs de bus, de plombiers ou d’infirmières pensent que leur travail est inutile. Beaucoup de bullshits jobs sont « bureaucratiques », autant dans le secteur privé que public. Un exemple ? Ces gens qui vont à des réunions et écrivent des compte-rendus pour d’autres gens qui vont à des réunions et écrivent des compte-rendus. Quand mon article a été publié sur le web, je n’imaginais pas que les gens feraient de telles confessions sur leur travail : « Je donne des ordres pour déplacer les photocopieuses d’un côté à l’autre », ou « Mon job est de reformater des formulaires allemands dans des formulaires anglais et tout un bâtiment fait ça »… C’est incroyable. Presque tous ces jobs se trouvaient dans le secteur privé.

Comment expliquez-vous alors que nous soyons si attachés à la bureaucratie, que nous n’arrivons pas à remettre en question ce processus et que nous continuons même à alimenter son développement ?

J’ai analysé cela avec l’analogie de « la peur du jeu ». Il y a quelque chose de très attirant dans le jeu, qui est une expression de la liberté de chacun, mais aussi quelque chose d’effrayant. Si les gens aiment tant les jeux, c’est parce que c’est la seule situation où vous savez exactement quelles sont les règles. Dans la vie, nous sommes constamment investis dans des jeux, dans des intrigues, au travail ou entre amis. C’est comme un jeu, mais vous n’êtes jamais sûr de savoir qui sont les joueurs, quand cela commence ou s’arrête, quelles sont les règles, qui gagne. Dans une conversation avec votre belle-mère, vous savez bien qu’il y a des règles, mais vous ne savez pas trop lesquelles, ce que vous pouvez dire ou non. Cela rend la vie difficile. Nous sommes effrayés par l’arbitraire.

On ne veut pas du pouvoir qu’il soit arbitraire. Une école de pensée aux États-Unis, le républicanisme civique, dit que la liberté signifie savoir quelles sont les règles : quand l’État peut vous contraindre et quand il ne peut pas. Partant de là, il faut créer toujours plus de régulations pour être plus libre. Paradoxalement, dans les sociétés qui se considèrent comme libres, beaucoup d’aspects sont régulés par la coercition, par la violence.

La bureaucratie est-elle le symptôme d’une société violente ?

La bureaucratie n’est pas stupide en elle-même. Elle est le symptôme de la violence sociale, qui elle est stupide. La violence structurelle – qui inclut toutes les formes d’inégalités structurelles : patriarcat, relations de genres, relations de classes…– est stupide. Là où il y a une inégalité de pouvoir, il y a aussi une forme d’ignorance et d’aveuglement. La bureaucratie semble stupide en elle-même, mais elle ne cause pas la stupidité, elle la gère ! Même quand la bureaucratie est bienveillante, sous la forme de l’État social, elle reste basée sur une forme d’aveuglement structurel, sur des catégories qui n’ont pas grand chose à voir avec ce dont les gens font l’expérience. Quand les bureaucrates essaient de vous aider, ils ne vous comprennent pas, ils ne veulent pas vous comprendre, et ne sont pas même autorisés à vous comprendre.

Vous écrivez que la critique de la bureaucratie aujourd’hui vient de la droite et pas de la gauche. Et que les populistes ont bien compris que la critique de la bureaucratie était rentable d’un point vue électoral…

C’est un des problèmes qui a inspiré mon livre. Pourquoi est-ce la droite qui tire tous les avantages de l’indignation populaire contre la bureaucratie, alors que c’est la droite qui est à l’origine d’une grande partie de cette bureaucratie ? C’est ridicule ! Aux États-Unis, la droite a découvert que si vous taxez les gens d’une manière injuste, et qu’ensuite vous leur dites que vous allez baisser les impôts, ils vont voter pour vous. Il y a quelque chose de similaire avec la bureaucratie en général. La gauche est tombée dans ce piège, avec la manière dont elle défend l’idée d’un État social tout en faisant des compromis avec le néolibéralisme. Elle finit par embrasser cette combinaison des forces du marché et de la bureaucratie. Et la droite en tire tout l’avantage avec ses deux ailes – d’un côté les libertariens, qui aiment le marché mais critiquent la bureaucratie, de l’autre, l’aile fasciste, qui a une critique du marché. La droite concentre toute la rage populiste sur ce sujet. Et la gauche finit par se retrouver à défendre les deux, marché et bureaucratie. C’est un désastre politique.

Comment le mouvement altermondialiste a-t-il renouvelé cette critique de gauche de la bureaucratie ?

Le mouvement altermondialiste cherche à identifier les structures bureaucratiques qui n’étaient pas censées être visibles. Mais pas seulement pour les dévoiler, également pour montrer à quel point ces structures ne sont pas nécessaires, qu’il est possible de faire les choses autrement d’une manière non-bureaucratique. Pourquoi les procédures démocratiques sont-elles aussi importantes dans le mouvement altermondialiste ? Parce qu’il essaie de créer des formes de décision non-bureaucratiques. Dans ce mouvement, il n’y a pas de règle, il y a des principes. C’est une négation pure de la bureaucratie. Bien sûr, ces processus ont aussi tendance à se bureaucratiser si l’on n’y fait pas attention, mais tout est fait pour l’éviter. Mon travail sur la bureaucratie vient de mon expérience d’activiste dans le mouvement altermondialiste.

Mais le mouvement altermondialiste se bat aussi pour plus de régulation, par exemple dans le secteur financier…Le mouvement altermondialiste se bat pour des régulations différentes ! Et nous ne devrions pas tomber dans le piège de croire que nos adversaires sont favorables aux dérégulations. Vous ne pouvez pas avoir une banque non-régulée, c’est absurde : les banques sont entièrement basées sur des régulations. Mais des régulations en faveur des banques ! Quand on parle de re-régulation, cela signifie mettre les consommateurs au centre plutôt que les banques. Nous devons sortir de ce langage « plus ou moins de régulation ». Le néolibéralisme crée plus de régulations que les systèmes économiques précédents.Voyez-vous la même critique de la bureaucratie dans l’expérience de démocratie directe en cours au Rojava, au Kurdistan syrien ?L’exemple syrien est vraiment intéressant. J’ai fait partie d’une délégation d’universitaires en décembre dernier, qui a observé sur place leur processus démocratique. Ils sont vraiment en train de créer une société non-bureaucratique (lire notre article). C’est le seul endroit que je connaisse où il y a une situation de pouvoir « dual » où les deux côtés ont été créés par les mêmes personnes. Avec, d’un côté, des assemblées populaires de base, et de l’autre des structures qui ressemblent à un gouvernement et à un Parlement. Des structures nécessaires, car pour coopérer avec les institutions internationales, il faut une sorte de gouvernement bureaucratique institutionnel effectif, sinon elles ne vous prennent pas au sérieux. Mais au Rojava, quiconque porte une arme doit en répondre face à la base avant d’en répondre au structures du « haut ». C’est pourquoi ils disent que ce n’est pas un État, car ils ne réclament pas le monopole de la violence coercitive.

Peut-on imaginer un État sans bureaucratie ?

L’État est une combinaison de trois principes aux origines historiques totalement différentes : premièrement, la souveraineté, le monopole de la force dans un territoire donné. Deuxièmement, l’administration, la bureaucratie, le management rationnel des ressources. Et troisièmement, l’organisation du champ politique, avec des personnages en compétition parmi lesquels la population choisit ses dirigeants. En Mésopotamie, il y avait beaucoup de bureaucratie mais aucun principe de souveraineté. L’idée de responsables politiques en compétition vient de sociétés aristocratiques. Et le principe de souveraineté vient des Empires. Ces trois principes ont fusionné ensemble dans l’État moderne. Nous avons aujourd’hui une administration planétaire, mais elle n’a pas de principe de souveraineté et pas de champ politique. Ces principes n’ont rien à faire ensemble a priori, nous sommes juste habitués à ce qu’ils le soient.

Comment expliquez-vous que, dans l’imaginaire social, les marchés, le libéralisme, apparaissent comme les seuls antidotes à la bureaucratie ?

C’est le grand piège du 20e siècle : cette idée qu’il n’y a qu’une alternative – les marchés ou l’État – et qu’il faut opposer les deux. Pourtant historiquement, les marchés et les États ont grandi ensemble. Ils sont bien plus similaires qu’ils ne sont différents : les deux ont l’ambition de traiter les choses de la manière la plus rationnelle et efficace possible.

Je me souviens d’une interview d’un général sud-africain au moment où Nelson Mandela est arrivé à la présidence du pays. On lui demandait : « Vous ne trouvez pas un peu étrange de recevoir des ordres de quelqu’un que vous avez combattu pendant 20 ans ? ». Il a répondu : « C’est un honneur en tant que militaire de recevoir des ordres, quelle que soit la personne qui les donne. » En fait, ce n’est pas un comportement spécialement militaire, mais bureaucratique. Parce que ça ne se passerait pas comme ça dans une armée médiévale. Être un bureaucrate, cela signifie faire ce qu’on vous demande, et séparer les moyens et les fins. Cette séparation est devenue une base de la conscience moderne. Seules deux institutions – marché et État – opèrent de cette manière.

Propos recueillis par Rachel Knaebel et Agnès Rousseaux

Photo : CC Christian Schnettelker

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Commentaire recommandé

Micmac // 08.11.2015 à 04h29

C’est amusant, parce que ça me rappelle un truc, que j’ai du lire je sais pas trop où, mais soit doit faire au moins 20 ans, qui affirmait que les dérégulations thatchériennes au Royaume Uni, et en particulier la privatisation des services publics (électricité, gaz, chemins de fer…), avaient eu pour effet l’embauche d’une pléthore de fonctionnaires pour vérifier que la libre concurrence et la main invisible (de ma sœur dans la culotte du zouave) jouait bien son rôle d’allocation optimale des ressources (de mon c.. sur la commode).

De même, il faudrait vérifier, mais il semble bien que la libéralisation administrative de nos hôpitaux (paiement aux soins pour mesurer la rentabilité d’un hôpital, concept complètement abscons digne d’un énarque ultralibéral caricatural), a entrainé l’embauche de plus de personnel administratif que de personnel soignant nécessaire au bon fonctionnement des dis hôpitaux… Le personnel administratif en question n’ayant eu de cesse de rogner les embauches et conditions de travail des personnels soignants afin de financer sa propre utilité administrative, il me semble. Je ne suis pas familier de ce milieu, mais c’est ce que j’en perçois, et ce que j’ai compris de la révolte de l’APHP.

Et je m’interroge depuis longtemps sur la nécessité de toutes ces écoles de commerces plus ou moins bidons qui délivrent (vendent?) les diplômes idoines pour effectuer ce genre de tâche, Ô combien nécessaires, bien sûr…

D’ailleurs, je perçois une réelle convergence entre le système néolibérale et le système soviétique. Obsession de la gestion « scientifique » et de l’évaluation (flicage), avec l’inflation bureaucratique nécessaire à ces contrôles permanents . « надо выполнить план », « Nada vypolnits’ plan », expression bien connue de l’époque soviétique : Il faut accomplir le plan.

Tout cela ayant en partie pour cause une absolue méfiance envers l’honnêteté des employés, qui, bien sûr, ne peuvent faire un travail convenable que sous la contrainte, les sociopathes qui nous dirigent n’imaginant pas une seconde qu’un employé puisse effectuer correctement sa tache sans un système de répression centralisé (cette bande de cinglés voyant le monde à son image).

48 réactions et commentaires

  • Serge // 08.11.2015 à 02h54

    J’adore ce genre de pensée qui met à jour les paradoxes apparents pour aller au plus profond de la vérité .
    Il n’y a rien de plus stimulant pour la pensée que les paradoxes .
    Plus trivialement que l’auteur de cet article ,je dis toujours : « nous ne sommes plus gouvernés ,mais de plus en plus administrés « .
    Paradoxe apparent en effet ,à l’heure de la globalisation ultra-libérale mais que l’auteur résout parfaitement .
    Dans un autre ordre d’idée ,nous avons jeté aux orties la belle géométrie grecque qui nous apprenait à penser l’espace ,la médiation,les rapports et les relations,les ordres d’organisation, pour faire triompher l’algèbre comme jeu gratuit des signes ,reléguant tout à l’état de chose (y compris l’humain) .
    Ceci ,au nom de l’efficacité .

    La philosophe Simone Weil (la vraie,pas l’autre …) écrivait :

    « ARGENT, MACHINISME, ALGÈBRE. Les trois monstres de la civilisation actuelle. Analogie complète. »

     » « Travail moderne : substitution du moyen à la fin.
    Algèbre moderne : substitution du signe au signifié. »
    Machine : la méthode se trouve dans la chose, non dans l’esprit.
    Algèbre : la méthode se trouve dans les signes, non dans l’esprit. »

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    • Sébastien // 08.11.2015 à 06h44

      Graeber, que je découvre, est un militant, ce qui oblitère gravement son objectivité. Je n’ajoute pas « gauchiste » à « militant », ce qui serait un pléonasme. Du coup, on retombe, rebelote, dans le prisme complètement dépassé de la pensée binaire « à la Lordon ».
      En réalité, il n’y a de paradoxes que dans ce type de pensée car elle est incapable de les résoudre. D’où la trahison et l’échec permanent (et à ce rythme éternel) de « la gauche ». Dernier exemple en date: Tsipras. Le résultat: on en est où dans le mouvement Occupy Wall Street? En Grèce?
      Après, je ne doute pas qu’il ait de bonnes trouvailles de base, mais s’il comprenait que le libéralisme n’a jamais existé, le paradoxe disparaitrait de lui-même car il ne se réfère et renvoie qu’à des concepts abstraits.
      Est-ce que Graeber fait intervenir la création de la technologie informatique comme facteur d’explication et levier de cette bureaucratisation? Autre paradoxe apparent car on nous vend depuis des décennies la simplification administrative grâce aux miracles (ni plus ni moins) de l’informatisation.
      Et devinez quoi? C’est un des dada actuels de…l’Etat français….(choc de simplification, tablettes pour tous, cours de « codage » au lieu d’apprendre à lire et écrire, on croit rêver).
      Pour enfoncer le clou, à quel moment avez-vous entendu la gauche ou l’ultra-gauche dénoncer la bureaucratisation? Ils en vivent tous. Bonnes recherches….

        +17

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      • Sébastien // 08.11.2015 à 06h54

        Pour prendre un exemple très simple et pas du tout paradoxal, plus l’Etat dépense, plus les « libéraux » sont contents: il consomme, gaspille les tas de saloperies produits par les firmes privées, vends des armes à d’autres Etats insolvables, pollue tout en dépensant pour lutter contre le réchauffement climatique. Il faut bien brasser de l’air tant qu’à faire….D’où la présence d’indécrottables girouettes gouvernementales, indispensables pour savoir dans quel sens le vent va tourner tout en restant immobile.
        Comme la moitié de la population dépend de cette situation (donc des millions d’emplois), vous voyez le tableau. Parlez moi de réformes……Dites moi des choses tendres…………lalali, lalalère…..

          +7

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      • groucho // 08.11.2015 à 15h38

        « Graeber, que je découvre, est un militant, ce qui oblitère gravement son objectivité. Je n’ajoute pas “gauchiste” à “militant”, ce qui serait un pléonasme. »

        C’est étrange. Vous pensez que les seuls qui militent sont des « gauchistes » ? Et qu’en plus le fait de militer, c’est-à-dire de défendre des idées aussi bien sur le papier que sur le terrain, empêche de regarder la « réalité » d’un oeil froid et analytique ?

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      • Serge // 08.11.2015 à 19h24

        @Sébastien .
        Je suis bien d’accord avec vous pour penser que le libéralisme total est une abstraction.C’est bien pour cela que j’ai accolé l’adjectif apparent à paradoxe .
        Je pense que que le capitalisme s’est toujours appuyé sur les états .
        Y-a-t-il des ouvrages sérieux à lire sur ce sujet ?

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        • Serge // 08.11.2015 à 19h31

          Dans un sens,c’est une bonne nouvelle.
          Il suffit de récupérer le pouvoir politique afin que tout ne se décide pas à la corbeille ,comme disait le général …

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        • olivier69 // 09.11.2015 à 01h03

          Bonsoir Serge,
          je vous conseille un Dalloz (Précis) d’économie politique pour commencer si vous voulez vraiment approfondir le sujet (vieille édition de préférence). C’est lourd mais assez complet….Ensuite, il y a des supports universitaires mais c’est technique, il faut le reconnaître (on aura peut-être l’occasion d’en reparler).

            +1

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      • Alfred // 09.11.2015 à 09h25

        Honnêtement vous avez des choses à dire mais votre prisme de lecture droite-gauche ampute singulièrement votre vision du monde. Avec un seul œil la vision manque de relief. Ouvrez l’œil gauche et dites vous que la « gauche » n’a pas davantage existé que le « libéralisme » selon vos termes.
        L’informatisation-simplification est un attrape-gogo sans étiquette politique et la pseudo gauche comme la pseudo droite avancent du même pas dans cette direction comme dans les autres.
        Par ailleurs vous militez à votre niveau comme d’autres font de la prose en prenant de votre temps sur ce site et ses commentaires. Ce n’est pas insultant. Au contraire.
        Enfin le livre de graeber sur la dette mérite d’être lu quoi qu’on en pense à mon humble avis. ( Même pour le réfuter car la perspective est intéressante)

          +4

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  • Papagateau // 08.11.2015 à 04h11

    je trouve très intéressante l’idée que la vraie bureaucratie se trouve principalement dans le privé, dans toute hiérarchie en fait. Et que la finance est un truc entièrement bureaucratique, la bureaucratie spécialisée dans la gestion du marché.

    Cependant, j’ai tiqué sur la phrase suivante :
    « de l’autre (coté de la droite), l’aile fasciste, qui a une critique du marché.  »

    Si la critique du marché est le critère pour définir le fascisme, alors la gauche a un problème.
    J’espère qu’il a parlé sans réfléchir.

      +9

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  • Micmac // 08.11.2015 à 04h29

    C’est amusant, parce que ça me rappelle un truc, que j’ai du lire je sais pas trop où, mais soit doit faire au moins 20 ans, qui affirmait que les dérégulations thatchériennes au Royaume Uni, et en particulier la privatisation des services publics (électricité, gaz, chemins de fer…), avaient eu pour effet l’embauche d’une pléthore de fonctionnaires pour vérifier que la libre concurrence et la main invisible (de ma sœur dans la culotte du zouave) jouait bien son rôle d’allocation optimale des ressources (de mon c.. sur la commode).

    De même, il faudrait vérifier, mais il semble bien que la libéralisation administrative de nos hôpitaux (paiement aux soins pour mesurer la rentabilité d’un hôpital, concept complètement abscons digne d’un énarque ultralibéral caricatural), a entrainé l’embauche de plus de personnel administratif que de personnel soignant nécessaire au bon fonctionnement des dis hôpitaux… Le personnel administratif en question n’ayant eu de cesse de rogner les embauches et conditions de travail des personnels soignants afin de financer sa propre utilité administrative, il me semble. Je ne suis pas familier de ce milieu, mais c’est ce que j’en perçois, et ce que j’ai compris de la révolte de l’APHP.

    Et je m’interroge depuis longtemps sur la nécessité de toutes ces écoles de commerces plus ou moins bidons qui délivrent (vendent?) les diplômes idoines pour effectuer ce genre de tâche, Ô combien nécessaires, bien sûr…

    D’ailleurs, je perçois une réelle convergence entre le système néolibérale et le système soviétique. Obsession de la gestion « scientifique » et de l’évaluation (flicage), avec l’inflation bureaucratique nécessaire à ces contrôles permanents . « надо выполнить план », « Nada vypolnits’ plan », expression bien connue de l’époque soviétique : Il faut accomplir le plan.

    Tout cela ayant en partie pour cause une absolue méfiance envers l’honnêteté des employés, qui, bien sûr, ne peuvent faire un travail convenable que sous la contrainte, les sociopathes qui nous dirigent n’imaginant pas une seconde qu’un employé puisse effectuer correctement sa tache sans un système de répression centralisé (cette bande de cinglés voyant le monde à son image).

      +58

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    • Sébastien // 08.11.2015 à 07h00

      Bravo, vous avez tout compris.
      Si je peux me permettre de vous résumer en une phrase: ou comment employer une moitié de la population à surveiller l’autre moitié pour vérifier qu’elle travaille bien selon les normes du libéralisme. Bienvenue chez les fous, ou les fameux Shadoks!

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      • DUGUESCLIN // 08.11.2015 à 07h10

        Il faudrait même dire les normes du libéralisme façon soviétique.
        Nous avons importé la bureaucratie apanage de la méthode soviétique, alors que la Russie s’en libère et continue dans cette voix.

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    • Philippe, le belge // 09.11.2015 à 08h26

      il y a quand même une « petite » différence entre une bureaucratie soviétique destinée, au moins théoriquement, à assurer le bien de tous et une bureaucratie libérale destinée à n’enrichir que quelques uns…
      A mon sens la bureaucratie en soi n’est pas mauvaise, seuls son but et la façon dont elle influence négativement la vie des gens, de par son niveau de coercition entre autres, peuvent l’être!

        +4

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  • Jay // 08.11.2015 à 05h01

    L’idee est seduisante, mais le développement de l’ auteur me laisse sur ma faim. Une idée : et si ce qu’il appelle bureaucratie concernait en réalité la dérive étouffante d’un système juridique, base notamment sur la Common Law, devenu gargantuesque ?

      +7

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  • couci couça // 08.11.2015 à 06h08

    C’est curieux , j’en suis arrivé aux mêmes conclusions .
    Sauf que cette bureaucratie est active : elle peut devenir sadique vis à vis des gens dont elle est censée s’occuper .
    Car il y a aussi un énorme cloisonnement .
    Donc des petits chefs qui doivent justifier leur salaire .
    Qui la rend aussi terriblement inefficace .
    L’époque revient à Kafka .
    A micmac : vous pouvez ajouter à la liste les sociétés privées qui ont mis la main sur la gestion du parc des logements sociaux …

      +11

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  • Kiwixar // 08.11.2015 à 06h11

    La bureaucratie et le juridisme sont des armes de la lutte des classes : ceux qui peuvent se payer des lawyers et des experts fiscaux, qui écrasent ceux qui ne peuvent pas (sans-dents, classes moyennes, PME).

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    • Sébastien // 08.11.2015 à 07h03

      Je les avais oublié ceux-là. Ils ressemblent d’avantage à des croque-morts qu’à des sauveurs de l’humanité.

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  • LEMOINE // 08.11.2015 à 07h45

    Je me méfie quand je vois un prétendu contestataire à qui les radios tendent leurs micros, qui a droit à des articles laudateurs dans la presse contrôlée par les plus grandes fortunes. C’est forcément de la contestation vide.

    En effet quoi de plus creux que les contestations visant la « bureaucratie » ou « la société de consommation » ou encore le « totalitarisme ».

    En fait ce genre de contestation voit ce qu’elle attaque partout sauf là où cela est vraiment.

    Oui nous vivons dans une société totalitaire (bien plus que bureaucratique) mais où est le totalitarisme ? Eh bien il est chez ceux qui en font leur thème de critique favori : chez ces groupes capitalistes qui se veulent champions du libéralisme.

    En effet, la question de la démocratie est posée dans l’espace public. Pour parer à cette menace, les prétendues « démocraties occidentales » agitent plus que jamais l’épouvantail du « totalitarisme » et son contre-modèle « les droits de l’homme » : mais qu’est-ce qui est totalitaire aujourd’hui sinon le fonctionnement des grands groupes capitalistes. Dans son ouvrage « Lénine, les paysans, Taylor », le sociologue Robert Linhart montre que l’organisation du travail est aussi et toujours un dispositif de domination. Le capitalisme néolibéral pousse ce dispositif à son extrême limite. Depuis environ 2003, il a renforcé le pouvoir discrétionnaire de l’employeur par l’introduction de méthodes de gestion individualisée des performances. Ces méthodes, couplées à l’enregistrement de l’activité (la traçabilité) et articulées à des menaces de licenciement, ont transformé en profondeur le monde social du travail. Le mesurage comparatif des performances entre les travailleurs n’a pas apporté de la « justice » dans le jugement et le traitement des salariés. Il a au contraire exalté la concurrence entre les individus et généré le chacun pour soi : un isolement individuel et une méfiance généralisée d’autant plus exacerbée qu’on monte dans la hiérarchie. Les fondements de la loyauté, de la confiance, de l’entente, sont sapés. La solitude et la peur sont entrées dans l’entreprise. Comme dans la société totalitaire le contrôle « policier » est partout. Sur le lieu du travail, organisé en « open space », chacun est à chaque instant au vu de tous les autres mais pourtant chacun s’enferme dans sa fonction et n’échange plus que des messages techniques. Chacun est tenu, souvent quotidiennement, de rendre compte de chacune de ses actions, que l’informatique enregistre par ailleurs à l’insu de ses utilisateurs. Les « reporting » se multiplient et les « procédures » sont de plus en plus contraignantes. La séparation de l’espace public et de l’espace privé est abolie : le travailleur (particulièrement le cadre) doit être joignable à tous moments. Il est sommé de se conformer à la « culture d’entreprise » et de manifester sa soumission à la fois dans ce qu’il fait mais aussi dans sa pensée et même sa manière d’être (sa motivation). Le monde du travail devient ainsi le lieu d’une servitude généralisée caractéristique de la société totalitaire. A tout cela s’ajoute souvent un culte de la personnalité du « dirigeant ». Chaque travailleur est informé de chacun des déplacements de ce dirigeant, sa parole est répétée, ses initiatives sont vantées par le service « communication ». Il est traité à l’égal d’un demi-dieu et reçoit en gratification des sommes démesurées comme s’il était destiné à vivre plusieurs vies.

    Tous les ingrédients du totalitarisme sont présents : atomisation sociale, disparition de l’espace privé (société civile), contrainte et peur généralisée, propagande, culte de la personnalité, volonté de tout maîtriser. Le licenciement tient lieu de goulag et le contrôle de gestion de police politique. La propagande est organisée par la « communication interne ». Ce monde est si brutal qu’il conduit parfois à des suicides. Mais sa brutalité et son totalitarisme mêmes ôtent toute crédibilité à sa prétention de refuser toute remise en cause sous le prétexte d’un risque de « glisser dans le totalitarisme ». Ce qui est le plus contraire à la démocratie est ce qui la rend d’autant plus nécessaire et urgente. Il serait permis de rêver que ce soit la base d’un retour à la démocratie.

    La

      +41

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    • LEMOINE // 08.11.2015 à 09h55

      En relisant, je vois que j’ai oublié deux instruments de domination particulièrement efficaces et pervers :

      1) les notations annuelles (devenues souvent semestrielles) qui obligent chacun à un examen de conscience. Il faut trouver ses points faibles, proposer de les corriger. S’engager pour la période avenir. Accepter de recevoir les avis et remontrances de quelqu’un qui souvent n’a aucune connaissance sérieuse du travail qui s’effectue. (il semble, c’est ce que j’ai observé au cours de ma dernière décennie de travail, que pour diriger un service il faut surtout ne rien y connaitre, ce qui l’assurance qu’on voudra lui faire faire l’impossible !!)

      2) les objectifs. C’est la pénitence imposée à celui qui vient de reconnaitre ses difficultés : il devra faire non pas ce qu’il n’est pas parvenu jusqu’ici à faire mais 10% ou 20% de plus ! Comme il aura lui-même (sous une contrainte qui se nie) accepté ce « challenge » il n’aura aucune excuse à son échec. Il est mis ainsi systématiquement en situation d’échec et doit subir une menace redoublée !

      Tout cela me parait bien autre chose que de remplir des formulaires. Il me semble qu’au contraire avec l’informatique et les télétransmissions bien des démarches sont simplifiées (les impôts par exemple – relevé à distance des compteurs – obtention sur sa propre imprimante à toute heure du jour ou de la nuit du document dont on a besoin etc.)

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      • LEMOINE // 08.11.2015 à 10h46

        Tiens ! j’avais passé cela :

        Une remise en cause même pas insidieuse de l’État social :  » quand la bureaucratie est bienveillante, sous la forme de l’État social, elle reste basée sur une forme d’aveuglement structurel… »

        Et d’ailleurs qu’est-ce que peut bien être un « aveuglement structurel » ? Encore une expression aussi ronflante que creuse !

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        • olivier69 // 09.11.2015 à 00h32

          Bonjsoir Lemoine,
          j’espère que mes interventions font avancer le débat. En aucun cas, malgré vos probables impressions, je vous cible. Certes, je ne vous fais pas de fleurs lorsque vous intervenez. L’aveuglement structurel se détermine sur ma fiche de paie. Vous rendez vous compte que 60% de celle-ci est amputée ? Bientôt, les 100% pour obtenir une idéologie communiste chère à vos yeux (nous sommes dans la normalisation à travers des règlements). Un principe de redistribution….
          Soit une ponction de 200 jours de travail en impôt sur 360 (regarder les ratios historiques en comparaison). Pour en plus, gouter au plaisir de la dette à rembourser à l’avenir, soit techniquement 150% à 200% mini de mon salaire…..

          J’apprécie que vous dénonciez le contrôle du contrôle à travers la bureaucratie de la bureaucratie (statistiques à remplir pour les agents publics par exemple sous forme de comptes rendus journaliers à fournir). Au paroxysme de la bêtise, nous pourrions reprendre un film bien connu comme « Brazil ». qui montre que ce temps perdu est au détriment de la fonction et du service lié à la gestion des risques d’une société (nécessaire, car nous ne sommes pas des sauvages). Au final, plus aucun droit mais que des devoirs. Que du temps perdu….

          Ensuite, vous avouerez que le communisme n’est pas non plus un modèle de démocratie. Cette idéologie propose t-elle des référendums par exemple (empiriquement) ? Non….
          Donc tout cela est une perversion des significations et des mots. Comme l’auteur se garde bien de dénoncer le post-keynésianisme, pourquoi ? Oui, pourquoi ?

          Enfin, vous dites « Les fondements de la loyauté, de la confiance, de l’entente, sont sapés. » ? Nous ne vivons pas dans le même monde. La loyauté existe par le manque d’esprit critique (le bal des faux culs). La confiance existe par la propagande. L’entente existe par la structure financière (les oligopoles). Est-ce que pour vous, un modèle est communiste parce qu’il se voit ? Si c’est le cas, alors le nouvel ordre mondial actera vos souhaits sans en douter. Mais pour l’instant, nous ne vivons que la surface des choses. Nous allons goûter au fond des principes lorsque le moment sera venu. A ne pas en douter….

          Combien d’entre nous ont été trahis par les syndicats dans la totalité de leur vie professionnelle ? Je pourrais vous raconter tellement d’histoires à ce propos. Moi d’abord, les autres ensuite, est la philosophie de ces membres qui s’acharnent à se donner une image qu’ils n’ont pas….

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          • Alfred // 09.11.2015 à 09h09

            Bonjour. Vous devriez regarder une « conférence gesticulée » de Franck Lepage sur votre feuille de paye. Désolé c’est un militant « pleonasmique ». Tout ce que vous risquez c’est d’apprendre quelque chose voir d’être dérangé (même si vous êtes assez bien informé). Évidement il faut en avoir envié.

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            • LEMOINE // 09.11.2015 à 10h24

              Merci d’avoir répondu.

              Personnellement je n’en ai pas le courage. Quand je vois quelqu’un qui me dit que les cotisations sociales sont retirées de sa fiche de paie, je ne peux plus rien pour lui. Elles ne sont pas retirées mais ajoutées. Elles lui permettent de pouvoir se soigner (lui et toute sa famille), de prendre une retraite, elles l’aident à élever dignement ses enfants, à se rendre au travail sans avoir à débourser pour cela (les frais de transport pèsent toujours plus sur les plus pauvres qui sont généralement ceux qui habitent le plus loin) . Elles sont un salaire différé et socialisé. Si on lui retirait cela il pourrait commencer à avoir réellement mal, assez mal pour crever dans la misère avant l’heure.

              Quant à la trahison des syndicats ! quels syndicats ? J’ai été et et je suis encore adhérent d’un syndicat et je n’ai trahi personne. Peut-être aurais-je fait une meilleure carrière sans cela.

              Le communisme n’est pas un modèle de démocratie. Sans doute s’agit-il de ce qu’on appelle aujourd’hui le « socialisme réel ». Mais vous en connaissez beaucoup vous des sociétés vivant sous la menace permanente de l’agression étrangère (intervention de 14 armées contre la Russie – réarmement de l’Allemagne invitée à s’emparer du pétrole russe et à coloniser les plaines d’Ukraine et de Russie – guerre froide – course aux armements). Vous en connaissez des sociétés victimes de boycott, d’entreprises de sabotage et qui ont pu développer une démocratie parfaite. D’ailleurs citez moi donc une démocratie parfaite. Demandez à un noir américain des années 30 / 40 / 50 /60 et même d’aujourd’hui même si son pays est un modèle de démocratie.

              Je ne comprends pas comment on peut lire les articles sur un blog comme celui-ci dans lesquels passent quelques vérités indispensables et n’en rien retirer.

              Je remercie d’ailleurs Olivier Berruyer pour l’immense et positif travail qu’il accomplit. Si je ne lui ménage pas les critiques c’est que je l’estime d’autant plus (sinon, je ne le lirais tout simplement pas).

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            • olivier69 // 09.11.2015 à 13h24

              Bonjour Lemoine,
              Se soigner ? Combien de français ne peuvent plus aller chez le dentiste par exemple ? Vous n’êtes pas au courant qu’il existe une médecine à deux vitesses ? Ce que je condamne, ce n’est pas les services publics en soi. Et vous le savez très bien….
              Mais vous ne comprenez pas que nos prélèvements obligatoires (donc TVA inclus) financent principalement le service de la dette. Vous remarquerez qu’autrefois, un document nous indiquait lors de la déclaration de revenus, comment étaient réparties les différentes dépenses de l’Etat (sous forme d’un camembert avec les pourcentages respectifs). Pourquoi, ce droit à l’information a disparu, il y a quelques années ? Le service de la dette était gênant…..Si il y avait réellement une redistribution sociale (j’y suis favorable), comment expliquez-vous le volume des dettes ?

              Ce que vous appelez « services publics », ce sont aujourd’hui des lignes comptables. Vous devriez le savoir ? Sur le compte des générations futures. Oui, puisque le financement des services est reporté sur l’avenir. On ne parle pas de court terme (ce serait acceptable) mais de long terme (un modèle d’esclavagisme par la dette). Le volume des dettes nous empêche une corrélation entre ce que nous payons et ce que je percevons dans le cadre d’un équilibre social relatif et surtout « générationnel ».
              Je peux même dire que je suis davantage attentif et attaché (que vous) à la survie de notre modèle social (et je ne mise pas sur une explosion afin d’imposer mon idéologie). Lorsque les dettes ne pourront plus être reportées par la temporalité, alors nous risquons la perte effective de nos acquis (et en totalité). A moins qu’envoyer ses enfants à la guerre ne constitue, une réponse pour vous…..

              Enfin, pour les avantages que procure la fonction syndicale, il suffit en dehors de sa propre expérience, d’observer l’actualité croustillante, les comités d’entreprise des multinationales,….
              Un syndicaliste qui méprise un salarié en colère (moi-même en l’occurrence), donne toute la mesure de son intention réelle vis à vis de la cause sociale. Les adhérents ? Vous les perdez pourquoi ?
              ps : « ajouté » veut dire reporté. Je ne suis pas contre la solidarité. Mais, jusqu’où ? l’ asservissement de mes enfants….

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          • bhhell // 09.11.2015 à 14h11

            l’impôt et la cotisation ont créé les sociétés modernes et retourné le sens du capitalisme. Supprimons les et nous retrouvons le capitalisme du 19e s, celui que nous décrivent les grands romanciers. De grands possédants qui ont remplacé l’aristocratie de la terre par celle de l’argent, d’un côté, des travailleurs avec juste de quoi vivre de l’autre côté. Il en découle des instabilités qui dans le passé récent ont produit le communisme et la nazisme, ce dernier étant par exemple perçu par les élites financière comme le retour à l’ordre social (sous Hitler, les syndicats ne mouftaient pas, ils n’étaient plus là). Au lieu de faire toujours le bilan de ces régimes, commençons par en expliquer la genèse qui a toujours un fondement économique aberrant. Le capitalisme pur du formidable 19e siècle est tellement absurde que les pays libéraux n’ont pas osé l’appliqué eux-même à nouveau. Pour créer de l’emploi et de la richesse, il faut de la consommation. Donc la seule alternative à l’impôt et la cotisation, c’est la dette.

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            • LEMOINE // 09.11.2015 à 14h54

              A quoi bon continuer ! La réponse est typique des gens qui refusent toute discussion. On parle des prélèvements sociaux figurant sur la fiche de paie mais pour se dispenser d’avoir à argumenter l’interlocuteur passe aux impôts directs et indirects.

              Je dis que les prélèvements sociaux ne sont pas des retirés du salaire mais s’y ajoutent. Il suffit pour s’en rendre compte d’imaginer une fiche de paie qui détaillerait le salaire direct et le salaire indirect socialisé (ce qui est connu dans le vocabulaire imposé comme charges patronales ou sur le salaire). Les supprimer serait amputer très sérieusement le salaire, cela parait évident.

              Dans une présentation de la fiche de paie en salaire direct et salaire indirect socialisé, les seules déductions seraient les aides reçues par l’employeur (puisqu’elles sont payées par le salarié via ses impôts). Ce ne serait pas la réalité du salaire qui serait modifiée mais l’image qui en est donnée.

              D’ailleurs on voit bien que les gens qui menacent régulièrement de montrer que le coût du travail les étouffe se gardent bien de mettre leurs menaces à exécution et ne modifient pas la présentation de la fiche de paie.

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            • olivier69 // 09.11.2015 à 15h17

              Bonjour bhhell
              Où placez-vous l’investissement ? La consommation ne peut pas assurer seule l’emploi et la richesse, puisque le temps passe. La dette est une ligne comptable et non une réalité physique éternelle. Vous risquez de provoquer sans les progrès techniques des pénuries ajustables par la démographie (c’est à dire les populations). La dette est devenue une arme de spoliation au lieu d’être un instrument d’échange. C’est le voeu d’imposer son rôle de financement inconditionnel qui entraine cette dérive. Une propriété mal exploitée..

              Seul, l’investissement (éducation comprise évidemment) peut assurer la survie d’un système. Mais celui-ci est entre les mains de l’oligarchie qui contrôle les propriétés intellectuelles (cf la gestion des brevets) et gère politiquement au compte goutte la démocratisation des avancées (car une crise s’exploite et la propriété des techniques se décide toujours par le robinet à finance, les concentrations sont représentatives. cf révolution technologique et cycle économique comme par hasard)….

              Pire, l’oligarchie transforme la gestion individuelle et collective des besoins primaires (et la possibilité individuelle d’autonomie budgétaire relative dans le cadre d’une solidarité territoriale et sociale) en un contrôle systématique de la distribution des besoins par le biais des normes (cf Bruxelles, TAFTA,….). Ce que l’auteur dénonce à juste titre. Trop, c’est effectivement trop….

              Etre « propriétaire de l’information » (technologique, principalement mais aussi médiatique pour le rôle de propagande….), c’est être propriétaire du capital futur…..Et donc de la monnaie institutionnelle dans le temps. Voir le rendement des actifs….Le contrôle de l’information fait celui de la finance puis celui des moyens de production.

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            • bhhell // 09.11.2015 à 19h55

              Je voudrais ajouter que la question de l’investissement est biaisée puisque depuis 50 ans, les gains de productivité ont accru la richesse de manière prodigieuse mais sans retombées significatives pour les salariés. Il ont profité seulement à une poignée. L’investissement n’est donc nullement le gage d’une distribution harmonieuse des richesses.

              Sans pression politique pour contrer la pente autodestructrice du capitalisme, les tendances spéculatrices l’emportent et la richesse est spoliée.

              De plus, l’investissement rend le travail humain toujours plus superflu. Autrement dit, il n’est nullement le garant de l’emploi. Les emplois disparaissent inéluctablement mais on continue d’invoquer le retour à la croissance et au plein emploi. 40 ans que cela dure. Un plein emploi qui signifierait une pression à la hausse sur les salaires et signerait la mort du système, d’ailleurs.

              Sans la mise place de mécanismes de redistribution extérieurs au marché, l’accumulation de richesse entraîne mécaniquement une explosion sociale, tôt ou tard. Les Etats-Unis ont dû attendre la deuxième guerre mondiale pour sortir réellement de la récession dans laquelle l’hyperconcentration du capital les avait plongés. Et ce via une imposition massive du gouvernement sur les très riches et un interventionnisme fort.

              Le soi-disant équilibre mathématique du marché est donc une blague. Les guerres sont toujours venues ponctuer les crises de surproduction. Sans correction, la propriété privée et l’intérêt renforcent la concentration de la richesse.

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            • olivier69 // 09.11.2015 à 20h24

              bhhell,
              je vous rejoins à 100% sur la mauvaise répartition des gains de productivité. Ce sont les ententes des multinationales et des gouvernants sous la coupe des financiers qui parasitent la redistribution. Le crédit a donné l’illusion de richesse (à travers la consommation présente) et surtout le sommeil de la contestation sociale (salariale puisque l’on peut s’offrir à crédit sauf qu’il faut rembourser. Ce sont les excès qui sont à bannir, pas forcément le principe). Aujourd’hui, nous sommes aux limites du modèle de financement proposé par les keynésiens. C’est réellement sur les gains de productivité (consommation temporelle et donc future) que le problème se situe en terme de répartition des richesses et donc de redistribution. Mais les financiers pilotent la propriété de ceux-ci.
              Un état fort doit justement empêcher la concentration. Or, il s’avère que l’on tire tout le monde vers le bas pour maintenir les privilèges de classes. Une caste publique et privée, main dans la main, à travers le législatif (les normes et les prélèvements) se joue de nous pour une lutte des places. C’est un modèle de distribution inéquitable et dangereux socialement. La richesse n’est pas le fruit d’une consommation mais bien d’une jouissance (usufruit) des gains de productivité. Ceux-là même qui définissent le rendement des actifs….

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      • Chris // 08.11.2015 à 13h13

        Voyez cela (les évaluations) comme l’aiguillon et la nasse dont dispose les multinationales et administrations… La liberté (néilibéralisme), c’est l’esclavage.
        C’est un US au patronyme prémonitoire qui a mis en forme ce système pour contrôler la masse laborieuse : « Drucker » mot allemand qui signifie « presser »… comme un citron.

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    • Tassin // 09.11.2015 à 10h02

      « Bastamag » un média « contrôlé par les plus grandes fortunes » !!!???

      LOL

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  • dufourcq // 08.11.2015 à 08h51

    Quand j’étais au Vietnam , les beaux esprits des OI (Organisations internationales , ONG … etc ) disaient que c’était un état sous administré .

    J’aime bien la définition du « Travail de merde  » : demander à chacun la valeur de son travail : on touche alors à la sacro sainte Evaluation

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  • GEP // 08.11.2015 à 09h20

    Ah la bureaucratie quelle belle affaire, changeons pour que rien ne change.
    Ne nous écartons pas de l’essentiel, tout est une question de choix.

    Encore un éclairage parmi tant d’autres: http://www.dailymotion.com/video/x75e0k_l-argent-dette-de-paul-grignon-fr-i_news

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  • LEMOINE // 08.11.2015 à 10h31

    Ce qui souligne bien l’inanité de la critique de ce M. Graeber, c’est sa réponse à la question : « peut-on imaginer un État sans bureaucratie ? »

    Il ne répond tout simplement pas ! Il va promener le lecteur en Mésopotamie !

    On le voit aussi remettre en cause insidieusement la défense de l’État social : Il écrit : « La gauche est tombée dans ce piège, avec la manière dont elle défend l’idée d’un État social tout en faisant des compromis avec le néolibéralisme. Elle finit par embrasser cette combinaison des forces du marché et de la bureaucratie. »

    Cette histoire de piège est des plus obscures. On ne voit pas bien ce que c’est que cette « gauche » qui défend l’Etat social en faisant des compromis avec le libéralisme. En France je ne vois pas ce dont il est question. Le PS se dit de « gauche » mais qu’est-ce que cela signifie ? C’est devenu un mot vide. Quant à la défense de l’Etat social par cette soi-disant gauche, elle n’existe pas puisque nous assistons de sa part au contraire à une attaque généralisée sur tous les acquis sociaux (en particulier ceux issus du CNR auxquels ceux qui étaient alors trop compromis n’ont pas pu s’opposer). Il faut se rappeler que cette prétendue gauche est la première après la libération à avoir envoyé l’armée contre les travailleurs en grève (les mineurs qui s’étaient particulièrement illustrés dans la résistance !). C’est aussi cette prétendue gauche qui a engagé le pays dans la guerre d’Algérie après s’être fait voter les pleins pouvoirs pour faire la paix !

    Et qu’est-ce que signifie « embrasser cette combinaison des forces du marché et de la bureaucratie » ? C’est juste une phrase ronflante dépourvue de sens !

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    • groucho // 08.11.2015 à 13h04

      Je partage vos analyses sur ce texte de Graeber.
      Il me semble que la bureaucratie dont il parle n’est qu’un moyen parmi beaucoup d’autres en vue d’une fin : l’extraction du profit. Il la cite, mais il n’en dit pas grand chose. C’est pourtant le coeur de la question. Et depuis bien avant ce développement de la bureaucratie !
      On peut remarquer qu’il évoque l’expérience de démocratie directe kurde, le seul contre-exemple à la bureaucratie qu’il connaît, mais quand il s’agit d’évoquer des citoyens, il utilise le terme de consommateurs !

      Et sur Graeber en général : « Quand David Graeber étale la dette : une critique du livre  » La dette : 5000 ans d’histoire  » », par Franz Schandl ( http://www.palim-psao.fr/article-quand-graeber-etale-la-dette-une-critique-du-livre-la-dette-5000-ans-d-histoire-par-fra-121371159.html )

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      • LEMOINE // 08.11.2015 à 14h22

        Oui, j’espère pour lui qu’il lui arrive de présenter des idées un peu plus élaborées.

        Quand il dit que l’État a trois composantes (la souveraineté, un champ politique et la bureaucratie), il affirme du même coup qu’il ne peut pas y avoir d’État absolutiste (pas de compétition politique pour le pouvoir), c’est absurde. Il existe et il a existé des États absolutistes ou dictatoriaux.

        Avec la bureaucratie, il mentionne l’administration et la gestion rationnelle des ressources. Mais comment peut-il condamner la bureaucratie si elle n’est rien d’autre que le moyen d’une gestion rationnelle ou une simple administration. Qu’il puisse y avoir des excès de bureaucratie c’est possible. Et alors ? a-t-on envie de lui dire. Il faut les repérer, les corriger, mais pas jeter le bébé avec l’eau du bain.

        Quant à l’État Kurde sans bureaucratie c’est une farce ! Le Kurdistan n’est pas un État, il peut bien se passer d’administration et de gestion rationnelle. Mais je doute d’ailleurs que ce soit le cas. Comme pourrait-il gérer sa défense sans un minimum d’autorité et d’administration.

        En attendant que tout cela prenne la forme d’idées qui menacent le « système », les puissants peuvent dormir tranquilles !

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        • groucho // 08.11.2015 à 15h48

          En plus, « la gestion rationnelle des ressources » en monde capitaliste est celle qui maximise le profit, de surcroît le plus souvent à court terme. On peut évidemment imaginer d’autres critères de « gestion rationnelle des ressources ». Mais peut-être pas en monde capitaliste…

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          • LEMOINE // 08.11.2015 à 16h36

            Ouais ! Quand il dit « les profits sont extraits directement par des moyens bureaucratiques. Aujourd’hui, la majorité des profits n’ont rien à voir avec la production, mais avec la finance », il a une conception pour le moins extensive de la bureaucratie.

            Les opérations financières comme les effets de levier, la création de produits dérivés, les arbitrages instantanés par l’informatique etc. sont certainement complexes dans leur mise en œuvre mais ne sont pas vraiment bureaucratiques. Il n’y a là-dedans aucun recours excessif à des procédures administrées, bien au contraire, il me semble.

            S’il s’agit de combattre ce développement récent du capitalisme, il n’y a nul besoin de le qualifier de bureaucratique. Il suffit de voir que l’allocation des ressources se ferait de façon beaucoup plus rationnelle dans le cadre d’une planification de l’économie sous contrôle démocratique. Mais cela exigerait une remise en cause du capitalisme lui-même.

            On voit bien que l’allocation des ressources dans le cadre du capitalisme prend la forme de l’allocation du capital et que sa seule règle est la recherche de gisements de profit. Cette allocation s’étend depuis le marché financier jusqu’à l’intérieur des sociétés multinationales (et de plus en plus de toutes les autres) sous la forme d’une gestion centralisée et d’une importance accrue au cours des dernières décennies des contrôles de gestion (avec le cortège de reporting, de contrôle budgétaire, de contrôle des ressources et des productions en volume et en valeur). J’en parle en connaissance de cause puisque c’est le dernier métier que j’ai fait ! J’ai vu le passage du simple contrôle visant en éviter les dépassements (contrôle des dépenses) au passage au contrôle de l’utilisation des surfaces disques en informatique, des utilisations de CPU, des volumes de transactions etc. Ceci au fur et à mesure que l’a permis le développement de l’informatique.

            Mais encore une fois pourquoi brouiller tout cela en parlant de « bureaucratie » ? Cela n’ajoute rien à la compréhension du phénomène. Bien au contraire. Tout cela n’est d’ailleurs pas en soi irrationnel. Même une société socialiste ne pourrait se passer de veiller à un retour sur investissement, à éviter le gaspillage des ressources, les doublons, les incohérences d’organisation etc.
            Le contrôle n’est pas en soi une chose condamnable. C’est sa finalité pour le seul profit et ses modalités inquisitoriales qui le sont.

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            • olivier69 // 09.11.2015 à 00h51

              Le mystère pour moi, c’est que vous n’intervenez jamais sur des billets qui dénoncent le système bancaire et la dette comme mode de financement ? Le crédit mutuel était une opportunité par exemple (deux billets mais bon…On ne change pas les lignes facilement. J’avais observé cet élément chez vous).
              Le profit n’a plus besoin des moyens de production puisqu’il existe une prédominance de la distribution (matérielle et surtout financière)….
              Le producteur (quelque soit sa taille) est devenu l’ouvrier de la finance. Donc le combat pour la propriété des moyens de production est dépassé. Seule la reconquête de l’outil monétaire (fait la pluie et le beau temps) est primordiale. C’est pourquoi, j’essaie à mon échelle d’expliquer ce que la monnaie est réellement. C’est à dire une définition fonctionnelle avant même d’être institutionnelle (souvent pour la guerre). Graeber sur ce point est en effet, un agent du système avec notamment, son livre sur la dette. Belle propagande que son mode d’emploi….

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  • Varenyky // 08.11.2015 à 10h38

    De nombreux amis vivant dans les pays composant l’Union Soviétique, et qui ont vécu sous son régime, me disent que même eux, n’avaient jamais connu une telle bureaucratie.

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  • Toutatis // 08.11.2015 à 14h12

    Quelque chose qui a vraisemblablement un rapport avec cet inflation de la bureaucratie : la part de plus en plus importante des coûts dûs aux « managers » et des profits qui leur sont distribués. Le capitalisme occidental, en particulier US, semble de moins en moins optimal, puisqu’il subit un nombre de plus en plus important de parasites. Par exemple dans les universités américaines

    http://www.oftwominds.com/blogoct15/student-loans10-15.html

    en particulier le graphique qui illustre « the rise of the educrat class, at the expense of teachers/professors »

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  • Jaime Horta // 08.11.2015 à 20h47

    Rome s’était déjà effondré sur elle-même, sous le poids de son administration.

    « Le mieux est l’ennemi du bien ».

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  • Bigfin // 08.11.2015 à 22h57

    L’article touche un vrai problème, mais commet l’erreur de confondre le libéralisme (une philosophie politique qui s’attache aux libertés économiques, civiles et sociétales des individus) avec le capitalisme de connivence entre l’état et les grandes entreprises – fort bien décrit dans l’article au demeurant.

    Les vrais libéraux dénoncent de la même façon le capitalisme de connivence, dans lequel l’état et les grandes entreprises s’entendent sur le dos des libertés individuelles. Mais ils en tirent une conclusion opposée à celle de l’article : la seule façon d’éviter le capitalisme de connivence n’est pas d’interdire les entreprises (qui dans un environnement *concurrentiel* sont source de création de valeur partagée), mais d’éviter que l’état intervienne dans l’économie, où son action est systématiquement capturée par les grands intérêts privés.

    Dans une économie libérée de l’emprise de l’état et concurrentielle, si vous n’aimez pas la bureaucratie d’un fournisseur, vous allez voir ailleurs. Dans une société où l’état se mêle de tout et a tendance à faire disparaître toute concurrence, la bureaucratie est inévitable.

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    • Tassin // 09.11.2015 à 10h05

      Le libéralisme « concurrentiel » est une vue de l’esprit : le monopole est l’aboutissement logique du processus de concurrence, c’est à dire le stade ultime du libéralisme, Quand le plus fort a triomphé des plus faibles et impose son dictat. C’est le cas aujourd’hui avec le secteur financier qui impose sa logique dans tous les domaines.

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      • Bigfin // 22.11.2015 à 15h21

        Dire que la concurrence aboutit systématiquement au monopole est un non-sens, voire un contresens total : est-ce qu’il y a un monopole pour la fourniture de papier toilette ? de services téléphoniques ? de génie civil ? de voitures ? d’essence ? de services de restauration ou d’hébergement ?

        Les seuls « capitalistes » (notez les guillemets) qui arrivent à une situation de monopole n’y arrivent et s’y maintiennent qu’en capturant la puissance de l’état à leur profit. Le meilleur moyen d’éviter que cela n’arrive est de limiter, et idéalement de faire disparaître, la possibilité pour l’état de se mêler d’économie.

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  • Devauchelle // 09.11.2015 à 09h53

    @Micmac: quand vous dites que vous n’êtes pas familier du milieu hospitalier, on le voit en effet.
    Pour ma part je suis directeur adjoint dans un hôpital de l’APHP et je l’ai été pendant vingt ans dans des hôpitaux publics. Ce que vous dites sur le personnel administratif recruté qui fait tout pour supprimer des postes soignants est une ânerie. En 2009, le Directeur de l’APHP (Paris) a lancé la fusion des hôpitaux en groupe, en commençant par économiser les directeurs de sites. Ensuite il a annoncé qu’il y avait trop d’agents mais rassurez vous, on ne touchera pas aux postes soignants ( et surtout pas les médecins, qui ont le pouvoir dans les hôpitaux), seulement le personnel administratif ( qui comme chacun sait, ne sert à rien).
    La particularité de l’APHP ( et des hôpitaux de Lyon et de Marseille, mais à une moindre échelle) est de disposer d’un Siège central, une ruche dans laquelle s’agitent 1200 mouches du coche qui supervisent ce que font les hôpitaux. Dix ou vingt fois plus que dans les autres hôpitaux publics. Or aucun poste n’a été supprimé dans la ruche, bien sûr. Par contre, quelques centaines d’informaticiens ont été recrutés pour faire fonctionner le nouveau système informatique centralisé. Bien sûr en contrepartie, des centaines de postes de gestionnaires ont été supprimés. Maintenant la gestion économique et financière des hœpitaux de l’AP est  » dématérialisée ».
    Donc on ne recrute pas des « administratifs », mais plutôt des informaticiens, qui gèrent des logiciels destinés à remplacer les gestionnaires.
    Quant à la rentabilité de l’hôpital, personne n’y a rèvé quand les hôpitaux publics s’occupent de toutes les pathologies alors que les cliniques ne soignent que ce qui est…rentable justement. Je citerai deux exemples: les pathologies cancéreuses, extrêmement couteuses en examens et en médicaments, ne sont prises en charge que dans les hôpitaux publics.
    Par contre, un hôpital est une structure économique comme une autre, qui doit tenter d’équilibrer ses recettes et ses dépenses, en sachant que le personnel payé est aussi nombreux qu’un service soit plein ou tourne à la,moitié de sa capacité.
    La « révolte  » de l’APHP est celle d’agents qui ne veulent simplement pas que l’on revienne sur ce qu’on leur avait accordé, les 35 heures.

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    • Devauchelle // 09.11.2015 à 09h56

      Merci, au fait, jéme suis trompé en mettant mon nom Devauchelle, pouvez vous le remplacer par Poliphème? Merci.

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  • KM // 09.11.2015 à 11h59

    Ce qui montre bien qu’on est en plein 1984. Les mots n’ont plus aucun sens.

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