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12.décembre.201512.12.2015 // Les Crises

Nouvelle offensive allemande contre la BCE, par Romaric Godin

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Source : La Tribune, Romaric Godin, 09/12/2015

La BCE doit faire face à une offensive allemande contre sa politique. (Crédits : reuters.com)

La presse allemande est vent debout contre des portefeuilles de titres dont disposent les banques centrales nationales. Une offensive de plus venue d’outre-Rhin contre Mario Draghi.

L’affaire est passée inaperçue dans le reste de la zone euro. Mais en Allemagne, elle a déclenché une vive polémique. Le 29 novembre dernier, un article du quotidien allemand du dimanche Welt Am Sonntag « découvrait » l’existence d’accords entre la BCE et les banques centrales nationales (BCN) appelés ANFA pour « Agreement on Net-Financial Assets » (accords sur les actifs financiers nets). Ces accords permettent aux banques centrales nationales de l’Eurosystème d’acheter ou de vendre des titres financiers – y compris des obligations souveraines – pour leur propre compte. Le montant global de ces portefeuilles est connu : 565 milliards d’euros, mais la BCE et les BCN refusent de communiquer d’autres détails.

Levée de bouclier politique outre-Rhin

La presse allemande n’a pas de mots assez durs contre ce « secret » qui, selon elle, cacherait un financement monétaire des dettes nationales en dehors de tout contrôle de la BCE. Après une semaine de battage médiatique, les politiques conservateurs ont évidemment suivi. Ce mercredi 9 décembre, Michael Fuchs, le vice-président du groupe parlementaire conservateur au Bundestag a demandé dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ) à la BCE « de rendre publique dans quelle mesure les banques centrales nationales ont réalisé des rachats de titres souverains. » De son côté, Hans Michelbach, membre de la CSU bavaroise et de la Commission des Finances du Bundestag, a demandé à Mario Draghi dans le Handelsblatt « des informations complètes sur l’expansion monétaire remarquable de plusieurs banques centrales nationales. » Même l’expert financier de la SPD Carsten Schneider demande la publication du détail des ANFA.

Qu’est-ce que l’ANFA ?

Pour comprendre la situation, il faut comprendre ce que sont les ANFA. Il s’agit d’accords annuels destinés à favoriser la liquidité. Les réserves obligatoires et les billets en circulation réduisent mécaniquement cette liquidité. Pour le compenser, la BCE autorise chaque année les BCN à acheter des titres afin de créer la quantité de liquidité correspondant à cette destruction. Au final, l’effet sur la quantité de monnaie doit être nulle. Chaque BCN doit acheter des titres dans le cadre d’une fourchette basse et haute. Certaines banques centrales peuvent se contenter du minimum (c’est le cas de la Bundesbank allemande) et transmette ainsi une capacité d’achat supplémentaire aux autres BCN. Le détail de ces accords n’est pas public.

Pour les banques centrales, ces portefeuilles obligataires permettent d’assurer la création de bénéfices. Il ne s’agit pas d’un détail : certaines banques centrales, comme la Banque des Pays-Bas, ont obligation de faire des profits. D’autres doivent assurer les fonds de pension de leurs salariés. D’autres encore doivent satisfaire des actionnaires privés en versant des dividendes. Toutes, enfin, reversent une partie de leurs profits aux Etats qui sont souvent ravis de pouvoir bénéficier de ses entrées d’argent frais. Ces portefeuilles ont pour fonction de renforcer ces profits et donc ces reversements.

Financements monétaires ?

Selon les calculs d’un économiste berlinois, Daniel Hoffmann, cité par le Welt am Sonntag, le montant de ces portefeuilles est ainsi monté jusqu’à 724 milliards d’euros durant la crise, avant de redescendre à 600 milliards d’euros fin 2014. Selon cette étude, deux banques centrales font particulièrement usage de ces accords ANFA : la Banque de France et la Banca d’Italia. Selon Daniel Hofmann, la Banque de France aurait 170 milliards d’euros de titres fin 2014 dans ses portefeuilles ANFA tandis que la Banca d’Italia en détiendrait 125 milliards d’euros. Le rapport annuel de la Banque centrale française indique cependant que ce portefeuille dispose d’un capital de 73,75 milliards d’euros. Quoi qu’il en soit, ces banques centrales ne dévoilent pas le détail de leurs investissements, mais ce serait le fruit de la redistribution des « droits » ouverts par l’ANFA. La Buba n’a que 14 milliards d’euros dans son portefeuille ANFA parce qu’elle ne fait que le minimum demandé par la BCE. Pour la presse allemande, c’est cependant la preuve que ces deux banques centrales réalisent un financement monétaire « illégal » des Etats français et italien. « Le financement monétaire des Etats est aussi interdit pour les banques centrales nationales », indique Michael Fuchs.

La critique allemande

La critique allemande vise à considérer que les ANFA sont des financements monétaires. Certes, il ne s’agit que d’achats sur le marché secondaire – et non primaire – comme les achats d’actifs publics (« QE ») réalisés par la BCE. Mais à la différence du QE et même de l’OMT (qui n’a jamais été utilisé), cependant, les ANFA ne sont pas inclus dans un cadre clair et connu du marché. La menace, pour la presse allemande, est donc de voir la BCE profiter de ce « secret » pour laisser les banques centrales influer sur les taux de certains pays. En réalité, on a vu que les accords limitent les investissements permis dans le cadre des ANFA. A la BCE, on assure que l’on est très sensible à ce que les titres détenus par les BCN demeurent toujours dans les limites du tiers d’une émission de dette. Cette limite a été fixée par la BCE comme une garantie que le marché n’est pas uniquement influencée par sa politique et, donc, qu’il ne s’agit pas d’un financement monétaire.

Transparence ?

Une source proche des banques centrales confirme que les ANFA sont très étroitement encadrés : il existe un « code » clair qui empêche les achats d’influer sur la politique monétaire en limitant très clairement les achats de titres souverains. Le Conseil des gouverneurs peut, de plus, demander si besoin le gel des achats d’une banque centrale à la majorité des deux tiers. Selon cette source, « s’il n’y a pas de transparence envers le public, il y a une transparence totale au sein de l’Eurosystème et la BCE sait parfaitement ce que fait la Banque de France, par exemple. »

Certaines banques centrales nationales défendent le « secret » par le besoin d’indépendance. L’absence de publication de détails permettrait justement d’éviter les pressions politiques sur la gestion de ces portefeuilles. En cas de publicité du portefeuille, il pourrait y avoir des pressions pour acheter des titres d’Etat sur le marché secondaire. Evidemment, l’argument peut être retourné : sans transparence, les pressions politiques peuvent s’exercer sous la protection du « secret. » Mais, selon une autre source, la clé du refus de la publication de l’ANFA serait la complexité des accords. Quoi qu’il en soit, le directoire de la BCE semble assez favorable à plus de transparence, mais il n’y a pas d’accord au niveau des BCN.

Opposition allemande à la BCE

Les arguments allemands ne semblent donc pas pertinents : la création monétaire est nulle et le financement monétaire peu probable. Mais il est vrai que la complexité et le manque de transparence entretiennent le doute. Cette affaire de l’ANFA ressemble beaucoup à la polémique de 2010-2012 autour de Target 2 : c’est une attaque contre l’Eurosystème qui sous-entend une hypothétique mise en danger des contribuables allemands.

Mais alors pourquoi alors cette « découverte » soudaine de Welt am Sonntag et cette campagne de presse qui a suivi ? Tout ceci ne peut se comprendre que comme une offensive contre la BCE. Offensive dont la question des ANFA n’est qu’un prétexte. La Bundesbank et les milieux économiques allemands n’ont pu empêcher le lancement du QE et toutes les requêtes juridiques allemandes ont partiellement ou entièrement échoué pour le moment. Mais les critiques et les protestations contre ce programme demeurent le discours dominant outre-Rhin. Alors que les annonces du 3 décembre de Mario Draghi ont largement déçu les marchés, les communiqués de presse des banques privées et publiques allemandes n’ont cessé de fustiger une nouvelle utilisation de la « presse à billets » qui « ruine » les épargnants allemands. La critique de la politique de la BCE doit donc utiliser d’autres formes. Il est, à cet égard, intéressant de noter que la critique allemande prend comme centre la BCE et non les banques centrales nationales.

Un « QE2 » bloqué au Conseil des gouverneurs

Cette offensive, lancée quelques jours avant la réunion du 3 décembre, n’est donc pas le seul fruit du hasard. Du reste, l’opposition allemande reprend de la vigueur. Jusqu’ici, Mario Draghi avait réussi à la maîtriser au sein du Conseil des gouverneurs en jouant sur les attentes des marchés. En faisant en sorte, par des annonces calibrées, de préparer les marchés aux mesures annoncées, ils les rendaient inévitables, à moins de prendre le risque d’une correction boursière. Mais, jeudi dernier, Mario Draghi n’est pas parvenu, si l’on en croit Reuters,à mener à bien cette stratégie. L’opposition au sein du Conseil des gouverneurs l’a contraint à réduire son paquet de mesures, même au prix d’une déception des marchés. Si ces informations de Reuters sont justes, ce serait un succès pour la Bundesbank qui, pour la première fois depuis longtemps, serait parvenue à « modérer » le QE et à désamorcer la stratégie de Mario Draghi.

La bataille de l’union bancaire

L’autre offensive contre la BCE est menée plus directement par Wolfgang Schäuble, le ministère fédéral allemand des Finances et concerne le « troisième pilier » de l’union bancaire, autrement dit la garantie européenne des dépôts jusqu’à 100.000 euros. Aujourd’hui, cette garantie existe, mais elle est assurée par les Etats. Or, certains Etats n’ont pas les moyens de cette garantie, alors que le nouveau mécanisme de résolution des crises bancaires qui sera lancé le 1er janvier prévoit la participation des déposants. Mais Berlin exige pour cela un changement de traité et une réduction des risques dans les bilans des banques. Autrement dit, Wolfgang Schäuble entend renvoyer ce troisième pilier aux calendes grecques. La BCE insiste, elle, beaucoup sur cette garantie. Mardi 8 décembre, Wolfgang Schäuble a très sèchement recadré l’institution de Francfort, en lui demandant de se limiter à son travail de surveillance des banques et de politique monétaire.

Le torchon brûle entre Berlin et Francfort

Le torchon brûle donc entre Berlin et Francfort, une nouvelle fois. Et cette campagne contre l’ANFA n’est qu’un signal de plus que les Allemands sont de plus en plus mal à l’aise avec la politique de la BCE. Comme en 2013, Mario Draghi va-t-il devoir tenir compte de cette nouvelle offensive pour réduire sa politique accommodante ? C’est possible. Mais la résistance allemande rend, en tout cas, l’espoir d’une collaboration des Etats et de la BCE pour favoriser la relance de plus en plus difficile. Le blocage allemand est, de ce point de vue, rédhibitoire.

Source : La Tribune, Romaric Godin, 09/12/2015

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Commentaire recommandé

yann // 12.12.2015 à 10h03

Il faut cesser de croire que nos pays sont rationnels et guidés par la raison. L’affaire ukrainienne et Daesh montrent que ce n’est pas le cas. L’orgueil, les croyances, les passions, le suprématisme sont autant de choses qui expliquent certains comportements collectifs. En l’occurrence il y a un réveil des nations dans tous les pays d’Europe, l’Allemagne n’y fait pas exception. C’est une bonne et une mauvaise chose à la fois, car cela dépend de la forme que prend ce réveil national suivant les traditions locales. En Allemagne ce réveil national prend malheureusement sa forme habituelle dans ce pays avec l’idée que l’Allemagne est au-dessus des autres. Que son apparent succès économique n’est que le fruit de sa supériorité naturelle. En aucun cas ils ne peuvent vraiment croire que l’Allemagne ne doit ses excédents qu’à une monnaie mal conçue. Et pourtant à la fin des années 90 l’Allemagnre avait des déficits vis-à-vis de la France par exemple, et une croissance économique nettement plus forte ce qui devrait tordre le cou aux crétins qui pensent que la croissance n’est que le fruit des exportations. Du reste, ils n’imaginent même pas que cette domination va finir par produire un retour de bâton macro-économique qui va leur faire très mal. En tuant leurs clients, ils détruisent leur propre économie. C’est bien cet orgueil national qui va pousser l’Allemagne à faire exploser l’euro contre ses propres intérêts à court terme.

34 réactions et commentaires

  • Furax // 12.12.2015 à 01h59

    J’ai toujours une interrogation à laquelle je ne trouve pas de réponse satisfaisante quand il est question des conflits entre l’Allemagne et la BCE.

    L’Allemagne est le seul pays (si on laisse de côté leur annexe commerciale appelée Pays-Bas) à profiter de l’euro. L’euro, comme l’a depuis longtemps expliqué entre autres Christian Saint-Etienne est l’outil qui permet à l’Allemagne de saigner à mort les industries des autres pays européens en la prémunissant des réévaluations qu l’accumulation des excédents auraient dû lui faire subir, et de faire subventionner par les autres pays europeens les exportations allemandes partout dans le monde.

    Je bute sur le dilemme suivant.

    L’Allemagne est-elle collectivement psychotique et souhaite-t-elle sortir de l’euro (ce qui ferait le plus grand bien aux autres pays de la zone euro) ?
    Ou bien y a-t-il quelque chose qui m’échappe ?

    Cela fait longtemps que je cherche. Et je n’ai toujours pas trouvé ce qui m’échappe.

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    • Yautjas // 12.12.2015 à 02h13

      Si l’Allemagne sort de l’euro ça ne fera du bien qu’à l’Allemagne.

      Ou peut être effectivement aux autres pays de la zone euro qui par effet domino sortiront eux aussi de l’euro.

        +6

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      • Furax // 12.12.2015 à 08h06

        Cela fera du bien à l’Allemagne ? J’ai plutôt l’impression que le made in Germany s’exporterait 25% plus cher alors que le prix des exportations des autres pays de l’actuelle eurozone baisseraient, eux, de 25%. Le site de production Allemagne ne vendrait plus que des Audi, des Mercedes, des BMW (et encore, avec eun forte baisse des volumes) et les meilleures de leurs machine-outils, et serait forcé de fermer tout le reste et de miser sur des unités de production localisées hors d’Allemagne.

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        • LBSSO // 12.12.2015 à 10h14

          Bonjour Furax.
          Votre analyse est juste mais elle ne raisonne qu’en termes de production et d’exportation (mercantilisme allemand)..

          Du point de vue allemand,la Bundesbank a beaucoup (trop) de créances sur ses équivalentes européennes.Elle n’a pas envie d’en avoir encore plus. « A la fin c’est l’Allemagne qui paie » selon la formule.

          Ensuite,il y a deux autres angles possibles:
          -la Bce dit aux allemands ,si vous ne voulez pas d’assouplissement organiser une relance en Europe.
          -Washington fait pression sur l’Allemagne pour « tenir » l’euro.Berlin dit  » pourquoi pas » mais alors ce sera à mes conditions.Se mêlent alors des questions géopolitiques qui nous éloigneraient du billet.

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        • max // 13.12.2015 à 11h44

          Il y a également le « léger » problème des excédents commerciaux énormes accumulés par l’Allemagne sur l’Eurozone, comptabilisés dans les soldes TARGET2 si je me souviens bien.

          Si l’Allemagne sort, on peut s’attendre à ce que l’Euro (ou ce qu’il en reste) se dévalue fortement, ce qui diminuera d’autant la valeur financière des excédents commerciaux allemands.

          Avec, en bout de chaine, le retraité allemand et ses économies dans un fonds de pension qui n’aimerait sans doute pas tellement voir sa retraite partir en fumée.

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    • Alain // 12.12.2015 à 07h11

      Ce n’est pas l’euro lui-même qui gêne l’Allemagne mais la politique de la BCE qui lui fait penser erronément à l’entre deux guerres. Si ils arrivent à mettre l’un des leur à la tête de la BCE à la fin du mandat de Mario Draghi, il n’y aura plus de conflit entre Berlin et Francfort; donc aucune raison de sortir de l’euro pour l’instant

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    • Patrick Luder // 12.12.2015 à 09h52

      Il y a une différence entre être responsable (déjà de soi puis collectivement des autres) et être nombriliste

      … C’est ça qui t’échappe Furax !

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    • yann // 12.12.2015 à 10h03

      Il faut cesser de croire que nos pays sont rationnels et guidés par la raison. L’affaire ukrainienne et Daesh montrent que ce n’est pas le cas. L’orgueil, les croyances, les passions, le suprématisme sont autant de choses qui expliquent certains comportements collectifs. En l’occurrence il y a un réveil des nations dans tous les pays d’Europe, l’Allemagne n’y fait pas exception. C’est une bonne et une mauvaise chose à la fois, car cela dépend de la forme que prend ce réveil national suivant les traditions locales. En Allemagne ce réveil national prend malheureusement sa forme habituelle dans ce pays avec l’idée que l’Allemagne est au-dessus des autres. Que son apparent succès économique n’est que le fruit de sa supériorité naturelle. En aucun cas ils ne peuvent vraiment croire que l’Allemagne ne doit ses excédents qu’à une monnaie mal conçue. Et pourtant à la fin des années 90 l’Allemagnre avait des déficits vis-à-vis de la France par exemple, et une croissance économique nettement plus forte ce qui devrait tordre le cou aux crétins qui pensent que la croissance n’est que le fruit des exportations. Du reste, ils n’imaginent même pas que cette domination va finir par produire un retour de bâton macro-économique qui va leur faire très mal. En tuant leurs clients, ils détruisent leur propre économie. C’est bien cet orgueil national qui va pousser l’Allemagne à faire exploser l’euro contre ses propres intérêts à court terme.

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    • john // 12.12.2015 à 11h09

      L’Allemagne quittera l’Euro dès qu’elle deviendra perdante, c’est à dire le jour où il sera question de vrais transferts entre pays (qu’impose une monnaie de type fédérale). Mais en attendant, les industries française et italienne disparaissent.

      Noter que le QE est très peu mutualisé, tout comme la pseudo « union bancaire, en gros en restant ils n’ont pas beaucoup de contraintes ou engagements et beaucoup d’avantages.

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    • nd // 14.12.2015 à 11h19

      Il me semble que la formulation « L’Allemagne est le seul pays à profiter de l’euro. » n’est pas tout à fait juste. La France , l’Espagne, le Portugal, l’Italie… tous ont profité de l’Euro à ses débuts.
      Je pense qu’il faut formuler la situation différemment. L’euro est une émanation du « Deutsche Mark », de fait l’économie allemande semble être la plus apropriée pour s’en accomoder, dans la durée (en tout cas d’un point
      de vue monétaire). Le projet monétaire européen a d’ailleurs toujours été celui-ci, Giscard ambitionnait d’avoir un strapontin à la Bundesbank, nous l’avons.

      Il faut poser maintenant le problème dans l’autre sens. Comme l’explique Sapir, pour qu’une monnaie unique se maintienne sur des économies hétérogènes il faut entre autre :
      des transferts de capitaux des zones les plus riches vers les plus pauvres (donc Allemagne vers les autres) et des transferts de population des zones les plus pauvres vers les plus riches
      (donc tous vers l’allemagne). Et c’est là, je crois, tout le problème maintenant posé à l’Allemagne. Pourquoi devrait-il consentir à cela ? Alors que l’Allemagne pourrait retrouver
      son DM sans avoir à subir les contraintes que nous voulons leur imposer aujourd’hui?

      Les allemands ne saignent personne, ils étaient meilleur que nous avant l’Euro et ils le seront après l’Euro.
      L’Europe des Banksters et son Euro sont devenus des idéologies décorrelées de toute réalité économique, sociale, historique voir même anthropologique. On est dans le pur délire
      du libéralisme. Il n’existe pas de peuple européen, ni de solidarité européenne (on arrive même plus à maintenir une solidarité à l’échelle d’un pays vieux de 1500 ans), c’est du pipo d’évangéliste droit de l’hommiste.
      Il eut fallut travailler sérieusement au projet Européen, autour du couple Franco-Allemand dès les années 70,80 et bien au dela de projets économco/industriels. Par exemple : sur un projet de double nationalité, en rendant nos deux langues obligatoires dans tous les cursus scolaires des deux pays, en
      imposant aux étudiants de faire leurs études supérieurs dans l’autre pays… c’est un projet de longue haleine, à contre courant de l’histoire, donc sérieux et difficile.

      Selon moi, l’Allemagne aura du mal à sortir de l’Euro pour différentes raisons : pour des raisons historiques et morales, l’Allemagne serait pour la troisième fois de suite responsable
      de la destruction de l’Europe (nos élites ne manqueront pas de les culpabiliser); pour une raison disons complotiste, qui vise à faire de la zone Euro une zone marchande sattelite de
      l’Empire américain: ce projet ne peux exister que si l’allemagne est dans la monnaie unique, si elle sort de l’euro seule, alors elle se tournera vers la Russie et la Chine, situation
      intolérable pour les Yankees.

        +0

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      • yann // 14.12.2015 à 14h03

        Ce que vous dites est complètement faux. L’Allemagne avait des déficits commerciaux à la fin des années 90. Le redressement de ses exportations coïncide parfaitement avec l’euro et la mise en place des réformes Schröder qui ont consisté à faire une dévaluation par les salaires. Une stratégie qui visait explicitement à profiter de l’euro pour croitre au détriment des voisins européens. La question de l’unification monétaire est de toute façon caduque, il ne peut pas y avoir de monnaie multinationale, cela finit toujours mal. Et de toute façon avoir une grosse monnaie n’est en aucun cas un avantage. Il faut cesser de vouloir créer les États-Unis d’Europe. La force de notre continent a toujours été sa division justement . Sa multitude de cultures de façon d’être et de penser. Ce jacobinisme délirant voulant reproduire à l’échelle européenne ce que la république a fait en France est à mon sens la pire absurdité qui soit. Mieux vaut être petit et bien géré que gros et malade à l’image des USA.

          +0

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        • nd // 14.12.2015 à 17h37

          Amusant votre contradiction, dans la mesure où je partage votre point de vue. Vous semblez argumenter autour de la balance commerciale. Il ne me semble pas qu’une puissance économique se mesure à ce seul indicateur, mais admettons :

          https://www.les-crises.fr/evol-commerce-ext-allemand/

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  • natoistan // 12.12.2015 à 02h53

    C’est encore plus simple:si ou l’Allemagne ou la France décide de sortir de l’Euro et bien à la même seconde il n’y a plus d’Euro.

    A noter que les Pays-Bas et la Finlande(tous deux en récession)ne profitent plus vraiment de l’euro,la contagion gagne les derniers maillons à part peut être le paradis fiscal Luxembourg et peut être Malte dont on ne parle jamais.

      +7

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  • Werrebrouck // 12.12.2015 à 08h45

    Nous sommes dans un vrai débat. En sortant de l’euro, l’Allemagne cesse de voir ses exportations subventionnées par un monnaie faible. Mais en retour le « made by Germany » y gagne car les produits intermédiaires fabriqués dans les satellites allemands sont achetés à meilleur compte. Il n’est pas facile de faire le bilan.
    Par contre on peut penser que la disparition de l’euro entrainerait un allongement des chaines de la valeur pour les entreprises allemandes, et inversement à un rétrécissement de ces chaines pour les pays ayant dévalué. De quoi aller vers davantage d’extraversion pour l’Allemagne, et un modèle plus auto centré pour les autres pays, en particulier la France.
    Mais au final ce déchainement de la presse allemande en dit long sur l’impossibilité de maintenir l’euro.
    http://www.lacrisedesannees2010.com/2015/11/l-euro-un-echec-ineluctable-video-du-colloque-du-21-novembre.html

      +9

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    • K // 12.12.2015 à 09h20

      Bien vu.
      Si l’Allemagne sort de l’euro, les entreprises allemandes verraient leurs coûts en marks augmenter de 25% mais leurs coûts dans les autres monnaies européenne (par exemple leurs fournitures auprès de sous traitants européens) baisser de 25%.
      Donc le surcout de 25% ne s applique pas à toute la valeur du produit mais que sur la part de la valeur ajoutée réalisée sur le sol allemand.
      Dans un secteur comme l’automobile allemande par exemple, une grande partie des pièces sont importées et assemblées en Allemagne.
      Donc rien nous dit que le coût en dollars de ces voitures augmenterait (+25 sur l’assemblage mais -25 sur les pièces).
      Au final la sortie de l’Allemagne aurait peu de consequences sur les exportations allemandes hors zone euro mais bcp sur les exportations intra zone.

        +5

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    • yann // 12.12.2015 à 12h25

      @Werrebrouck

      Là vous supposez que les pays satellites de l’Allemagne vont continuer leurs suivismes même avec l’explosion de la zone euro. Rien ne dit que la Pologne ne va pas par exemple se rapprocher de la Russie et couper court à son inféodation vis-à-vis de l’industrie allemande. Même chose pour les autres pays de la région. Il faut être modeste en cas de crise d’explosion de la zone on ne sait pas vraiment comment les choses tourneront d’un point de vue géopolitique. C’est une transition de phase, une singularité, un processus non linéaire et chaotique, ce qui explique la peur que ce changement peut engendrer dans la tête des gens. Ce dont on est sûr par contre, c’est que la continuation de l’euro telle qu’il est, conduira inéluctablement à l’effondrement général du continent, Allemagne comprise puisqu’elle tue ses clients. Elle sera juste la dernière à fermer boutique.

        +7

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  • Vénus-Etoile du Berger // 12.12.2015 à 08h50

    Cela sonne la fin de la suprématie allemande qui impose ses propres lois afin d’obtenir une politique accommodante pour son économie nationale sans se soucier des contraintes et de la problématique de survie des autres populations et des autres pays de la zone euro.
    La France paye pour le panier commun.
    L’Italie a fait l’effort des austérités imposées ce qui a permis à l’Allemagne d’économiser et de rationaliser sa dette allemande. L’Allemagne n’a pas à imposer à Mario Draghi sa politique souveraine allemande monétaire, Mario Draghi fait le choix d’une politique monétaire commune pour le bien de tous les pays de la zone euro, il ne doit en aucun cas plier sous les exigences égoïstes de l’Allemagne.
    L’Allemagne veut tout contrôler pour continuer à économiser mais l’Allemagne ne veut pas épargner dans le panier commun et ne veut pas payer dans le panier commun, la problématique est là.

      +9

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    • Prométhée Enchaîné // 12.12.2015 à 10h28

      On entend souvent dire aussi, notamment par les journalistes « sérieux », que l’Allemagne ayant fait des sacrifices pour se réformer, estime que les autres pays ne peuvent faire l’impasse sur cette fameuse cure, et que c’est la seule condition pour elle pour que l’euro fonctionne, et éventuellement qu’elle s’investisse plus dans la fédéralisation.

      Il semblerait que la France traîne des pieds depuis déjà très très longtemps pour faire ce qu’Hollande paraît faire à marche forcée désormais.

      Toutes les remontrances, que l’on a pu voir périodiquement (je me rappelle de Raffarin par exemple mais aussi à gauche, Montebourg ? Moscovici ?), de nos hommes politiques à l’égard de Bruxelles montrent une inertie qu’ils ne parviennent pas à briser chez nous (toujours cf. Conesa sur l’art de faire semblant d’agir…). Il n’est pas question pour moi de juger moralement le manque de courage politique ou la résistance du peuple français, mais juste de les signaler.

      Et donc pour l’Allemagne, cette politique de la BCE serait contre-productive dans le sens où elle ralentirait les efforts attendus pour chaque état.

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    • bourdeaux // 12.12.2015 à 14h31

      Je ne suis pas d’accord du tout. Ce que défend ici l’Allemagne, c’est le respect du cadre légal de la politique monétaire, tel qu’il est défini par traité. « Draghi mène une politique commune pour le bien de tous les pays » dites-vous ? Non, il engage l’euro système sur des sommes gigantesques pour empêcher les banques en péril de faire faillite, comment peut-on tolérer cela ?? Je connais bien l’argument à la nicolas Doze : « si il ne le faisait pas , tout le monde irait au tapis », mais le capitalisme, c’est aussi cela : quand on se met en danger, on peut mourir. Les QE, c’est : antibiotique pour tout le monde parce qu’on ne veut pas nommer les malades : on tripatouille la monnaie pour ne pas avoir à nommer ceux qui n’en ont plus la queue d’un.

        +8

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      • Vénus-Etoile du Berger // 12.12.2015 à 21h42

        Vous dites « ce que défend l’Allemagne est le respect du traité. »

        Elle défend son seul intérêt au détriment des autres pays de la zone euro.

        L’attachement au respect du traité de l’Allemagne s’explique par son histoire atypique. Durant les années 20 l’Allemagne a vécu une hyperinflation qui a dévasté l’épargne des ménages et a causé une hausse du chômage. L’Allemagne n’a pas su faire face et n’a pas réussi à revenir à l’équilibre budgétaire. Ce fâcheux événement est ancré dans la culture économique de l’Allemagne.
        Seule obsession allemande:Faire respecter le traité pour se protéger de l’inflation afin de conserver son budget à l’équilibre au détriment de tous les autres pays (et de leurs budgets) de la zone euro.

          +3

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  • Bayard Jean // 12.12.2015 à 08h50

    Bonjour Olivier,

    La garantie des dépôts n’existe plus en pratique depuis l’ordonnance 2015-1024 du 20 août dernier.

    Voir aussi :
    http://la-chronique-agora.com/garantie-depots-bancaire/

    Cordialement

    jean

      +1

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  • Alex Hanin // 12.12.2015 à 09h02

    Ce qu’on appelle le »financement monétaire » permettrait de relancer la croissance, d’investir dans l’énergie renouvelable et de mettre les gens au travail en un rien de temps. D’exploiter nos vraies ressources, en somme, au lieu de nous traîner péniblement en geignant qu' »on a pas d’argent ». Cerise sur le gâteau, on s’éloignerait de la déflation et on pourrait mettre un terme aux QE.

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  • Grim // 12.12.2015 à 10h03

    Finalement les deux bonnes nouvelles de cette histoire sont :

    Le blocage du QE2 de Draghi (qui a juste pour effet de pourrir nos banques centrales)

    La preuve qu’une union monétaire avec un pays qui a une peur panique de l’inflation est impossible

      +4

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    • K // 12.12.2015 à 14h22

      Disons que dans certains (rares) cas précis, une union monétaire pourrait fonctionner, mais seulement entre des pays qui ont à la fois :
      – la même évolution démographique
      – la même culture monétaire (orthodoxe ou laxiste)
      – la même évolution de la productivité
      – la même structure économique (industrielle ou tertiaire / consommation intérieure ou exportation)
      – le même taux de chômage
      – les même besoins en matières d’infrastructures publiques
      – les mêmes politiques sociales et salariales
      – les mêmes niveaux de fiscalité
      – les mêmes dettes publiques et les mêmes déficits publics

      Ca fait quand même beaucoup de conditions !

        +2

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      • Surya // 12.12.2015 à 18h00

        Non. Les différentees régions françaises ont des profils différents, c’est juste qu’il y a un état fédéral au dessus qui organise les trasferts pour le réquilibrage interne de la balance des paiements.

          +2

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        • K // 13.12.2015 à 01h31

          Je parle d’union. La France n’est pas une union mais un pays. Tous les grands pays sont hétérogènes. Les transferts ne sont pas acceptés par les peuples au delà de l’échelon national.

          PS : La France n’est pas un état fédéral

            +2

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    • Grim // 12.12.2015 à 14h33

      C’est sur que la mauvaise gestion budgétaire des uns, le comportement prédateur des autres avec pour couronner le tout l’absence complète d’une réelle autorité politique ou solidarité ne risque pas de déboucher sur une très grande prospérité en Europe.

      Il n’y a que pour notre classe politique que ce n’est pas évident

        +5

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  • groucho // 12.12.2015 à 11h14

    Pour moi, ce genre de texte sonne comme la Pythie de Delphes (honneur aux Grecs !). A ceci près que la Pythie produisait autant d’oracles positifs que négatifs alors qu’invariablement, ici, ils sont toujours négatifs tôt ou tard pour nous autres, pauvres mortels…

      +3

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  • tchoo // 12.12.2015 à 11h40

    Si l’Allemagne a fait des sacrifices, c’est pour permettre a ses rentiers, nombreux (trop?) de récolter des dividendes
    Population en train de vieillir ayant besoin de financer des retraites par capitalisation.
    Tous les pays d’Europe n’ont pas ces besoins ou ces impératifs, la disparité est trop grande pour continuer à avoir une monnaie commune parce cela implique une politique monétaire commune qu’il devient de plus en plus impossible à tenir
    et le modèle allemand tant vanter par nos merdias n’en est pas un

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  • bourdeaux // 12.12.2015 à 11h57

     » la garantie européenne des dépôts jusqu’à 100.000 euros. Aujourd’hui, cette garantie existe, mais elle est assurée par les Etats.  »
    Cette histoire de garantie des dépôts me fait bien rire. Les ressources des fonds qui sont sensés rembourser les déposants en cas de faillite bancaire sont investis dans des titres de dettes, et même parfois investis dans les banques qui pourraient devoir être secourues…Autrement dit, on stocke la flotte pour éteindre l’incendie dans les entrepôts qui vont brûler : donc le jour de l’incendie l’eau se sera vaporisée ! Tout ceci n’est donc à mon avis qu’un mécanisme purement psychologique destiné à rassurer les déposants, un théâtre de guignol où le gendarme et gnafron dissimulent les 2 mains d’un unique acteur.

      +10

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    • john // 12.12.2015 à 12h46

      Et le détournement du (faible) fond vers le casino financier date de la pseudo loi de séparation bancaire.

        +2

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  • Charlie Bermude // 12.12.2015 à 14h19

    Les Allemands , ceux qui en ont , défendent leur patrimoine et les revenus qui vont avec , çà se confond pas forcémment avec l’intéret national , et pas du tout avec la BCE , , alors ils se défendent comme ils peuvent . C’est pas facile avec l’emprise du $ délétére . Et puis y a la nouveauté , la bonne Merkel , atlantiste moins que moi tu meurs , avec ses immigrés qui faut bien recevoir , çà va couter çà encore .
    On nous dit que la BCE , elle est pas synchro avec la fed , c’est qu’on veut pas comprendre , la hausse des tx pour la fed c’est une catastrophe , Draghi lui donne un coup de main, pour éventuellement encore differer .

      +4

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  • norbix // 13.12.2015 à 00h08

    « Pour les banques centrales, ces portefeuilles obligataires permettent d’assurer la création de bénéfices. Il ne s’agit pas d’un détail : certaines banques centrales, comme la Banque des Pays-Bas, ont obligation de faire des profits. D’autres doivent assurer les fonds de pension de leurs salariés. D’autres encore doivent satisfaire des actionnaires privés en versant des dividendes. Toutes, enfin, reversent une partie de leurs profits aux Etats qui sont souvent ravis de pouvoir bénéficier de ses entrées d’argent frais.  »

    Où l’on apprend au détour d’un article, que les Banques Centrales Nationales de la Zone Euro ne sont pas régies par les mêmes statuts.

      +2

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    • Alfred // 13.12.2015 à 00h28

      C’est une chose qui m’a marqué aussi. Voilà un point sur lequel on ne s’est pressé de définir une norme commune ou un mécanisme de convergence…
      J’aimerai bien en savoi plus.

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