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17.mai.201817.5.2018 // Les Crises

Apparences et réalités de la commémoration de Charles Maurras (3/3) : De l’urgence de la réédition des « collabos » au rôle du Haut comité aux commémorations nationales de 2011 à 2018

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Dernière partie de cet article détaillé sur la commémoration de Charles Maurras – afin de faire vivre le débat historique. Nous publierons les réponses d’historiens à cet article.

I. Apparences et réalités de la commémoration de Charles Maurras

II. Une commémoration-célébration par un biographe faisant l’unanimité des « historiens du consensus »

III. – De l’urgence de la réédition des « collabos » au rôle du Haut comité aux commémorations nationales de 2011 à 2018

Apparences et réalités de la commémoration de Charles Maurras, par Annie Lacroix-Riz [2e partie]

Par Annie Lacroix-Riz, professeur émérite université Paris 7

III. – De l’urgence de la réédition des « collabos » au rôle du Haut comité aux commémorations nationales de 2011 à 2018

  • A-Une mission civique et critique, rééditer les fascistes?

Début janvier 2018, moins d’un mois après cette série télévisée si typique des révisions historiques en cours, Pascal Ory était une nouvelle fois intervenu sur une question qui le taraude depuis plusieurs années, comme nombre d’éditeurs et d’intellectuels français : la réédition de la littérature collaborationniste, antisémite, anti-rouges, anti-métèques d’avant-guerre et d’Occupation en général, celle de Céline en particulier : celle qui avait connu son heure de gloire sous l’Occupation, quand les éditeurs français et aryens, d’une part, gagnaient de l’argent avec cette prose ignominieuse, d’autre part, participaient sans état d’âme apparent, à l’aryanisation alors à l’ordre du jour. En témoigne l’offre de participation des grands éditeurs, Gaston Gallimard, pendant toute l’année 1941, à l’aryanisation de Calmann-Lévy : les « fonds Barnaud » (directeur général de la banque Worms et délégué général aux relations économiques franco-allemandes) en ont conservé la trace((Récit dans Industriels et banquiers français sous l’Occupation, p. 468-470, et Jean-Yves Mollier, Édition, presse et pouvoir en France au XXe siècle, Paris, Fayard, 2008, chap. 2.)). Début décembre 2017, le successeur de la maison, Antoine Gallimard, avait annoncé pour mai 2018 la republication, sous le joli titre d’Écrits polémiques, des trois textes surenchérissant dans l’ordure de 1937, 1938 et 1941 Bagatelles pour un massacre, L’École des cadavres et Les Beaux draps. Naturellement, avait précisé l’éditeur, ce serait avec « un appareil critique et une préface de Pierre Assouline » dont de précédentes biographies font douter de la résolution critique((Dans Une éminence grise. Jean Jardin (1904-1976), Paris, Seuil, 2007 (1e éd., Gallimard, 1986), œuvre « de commande » qui a scellé une amitié illustrée par des invitations régulières de l’auteur dans la propriété suisse des Jardin (témoignage oral d’Alexandre Jardin, 2011), Assouline a transformé le synarque Jean Jardin, directeur de cabinet de Laval, à la germanophilie notoire depuis l’avant-guerre, en modèle de « vichysto-résistant » (le mot n’existait pas encore), voir Élites, index Jean Jardin.)).

Après que le Premier ministre Édouard Philippe eut dans une interview du 7 janvier 2018 au JDD exprimé son soutien à ce noble projet, Pascal Ory se prononça résolument pour la réédition : « Ce qui était anormal, c’est que ces pamphlets n’aient pas été réédités plus tôt. Ces textes sont des documents historiques importants, et il est normal de les réintégrer enfin dans l’œuvre de Céline. L’Humanité vit avec des cancers, ça ne sert à rien de dire: “Il n’y a pas de cancers !”Au fond, la censure est un aveu troublant. Ces textes auraient-ils une force telle qu’il faudrait les empêcher de resurgir? Au contraire, il faut les affronter directement, avec les armes de la critique scientifique. Sans cela, on aura la liberté d’Internet, sans l’appareil critique. »((https://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20180105.OBS0211/edouard-philippe-annie-ernaux-sansal-luchini-pour-ou-contre-la-reedition-des-pamphlets-de-celine.html)). Pascal Ory qui, on va le voir, était déjà intervenu au moins à deux occasions marquantes en faveur de la réédition de publicistes fascistes, songeait sans doute aux « armes de la critique » dont Olivier Dard est censé avoir « blindé », d’une part, la biographie de Maurras et, d’autre part, la notice, qu’il avait lui-même agréée en compagnie de Jean-Noël Jeanneney.

Ces intellectuels, de Céline à Rebatet en passant par Robert Brasillach (et la liste est encore fort longue) ne furent pas seulement fascistes d’ondes et de plume tant « littéraire » que quotidienne, à Je suis partout et dans le reste de « la presse allemande de langue française ». Ils collaborèrent tous, comme délateurs et/ou exécutants, « agents » du Sipo-SD de Knochen, à la liquidation des juifs, des rouges, sans oublier les gaullistes, etc.; ils participèrent à la curée de l’aryanisation, notamment en s’installant dans des appartements « juifs »; ces diverses pratiques les mirent en contact permanent et matériellement intéressé avec la « Gestapo », nom français courant du service, jusqu’au bout de l’Occupation((Les exemples d’Élites, chap. 2, dont Jean-Hérold Paquis et Céline, peuvent être étendus à tous, dont Robert Brasillach et Lucien Rebatet, cf. infra.)). Le troisième cité plus haut, Brasillach, autre éminence de l’Action française((Long rapport des RG sur le « Comité national de Vigilance de la Jeunesse » fondé le 29 février, mai 1936, F7, 13983, bleus PP et SN, 1936, dossier 6, AN.)), rédacteur en chef de Je suis partout sous l’Occupation, familier d’Abetz et autres dignitaires nazis en poste à Paris (dont Epting) depuis le début des années 1930((Direction des RGSN, PV auditions 77/2 et 77/3 de Karl Epting par René Seyvoz, 7 et 10 juin 1947, W3, 358, Interrogatoires et rapports de personnalités allemandes 1944-1947, et « Relations d’Otto Abetz avec certaines personnalités françaises (hommes politiques, intellectuels, artistes, milieux mondains, etc.) », PV audition par Marc Bergé et Léon Dauzas, 21 novembre 1945, F7, 15332, Abetz AN.)), visite[eur d]u front de l’Est » en juillet 1943((Rapport de la DRGSN, février 1945, F7, 15296, DRGSN, agences de presse, divers dont Inter-France (de loin le plus gros dossier), AN.)) et hôte assidu de l’ambassade d’Allemagne avec tous ses pairs((PV 3e réunion commission de sûreté [Sûreté nationale] du 18 septembre, Paris, 19 septembre 1944, F7 14966, Listes d’arrestations demandées par la Sûreté générale (sic), IV C2,AN.)) pour ne mentionner que quelques-unes de ses activités hors « plume » , sera le héros de la prochaine biographie d’Olivier Dard. Avec l’appareil critique habituel ?

Interrogé sur l’opportunité de « rééditer les mots bruns » par Sonya Faure dans Libération le 2 février 2018, juste après le retrait de sa notice Maurras du Grand Livre, Olivier Dard s’est prononcé en termes aussi catégoriques que Pascal Ory. Au nom, d’une part, de la louable lutte contre la censure, et, d’autre part, ce qui ne surprendra pas, de la croisade contre le « complotisme ». La journaliste, ayant argué qu’« il y a tout de même une responsabilité à publier aujourd’hui des œuvres d’auteurs d’extrême droite, qui ont collaboré avec Vichy ou le nazisme… », reçut cette réponse : « La responsabilité éditoriale existe, évidemment, mais le débat est sous-tendu par l’idée, discutable [vraiment, et discutée quand?], que la France d’aujourd’hui ressemblerait beaucoup à celle des années 30. Vous ne dissuaderez pas l’antisémite d’aujourd’hui d’être antisémite avec des notes en bas de page [raison probable de sa quasi-omission du sujet dans sa biographie de Maurras, de son mutisme complet dans sa notice]. De toute façon, celui-là n’achètera pas ces éditions avec appareillage critique. En revanche, elles peuvent permettre aux personnes désireuses de mieux comprendre ceux qui ont fait cette période de l’histoire. Lire Les Décombres de Rebatet, par exemple, est la meilleure manière de se mettre dans la tête d’un collabo. Censurer ces œuvres risque au contraire d’avaliser les thèses complotistes. Ce qui compte c’est la pédagogie et le décryptage. Arrêtons de penser que le public n’est pas mûr. »

Pourquoi choisir ce « personnage » (pour citer Jean-Noël Jeanneney sur Maurras) qui permettrait de « comprendre » les fascistes ou de « se mettre dans la tête d’un collabo »? Objectifs si préférables à l’étude des liens entre le « fascisme français » et ses bailleurs de fonds, français et allemands, avant la guerre et pendant, qui éclairent pourtant singulièrement le parcours et les activités de Rebatet, étoile de l’Action française et de Je suis partout, organe chéri de Maurras, tant avant la guerre que sous l’Occupation((En février 1941, date de reparution de Je suis partout, les RG recensèrent la liste des rédacteurs, dont Rebatet, tous liés à l’Action française, de cet « organe national et antisémite d’inspiration royaliste » d’avant juin 1940, RGPP, 7 février 1941, GA, R 6, Rebatet, APP (et supra).)). C’était adresser un salut à un de ses deux mentors des Commémorations, Pascal Ory, qui a honoré d’une préface la réédition en 2015, par Bénédicte Vergez-Chaignon des Décombres de Lucien Rebatet, texte ouvert sur la question : « Fallait-il republier ça ? »((Dossier Rebatet Les décombres ; L’inédit de Clairvaux Paris, Robert Laffont, 2015.)). Mais oui, il fallait absolument « republier » Rebatet, dont la carrière nazie d’après-guerre, fut, quoique plus discrètement qu’avant (pas pour les RG), presque aussi riche qu’avant la Libération((Sur ses activités politiques et journalistiques et des années 1950 à 1970 (grand maître de Rivarol, il « fai[sai]t partie du comité de rédaction de la revue Valeurs actuelles en qualité de critique musical en septembre 1970 », fiche RGPP manuscrite, sans date, GA, R 6, Rebatet, APP.)), et marquée par des campagnes antisémites coordonnées entre nazis français et ouest-allemands((Long rapport RGPP sur l’impressionnant déploiement antisémite-anticommuniste de 1959, où on retrouve Bardèche, Rebatet, Coston, Xavier Vallat, etc., et marqué en décembre par « la campagne antisémite qui a débuté le 25 décembre 1959 à Cologne […] et qui se manifeste principalement par l’inscription de slogans nazis sur les murs, a fait son apparition à Paris quelques jours après » : dans la nuit du 28 au 29décembre, « les façades de plusieurs magasins israélites » rue de Turenne « ont été recouvertes de croix gammées tracées à la peinture », comme en divers endroits des 3e, 4e, 12e et 15e arrondissements, 8 janvier 1960, GA, R 6, Rebatet, APP.).

La préface de Pascal Ory et l’œuvre « critique » de l’historienne qui chemine depuis plus de quinze ans entre la réhabilitation de Vichy, de Ménétrel à Pétain, l’exaltation des « vichysto-résistants », l’indulgence pour les épurés de Fresnes et pour Touvier sauvé par de charitables (présumés non-)réseaux catholiques, et l’indignation contre l’« l’épuration sauvage » des rouges barbares dans une France submergée par « des violences qui évoquent un pays en révolution, le terrorisme, les lynchages »((Vergez-Chaignon, citation, Histoire de l’épuration, Paris, Larousse, 2010, p. 321 sq. Dans l’ordre des mentions, Le docteur Ménétrel, éminence grise et confident du maréchal Pétain, Paris, Perrin, 2002; Pétain, Paris, Perrin, 2014; Les vichysto-résistants; Vichy en prison. Les épurés à Fresnes après la libération, Paris, Gallimard, 2006; L’affaire Touvier. Les révélations des archives, Paris, Flammarion, 2016.)) ont généré une avalanche de louanges personnelles et de soutiens à l’opportunité de l’initiative. Témoigne de ce double hosanna l’hommage rendu par l’hebdomadaire de « gauche » Télérama aux « historiens Bénédicte Vergez-Chaignon et Pascal Ory, qui ont magistralement établi le dossier intellectuel et politique accompagnant cette réédition. Ce livre, donc cette pensée, ce mouvement d’idées ne doivent pas être glissés sous le tapis de l’histoire au motif, parfois avancé, qu’ils seraient inopportuns, voire trop nauséabonds, à l’approche d’élections qui pourraient être profitables au Front national – mouvement, jusqu’à preuve du contraire, d’extrême droite. […] Rebatet est de ces écrivains dont la lecture rappelle que le fascisme d’hier inspire encore, quoiqu’on dise, un courant politique d’aujourd’hui, et ce, malgré les tentatives de blanchiment idéologique auxquelles il procède avec, il faut bien en convenir, un certain succès. », etc((Gilles Heuré, 10 novembre 2015, http://www.telerama.fr/livre/les-decombres-fallait-il-republier-lucien-rebatet,133824.php, et faire une recherche en ligne.)).

Notons que Pierre Assouline, (momentanément) déçu début 2018 que Gallimard eût été empêché de rééditer les pamphlets antisémites de Céline, avait le 13 octobre 2015 observé, en PS de sa recension aussi chaleureuse du 12 de la réédition de Rebatet : « Selon une information publiée par L’Express, les 5 000 exemplaires du premier tirage de ce Dossier Rebatet se sont vendus dès le premier jour. L’éditeur a aussitôt effectué un nouveau tirage. »((http://larepubliquedeslivres.com/rebatet-exhume-des-decombres/ )). Ce succès immédiat, ensuite considérablement amplifié, en France mais surtout en Allemagne (début janvier 2016), où la réédition de Mein Kampf, juste après, a également « fait un carton »((https://www.lesinrocks.com/2016/01/18/livres/pourquoi-la-reedition-de-mein-kampf-fait-un-carton-en-allemagne-11799009/)), n’a rencontré ni ici ni là un public en quête de « pédagogie et [d]e décryptage » et de garde-fous antifascistes. Cet « énorme succès » ne doit rien à « une simple curiosité historique ou citoyenne » mais tout à l’intérêt politique d’un lectorat ravi de recevoir d’« un grand éditeur » ce qu’il devait auparavant « se procurer sous le manteau »((Tribune d’Alya Aglan, Tal Bruttman, Éric Fournier et André Loez, janvier 2018 https://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20180105.OBS0211/edouard-philippe-annie-ernaux-sansal-luchini-pour-ou-contre-la-reedition-des-pamphlets-de-celine.html)). Vainement depuis 2015, quelques historiens mettent en garde contre ce « lot des rééditions idéologiquement rances, invitant à une réhabilitation quasi totale de Rebatet ou Céline… Untendance inquiétante »((Référence précédente, avec interview d’André Loez, faisant suite à une tribune signée par Loez, Bruttman, Johann Chapoutot, Fournier et Gérard Noiriel, le 15 octobre 2015, contre le projet de réédition commerciale par Fayard de Mein Kampf, https://www.nouvelobs.com/rue89/rue89-parti-pris/20151029.RUE1130/republier-mein-kampf-oui-mais-en-ligne.html)) qui n’avait pas inquiété le jury des commémorations de 2018.

Les Français avaient vraiment besoin de lire ou relire la prose de Rebatet, cet antisémite et anticommuniste aussi haineux, ordurier et frénétique((Rebatet est une vedette des fonds F7, W3, archives de Berlin, des AN, GA et PJ 40-45 (équivalents des fonds W3) des APP : voir sources de mes op. cit.)) que toute la cohorte à rééditer dont la liste ne cesse de s’allonger? Il leur fallait d’urgence « se mettre dans la tête » de celui qui se déchaînait quotidiennement contre les « judéo-bolcheviques » russes, et qui exalta d’emblée la croisade de la jeune Légion des Volontaires français contre le bolchevisme. Il en fut même un des fondateurs((Paris, tél. Abetz 2364, 8 août, W3, 355, AN, et RGPP, 11 juillet 1941, BA, 1914, Mouvement social révolutionnaire (MSR), 1939-1944, APP.)), mais, comme nombre de ses pairs, n’alla point se frotter à l’armée rouge (les crimes contre les juifs et les communistes de France, plus aisés, étaient seuls utiles à l’occupant)((Qui n’avait besoin de ces troupes, nulles sur le front de l’Est, que pour semer la mort en France, Élites, p. 67.)) : ses pairs d’Action française ricanaient à la mi-juillet 1941 sur celui qui incitait à partir pour le front russe et « s’était vanté “que s’il en avait un [fusil] il partirait”. […] Quelqu’un lui en a donné un », mais il n’a pas quitté Paris((RGPP, 15 juillet 1941, GA, R 6, Rebatet, APP.)). Les Français devaient absolument « comprendre » ce « “profiteur de la guerre” » comme le surnommaient janvier 1943 les « milieux de presse » qui opposaient son affectation de désintéressement à son tas d’or franco-allemand pour Les Décombres (les mêmes gains qu’engendrent les actuelles rééditions franco-allemandes) : il « a[vait] perçu, jusqu’à ce jour, environ 500 000 francs de droits d’auteur » pour « ce livre […] très demandé » dont seule « la pénurie de papier » avait limité « le tirage […] et [allait] percevoir […] une très forte ristourne » de sa traduction allemande((RGPP, 23 janvier 1943, GA, R 6, Rebatet, APP))

Au fait, qui s’enrichit de la réédition, en sus des éditeurs ?

  • B-Le Haut comité aux commémorations nationales de crise (2011) en crise (2018)

Si impatient de la réédition de Céline en 2018 après avoir soutenu celle de Rebatet en 2015, Pascal Ory ne fait que renouveler, comme son collègue Jean-Noël Jeanneney, la position qui a provoqué en 2011 la précédente crise du Haut comité : « l’inscription de Louis-Ferdinand Céline en 2011, dans le même calendrier […] avait déclenché [un] barouf » contre lequel Gégoire Leménager mit en garde le Landernau mondain le 26 janvier 2018((https://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20180125.OBS1238/la-france-doit-elle-celebrer-charles-maurras-en-2018.html)). Les deux mentors d’Olivier Dard ont le 28 janvier 2018 forgé un distinguo inédit entre commémoration et célébration dans une tribune du Monde : « Commémoration de l’écrivain antisémite Maurras : “Commémorer, ce n’est pas célébrer” »((http://www.lemonde.fr/idees/article/2018/01/28/commemorer-ce-n-est-pas-celebrer_5248372_3232.html#mSFWQBfChHEYxvbj.99; « Maurras. “Commémorer n’est pas célébrer”, un insupportable sophisme », Libération, 1er février 2018.)). Titre doublement trompeur : 1° « l’écrivain antisémite Maurras » n’a pas été ainsi qualifié par Olivier Dard, dont la notice a « glissé [cette caractéristique] sous le tapis de l’histoire »; le 23 mars 2018, interrogé par Emmanuel Laurentin sur l’absence de l’antisémitisme dans ce texte, Jean-Noël Jeanneney s’est d’ailleurs abstenu de répondre. 2° les deux contemporanéistes, déjà membres du Haut comité en 2011((J’ignore depuis quand, la liste des membres du HCCN n’étant publiée sur son site que depuis 2011 https://francearchives.fr/commemo/recueil-2011/39474.)), n’avaient pas invoqué ce distinguo quand il fut décidé de célébrer Céline via la notice d’un littéraire, et non d’un historien, le « professeur Henri Godard, remarquable spécialiste de l’écrivain » qui, selon G. Leménager, ne pouvait être « soupçonn[é] d’avoir occulté tel ou tel aspect du personnage dans ses travaux. »((https://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20110120.OBS6577/doit-on-celebrer-louis-ferdinand-celine.html; et https://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_Godard)).

Catherine Backès-Clément ne partageait pas cet avis((Citée infra.)) et on ne saurait douter de la célébration d’alors, revendiquée par l’« avant-propos » du ministre de la culture Frédéric Mitterand, et plus encore par la « préface » d’Alain Corbin, « membre du Haut comité des Célébrations nationales ». Ces deux seuls textes publics de 2011 anéantissent le distinguo de 2018 dans lequel un collectif d’historiens et d’autres intellectuels groupés autour de Tal Bruttmann a dénoncé « un insupportable sophisme »(( « Maurras. “Commémorer n’est pas célébrer”, un insupportable sophisme », Libération, 1er février 2018, http://www.liberation.fr/auteur/18300-un-collectif-d-historiens-professeurs-chercheur-militant-sociologue-et-scenariste.))

Frédéric Mitterand avait en effet ainsi conclu son « avant-propos » du « recueil » : au « service [de tous les personnages] et pour leur rendre hommage, les plumes les plus prestigieuses ont réécrit au fil de ces trois cents pages une histoire de France propre à charmer nos imaginations et nos esprits contemporains, propre à flatter, stimuler ou interroger les héritiers que nous sommes, de nature enfin à inventer ce que pourraient être nos lendemains. » Alain Corbin, autre contemporanéiste du HCCN d’alors, s’était enflammé dans ce texte (cité in extenso) :

« Il n’est pas facile mais il est passionnant d’établir une liste des individus dignes d’être célébrés; c’est-à-dire de ceux dont la vie, l’œuvre, la conduite morale, les valeurs qu’ils symbolisent sont, aujourd’hui, reconnues comme remarquables. Cela n’est pas facile car les ressorts de l’admiration possèdent leur histoire. Tel qui a été, un jour, célébré se trouve par la suite ignoré, disqualifié voire conspué. En revanche, tel qui a été longtemps oublié bénéficie, parfois, d’un renouveau de gloire. Plus précisément, l’estimation de ce qui justifie la célébration se fonde sur des représentations, souvent transitoires, du héros, du grand homme, de l’artiste, du savant voire du saint.

L’intérêt de ce volume résulte du rassemblement de ces figures successives. Comme chaque année, il s’agissait, pour le Haut comité, de les présenter toutes, grâce à la prise en compte de ce qui a pu, au cours des siècles, fonder l’admiration. C’est ce jeu entre la reconnaissance passée et ce qui justifie l’admiration actuelle qui sous-tend cet ouvrage. Les auteurs ont retenu ce qui, selon les modes d’appréciation qui se sont relayés ou qui se sont empilés, méritait d’être célébré et dont la mémoire devait être revivifiée.

De ce fait, la qualité de ce volume résulte de ce que les auteurs, en bons historiens, ont évité de se soumettre à l’immédiat pour reconnaître aussi les mérites de ceux qui, après avoir eu leur heure de gloire, commençaient sinon d’être oubliés du moins d’être victimes d’un déficit de mémoire. La liste ici présentée montre bien la diversité des modes de reconnaissance de la grandeur qu’il convient de prendre en compte et la nécessité de surmonter l’oubli par la célébration.

Afin de mieux me faire comprendre, je choisirai quelques exemples. Longtemps, des individus ont mérité d’être exaltés parce qu’ils se conformaient au modèle du héros plutarquien. Les défenseurs de la patrie, ceux qui s’étaient couverts de gloire grâce à de hauts faits militaires se devaient d’être célébrés. Depuis le milieu du XXe siècle, les mérites de ces hommes illustres tendent à ne plus guère être reconnus. Les saints, conformes à un modèle prégnant sur l’ensemble du territoire national durant des siècles, n’ont pas été considérés par la République comme dignes de beaucoup d’honneurs. Or, voici qu’ils retrouvent une présence sourde, grâce à l’emprise du compassionnel, à l’attention nouvelle portée au bienfait, au bénévolat, au dévouement. Le grand homme des Lumières, le philosophe, les promoteurs du progrès scientifique, utiles à l’humanité, les fondateurs de la République, à la fin du XIXe siècle, correspondent eux-mêmes à des modèles dont les récents sondages d’opinion révèlent qu’ils sont en net déclin dans les mémoires. Les grands artistes qui ont naguère – comme ce fut le cas sous le Consulat – fait l’objet, dès l’école, d’une injonction d’admiration ont, eux-mêmes, perdu de leur prestige.

Il convenait donc aux auteurs de ce volume de reconnaître la diversité des modèles et d’éviter toute exclusive, de montrer, en célébrant les anniversaires de 2011, toute la richesse mémorielle qui résulte du rassemblement des figures qui, au cours des siècles, ont mérité de survivre dans les mémoires. C’est là une façon de révéler, de proposer à l’admiration des jeunes générations des hommes et des femmes qui ont construit l’histoire nationale. En adoptant une optique compréhensive à l’égard du passé, en luttant de ce fait contre l’excès du présentisme qui constitue la grande tentation de notre société – laquelle, spontanément, ne sait plus guère exalter que ce qui échappe à la profondeur temporelle –, les auteurs de ce volume nous incitent à la réflexion sur ce qui fonde la commémoration et la célébration.

La saveur du livre résulte, en outre, de la découverte, au fil de cette navigation dans le temps, de la contiguïté d’hommes et de femmes dont les mérites furent différents mais tous incontestables. La célébration des anniversaires n’est pas qu’occasion de reviviscence du souvenir, elle permet aussi de repérer des simultanéités qui éclairent l’histoire des siècles passés. »((https://francearchives.fr/fr/commemo/recueil-2011/ et https://francearchives.fr/fr/commemo/recueil-2011/39472; souligné par moi. https://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20180125.OBS1238/la-france-doit-elle-celebrer-charles-maurras-en-2018.html)).

Une campagne de protestation, animée notamment par Serge Klarsfeld, ayant abouti dans les meilleurs délais à exclure du Grand livre le « modèle » Céline, Catherine Backès-Clément, théoriquement membre du Haut comité, fit le 22 janvier 2011 cette déclaration, un peu contradictoire (je souligne) mais finalement nette : « Je partage en tous points l’indignation de Serge Klarsfeld sur la célébration de Louis-Ferdinand Céline, décidée par le Haut Comité des célébrations nationales à l’époque où j’y siégeais (je n’ai pas reçu de convocation depuis plus d’une année). Tant que restent vivantes des victimes (dont je fais partie), une célébration officielle de Louis-Ferdinand Céline leur est insupportable. Ma mère me disait: “Tant qu’il n’y a que 20% d’antisémites en France, ça va.” Ce qui voulait dire, “cela ne menace pas nos vies”. Le nom de Céline me révulsant depuis plus de cinquante ans, je doute d’avoir approuvé cette décision sans mot dire. Suivant les règles de ce Haut Comité dans lequel chacun est libre de ses textes, je n’ai jamais pris connaissance avant publication d’un texte de présentation indulgent, et que j’aurais désapprouvé. En tout état de cause, je tiens à m’en désolidariser.»((http://www.lepetitcelinien.com/2011/01/le-nom-de-celine-me-revulse.html)). La « philosophe et écrivain » cessa d’être membre dudit Haut comité, où Pascal Ory et Jean-Noël Jeanneney se maintinrent. Le second a, le 23 mars 2018 sur France Culture invoqué l’« assez fétide » affaire Céline de 2011 sans autre précision , et admis qu’à cette date commémoration et célébration se confondaient. Si elle avait été si « fétide », et à but de célébration si limpide, pourquoi Pascal Ory et Jean-Noël Jeanneney n’ont-ils pas alors démissionné? C’est que, a avancé l’interviewé, le nouveau nom du Haut comité, relatif aux seules « commémorations nationales », était désormais « très clair ».

C’est donc ainsi « éclairés » que les deux piliers du « Haut comité » ont endossé la responsabilité de choisir Olivier Dard puis d’agréer sa notice, qu’ils avaient lue ou pas, « chacun [étant] libre de ses textes ». Que n’ont-ils conseillé au biographe de Maurras de modérer son admiration notoire pour « le maître » et de mentionner son antisémitisme entre l’Affaire Dreyfus et 1944 (ou au minimum, en 1936?). Et comment invoquer la simple liberté d’expression ou l’objectif scientifique quand l’interviewé du 23 mars a admis que sa mémorable présidence de la Commission du Bicentenaire de la Révolution française avait établi eu pour objectif de définir la Doxa sur l’événement : nous avons célébré « le 14 juillet » (1790, la Fête de la Fédération), « nous n’avons pas célébré la Terreur » [de 1793-1794].

Aveu intéressant, non seulement sur le but général de propagande des célébrations que M. Jeanneney anime depuis près de trente ans, mais aussi sur sa contribution personnelle à la liquidation de l’héritage progressiste de la Révolution française. Car il servit ainsi la vaste mission que s’était depuis les années 1960 fixée François Furet : « remettre en cause et remplacer l’histoire marxisante – qu’il appellera plus tard “jacobine” – de la Révolution », c’est-à-dire vouer à l’oubli le grand historien de la Révolution française Albert Soboul. Car celui-ci avait eu le grave tort de démontrer par les archives, comme ses prédécesseurs à la Sorbonne, Albert Mathiez et Georges Lefebvre, que la Terreur, par ses dispositions économiques et militaires c’est la proclamation du « maximum » des prix qui permit de nourrir les soldats français et rendit possible la « levée en masse » , avait sauvé la nation française en « guerre totale » de l’anéantissement promis par l’Europe aristocratique coalisée en vue de rétablir l’Ancien régime((Citation, William Serman, Jean-Paul Bertaud, Nouvelle histoire militaire de la France 1789-1919, Paris, Fayard, 1998, chap. 4, dont p. 93-94; Mathiez, La Révolution française, 3 vol., Armand Colin, 12e édition, 1963; Georges Lefebvre, La Révolution française, Paris, PUF, 1951; Soboul, Précis d’histoire de la Révolution française, Paris, Éditions sociales, 1962 (et leurs thèses d’État respectives).)) C’est cet objectif, non pas scientifique mais exclusivement politique et idéologique, qui a constitué le préalable à la croisade de Furet contre le communisme et l’URSS, comme l’a montré l’historien américain Michael Christofferson. ((Michael Christofferson, French intellectuals against the Left. The Antitotalitarian moment of 1970s, Oxford, Berghahn Books, 2004, Les Intellectuels contre la gauche, L’idéologie antitotalitaire en France (1968-1981), Marseille, Agone, 2009, 2014, p. 506-507 et index Soboul.)). À quel titre scientifique M. Jeanneney, spécialiste de « l’histoire politique, culturelle et des médias » de l’IEP, entre autres « président-directeur général de Radio France et de Radio France internationale de 1982 à 1986 » et lauréat de la troisième promotion, en 1983, des « French-American young leaders » (la première datant de 1981), avait-il été choisi pour édifier les Français sur l’histoire de la Révolution française, en évinçant ce qui avait représenté jusqu’à la décennie 1980 son principal courant historiographique ?((https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-No%C3%ABl_Jeanneney (longue liste de ses distinctions, notamment « européennes ») et https://frenchamerican.org/young-leaders/earlier-classes/1983/)).

  • C-Le bilan de la croisade occidentale contre les Lumières et contre la pensée progressiste

Il est bon que, comme en 2011, la complaisance ou l’admiration pour des criminels se soit heurtée en 2018 à un barrage. L’antisémitisme d’un Céline et d’un Maurras est encore partiellement tabou, mais la fragilité de ce barrage est éclairée par l’impatience à banaliser, via les rééditions, l’appel au meurtre, la haine, l’injure des intellectuels collaborationnistes. Impatience illustrée par le colloque « européen » de l’institut Iliade le 7 avril 2018, où Olivier Dard a rapporté sur « La culpabilisation, une arme politique », dans le cadre du thème général « En finir avec la culture de la repentance » que partageait avec lui l’africaniste « racialiste » Bernard Lugan((https://twitter.com/AbdelSansLeB/status/982554018697367554; https://twitter.com/search?q=%23ColloqueILIADE&src=tyah et https://fr.wikipedia.org/wiki/Bernard_Lugan)). Que se passera-t-il si disparaît le seul tabou actuel, l’interdiction de mettre en cause, sur le plan historique, la « destruction des juifs d’Europe » ou de six millions d’entre eux : c’est en France officielle le seul élément préservé de l’héritage historique et civique de mai 1945, puisque la Doxa « mémorielle », cette machine de guerre contre l’histoire, a balayé le reste d’une guerre d’attrition allemande qui a fait des dizaines de millions d’autres victimes près de trente en URSS, dont un sur les trois millions de juifs que le pays comptait.

Or la visibilité de la « question juive », écartée jusqu’aux années 1980 de la plupart des manuels d’histoire du secondaire, n’a gagné le droit à la reconnaissance historique pour des raisons ni scientifiques ni civiques ni « mémorielles » : seulement pour des motifs d’opportunité liés à la fois au plan des dirigeants des États-Unis de liquidation de l’URSS mis en œuvre dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale impliquant appui décisif sur l’Allemagne occidentale à réhabiliter en tous domaines et à leurs objectifs au Proche-Orient. Le sort des « juifs d’Europe » dans l’entre-deux-guerres ne les avait pas intéressés, pas plus que leur « destruction » de 1939 à 1945. Ils avaient même mis leur veto jusqu’au début des années 1960 à ce que les grandes organisations juives officielles, l’American Jewish Committee et l’American Jewish Congress, y accordassent publicité. Fort dociles, surtout la première, aux vœux du Département d’État, qui verrouillait leur incursion dans ce dossier « allemand » brûlant, elles avaient en revanche obtenu quartier libre pour accabler l’antisémitisme des Soviets, comme l’a vaillamment exposé Peter Novick en 1999((The Holocaust in American Life, Boston, Houghton Mifflin, 1991, traduit en français en 2001 L’holocauste dans la vie américaine, Gallimard, Paris, 2001; bibliographie anglophone in Lacroix-Riz, « L’apport des “guerres de Staline” de Geoffrey Roberts à l’histoire de l’URSS : acquis et débats », préface à Geoffrey Roberts, Les guerres de Staline, Paris, Delga, 2014, p. XI sq.))

Quels historiens, même parmi les courageux qui se dressent contre la célébration de Céline ou de Maurras, protestent contre l’exclusion ou la criminalisation pure et simple, depuis plusieurs décennies, de catégories autrefois pourvues d’un droit de cité scientifique? Les dernières décennies ont ici sonné le glas de l’étude des populations privées de tous moyens de défense tandis qu’explosaient les profits monopolistes. Leurs défenseurs ou porte-parole ont été soit évacués, soit transformés en purs bourreaux, des rouges vernaculaires (présumés judéo-bolcheviques) à l’URSS à laquelle est déniée jusqu’à sa contribution militaire à la défaite de l’Allemagne hitlérienne. Quels barrages contre la marée droitière vont subsister, au rythme effréné où l’historiographie dominante radicalisée « révise » tout et n’importe quoi, avec la complicité active ou passive de ses pairs, en piétinant les normes méthodologiques minimales? Après-guerre, un institut dont les fondateurs y avaient parfois un intérêt personnel direct a « glissé sous le tapis » le fascisme français et amorcé la réhabilitation de Vichy. Depuis l’ère Furet, la « culpabilisation » des Lumières et du progressisme et le matraquage antimarxiste et anticommuniste ont ouvert sur la « déculpabilisation » du nazisme et de sa « parole », que le très réactionnaire Wladimir d’Ormesson, oncle de feu Jean d’Ormesson, avait saisie dans « l’Église de France » dès 1951 : il décrivit alors au plus réactionnaire Robert Schuman (fidèle du camp intégriste depuis l’entre-guerres qui dut juger ce courrier quasiment bolchevique)((Sur Schuman, Lacroix-Riz, Aux origines du carcan européen, 1900-1960. La France sous influence allemande et américaine, Paris, Delga-Le temps des cerises, 2016, index.))l’offensive « intégriste » de l’ultra Pacelli, appuyé sur toutes « les têtes » sauves de l’Action française, des nazis allemands, des fascistes italiens, des franquistes, etc., qui, « après une période d’écrasement, [s’étaient] remises à penser presque tout haut » et ne songeaient qu’à « se venger […] des sanctions qui leur [avaie]nt été imposées » depuis la Défaite du Reich((Lettre d’Ormesson à Schuman, no 384, Rome, 26 juillet 1951, Saint-Siège 1944-1944-1960, 27, politique internationale, dossier général, janvier 1951-mai 1952, archives du ministère des Affaires étrangères, et Le Vatican, p. 652-653.))

Le biographe de Maurras et bientôt de Robert Brasillach, qui mène la guerre contre les « conspirationnistes » marxistes, communique dans un colloque tenu sous l’égide d’un ancien responsable du Front national, Jean-Yves Le Gallou, « président du groupe FN puis MNR au conseil régional d’Île-de-France de 1986 à 2004, et député européen de 1994 à 1999 », sur « La culpabilisation, une arme politique »((https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Yves_Le_Gallou; https://metamag.fr/2018/01/10/5eme-colloque-de-linstitut-iliade-le-7-avril-2018/; https://humanite.fr/sites/default/files/files/documents/du_dossier_maurras-olivier_dard_a_la_chasse_aux_sorcieres_wikipedia_france_0.pdf ; infra sur le colloque lui-même.)) Ceux qui revendiquent le monopole de la démocratie et prétendent lutter contre l’antisémitisme piaffent de voir sortir des presses le poison prétendument adouci par leur appareil « critique ». Le 5 avril 2018, Pierre Assouline, transmutateur de « collabos » avérés, tel Jean Jardin, en preux résistants, s’est réjoui de pouvoir bientôt « signer la préface [des…] six [et non plus trois] pamphlets antisémites de l’écrivain Louis-Ferdinand Céline », munis d’« un appareil critique » (le sien?). Car, par bonheur, a-t-il annoncé, « la maison d’édition Gallimard “n’a pas fait marche arrière” sur la publication controversée des pamphlets de Céline », « projet » qu’elle n’avait « le 11 janvier [que] suspend[u]. » Et l’heureux préfacier s’est, réclamé sur Céline, comme l’avait fait Jean-Noël Jeanneney le 23 mars sur Maurras, de la quasi-approbation du projet de Gallimard par Emmanuel Macron au nom de de la liberté d’expression((http://www.cicad.ch/node/24143/, et entretien du 23 mars 2018 cité sur France Culture)) – prise de position utilisée selon les besoins de leur cause respective par les deux intéressés((Le président a en effet déclaré « qu’’il ne fallait “pas occulter la figure de (Charles) Maurras » mais après avoir félicité Klarsfeld de son veto contre la réédition des pamphlets de Céline, et « estimé que “les auteurs de textes antijuifs pourraient s’en donner à coeur joie si les pamphlets de Céline étaient réédités et légitimés par un éditeur prestigieux” », https://www.lexpress.fr/actualite/politique/au-diner-du-crif-macron-se-prononce-contre-une-reedition-des-pamphlets-de-celine_1990636.html; puis « écart[é] toute accusation de censure : “Il n’y a pas dans notre pays de police mémorielle et morale des éditions dans le sens où je dirai : “j’interdis la publication de ces écrits” », https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/0301391658725-au-crif-macron-affiche-sa-volonte-de-sattaquer-a-la-cyberhaine-2159416.php)) Cette référence significative de l’absence d’indépendance de l’historiographie dominante, souligne, au terme d’une affaire Maurras aussi « fétide » que l’affaire Céline de 2011, deux caractéristiques de l’historiographie dominante française :

1° son mépris de plomb des sources originales qui non seulement ne ternit pas le renom des spécialistes d’histoire contemporaine concernés mais constitue une condition sine qua non de leur prestige, l’important étant de ne jamais flétrir l’image irénique de nos classes dirigeantes, en n’en parlant point.

2° l’étroitesse de ses liens avec les gens « d’en haut », des ministres aux grands patrons, des institutions « européennes » aux « témoins » : l’histoire contemporaine, objet de premier plan de l’« information » médiatique de la population, exerce son magistère sous la tutelle des autorités. Cette discipline a toujours été liée à l’État, assurément, mais elle a dans les dernières décennies abdiqué ce qui restait de son « indépendance méthodologique ».

On ne peut que se féliciter de la démission de dix des douze membres du Haut comité aux commémorations nationales, vu l’usage de ce dernier. Cette bonne nouvelle n’apaisera pas la progression effarante de l’extrême droite qui, prétendument combattue sur le terrain électoral, notamment en vue du second tour des élections présidentielles de 2017((Où nombre d’institutions et associations académiques ont dicté leur vote aux universitaires et criminalisé leur éventuelle abstention : références impossibles ici, vu la marée.)), se déploie en tous lieux « culturels ». Les rééditeurs obstinés de la prose fasciste jurent qu’ils ont pour unique objectif de mieux informer le peuple français de ses périls, grâce à l’appareil « critique » dont l’affaire Olivier Dard-Maurras vient de démontrer la valeur. Qu’ont-ils à dire sur l’opportunité de promouvoir la pensée progressiste issue des Lumières (marxisme inclus) traitée depuis vingt ans en pestiférée éditoriale ? ((Traduction de The age of extremes d’Eric Hobsbawm, L’histoire contemporaine, p. 36; « Entretien libre » n° 5, Le Media, 26 février 2018, https://www.youtube.com/watch?v=c7_KzTgM7LM)) Ils ne trouvent manifestement pas d’intérêt dans la réédition d’ouvrages aussi explicites sur le fascisme français et son rôle dans les années 1930 et 1940 que ceux de Robert Soucy, désormais interdits d’accès au public francophone; et le Veni, vidi, Vichy du grand ambassadeur Raymond Brugère, « seul diplomate » démissionnaire le 17 juin 1940, jour de la demande d’armistice, gaulliste de la première heure dont de Gaulle fit son premier secrétaire général du Quai d’Orsay en septembre 1944((Duroselle Jean-Baptiste, L’Abîme 1939-1945, Paris, Imprimerie nationale, 1982, p. 187, et ma note 53 supra.)). Les lecteurs de France seraient pourtant ainsi autrement mieux informés sur les périls du fascisme en général et du fascisme français en particulier.

Les choses étaient plus claires, en 1952, où « une employée de longue date aux éditions Grasset », dont le chef, Bernard Grasset, avait été le champion autoproclamé de la Collaboration, fit savoir en 1952, sans l’émouvoir, au ministre de la Justice : « M. Grasset » nous a annoncé qu’il mettrait en œuvre, « dès que son dossier en justice sera[it] définitivement classé »; « deux collections », 1° « les “écrivains du courage” », qui comportera des textes choisis de Rebatet, Brasillach, Bardèche, Maurras, [Alphonse de] Châteaubriant, Céline, etc. », 2° « un livre important tenu secret ici sur les “crimes de la Résistance”. Mais le titre et le préfacier ne sont pas encore connus. M. [René] Malliavin, qui signe Michel Dacier dans les Écrits de Paris, se tient à cet effet en rapports constants avec M. Grasset et M. Guiral, son collaborateur qui était à Gringoire. […] Il n’y a rien qui puisse amadouer des hommes comme M. Maurras, M. Grasset ou M. Massis. » ((Lettre anonyme au ministre de la Justice [Léon Martinaud-Déplat] d’« une employée de la maison », Paris, 23 avril 1952, BB/18/7118, dossier 8 BL 507 R, société des éditions Bernard Grasset, petit dossier 1952-1955, AN, fautes de frappe corrigées. Document original reproduit en annexe, avec la couverture du dossier. Sur Malliavin, Action française, collaborationniste au « rôle important dans la propagande secrète d’Inter-France » (rapport de la DRGSN, février 1945, déjà cité, F7, 15296, DRGSN, AN), et Anne Grynberg, « Des signes de résurgence de l’antisémitisme dans la France de l’après-guerre (1945-1953) ? », Les Cahiers de la Shoah, 2001/1, no 5, p.171-223, Lacroix-Riz, Choix, Munich, et Élites, index (Agence) Inter-France.))

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Commentaire recommandé

degorde // 17.05.2018 à 08h59

Excellent rappel et nécessaire bien sûr. Résumons tout d’un mot : la French American Foundation est l’école de la trahison.

35 réactions et commentaires

  • anatole27 // 17.05.2018 à 08h39

    En parlant de la promotion 1983 de la FAF, et en sus de Jeannenay, s’y trouvait également Alain Minc qui tient des propos discourtois (cf 24s) sur notre président

    https://www.youtube.com/watch?v=w4zFA3oH5dY

    S’y trouvait aussi François Henrot (celui qui dit que Macron à appris les techniques de manipulation de l’opinion cf 1min08s)

    S’y trouvait Christine Ockrent (ECFR) Jean-Marie Colombani (ex le monde) et la grande Hillary Rodham Clinton celle qui fit bombarder la Lybie et prononca la phrase Hillarante (jeu de mots):
    we Came, We Saw, He Died

    https://www.youtube.com/watch?v=syUV7nlbXs8

    Comme la vérité historique prime sur le propos on précisera que dans cette promotion 1983 de la FAF se trouvait également Wesley Clarke, ce général conspirationniste (l’était il vraiment) qui disait que dix jours après le 9/11 l’administration américaine envisageait de prendre le contrôle de l’Irak , la Syrie , le Liban , la Libye , la Somalie , le Soudan et l’Iran …

    https://www.youtube.com/watch?v=9RC1Mepk_Sw

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    • degorde // 17.05.2018 à 08h59

      Excellent rappel et nécessaire bien sûr. Résumons tout d’un mot : la French American Foundation est l’école de la trahison.

        +16

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  • Sandrine // 17.05.2018 à 11h00

    Effrayante et lucide constation.
    C’est une action qui est menée sur tous les fronts, pas seulement dans la sphère intellectuelle. La série diffusée sur France 3 pendant plus de 5 ans « Un village français » et qui a été encensée par JM Jeanneney dans son émission Concordance des temps sur France culture pour sa « qualité » historique est la traduction pour le grand public de ce que dénonce ALR dans ce texte.
    La dernière saison diffusée à l’automne dernier, en plus d’être catastrophique sur le plan cinématographique (beaucoup plus bâclée que les premières, visiblement) est impressionnante de complaisance pour les collabos et d’une virulence incroyable par rapport aux communistes.

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    • degorde // 17.05.2018 à 16h54

      Tout à fait d’accord avec vous, encore que cette ultime saison est centrée sur les ambiguïtés des personnages. Maintenant il est vrai qu’il y a un brin de complaisance avec les collabos et un gros mensonge sur l’attitude du PC à cette époque. L’épisode de la grève de la scierie soutenue par le PC local est une pure falsification. Elle est facilement détectable par qui connaît l’histoire du PCF entre la libération et 1947. Pas étonnant quand on sait que supervisait le scénario Jean Pierre Azéma. Dans des saisons précédentes il a trouvé le moyen de nous servir la fable des vichysso-résistants.

        +3

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      • Sandrine // 17.05.2018 à 19h05

        La saison qui traite de la déportation des juifs en 42 est également assez hallucinante.
        On y découvre que l’ensemble de la population française, collabos et résistants compris (jusqu’au personnage totalement abracadabrant de Hortense, la maîtresse « a-politique » du tortionnaire de la gestapo qui est prête à se sacrifier pour sa domestique juive au point de risquer de partir en déportation à sa place…), toute la population française de l’epoque, donc, aurait été scandalisée par la déportation des juifs et aurait fait tout ce qui était en son (maigre) pouvoir pour en atténuer les effets (même le chef de la police et le préfet paraissent totalement consternés par ce qu’on les oblige à faire … ces deux personnages se montreront d’ailleurs particulièrement stoïques et héroïques au moment de leur procès et de leur exécution)

          +2

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  • caliban // 17.05.2018 à 11h26

    Mme Lacroix-Riz semble régler des comptes personnels avec des l’institution universitaire.

    Je trouve vraiment dommage qu’elle jette le soupçon sur les historiens impliqués, les accusant d’être des réactionnaires (= anti-lumière) et faisant ainsi dévier le débat sur la plan politique au lieu de le cantonner à celui initial du traitement des archives.

    Car la question « que faut-il faire des textes antisémites » des écrivains français n’est finalement pas traitée comme si cela ne faisait pas débat, ou comme si le débat était sciemment mis sur la table par la seule volonté d’historiens réactionnaires.

    Or la question se pose au moins pour deux raisons aujourd’hui :
    • l’accès à ces textes est ou sera très facile via internet. Et sans l’indispensable appareil critique.
    • les textes en question tombent dans le domaine public, des maisons d’édition seront tentées d’en faire commerce

    Dans les faits, légiférer est extrêmement compliqué. Personnellement je crois que couper des arbres pour coucher sur papier les saloperies de Céline & Co devrait être interdit. En revanche, il me semble compliqué d’interdire la diffusion de ces textes sur le web (ils sont déjà présents) et la difficulté ira croissante avec le temps, lorsque la Seconde Guerre mondiale sera un pur objet d’Histoire et plus du tout objet de Mémoire.

    ps : je note que « bien pire » (si tant est qu’on puisse échelonner les ignominies) est diffusé par la Bibliothèque nationale, en libre accès : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6815z/f1.item

      +8

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    • Sandrine // 17.05.2018 à 12h49

      Mais la question n’est pas la publication mais la commémoration. Comment ne pouvez-vous pas voir que c’est très différent !

        +7

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    • caliban // 17.05.2018 à 12h58

      @Sandrine

      Titre de l’article : « III. – De l’urgence de la réédition des « collabos » au rôle du Haut comité aux commémorations nationales de 2011 à 2018 »

      Mme Lacroix-Riz estime en joignant les deux qu’il y a une lente dérive historiographique tendant à « réhabiliter » les collaborationnistes. C’est son opinion, qu’elle a bien entendu le droit d’exprimer et d’argumenter.

      Cependant en mêlent les questions elle politise le débat. Et cela nuit à mon avis à la compréhension des enjeux, celui du traitement des archives :
      • quel accès pour le public
      • quel avenir pour ces « objets » une fois que l’Histoire aura pris le pas sur la mémoire

        +3

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      • ben // 17.05.2018 à 14h39

        Pourquoi dites-vous que politiser le débat nuit à la compréhension des enjeux ? Il n’y a pas que la question des archives dans cette affaire. La question est bel et bien politique. Et la dérive historiographique est patente. On pouvait rester simple observateur de cette dérive, déjà perceptible à l’époque de la commémoration du bicentenaire de la révolution française, mais il devient urgent d’alerter sur la banalisation des idées d’extrême-droite quand des historiens mondains et universitaires médiatiques estiment que des criminels comme Maurras font partie du patrimoine. Or, cette offensive politique ne se fait pas dans un contexte de démocratie apaisée, si on pense cela c’est qu’on est complètement déconnecté des réalités sociales et de l’Histoire immédiate, particulièrement en Europe. Mais je ne crois pas que ce soit le cas. Ces évènements se produisent car il y a une convergence d’intérêts (personnels et collectifs) à côté d’une inertie politique.

          +8

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      • caliban // 17.05.2018 à 19h09

        @ben

        « Et la dérive historiographique est patente. »
        Je ne crois pas du tout que ce constat, qu’il soit patent ou imaginaire, aille au fond du sujet.

        La question du traitement / de la diffusion des archives « sensibles » ne peut pas être traitée de manière bénéfique en l’ouvrant par des querelles de clochers universitaires. C’est un débat sur lequel j’attends de la part des Historiens des arguments un peu plus solides et moins caricaturaux.

        Qu’ils nous parlent :
        • du processus conduisant de la Mémoire à l’Histoire
        • de l’impact des technologies de l’information sur l’accès au savoir
        • de la vulgarisation de la discipline historique

        La quête d’objectivité devrait être le moteur de la science historique. Mme Lacroix-Riz me paraît l’oublier dans cet article. Dommage car cette commémoration « foireuse » de Maurras était une bonne occasion d’en discuter sérieusement.

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        • Sandrine // 17.05.2018 à 21h15

          En l’occurrence, avec « cette commémoration foireuse de Maurras » comme vous dites, il est question d’aller de l’histoire à la mémoire et non l’inverse…
          et cela dans l’optique, affichée et revendiquée, de (re)-construire un «roman national ».
          Avec ce comité des commémorations, la science est mise au service de la politique ; de manière assumée en plus.

            +5

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        • caliban // 18.05.2018 à 01h49

          @Sandrine

          Critiquer la politisation du débat tel que le pose Mme Lacroix-Riz ne signifie pas que j’approuve les « conneries » de ce Comité de commémoration. Et j’admets sans difficulté que ce Comité par son statut « officiel » qui le lie au Ministère de la Culture est une plus grosse connerie encore.

          Je me répète au cas où il s’agisse d’une incompréhension de votre part :
          01 • accuser ses confrères historiens de réactionnaires (voire de révisionnisme collaborationniste) n’est pas la bonne méthode pour traiter du sort des archives sensibles. Mme Lacroix-Riz prêche un discours politique (elle a tout à fait le droit) mais ne traite pas la question.
          02 • le débat pourrait utilement déboucher sur des propositions concrètes quant à la publication papier ou à la diffusion web, quant à l’accès (indispensable) pour les étudiants de fac, etc.

          Je regrette simplement l’occasion manquée d’un débat serein.

          Notez que le débat avait déjà été posé il y a quelques années avec Céline, sans réelle avancée puisque nous y revoici avec Maurras. C’est qui le prochain sur la liste à polémiquer ?

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          • Sandrine // 18.05.2018 à 06h51

            Je ne suis pas d’accord, ALR tranche le débat: elle dit que la publication de ces textes n’est pas nécessaire car ils sont déjà largement disponibles sur le net et dans les bibliothèques pour les étudiants et les chercheurs.
            Ce avec quoi je suis entièrement d’accord.
            A quoi bon republier? Pour que des gens puissent avoir le plaisir d’exiber dans leurs bibliothèques personnelles ces ouvrages sulfureux aux côtés de Victor Hugo et de Platon? Pour que leurs enfants puissent y avoir un accès privilégié ? Pour pouvoir consulter à leurs heures ces textes et se persuader de leur caractère attrroce? Pour pouvoir plus facilement les prêter à leur amis? Non vraiment, tout ceci ne me parait pas souhaitable. Pourquoi pas restaurer les films national-socialistes allemands et les ressortir en salle comme on l’a fait récemment avec certains films (je pense à « Portier de nuit ») pendant qu’on y est… après tout les films de propagande nazis, c’est aussi de l’art!!

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          • caliban // 18.05.2018 à 12h13

            @Sandrine

            J’ai bien du mal à me faire comprendre je crois.

            Mon propos est de pointer que de politiser la question des archives antisémites n’est pas la bonne méthode.

            Le discours de Mme Lacroix-Riz est bien rodé :
            • assumer d’emblée son axe communiste afin de désamorcer toute critique de subjectivité
            • affirmer son ultra-compétence archivistique

            … mais dans le fond, Mme Lacroix-Riz semble régler des comptes personnels avec l’institution universitaire et deux de ses représentants. Un Historien est bien entendu libre de polémiquer mais il y a mieux à faire sur le sujet. D’autant que le sujet est récurrent, tous les 5 ans environ.

            Notamment sur le non-dit qui crève les yeux dans cette affaire : les textes en cause ont tous trait à l’antisémitisme de la première moitié du XXe siècle. Cela pose énormément de question sur cette mémoire qui « se cramponne », qui se refuse à l’Histoire. Ce que ces épisodes Céline, Maurras, … nous enseignent c’est un passé qui ne passe pas.

            Il y a un « cadavre dans le placard », c’est à mes yeux bien plus tangible que la supposée réaction « anti-lumières » de certains universitaires. Mais c’est encore une fois un débat manqué. Peut-être au prochain épisode si un historien a le courage de mettre les pieds dans le plat et pas à côté.

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            • Sandrine // 18.05.2018 à 15h30

              Je suis d’ accord avec vous par rapport à la « posture » de ALR. J’ai d’ailleurs régulièrement été déçue par la lecture de ses ouvrages où elle affirme beaucoup et démontre finalement assez peu (en dépit de toutes les notes de bas de page).
              La, où je ne suis pas d’accord avec vous, c’est pour rejeter d’un revers de main les critiques que fait ALR par rapport à l’historiographie contemporaine : il est incontestable qu’il y a actuellement en France, concernant l’histoire, une sorte d’hégémonie culturelle, représentée par une certaine interprétation, je n’irai pas jusqu’à dire anti-lumières, mais au moins anti-marxiste.
              Et personnellement, entendre Macron citer Celine dans ses discours, je trouve que cela témoigne d’une dérive très préoccupante (ça va plus loin que le simple anti-marxisme…)

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            • Sandrine // 18.05.2018 à 16h32

              Quand au débat au sujet de ce passé qui ne passe pas, il a lieu parfois à la dérobée… Mais certains se dérobent plus que d’autres.
              Concernant l’existence d’un fascisme en France, il y a eu le débat Milza-Sternell largement médiatisé. Par exemple, cette émission de Réplique:
              https://www.franceculture.fr/emissions/repliques/lhistoire-et-lavenir-du-fascisme-en-france
              Concernant l’antisémitisme de Vichy, là aussi un assez grand débat il y a quelques années qui a eu pour conséquence un certain nombre de lois mémorielles (très controversées, et dont la controverse a été relayée dans les médias)
              Concernant la défaite de 40 et le rôle des élites françaises (spécialité de ALR), en revanche, un silence de plus en plus assourdissant vu la polémique que cela suscite dans les réseaux sociaux. J’ai entendu une fois JM ; Jeanneney dans son émission « Concordance des temps » (que je suis depuis très longtemps) dire « il faudra un jour qu’on fasse une émission sur la défaite de 1940 »… Mais depuis j’attends toujours… ALR a été invitée une fois il y a longtemps au téléphone sonne pour un débat contradictoire à de ce sujet, mais l’émission n’est plus podcastable (https://www.franceinter.fr/emissions/le-telephone-sonne/le-telephone-sonne-28-mai-2010)

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            • caliban // 18.05.2018 à 20h10

              @Sandrine,

              « je n’irai pas jusqu’à dire anti-lumières, mais au moins anti-marxiste. »
              > la critique du marxisme en Histoire a été virulente dans les années soixante et il y avait de réelles raisons à cela. Les historiens d’inspiration « marxistes » (pour aller vite) se focalisaient sur les données matérielles et les séries chiffrées. Ce travail a été très utile à l’élaboration de la connaissance historique mais il montrait alors ses limites par un ensemble d’angles morts qui échappait à ses filets (je pense notamment aux apports de l’anthropologie alors en plein essor)
              > une autre critique était adressée à ces historiens marxistes, celle de pratiquer une histoire téléologique et finaliste (lutte des classes comme moteur de l’histoire, interprétation du passé en fonction du présent, …)
              > depuis, la critique vis-à-vis de l’historiographie marxiste est bien moins virulente, ses apports son reconnus

              Mme Lacroix-Riz confond (ou plutôt fait semblant de confondre)
              • la remise en cause de la valeur scientifique d’une approche marxiste de l’Histoire
              • et les oppositions politiques au communisme

              D’ailleurs, je ne vois nulle part dans sa méthode, qu’elle présente comme purement archivistique, une trace d’histoire marxiste. Son originalité en tant qu’historienne est d’être communiste et de lire l’histoire selon ce point de vue particulier. Cela explique peut-être pourquoi elle voit si facilement des réactionnaires parmi ses collègues.

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            • Sandrine // 18.05.2018 à 21h27

              @caliban
              MLR a peut-être une « déformation » idéologique qui la pousse à voir des réactionnaires partout, n’empêche que les idées contre-révolutionnaires type Action française progressent en ce moment en France. Pas plus tard que ce soir, j’ai trouvé ça sur le site de France Culture :
              https://www.franceculture.fr/emissions/hashtag/les-mandats-sont-trop-courts-pour-mener-des-politiques-le-roi-cest-la-continuite

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  • Lysbeth Levy // 17.05.2018 à 13h18

    Toujours a propos de Maurras, Olivier Dard et Annie Lacroix Riz qui s’est apperçu qu’elle « gênait » et elle aussi accusé de « mot favori » d’un certain « chasseur » de complot, voici ce qu’elle en dit : http://www.librairie-tropiques.fr/2018/04/rudy-reichstadt-et-olivier-dard-sont-dans-un-bateau.html
    Etrange, le pourfendeur de l’extrêmisme/complotisme/antisémitism, en tout genre se trouve allié d’un pro-maurassien justement accusé par l’Histoire et les vrai-e-s chercheurs en Histoire. L’intrusion innoportunne de l’intrigant tente de phagocyter diverses associations ou Mme Riz à ces entrées, elle a reçu une curieuse invitation : http://www.librairie-tropiques.fr/2018/03/annie-lacroix-riz-a-recu-une-curieuse-invitation.html Elle aussi remarque que Wikipedia est sous influence et que des « petites mains » douteuses ré-écrivent son CV et surtout l’Histoire …On attends la suite de l’affaire …

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    • Alfred // 17.05.2018 à 14h18

      Incroyable. Ou prévisible (si l’on se souvient d’un philosophe français en gogette à Kiev il n’y a pas si longtemps). La marque noire de l’accustion d’antisémitisme est une arme intelligente et sélective. Certains seront touchés et d’autres pas. C’est exactement ce qui rend chaque jour cette accusation plus caduque. C’est surtout ce qui fait que si son usage malhonnête se poursuit il arrivera un moment où d’aucuns crânes de piafs la porteront comme un titre de gloire (meme sans l’être, au même « rang » que populiste ou complotiste), alors qu’elle n’est pas de même nature! Pour ne pas que cette accusation devienne un totem « antisysteme » dénué de sens il faut absolument que mrs reichstad et bhl répondent de leur collusion avec de vrais antisémites. Merci donc de permettre de mettre ce malhonnête monsieur devant ses responsabilités.
      (Pour être honnête je pense que certains pompiers pyromanes sont d’une telle duplicité que cette confusion qui s’annonce ne les dérange pas bien au contraire. )

        +9

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      • Mr K. // 18.05.2018 à 06h22

        BHL soutenant des nazis à Kiev : c’est la danseuse légère de la farce humanitaire se produisant au théâtre aux armées…

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  • Perret // 17.05.2018 à 13h59

    Très intéressant et bien documenté (c’est le cas de le dire !) mais avec un bémol sur les catholiques. Classer Robert Schuman, démocrate chrétien soumis à toute les dérives romaines y compris pendant le concile de Vatican 2, parmi les catholiques « intégriste », n’est cohérent que si on donne au mot le sens médiatique qu’il a, c’est à dire rien de cohérent avec la réalité. Les « intégristes » sont en fait issus des « catholiques intégraux », mouvance assez large des alentours des années 1900 et opposée au modernisme. Schuman était beaucoup plus proche des modernistes que des « intégristes ». A plusieurs reprises dans ses textes, Annie Lacroix-Riz donne l’impression de ne pas comprendre les courants catholiques.
    Cela dit, je ne comprends toujours pas pourquoi les textes d’Annie Lacroix-Riz ne font pas l’objet d’un débat entre universitaires et chercheurs. Peut-être est-ce parce que la nouvelle génération d’historiens ne sait pas ce que sont les archives ?

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  • Fred // 17.05.2018 à 19h32

    Franchement pas intéressant.
    J’en peut plus de tous ces fétichistes de l’antisémitisme dont Berruyer semble faire partis.

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  • Nietil // 17.05.2018 à 19h54

    Il y a un problème avec les notes de bas de page, je pense …

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  • Mr K. // 18.05.2018 à 06h20

    Série d’Annie Lacroix-Riz passionnante et lumineuse.

    @ Caliban : NON, Annie Lacroix-Riz ne règle pas des comptes personnels avec l’institution universitaire.

    Pour preuve, ce qu’elle décrit dans le milieu historiographique français c’est produit très largement dans la société française depuis l’après guerre et se produit encore.
    La French American Fondation citée dans le texte, même si elle est plus récente, est très significative de ces actions extérieures systématiques américaines dans les champs culturels, politiques, médiatiques, étatiques… par l’intermédiaire de français biberonnés et favorisés par l’empire. On retrouve l’équivalent en Allemagne, Italie,…, en fait dans tout les pays sous une forme ou une autre.

    Si je me souviens bien, Emmanuel Todd résumait très schématiquement ainsi les progrès démocratiques :
    – l’Angleterre a inventé les libertés individuelles (Magna carta, Habeas corpus),
    – les États-Unis la démocratie, mais raciale (réservée aux blancs),
    – la France la démocratie égalitaire, par la révolution de 1789.

    Cette révolution égalitaire française, qu’on le veuille ou non, a quand même dans ses conséquences produit, favorisé, promu un champ large d’idées théoriques émancipatrices.

    Sacré paradoxe, la France coloniale formant dans ses universités les futurs cadres indigènes qui allaient faire sauter les colonies.

    La révolution égalitaire française inspirant les mouvements émancipateurs dans le monde, cela n’est pas, comme de plus en plus on veut nous le faire croire, une blague franco-française.
    En Amérique du sud par exemple, l’arrière cour des USA (doctrine Monroe 1823), elle a inspiré bien des mouvements.

    Notre époque est bien l’aboutissement d’un mouvement général impulsé par les anglo-saxons et particulièrement les USA, par lequel les inégalités se creusent comme jamais dans la période moderne.

    Pour maintenir ces inégalités et continuer à les faire croître il faut bien simultanément faire disparaître l’idée, les moyens d’émancipation et faire grossir le bâton.

    Faire sauter « les lumières » en les politisant au maximum, c’est y travailler activement. La très grande majorité de la population française en pâtira de plus en plus…

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    • caliban // 18.05.2018 à 12h41

      @Mr K

      Une partie de vos propos reprennent ce que vous dénoncez, la construction d’un « roman national ».
      Celui que vous voyez se construire actuellement – réactionnaire et anti-lumière – ne vous plaît pas parce qu’il va à l’encontre du roman national que vous chérissez. Il y a beaucoup de mythologie là-dedans. Il en faut certainement pour « cimenter » une société. Mais ce n’est pas le rôle des historiens de la propager, bien au contraire ils doivent nous aider à repérer les mythes qui se succèdent.

      Vous réfutez le fait que Mme Lacroix-Riz règle des comptes personnels avec l’université. C’est pourtant le cas, c’est sa marque de fabrique et ce qui lui permet de se faire une place dans le champ des historiens.

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      • Mr K. // 18.05.2018 à 13h32

        @ Caliban
        Les compléments que j’ai placé dans mon commentaire plus bas (18.05.2018 à 12h52),permettent de mieux discerner le mouvement d’ensemble, dans lequel s’inscrit parfaitement de mon point de vue ce qu’a présenté Annie Lacroix-Riz dans ses billets. Roman national ou faits?

        1- Hô Chi Minh, figure majeure du Vietnam se formant politiquement en France avec des compatriotes, dont « les idéaux sont ceux de la révolution française ».
        La déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen de 1789 elle existe ou pas?
        Alors « Roman national », comme vous dites?

        https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%B4_Chi_Minh

        Extrait : « Il se rapproche aussi d’autres émigrés vietnamiens, nationalistes comme lui, qui veulent s’émanciper de la France : Phan Châu Trinh qui l’initie au métier de retoucheur de photos, Nguyễn Thê Truyên, un ingénieur, Phan Văn Trường, un avocat et Nguyễn An Ninh, un écrivain journaliste. Ensemble ils sont connus comme « les cinq dragons » ; le chef du groupe est Phan Châu Trinh, leurs idéaux sont ceux de la Révolution française. »

        2- Lorsque dans le documentaire « Apocalypse, la deuxième guerre mondiale », la bataille de Smolensk (ville sur le chemin de Moscou) qui dure trois semaines n’existe tout simplement pas : falsification politique de l’histoire ou simple question de « roman national »?

        3- Lorsque vous écrivez « Celui que vous voyez se construire actuellement – réactionnaire et anti-lumière – ne vous plaît pas parce qu’il va à l’encontre du roman national que vous chérissez. », vous vous trompez lourdement.
        Vous projetez possiblement sur moi votre manière de voir qui me semble être issue d’une « pensée par blocs ». L’esprit verrouillé définitivement dans « un camp », on s’interdit bien des possibilités d’enrichissement et donc de compréhension plus large.

        Je suis pour l’équilibre, la conservation de l’intégralité des courants d’après révolution de 1789, qui sont constitutifs de notre « large roman national » si vous voulez, mais surtout de la richesse de ce que l’on peut penser, donc concevoir…

        4- Votre dernière sentence sur Annie Lacroix-Riz est indigne.
        Mme Annie Lacroix-Riz mise au banc de l’université par ses recherches universitaires iconoclastes aurait donc prévu à l’avance l’invention d’internet, seul média qui lui a permis de se faire connaître, et sacrifié sa carrière universitaire, « pour se faire une place dans le champ des historiens » ? Euh, vous maintenez ce que vous avez écrit?

        J’attends votre avis sur les quatre points ci-dessus.

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        • caliban // 18.05.2018 à 15h22

          1. A propos du « roman national »
          L’Histoire produit nécessairement un récit, et quelles que soient les précautions et les efforts des Historiens (qui sont parties prenantes mais pas les auteurs exclusifs), ce récit est truffé de mythes. C’est cette caractéristique mythique, dont les contours évoluent avec les siècles, qui assure la cohérence d’une société. Par exemple le triptyque de la devise républicaine contient trois principes qui selon les époques (et les personnes) revêt des significations différentes : c’est un mythe. Cela ne signifie évidemment pas qu’il soit privé de puissance performative, bien au contraire, tout comme les religions, il agit concrètement sur le réel bien des siècles après sa fondation.

          2. Je ne vois pas de quoi vous parlez

          3. Voir considérations plus haut à propos du roman national, qui fluctue nécessairement avec le temps. L’Histoire n’est pas figée, c’est un récit qui évolue en fonction de celui / de l’époque qui regarde le passé.

          4. Mme Lacroix-Riz a toute sa place dans la discipline historique. Elle est une historienne communiste, mise à l’écart en raison de cette prise de position politique. Aujourd’hui :
          • elle en tire un (modeste) avantage auprès d’auditoires sceptiques (j’aurais bien écrit « critiques » au lieu de sceptiques mais je crois constater qu’il y a beaucoup d' »inconditionnels » sans vrai recul critique)
          • elle me semble régler des comptes avec les historiens / personnalités qui eux ont eu une reconnaissance officielle. Cela n’ôte rien à sa sincérité, mais quand elle dénonce une historiographie réactionnaire / anti-Lumières, rien ne nous oblige à prendre cette thèse pour argent comptant.

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          • Mr K. // 18.05.2018 à 20h00

            1- Vous ne répondez pas du tout à l’exemple que je propose.

            2- Plus largement, des faits historiques de la seconde guerre mondiale placés unanimement au crédit de l’URSS à une époque, ont été au fil du temps, pour des raisons idéologiques et politiques, minimisés, voir tout simplement tus ou supprimés. Je pense qu’avec le billet récent suivant vous voyez de quoi je parles?

            https://www.les-crises.fr/la-fabrique-du-cretin-defaite-nazis/

            Et dieu sait que je conchie Staline et tout ses successeurs, ainsi que le système soviétique. Simplement on peut essayer honnêtement de faire passer la véracité de faits avant ce qui nous fait plaisir.

            3- Quelles platitudes, c’est du remplissage, vous ne vous êtes pas foulé…

            4- A mettre à votre crédit l’apparition d’un « elle me semble » régler des comptes dans votre propos. Cela n’efface pas la fin de votre commentaire très limite de 12h41 ci-dessus, montre sans doute d’une réaction épidermique bien loin de la Raison.

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    • Mr K. // 18.05.2018 à 12h52

      Compléments :

      – Michael Christofferson professeur d’histoire contemporaine à Adelphi University (New York), cité dans le texte d’ALR.

      Il parle dans cette vidéo en français de son livre issu de sa thèse de doctorat, « Les intellectuels français contre la gauche »,1968 – 1981(Agone, 2014) ou comment le débat d’idée en France a été fortement orienté :

      https://www.youtube.com/watch?v=-0psdDa_qzc

      Un passage sur « les nouveaux philosophes » permet de mieux comprendre les phénomènes « type BHL ».

      – Frances Stonor Saunders, journaliste et historienne britannique.

      Auteure de « Qui mène la danse?: la CIA et la guerre froide culturelle » (Denoël, 2003) ou l’infiltration par la CIA des milieux artistiques et intellectuels occidentaux à partir de 1947 pour l’orienter politiquement par ses financements. Par exemple promouvoir et favoriser un art abstrait inoffensif politiquement.

      Raymond Aron payé régulièrement par la CIA, cela devrait faire l’effet d’une bombe en France. Figure majeure du débat d’idée en France dans les années 50 et 60, il a été en particulier éditorialiste au quotidien « Le Figaro » pendant trente.

      «  […] De considérables moyens humains et financiers furent employés pour utiliser la littérature, la musique, l’art et la presse comme armes idéologiques privilégiées en faveur des Etats-Unis. Les manipulations furent plus ou moins licites, plus ou moins apparentes de Raymond Aron à Jackson Pollock, en passant par Arthur Koestler, Ignazio Silone et Igor Stravinski,… »

      Vidéo en anglais de l’auteure présentant son livre :

      https://www.c-span.org/video/?157308-1/the-cultural-cold-war

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      • Sandrine // 18.05.2018 à 14h09

        Merci MrK pour ces compléments.
        @Caliban : « ce n’est pas le rôle des historiens de propager un roman national» dites-vous. Sans doute. Mais l’histoire, comme les autres sciences humaines ne peut jamais être totalement neutre.
        De plus, ALR ne milite pas pour qu’on interdise de parole des historiens comme O.Dard. Elle demande juste un rééquilibrage du temps de parole.
        Mais comme le montrent les ouvrages cités par Mr K, ce n’est clairement pas l’objectif d’un certain nombre de grands de ce monde.
        Leur objectif est bien plutôt d’utiliser la culture (dont les sciences, y compris les sciences dites naturelles) comme médium de leur idéologie.

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  • Riboul // 18.05.2018 à 08h42

    Très interessant car très documenté. On peut voir comme l’extrême droite est mise en réserve « au cas ou » en la banalisant au maximum par une partie des élites actuellement au pouvoir. Ceux qui bafouent au pouvoir tous les jours un peu plus la démocratie se réservent la possibilité de la faire disparaitre.

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    • Sandrine // 18.05.2018 à 14h29

      Macron dans un de ses derniers discours cite Giono, Chateaubriand…et Celine, figurez-vous! Et dans le même discours, il critique le « post-modernisme »… ainsi que les petits -bourgeois européens engourdis dans leur confort qui ont perdu le sens du tragique (je ne retrouve pas les références exactes malheureusement).
      Moi je trouve que tout cela a des accents très fascisant. Et ça ne peut pas être fortuit. Une manière de récupérer l’extremse-droite? Ou une façon de préparer les esprits pour de nouvelles « réformes » brutales ?

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  • Seraphim // 19.05.2018 à 14h57

    Julian Assange est sur le point de se faire livrer aux Anglais par l’ambassade de l’Equateur à Londres, Craig Murray se fait confisquer son compte Facebook parcequ’il dit d’Israël une vérité si simple « c’est un état raciste pratiquant l’apartheid », la guerre gronde de partout, mais Olivier Berruyer s’intéresse à… Charles Maurras! ! Par goût littéraire ? La bonne blague! Pour bien nous rappeler, comme la cohorte mainstream, que les Français sont coupables, foncièrement antisémites. Comme si cette litanie n’était pas assez répétée depuis 60 ans!

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  • Nanker // 24.05.2018 à 11h41

    « Pascal Ory était une nouvelle fois intervenu sur une question qui le taraude depuis plusieurs années, comme nombre d’éditeurs et d’intellectuels français : la réédition de la littérature collaborationniste, antisémite, anti-rouges, anti-métèques d’avant-guerre et d’Occupation en général »

    Hier soir était diffusé sur la Trois un documentaire (assez médiocre) sur Mai 68 vu par les étudiants de droite… Déjà il fallait comprendre « d’extrême-droite » ensuite on nous présentait ces gens comme de gentils jeunes un peu agités car en rébellion contre l’apathie de la majorité des Français moyens et surtout comme des victimes des méchants Rouges hantant les campus français.

    Et qui était crédité au générique au titre de « conseiller historique »? Un certain Pascal Ory!
    Décidément « il est partout » ce Ory…

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