Des citations révèlent les craintes existentielles qui ont poussé Israël à frapper, les plans pour tuer Khamenei, les efforts pour amener Trump à bombarder un site nucléaire fortifié et les différends sur le ciblage des raffineries de pétrole.
Source : The Times of Israel, Michael Bachner
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises
Un reportage diffusé dimanche a fait état de nombreuses citations de dirigeants et de hauts fonctionnaires israéliens avant et pendant les 12 jours de guerre contre l’Iran, mettant en lumière les motifs des frappes nocturnes extraordinaires du 13 juin qui ont déclenché la guerre, les espoirs que les États-Unis interviennent pour détruire les installations souterraines de Fordo, les tentatives pour assassiner le guide suprême Ali Khamenei et ainsi déstabiliser le régime de Téhéran, ainsi que les tentatives pour faire fuir les habitants de Téhéran.
Channel 13 news a publié ces informations dans le cadre d’un reportage qui sera diffusé dans son intégralité mardi soir (16 septembre) et qui sera accompagné d’une interview du Premier ministre Benjamin Netanyahou, dont certains extraits ont été publiés par la chaîne dimanche. Elle n’a pas précisé comment elle avait obtenu les transcriptions des réunions à huis clos les plus secrètes.
Le 12 juin, le cabinet de sécurité s’est réuni en secret dans un bunker situé dans la région des Monts de Judée. Netanyahou a déclaré au début de la réunion : « Nous nous trouvons à un tournant historique, et nous avons une décision cruciale à prendre. Si nous ne les arrêtons pas, dans quelques années, ils auront en leur possession des dizaines de milliers de kilogrammes d’explosifs [nucléaires]. L’Iran a déjà enrichi des matières fissiles à un niveau suffisant pour fabriquer huit ou neuf bombes, et il travaille à la fabrication d’armes. Si nous n’agissons pas, nous ne serons tout simplement plus là. Nous porterons un coup sévère au commandement et au contrôle, nous toucherons des scientifiques de haut niveau et d’autres éléments. Que Dieu nous aide. »
« Ils sont sur le point de devenir la deuxième puissance en matière de missiles balistiques. Une fois que nous aurons détruit certains de leurs sites et de leurs scientifiques, les négociations en vue d’un accord se dérouleront dans une réalité différente. Nous avons des discussions marathon depuis de nombreux mois. ». Un haut responsable militaire dont le nom n’est pas précisé a déclaré aux ministres que l’un des objectifs de l’opération était de créer les conditions permettant d’empêcher Téhéran de se doter d’armes nucléaires à long terme et de « renforcer l’équilibre stratégique d’Israël ».
Seuls les États-Unis peuvent bombarder Fordo
Ce haut responsable a indiqué que les objectifs comptaient également la « destruction » de l’installation nucléaire iranienne de Natanz, le ciblage de personnes responsables du programme nucléaire et la frappe des sites de conversion de l’uranium enrichi en noyau métallique de la bombe. « À Téhéran même, nous frapperons de nombreuses cibles de différents types, car il s’agit d’un point névralgique iranien », a-t-il déclaré lors de la réunion. Il a ajouté : « Fordo ne sera détruit que si les États-Unis l’attaquent. »
Le site nucléaire de Fordo était enfoui sous une montagne, et seuls les États-Unis possédaient les énormes bombes de type « bunker buster » capables de pénétrer dans le site fortifié. Il a également prévenu : « L’hypothèse de base est qu’à la fin de l’opération, l’Iran possédera encore du matériel enrichi. Dans les premiers jours, ils seront en mesure de lancer des centaines de roquettes en direction d’Israël. ». Ce même responsable a mis en garde contre les conséquences sans précédent pour le front intérieur israélien, estimant qu’au moins plusieurs dizaines de cibles israéliennes seraient touchées avec précision par des ogives de grande taille, et que de plusieurs dizaines, allant à plusieurs centaines seraient touchées par des ogives légères.
Mais il a également mis en garde sur le fait que la guerre devrait finalement trouver une solution diplomatique. « Les succès opérationnels ne suffiront pas et devront être complétés par la diplomatie », a-t-il déclaré. Un haut responsable des services de renseignement aurait déclaré : « Nous préparons depuis des années des opérations inattendues. Certaines visent les missiles sol-sol, [en plus] d’une opération de renseignement visant à perturber les activités ennemies, notamment celles visant à déstabiliser le régime. »
Ronen Bar, chef du Shin Bet, a déclaré qu’Israël se préparait à une éventualité de mouvements de contestation parmi les Arabes israéliens dans les villes mixtes judéo-arabes.
La réunion s’est terminée par un vote unanime pour approuver l’opération qui a été lancée à 3 heures du matin le vendredi 13 juin, avec une série d’attaques surprises contre les défenses aériennes, les scientifiques nucléaires et les chefs militaires de l’Iran. En Israël, les sirènes ont retenti dans tout le pays en prévision d’une riposte massive de missiles iraniens qui n’a finalement eu lieu que plusieurs heures plus tard.
Continuez à chercher le leader
Après la frappe initiale de la nuit, les ministres et les chefs de la sécurité se sont de nouveau réunis le vendredi 13 juin. Les efforts des ministres ont porté principalement sur l’obtention de l’aide des États-Unis, à la fois par la fourniture d’avions ravitailleurs qui permettraient aux avions israéliens de poursuivre leurs attaques sur des cibles éloignées et en persuadant le président américain Donald Trump de donner son feu vert à une attaque américaine sur Fordo. Le ministre des Affaires stratégiques, Ron Dermer, a déclaré lors de la réunion que lors de sa conversation téléphonique avec Trump, Netanyahu avait « incité et influencé » Trump à prendre la décision d’envoyer des avions ravitailleurs pour soutenir les frappes israéliennes.
Quant à la question de savoir si Washington allait frapper Fordo, Dermer a déclaré qu’il avait l’impression que Trump penchait en faveur d’une telle action, « mais en choisissant le bon moment ». Le ministre de la défense, Israël Katz, a déclaré que le secrétaire de la défense américain, Pete Hegseth, lui avait dit que des disposiitons étaient prises pour envoyer les avions de ravitaillement, qui sont finalement arrivés quelques jours plus tard. « Je lui ai expliqué en quoi il était important de frapper Fordo », a ajouté Katz.
Le chef d’état-major des forces de défense israéliennes, Eyal Zamir, a déclaré que les premières frappes avaient été couronnées par des « résultats extraordinaires », ajoutant que l’opération était en avance sur les plans et que d’autres frappes seraient menées le lendemain. « Tout peut être fait très rapidement. Si les États-Unis coopèrent avec nous, nous pouvons frapper dans les 48 heures. L’Iran est ébranlé par les frappes », a-t-il déclaré, ajoutant que l’Iran avait procédé à « un nombre réduit de tirs [de missiles] par rapport à nos prévisions. ». Le chef du parti Shas, Aryeh Deri, a exhorté l’armée à s’en prendre également aux officiers qui avaient été désignés pour remplacer ceux qui avaient été tués lors de la première vague de frappes, ainsi qu’à frapper de leurs tirs les bâtiments de la radiotélévision d’État iranienne et le quartier général de la police secrète.
Bien qu’il n’ait pas été déclaré publiquement comme un des objectifs de la guerre, les transcriptions démontrent clairement qu’Israël cherchait également à déstabiliser le régime et même à tuer le guide suprême Ali Khamenei. Le ministre des finances, Bezalel Smotrich, a déclaré qu’Israël devait « continuer à chercher le leader », faisant référence à Khamenei, dont Katz a déclaré plus tard que Jérusalem cherchait à le tuer, mais que l’occasion ne s’était pas présentée.
Le samedi, lors d’une réunion d’un petit nombre de ministres du cabinet de sécurité, Netanyahou a affirmé que « l’essentiel » était de frapper Fordo et de « créer un énorme rapport de force et de terreur » avec l’Iran. Il a ajouté que les priorités étaient de mettre le feu aux dépôts de carburant à Téhéran, de s’efforcer de tuer les hauts responsables qui avaient remplacé ceux qui avaient été assassinés et d’œuvrer à l’élimination de Khamenei.
Netanyahou a également déclaré que des secteurs et des quartiers entiers d’Iran devraient être évacués, et qu’Israël devrait s’efforcer de déstabiliser le régime islamique. Selon lui, une frappe sur Fordo représenterait un double succès : la destruction complète du programme nucléaire et, « si Khamenei réagit à une frappe américaine, cela pourrait signifier la fin du régime ». « Fordo permet de mettre fin à la guerre rapidement. Si l’Iran continue de nous attaquer, Trump voudra de toute façon en finir », a-t-il déclaré.
Précisant qu’à ce stade, il y avait 224 morts et 1 300 blessés en Iran, Zamir a déclaré que les objectifs de la guerre pourraient être atteints dans les cinq ou six jours à venir, mais qu’Israël pouvait encore faire davantage. « Jusqu’à présent, nous nous sommes occupés du commandement à l’ouest et maintenant nous allons passer au commandement au centre », a-t-il déclaré, faisant référence aux opérations de l’armée de l’air pour détruire les lanceurs de missiles et la défense aérienne de l’Iran à l’ouest de l’Iran, puis au centre de l’Iran, ce qui a permis aux avions de chasse israéliens d’opérer librement dans le ciel de Téhéran.
Infrastructures civiles
Les ministres ont débattu de l’éventualité de frapper des infrastructures civiles telles que des raffineries de pétrole, après avoir lancé des avertissements enjoignant les populations voisines de s’enfuir. Selon Katz, « la relocalisation de la population est pratique et symbolique. Nous devrions frapper les infrastructures nationales civiles qui déstabilisent le leader ».
Dermer n’est toutefois pas d’accord : « Si nous attaquons des infrastructures civiles maintenant, la guerre pourrait prendre fin avant que nous n’ayons atteint nos objectifs et avant qu’il y ait une attaque contre Fordo. Khamenei est désorienté mais déterminé et c’est un fanatique religieux. Comme Nasrallah, il pense que nous sommes une société faiblarde ». « Ils travaillent d’arrache-pied pour remobiliser leurs proxys. Le Hezbollah refuse toujours de se joindre au mouvement et, par conséquent, [l’Iran] a intérêt à faire preuve de force », a répondu Katz, invitant les participants à la réunion à accepter le fait qu’Israël ne serait pas en mesure de mettre fin à la guerre avant vendredi.
Khamenei est un fanatique obstiné. S’ils capitulent, il perdra l’œuvre de sa vie. Je suis favorable à la fin de ce conflit, mais seulement à condition que nous réglions la question de Fordo et quelques autres points. Mais cela ne dépend pas de nous, nous devons donc faire face à la situation telle qu’elle est. Si l’Iran continue de prendre pour cible nos civils, nous détruirons des dizaines de bâtiments après avoir évacué la population civile. Il y a des cibles militaires à Téhéran au milieu de la population. Si les gens fuient Téhéran, ce sera une victoire », a déclaré Katz.
Toutefois, il a prévenu que si Israël ne ciblait pas actuellement des infrastructures civiles, cela pourrait changer si les missiles iraniens visaient des infrastructures israéliennes. « Si [l’Iran] cible des centrales électriques, nous n’aurons aucun état d’âme. Nous attaquerons les infrastructures civiles immédiatement, même s’il s’agit de cibles que nous préfèrons garder pour plus tard », a-t-il déclaré. Zamir, à son tour, a assuré que Tsahal « se préparait à intensifier l’attaque tout au long de la semaine avec une frappe sur Natanz, une attaque à Fordo et des attaques à Téhéran ». « Il est difficile de saisir l’ampleur de notre succès en Iran. Plus de 120 lance-roquettes ont été détruits et au moins 80 ne fonctionnent plus », a-t-il déclaré
Un responsable des services de renseignement dont nous ne savons pas le nom a ajouté qu’Israël avait également commencé à cibler le commandement central de l’Iran la veille, ce qui s’est traduit par une diminution des attaques iraniennes et une augmentation des interceptions israéliennes. Dermer a assuré les personnes présentes à la réunion que les États-Unis seraient « entièrement déployés en défense sous les 48 heures », dans la mesure où Trump avait renforcé les forces américaines dans la région. Toutefois, le ton a semblé changer au sein des responsables de la défense lundi, lorsqu’ils ont commencé à exhorter les participants à une réunion à réfléchir à terminer la guerre, s’attirant ainsi les foudres de Netanyahou.
« Arrêtez de parler de mettre fin à la guerre », a grondé Netanyahou. « Il n’y aura rien de tel. Nous n’avons pas terminé et il faut en finir. La guerre se poursuivra aussi longtemps qu’il sera nécessaire pour atteindre nos objectifs. Nous sommes sur le point de remporter la victoire. Vous dites que nous n’avons plus de cibles, quel message envoyons-nous à nos ennemis ? Et donc le porte-parole de Tsahal dit qu’il faut en finir ? Il y a une politique. Agissez en conséquence. Nous continuerons jusqu’à ce que nous ayons atteint nos objectifs. La population ici est très forte. »
Le reportage complet de Channel 13 devrait révéler d’autres citations concernant la frappe directe de l’Iran sur le centre médical Soroka de Beersheba et la pression exercée par Israël sur Trump pour qu’il frappe Fordo. L’Iran a riposté aux frappes israéliennes en lançant plus de 500 missiles balistiques et environ 1 100 drones sur Israël. Les attentats ont fait 31 morts et plus de 3 000 blessés en Israël, selon les autorités sanitaires et les hôpitaux. Au total, 36 missiles et un drone ont frappé des zones peuplées, causant des dommages à 2 305 maisons dans 240 bâtiments, ainsi qu’à deux universités et un hôpital, et déplaçant plus de 13 000 Israéliens.
Source : The Times of Israel, Michael Bachner, 15-09-2025
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises
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1 réactions et commentaires
La France est complice, puisqu’elle approuve.
Qui ose rappeler ces paroles, vieilles de 25 ou 30 siècles, et venues de là-bas, « tu ne convoiteras pas, tu n’accuseras pas, tu ne tueras pas » ?
Moïse, reviens ! ils ont tout oublié, ils sont devenus fous…
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