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Mensonges et légitimation dans la construction nationale en Ukraine (2005-2010)

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  1. Un révisionniste ukrainien à la Sorbonne ce week-end + ACTION
  2. Volodymyr Viatrovich : l’historien qui blanchit le passé historique de l’Ukraine, par Josh Cohen
  3. Mensonges et légitimation dans la construction nationale en Ukraine (2005-2010), par Delphine Bechtel

Source : ELH Revues, Delphine Bechtel, Octobre 2012

Résumé

Depuis son indépendance, et surtout à partir de la présidence de Viktor Iouchtchenko, l’Ukraine s’est construit un nouveau grand récit historique, appelé à fonder la grandeur héroïque de sa nation. Le mensonge ici se décline en un déni du caractère multiculturel de sa population (aux dépens en particulier de ses composantes juives et polonaises) et, concernant la part de l’Ukraine dans les événements de la Seconde Guerre mondiale, en un révisionnisme alimenté par la propagande nationaliste précédemment développée par un certain nombre d’intellectuels de la diaspora.

Plan

– La construction d’un récit nationaliste galicien en Ukraine occidentale
– L’historiographie comme entreprise étatique : les stratégies de légitimation scientifique de l’OUN/UPA
– La présidence Iouchtchenko, un passé difficile à effacer ?
  • 1 L’historiographie ukrainienne est celle d’une nation jeune, en pleine construction, dont l’histoire est discontinue et fortement liée à l’histoire russe, polonaise et, pour certaines régions, autrichienne, hongroise, tchécoslovaque, etc. Depuis l’indépendance, en 1991, les historiens s’évertuent à produire un grand narrative de la nation, la faisant remonter, en l’absence de véritable continuité chronologique, géographique et étatique, à la Rous’ kiévaine, puis à la principauté de Galicie, passant ensuite aux Cosaques zaporogues, aux deux tentatives éphémères d’indépendance en 1918-1919, et enfin à l’invasion allemande de l’URSS en juin 1941.
  • 1 C’est ainsi qu’on appelle en russe la Seconde Guerre mondiale.
  • 2 David Marples, Heroes and Villains : Creating National History in Contemporary Ukraine, Budapest/Ne (…)

2Cette production historiographique a pris naissance dès le tournant des années 1990 dans le berceau du nationalisme ukrainien, à Lviv, la capitale de l’Ukraine occidentale, avant de s’étendre progressivement au centre du pays et à la capitale, Kiev. Durant la présidence de Viktor Iouchtchenko (2005-2010), notamment, a été menée jusque par les plus hautes instances du pouvoir une relecture de l’histoire dont le but était, face à l’ancienne épopée soviétique de la « Grande Guerre patriotique1 », de créer un récit de l’histoire nationale fondé sur des stratégies d’héroïsation et de victimisation2 des seuls Ukrainiens ethniques et occultant la composante multiculturelle du pays, et de retracer les « efforts de libération » et de construction de l’État ukrainien. Cela n’est pas allé sans un certain révisionnisme, concernant notamment les périodes sombres de l’histoire, comme la Seconde Guerre mondiale.

La construction d’un récit nationaliste galicien en Ukraine occidentale

  • 3 Delphine Bechtel, « Lemberg/Lwów/Lvov/Lviv : identités d’une “ville aux frontières imprécises” », D (…)

3Depuis les années 1990, les intellectuels et les édiles de Lviv, capitale de la région historique de Galicie (l’ancienne Lemberg autrichienne, puis la Lwów polonaise de l’entre-deux-guerres), ont entrepris de réinventer le passé de leur région. L’appellation « Galicie », tombée en désuétude sous l’ère soviétique, a été réinvestie avec une réactivation folklorique du mythe habsbourgeois (ouverture de cafés « viennois », marques de produits alimentaires faisant référence à la tradition « galicienne »). Ce particularisme s’est exprimé notamment à travers la revue Yi (nommée d’après la lettre ï, qui distingue l’alphabet ukrainien de l’alphabet russe), dirigée par Taras Vozniak et financée par la Fondation Heinrich Böll, qui a défendu dans les années 2000 une version douce du nationalisme local, consacrant plusieurs numéros tant aux conflits qu’à la réconciliation polono-ukrainienne et judéo-ukrainienne. Vozniak veut œuvrer en faveur d’une intégration rapide de l’Ukraine à l’Europe et a soutenu l’idée de faire de Lviv la « Strasbourg de l’Europe centrale de l’Est » et la capitale culturelle d’une Ukraine tournée vers l’Occident3.

4Dans cette région, berceau du nationalisme ukrainien, rurale et ukrainophone (contrairement à l’est du pays, industriel et russophone), gréco-catholique (contrairement à l’Est orthodoxe) et nationaliste (contrairement à l’Est, culturellement plus lié à la Russie), les fidèles de l’OUN (Organisation des nationalistes ukrainiens), mouvement ukrainien terroriste, fasciste, xénophobe et antisémite fondé en 1929, et de sa branche combattante l’UPA (Armée insurrectionnelle ukrainienne) se réveillent. Le parti UNA-UNSO (Assemblée nationale ukrainienne / Organisation national-socialiste ukrainienne), parti nationaliste ouvertement pronazi qui s’est renommé Svoboda (Liberté) après sa dissolution en 2004, et ses sbires bottés brandissant des drapeaux rouges et noirs évoquant les couleurs nazies défilent régulièrement lors des manifestations locales. Son leader, Oleh Tiahnybok, également élu député en 2002 au sein de la coalition Notre Ukraine de Iouchtchenko, dont il est l’un des soutiens, mène régulièrement campagne avec les slogans « L’Ukraine aux Ukrainiens » et « Dehors les Moscovites et les Juifs ».

  • 4 Aux élections locales de 2010, le parti Svoboda a obtenu entre 20 % et 30 % des voix en Galicie et (…)

5Depuis les élections locales de 2009 et 2010, Svoboda dispose d’une influence déterminante dans les conseils régionaux de Lviv et de Ternopil4, tandis que les discours et les thématiques nationalistes ont gagné droit de cité dans toute la région. D’autant qu’un certain nombre de députés de l’ancienne UNA-UNSO siègent désormais sous l’étiquette d’autres partis, comme Andriy Shkil, réélu plusieurs fois député de Lviv dans le Bloc Ioulia Tymochenko. Cette radicalisation de la vie politique locale et l’acceptabilité croissante des thèses nationalistes extrémistes se sont vite traduites par la décision des conseils municipaux de la région de renommer des rues en l’honneur de nationalistes ukrainiens de l’OUN/UPA et d’ériger des monuments à ces leaders fascistes, impliqués dans la purification ethnique de la Galicie (les massacres de Polonais en 1942-1943 en Volhynie et en Galicie, ainsi que la collaboration avec les nazis dans l’anéantissement des Juifs).

6Ainsi, le musée d’Histoire de la ville de Lviv présente depuis 2006 une exposition dédiée aux « efforts de libération du peuple ukrainien » qui glorifie en réalité les bataillons Nachtigall et Roland, composés d’Ukrainiens embrigadés par les nazis, qui ont marché sur Lviv en juin 1941 en portant l’uniforme de la Wehrmacht, et la division SS-Galizien, constituée de volontaires ukrainiens ayant prêté serment à Hitler en 1943. Les théoriciens du fascisme ukrainien, tel Dmytro Dontsov, ainsi que les leaders de l’OUN/UPA, notamment Stepan Bandera et Roman Shukhevytch, deux fascistes et criminels de guerre notoires, sont célébrés à Lviv comme des figures de la quête d’indépendance ukrainienne. Relèvent particulièrement de la désinformation et du négationnisme les changements délibérés des légendes qui accompagnent les photos historiques et les objets exposés : les appellations allemandes ont disparu au profit de traductions ukrainiennes anodines, et le terme « SS » est carrément supprimé. Ainsi les bataillons Nachtigall et Roland apparaissent désormais sous la dénomination « Division des nationalistes ukrainiens », tandis que la division SS-Galizien devient l’inoffensive « Première Division ukrainienne », faisant croire à l’existence d’une armée ukrainienne indépendante des nazis. L’uniforme exposé a de surcroît été expurgé des galons, têtes de mort et insignes SS, tandis qu’une mention en petits caractères indique qu’il s’agit d’une « reconstitution ». C’est tout le passé collaborationniste de l’Ukraine que l’on cache ici aux visiteurs, afin de rendre acceptable l’héroïsation de criminels de guerre ayant collaboré avec les nazis.

Vitrine du musée d’Histoire de la ville de Lviv
Uniforme de la SS-Galizien sans les galons et insignes de la SS, présenté comme une « reconstitution ».
À l’arrière-plan : affiche de propagande antisoviétique et antisémite de 1943, publicité en ukrainien pour l’enrôlement dans la SS : « Venez combattre le bolchevisme dans les rangs de la Division galicienne ».
© Delphine Bechtel, 2007

  • 7 Parallèlement, une véritable invention de l’histoire héroïque nationale se met en place, comme le démontre le complexe mémoriel inauguré en 2007 au cimetière Lytchakiv, à Lviv. Dominant l’ancien cimetière des défenseurs polonais de Lwów morts en combattant les indépendantistes ukrainiens en 1918-1919, les autorités locales ont construit un immense mausolée, avec un ensemble de stèles commémoratives aux « combattants pour la liberté » de l’Ukraine, ceux de 1918-1919, puis de 1941-1945 comme le bataillon Nachtigall et la SS-Galizien. Cette dernière est commémorée par une tombe du soldat inconnu, la seule au monde qui soit dédiée à un soldat de la SS5.

Stèle à la mémoire de la division SS-Galizien, cimetière Lytchakiv, Lviv
Inscription visible sur cette face de la colonne : « 1re Division “Galicie” ». Le mot « SS » a disparu de l’appellation.
© Delphine Bechtel, 2007

Tombe du soldat inconnu de la division SS-Galizien, cimetière Lytchakiv, Lviv
Inscription : « Ici repose un combattant inconnu de la Division “Galicie”, qui a donné sa vie pour la liberté du peuple ukrainien à la bataille de Brody en juillet 1944 ». La division SS-Galizien est ici commémorée comme unité ayant combattu l’Armée rouge, notamment à travers la bataille de Brody (petite ville de Galicie, à 80 % juive à l’époque – c’est la ville natale de Joseph Roth), où l’armée allemande encerclée subit une cuisante défaite.
© Delphine Bechtel, 2007

  • 8 Comme dans les manuels d’histoire récents, on cherche à accréditer les « dates clés » de la construction de l’État ukrainien : l’éphémère indépendance de 1918-1919, puis l’« Acte du 30 juin 1941 », par lequel Yaroslav Stetsko, un des dirigeants de l’OUN proche de Bandera, proclama l’indépendance – proclamation inattendue et annulée une semaine plus tard par les nazis6.

9S’inscrivant davantage dans la tradition du martyrologe, des monuments commémoratifs aux victimes des persécutions staliniennes ont été dressés devant les prisons des rues Zamarstynivska et Lonskoho, où le NKVD avait fait abattre plus de 3 000 détenus en juin 1941, juste avant l’invasion allemande. Les Ukrainiens ethniques y sont montrés comme les seules victimes du stalinisme, alors que les déportations et la soviétisation forcée ont touché en premier lieu les élites polonaises et les Juifs. Plus encore, nulle part ne sont mentionnés les pogromes sanglants du mois de juillet 1941, perpétrés notamment par la milice et les nationalistes ukrainiens, qui ont fait près de 7 000 morts à Lviv, justement sur le terrain de ces mêmes prisons, et plusieurs dizaines de milliers en Ukraine occidentale.

  • 7 Rossolinski-Liebe, art. cit. (notre traduction).

10Si la ville de Lviv a pu être justement caractérisée à la fois de « jungle mémorielle » et de « palimpseste mémoriel7 » au vu de la valse des monuments qui a accompagné les nombreux bouleversements étatiques qu’elle a traversés, elle est aujourd’hui placée sous le signe d’une ukrainisation de plus en plus radicale et d’une politique de commémoration sélective, voire délibérément tronquée.

L’historiographie comme entreprise étatique : les stratégies de légitimation scientifique de l’OUN/UPA

  • 8 On désigne par ce mot, qui signifie en ukrainien « extermination par la faim », la grande famine qu (…)

11Tout cela n’aurait pas été possible sans la politique mémorielle menée au plus haut niveau de l’État depuis la révolution orange et l’élection du président Iouchtchenko. Ce dernier a poursuivi tout au long de son mandat une politique d’ukrainisation et de nationalisation du pays qui s’appuie sur les vues des milieux de la diaspora ukrainienne liés à l’OUN/UPA tout comme sur celles des néonationalistes d’Ukraine occidentale. Pour étayer sa politique de construction mémorielle, il s’est doté d’un appareil étatique : en 2005, il fonde l’Institut pour la mémoire nationale, créé sur le modèle de l’institut éponyme en Pologne, dont le but est de diffuser l’interprétation officielle de l’histoire. En premier lieu, par une loi de 2006, la Grande Famine ukrainienne est érigée au rang de génocide et tout négationnisme en la matière constitue désormais une infraction à la loi. L’Holodomor8, souvent appelé « holocauste », supplante le génocide des Juifs dans le discours victimaire officiel. Des chiffres fantaisistes allant jusqu’à dix millions de morts ukrainiens sont cités, tandis qu’est occultée la dimension transversale de cette Grande Famine stalinienne, qui s’est étendue jusqu’à la Volga et au Kazakhstan.

  • 9 Décrets présidentiels d’octobre 2007 no 966/2007 relatif à la commémoration du 65e anniversaire de (…)

12Mais il s’agit surtout de fonder un discours héroïque : depuis 2005, lors des commémorations de la fin de la Seconde Guerre mondiale, Iouchtchenko met sur un pied d’égalité les vétérans de l’Armée rouge et ceux qu’il appelle « les combattants pour la liberté » de l’Ukraine. Il octroie aux vétérans de l’UPA des décorations ainsi que l’accès à une pension d’ancien combattant, et réhabilite Roman Shukhevytch, chef du bataillon Nachtigall et de l’UPA, en lui décernant fin 2007 le titre de « héros de l’Ukraine »9.

  • 10 Volodymyr Viatrovytch, Stavlennia OUN do evreiiv : Formuvannia pozytsii na tli katastrofy, Lviv, MS (…)
  • 11 « Lehenda pro Nachtigall » (en ukrainien), reproduit sur la page <memorial.kiev.ua/content/view/539 (…)
  • 12 Voir « Security Service of Ukraine reveals documents that unmask Soviet myths about the OUN », Den’(…)
  • 13 John-Paul Himka, « True and False Lessons from the Nachtigall Episode », Brama, <www.brama.com/news (…)

13Trois institutions officielles collaborent sous la présidence de Iouchtchenko à l’entreprise de blanchiment de l’OUN/UPA : l’Institut pour la mémoire nationale, le Centre pour l’étude du mouvement de libération, établi en 2002 à Lviv et dirigé par l’historien Volodymyr Viatrovytch, et surtout le SBU, le Service de la Sécurité d’État, qui a remplacé le KGB et a hérité de ses archives, sur lesquelles il dispose d’un monopole. Les trois institutions se soutiennent et se corroborent mutuellement, fonctionnant grâce à un réseau de jeunes historiens acquis à la cause de l’OUN/UPA. Viatrovytch est l’un des plus actifs : en 2006, il publie un livre fondé sur des citations tronquées qui dénie tout antisémitisme au sein de l’OUN10 ; en 2007, il tente de réhabiliter la mémoire du bataillon Nachtigall en faisant remonter la « légende autour de Nachtigall », c’est-à-dire l’accusation de massacres, notamment de pogromes, à une tentative soviétique pour déstabiliser le gouvernement Adenauer dans les années 196011. En 2008, Oleksandr Ishchuk, un autre jeune historien travaillant aux archives du SBU, déterre un texte qui exonérerait l’OUN de toute implication dans les pogromes : d’après cette « chronique » datée du 4 juillet 1941, la Gestapo aurait invité les Ukrainiens à en commettre un à Lviv, mais l’OUN aurait interdit à ses membres d’y participer12. Toutefois, selon l’historien ukraino-américain John-Paul Himka, ce document, comme bien d’autres, a probablement été écrit après 1943, à un moment où l’organisation, sentant le vent tourner, avait donné l’ordre d’expurger et de trafiquer ses archives afin de donner l’impression que c’étaient les Allemands et les Soviétiques qui étaient coupables d’actes antisémites, et non les Ukrainiens13.

  • 14 Pour plus de détails, voir Grzegorz Rossolinski-Liebe, « Celebrating Fascism and War Criminality in (…)

14Il faut rappeler que, depuis des décennies, une vaste œuvre de propagande est menée par des idéologues des milieux ukrainiens immigrés notamment au Canada, en Angleterre et en Allemagne, qui vise à présenter l’histoire de l’OUN/UPA comme celle d’organisations démocratiques, pro-occidentales, voire philosémites. Parmi les plus connus, Mykola Lebed’, ancien leader de l’OUN et fondateur de l’UPA, recruté par la CIA (qui ne répugnait pas à incorporer d’anciens nazis et fascistes), dont les archives ont été récemment transférées au Harvard Ukrainian Institute, avait détruit et redactylographié tous les originaux des années de guerre, procédant ainsi à une falsification à grande échelle ; l’équipe réunie à Toronto autour du vétéran de l’UPA Petro Potichnyj a pour sa part publié dans la longue série de volumes Litopys UPA les chroniques (soigneusement expurgées de toute mention d’antisémitisme) de l’UPA. Pour parler de la France, mentionnons Volodymyr Kosyk, docteur en histoire de l’université Paris-I – Sorbonne (!) et vice-directeur de l’Université ukrainienne libre de Munich, auteur d’un ouvrage paru en 1986 à Paris, L’Allemagne national-socialiste et l’Ukraine, qui réussit le tour de force de ne pas receler un mot sur la collaboration ou la destruction des Juifs d’Ukraine. Citons encore Petro Myrtchuk, ancien de l’OUN, dont les pamphlets nationalistes suintent l’antisémitisme primaire14. On n’hésite pas à recourir à la mystification pour présenter l’UPA comme philosémite : ainsi, le même Myrtchuk publie la pseudo-autobiographie de Stella Krentsbakh, une Juive ukrainienne qui aurait dû sa survie à l’UPA, texte qui s’est révélé être un faux mais reste fréquemment cité.

  • 15 Propos tenus par Valentyn Nalyvaytchenko, président du SBU, dans « KGB provoked Ukrainian-Jewish co (…)

15Dans le sillage de ces travaux de la diaspora, des publications et des colloques sont organisés en Ukraine afin de prouver que les Ukrainiens et les Juifs combattaient côte à côte contre le totalitarisme et le régime communiste, et que les atrocités qui ont été reportées par les témoins juifs seraient en réalité le fait du KGB, lequel aurait envoyé des agents soviétiques déguisés en Ukrainiens pour tuer des Juifs15 !

  • 16 Voir le décret présidentiel du 23 janvier 2009 relatif à la déclassification, la publication et l’é (…)
  • 17 Tarik C. Amar, Ihor Balyns’kyi, Yaroslav Hrytsak (dir.), Strasti za Banderoiu, Kyiv, Hrani-T ; voir (…)

16Enfin, en décembre 2008, le directeur de l’Institut pour la mémoire nationale, Ihor Ioukhnovskyi, attèle ses historiens à la tâche la plus ardue : la réhabilitation du chef de l’OUN lui-même, l’extrémiste fasciste Stepan Bandera. Dans ce but, Iouchtchenko déclassifie en janvier 2009 une nouvelle fournée de documents sur l’OUN/UPA conservés au SBU16 et, fin janvier 2010, juste avant de quitter le pouvoir, décerne le titre de « héros de l’Ukraine » à Bandera. Entre-temps, les historiens ont rivalisé pour célébrer le nouveau héros, à tel point que la désinformation, la manipulation des sources, le négationnisme et même la légitimation de massacres finissent par obtenir droit de cité, y compris dans les milieux universitaires. Témoigne des errances de l’époque le volume Strasti za Banderoiu (Les passions autour de Bandera), édité en 2010 par un collectif d’historiens – dont Tarik Amar et Yaroslav Hrytsak, de Lviv –, qui juxtapose sans commentaire des textes de pure idéologie glorifiant le leader fasciste et d’autres, plus nuancés17. En offrant un forum et une plate-forme respectables à ce type d’opinion antidémocratique, les deux historiens de Lviv, eux-mêmes modérés, cautionnent et légitiment hélas un discours xénophobe et dangereux.

La présidence Iouchtchenko, un passé difficile à effacer ?

17Voulant ancrer l’identité ukrainienne dans un récit héroïque fondé sur des faits d’armes et réhabiliter les chefs de guerre liés à l’OUN/UPA, Iouchtchenko a tenté de faire reconnaître des narrations historiques empreintes d’idéologie, de nationalisme ethnique, de xénophobie, et d’ériger en héros des personnages suspects et criminels. Cette tentative a échoué, ne serait-ce que parce que la moitié orientale du pays, russophone et au passé lié aux partisans soviétiques et à l’Armée rouge, l’a refusée. Les conseils municipaux de villes comme Kharkiv, Donetsk ou Lugansk ont réagi vivement contre les mesures présidentielles, et à Kharkiv, Simferopol, Sumy, etc., ont été érigés, en signe de protestation, des monuments aux victimes de l’UPA, comme il en existe aussi beaucoup en Pologne. La politique mémorielle de Iouchtchenko a donc divisé le pays en deux, isolé l’Ukraine de ses voisins et de l’Europe, et décrédibilisé la recherche et les milieux académiques ukrainiens, tout en les subordonnant à des institutions d’État chargées de produire une version gouvernementale de l’histoire.

18Certes, le nouveau président, Viktor Yanoukovytch, a annulé le titre de héros de l’Ukraine décerné à Bandera et à Shukhevytch, a fait retirer le qualificatif de génocide à la Grande Famine, a renvoyé Ioukhnovskyi et Viatrovytch de leurs postes et a placé les instituts de recherche et le SBU sous l’autorité du nouveau pouvoir.

19Toutefois, ces mesures, également antidémocratiques par ailleurs, n’effacent pas le mal fait durant l’ère de la présidence orange. L’extrême droite progresse fortement en Ukraine ; le racisme, l’antisémitisme, la xénophobie, qui se déploient jusque sur les terrains de football, où les supporters du club Karpaty Lviv arborent des drapeaux nazis, s’étalent à ciel ouvert. L’ouest du pays s’est encore radicalisé et vote désormais pour le parti Svoboda plutôt que pour les partis orange, déconsidérés par la faillite du président sortant et l’incarcération de Ioulia Tymochenko.

  • 18 Voir « Petition by historians in response to detention of their colleague Ruslan Zabily », <khpg.or (…)
  • 19 Per A. Rudling, Jared McBride, « Ukrainian Academic Freedom and Democracy under Siege », The Algeme (…)

20En face, Yanoukovytch remet de l’ordre de manière autoritaire, allant jusqu’à intimider les chercheurs nationalistes : Ruslan Zabilyi, à l’époque directeur du musée de la prison « Tiurma na Lonskoho » à Lviv, a ainsi été soumis en septembre 2010 à une garde à vue musclée de quatorze heures par le SBU, qui lui a confisqué son ordinateur18. Certes. Mais, d’un autre côté, Svoboda jouit d’une toute-puissance et d’une impunité totale : n’a-t-il pas réussi à empêcher une série de conférences de l’historien polonais Grzegorz Rossolinski-Liebe, qui vient d’achever à l’université de Hambourg une thèse sur Bandera et qui était invité en Ukraine par l’ambassade d’Allemagne et la Fondation Heinrich Böll pour parler de Bandera en tant que fasciste19 ? Quand des centaines d’extrémistes de Svoboda ont entouré l’ambassade en brandissant des panneaux traitant le jeune historien de « fasciste », « nazi », « ukrainophobe » et le comparant à… Goebbels, il y eut très peu de réactions de la part de la communauté scientifique ukrainienne et même internationale. Des jeunes chercheurs ont été intimidés, menacés de perdre leur bourse ou leur soutien institutionnel s’ils signaient la pétition en sa faveur. Personne n’ose se mesurer à Svoboda, qui gagne sur tous les plans, reléguant la critique de Bandera au rang d’une « provocation » allemande ou, comme on l’a prétendu bien à tort, d’une bravade d’un historien fantasque qui serait à la solde du Parti des régions, le parti de Yanoukovytch.

21L’entreprise de blanchiment de l’OUN/UPA et des périodes les plus noires de l’histoire ukrainienne se poursuit dans les milieux de l’émigration, et même dans les départements d’études ukrainiennes des universités d’outre-Atlantique, comme à Harvard, où Viatrovytch a trouvé un refuge comme chercheur invité. En Ukraine occidentale, les mentalités n’ont pas changé et se sont même trouvées confortées par les ennuis que le nouveau régime fait subir aux nationalistes. Dans le même temps, la recherche continue d’être assujettie au pouvoir, dans une Ukraine de plus en plus poutinisée ou rien d’approchant la liberté et l’indépendance de la recherche et de l’histoire n’existera avant longtemps…

NOTES

1 C’est ainsi qu’on appelle en russe la Seconde Guerre mondiale.

2 David Marples, Heroes and Villains : Creating National History in Contemporary Ukraine, Budapest/New York, Central European University Press, 2007.

3 Delphine Bechtel, « Lemberg/Lwów/Lvov/Lviv : identités d’une “ville aux frontières imprécises” », Diogène, no 210, 2005, p. 73-84. Voir Yi, no 29, Genius loci. Leopolis. Lviv. Lemberg. Lwów, 2003.

4 Aux élections locales de 2010, le parti Svoboda a obtenu entre 20 % et 30 % des voix en Galicie et un tiers des sièges au conseil municipal de Lviv.

5 Voir Grzegorz Rossolinski-Liebe, « Der Raum der Stadt Lemberg in den Schichten seiner politischen Denkmäler », Kakanien Revisited, 2009, accessible à partir de la page <www.kakanien.ac.at/beitr/fallstudie/GRossolinski-Liebe1/?page=2&alpha=r>, cons. août 2012.

6 Malgré les bonnes volontés collaborationnistes de Stetsko et des autres dirigeants de l’OUN face à l’invasion allemande, à laquelle ils participèrent, malgré leur antisémitisme et leur vision d’un État ukrainien fasciste sur le modèle de la Slovaquie de Tiso ou de la Croatie de Pavelic, l’indépendance de l’Ukraine ne correspondait pas aux projets d’Hitler.

7 Rossolinski-Liebe, art. cit. (notre traduction).

8 On désigne par ce mot, qui signifie en ukrainien « extermination par la faim », la grande famine qui fit entre 3 et 5 millions de victimes en Ukraine en 1932-1933.

9 Décrets présidentiels d’octobre 2007 no 966/2007 relatif à la commémoration du 65e anniversaire de la création de l’UPA ; no 958/2007 relatif à la remise de décorations de l’État ukrainien aux participants à la lutte de libération nationale ; no 965/2007 relatif à l’octroi du titre de héros de l’Ukraine à R. Shukhevytch.

10 Volodymyr Viatrovytch, Stavlennia OUN do evreiiv : Formuvannia pozytsii na tli katastrofy, Lviv, MS, 2006.

11 « Lehenda pro Nachtigall » (en ukrainien), reproduit sur la page <memorial.kiev.ua/content/view/539/149/>, déc. 2007, cons. 21 août 2012.En 1959, lors du procès de Theodor Oberländer, référent allemand de Shukhevytch dans la Wehrmacht et alors ministre en RFA, l’Union soviétique, par le biais de la RDA, a rendu publics des documents sur les atrocités commises par les membres de l’OUN.

12 Voir « Security Service of Ukraine reveals documents that unmask Soviet myths about the OUN », Den’, <www.day.kiev.ua/en/article/day-after-day/security-service-ukraine-reveals-documents-unmask-soviet-myths-about-oun>, 12 févr. 2008, cons. 21 août 2012. Sur les pogromes, voir Delphine Bechtel, « Les pogroms en Galicie, 1941 : des pages blanches de l’histoire à une histoire en pointillés ? », dans Luba Jurgenson, Alexandre Prstojevic (dir.), Des témoins aux héritiers : l’écriture de la Shoah et la culture européenne, Pétra, 2012, p. 111-130 ; John-Paul Himka, « The Lviv Pogrom of 1941 : The Germans, Ukrainian Nationalists, and the Carnival Crowd », Canadian Slavonic Papers/Revue canadienne des slavistes, vol. 53, no 2-4, 2011, p. 209-244.

13 John-Paul Himka, « True and False Lessons from the Nachtigall Episode », Brama, <www.brama.com/news/press/2008/03/080319himka_nachtigall.html>, 19 mars 2008, cons. 21 août 2012.

14 Pour plus de détails, voir Grzegorz Rossolinski-Liebe, « Celebrating Fascism and War Criminality in Edmonton. The Political Myth and Cult of Stepan Bandera in Multicultural Canada », Kakanien Revisited, 29 déc. 2010, accessible à partir de la page <www.kakanien.ac.at/beitr/fallstudie/GRossolinski-Liebe2/?page=2&alpha=r>, cons. 21 août 2012 ; Per A. Rudling, « The OUN, the UPA and the Holocaust : A Study in the Manufacturing of Historical Myths », Carl Beck Papers in Russian & East European Studies, no 2107, 21 déc. 2011.

15 Propos tenus par Valentyn Nalyvaytchenko, président du SBU, dans « KGB provoked Ukrainian-Jewish conflits : SBU publicised documents », <www.axisglobe.com/article.asp?article=1533>, cons. janv. 2010 (des trois liens vers cette information, tous ont été désactivés depuis – signe de la mystification ?), et Oleksandr Ishchuk ; cf. Sofia Grachova, « Unknown Victims : Ethnic-Based Violence of the World War II Era in Ukrainian Politics of History after 2004 », Daniyliw Lecture2008, <www.ukrainianstudies.uottawa.ca/pdf/Danyliw08%20Grachova%20Paper.pdf>, cons. 21 août 2012.

16 Voir le décret présidentiel du 23 janvier 2009 relatif à la déclassification, la publication et l’étude de documents d’archives liés au combat pour la libération nationale ukrainienne, aux répressions politiques et au Holodomor en Ukraine.

17 Tarik C. Amar, Ihor Balyns’kyi, Yaroslav Hrytsak (dir.), Strasti za Banderoiu, Kyiv, Hrani-T ; voir également la critique du livre par Franziska Bruder, <defendinghistory.com/strasti-za-banderoju-%E2%80%98bandera-passion%E2%80%99-by-franziska-bruder/25453>, 20 nov. 2010, cons. 21 août 2012.

18 Voir « Petition by historians in response to detention of their colleague Ruslan Zabily », <khpg.org/en/index.php?id=1284550630>, 15 sept. 2010, cons. 21 août 2012.

19 Per A. Rudling, Jared McBride, « Ukrainian Academic Freedom and Democracy under Siege », The Algemeiner, <www.algemeiner.com/2012/03/01/ukrainian-academic-freedom-and-democracy-under-siege/>, 1er mars 2012, cons. 21 août 2012.

Source : ELH Revues, Delphine Bechtel, Octobre 2012

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Commentaire recommandé

GLEB // 10.03.2017 à 08h06

Pour compléter un peu : le bandérisme appliqué
http://cartouche-info.livejournal.com/8696.html

– Le gouvernement ukrainien actuel a réhabilité Bandera .. entre l’article et le complément, on voit combien les polonais doivent apprécier.
– L’UE signe donc un accord d’échanges avec l’Ukraine et le régime sans visa est bien engagé
– Kiev laisse faire le blocus des républiques auto-proclamées de Lougansk et Donetsk
– La Russie reconnait les documents de ces deux républiques

Pour faire simple, ça chauffe un peu … à 2500 km de Paris

Et pourtant ce qui occupe nos journaux et radios : 6-1 du PSG, la coupe de cheveux et le sourire enjôleur du banquier qui a le vent en poupe.

Tout va bien

19 réactions et commentaires

  • Catalina // 10.03.2017 à 07h24

    L’Ukraine donne à la Russie les armes juridiques pour siffler la fin de partie dans le Donbass grâce à la bêtise abyssale de sa plainte devant la CIJ
    Christelle Néant, journaliste au Donbass.

    https://dnipress.com/fr/posts/lukraine-donne-a-la-russie-les-armes-juridiques-pour-siffler-la-fin-de-partie-dans-le-donbass-grace-a-la-betise-abyssale-de-sa/

      +8

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    • Catalina // 10.03.2017 à 16h32

      J’aimerai apporter une précision sur le lien que j’ai mis. Il faut avoir en tête qu’en Russie et dans l’esprit des Russes, le droit international est recherché beaucoup plus que par chez nous. C’est une des fondations de la diplomatie. Il peut sembler naïf de s’appuyer sur lui puisque de grandes puissances ne l’appliquent pas, ceci dit, d’autres grandes puissances l’appliquent elles. Leur vision des choses est de manière très importante basée sur ce droit.
      Les choses se passent de manière moins spectaculaire et sur le long terme. Puisque le droit international est quand même respecté par de grandes puissances, au final, il fini par s’imposer et il est moins meurtrier que toute autre solution.

        +4

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  • RGT // 10.03.2017 à 07h59

    Très bon document qui permet de recentrer le débat, avec de nombreuses sources et preuves qui permettent de bien cerner le problème.

    Il y a juste une petite phrase que je trouve inappropriée à la fin : « dans une Ukraine de plus en plus poutinisée… ».

    Je ne suis pas pro-Poutine, loin de là, mais jusqu’à présent il n’a jamais tenté de réécrire l’histoire pour faire l’apologie du stalinisme…

      +16

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    • Tetris // 10.03.2017 à 10h05

      Attention, je vis en Russie et beaucoup de média mette en avant la période Staliniste et beaucoup de musée parle en bien de cette période. Meme s’il ne les contrôle pas directement, Poutine s’appuie sur des périodes de l’histoire ou la Russie fut puissante (les Tsars, post seconde guerre mondiale, la conquête de l’espace…). Sont objectif est de faire retrouver sa gloire aux russes et de ne pas se faire voler une deuxième fois la victoire de la grande guerre patriotique. Il y a beaucoup de reportages bidons qui declare que la Russie est la meilleure en sport, en médecine, militairement, intellectuellement. Apres c’est toujours les memes chaines de tele qui les montrent et la très grande majorité des russes ne sont pas dupent. Pour conclure dirons nous que les derniers manuels d’histoire ne sont pas neutre sur pleins de sujets.

        +6

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      • Papagateau // 10.03.2017 à 17h52

        Est-ce que tu parles des manuels d’Histoire français ?
        Voire de la sélection d’auteurs de l’increvable Lagarde et Michard ?

          +1

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  • GLEB // 10.03.2017 à 08h06

    Pour compléter un peu : le bandérisme appliqué
    http://cartouche-info.livejournal.com/8696.html

    – Le gouvernement ukrainien actuel a réhabilité Bandera .. entre l’article et le complément, on voit combien les polonais doivent apprécier.
    – L’UE signe donc un accord d’échanges avec l’Ukraine et le régime sans visa est bien engagé
    – Kiev laisse faire le blocus des républiques auto-proclamées de Lougansk et Donetsk
    – La Russie reconnait les documents de ces deux républiques

    Pour faire simple, ça chauffe un peu … à 2500 km de Paris

    Et pourtant ce qui occupe nos journaux et radios : 6-1 du PSG, la coupe de cheveux et le sourire enjôleur du banquier qui a le vent en poupe.

    Tout va bien

      +19

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  • Ardéchoix // 10.03.2017 à 08h24

    La révolution Ukrainienne qui nous est racontée par l’Europe , une autre façon d’écrire l’histoire .
    Perso j’ai eu beaucoup de mal à regarder vu la propagande honteuse de ce doc .
    Mis en ligne sur netfix (en français ) il y a 1 semaine.
    https://youtu.be/0d1EGjZJFEg

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    • Catalina // 11.03.2017 à 13h13

      il est sur netfix depuis bien plus qu’une semaine. ;O) à minima un an voire plus. je vous dis pas la rage que j’ai eu à voir cette ingnominie mensongère.

        +0

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  • moshedayan // 10.03.2017 à 10h11

    Très bon document, oui. Ce qui se passe en Ukraine de l’Ouest est un vrai problème. C’est une volonté acharnée de créer une nation sur la falsification de l’Histoire et les historiographes nationalistes ne font aucune nuance dans ce domaine.
    Mais vous savez le mal est très profond. J’ai regardé sur youtube, un documentaire orienté mais intéressant sur l’OUN-UPA fait par une chaîne russe et il disait que les services de sécurité soviétique avaient estimé à plus de 200.000 citoyens ukrainiens le nombre de ceux qui après 1945 continuaient à soutenir le nationalisme ukrainien OUN-UPA (avec une guerilla qui se poursuivit jusqu’en 1953…à peu près) Et des dirigeants communistes locaux furent assassinés pendant cette période. Ajoutez évidemment surtout les Juifs et les Polonais (de Volhynie surtout) dans les assassinats de 1939 à 1944 par l’OUN-UPA

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  • Le modéré // 10.03.2017 à 10h16

    Des informations inédites et un style qui oblige le lecteur à lire tout l’article sinon (c’est mon cas) de le relire trois fois.
    J’apprécie ce genre de travail qui a été mené non pas pour plaire mais pour présenter une contribution riche émanant d’un auteur qui maîtrise la technique de rédaction et la réunion des informations.Je n’ai rien à ajouter sauf que cette région se situe au coeur de la terre (Heart land)L’Ukraine occupe une place centrale entre la Russie et les membres de l’OTAN. Elle est cosidérée comme zone tampon entre les deux camps en sus qu’elle occupe plus que la moitié du « Portail Oriental » qui historiquement constituait le passage privilégié à toute sorte d’invasions. Elle fait partie de l’Eurasie. A ce titre,celui qui contrôle l’Eurasie, commande l’Europe et celui qui commande l’Europe commande le monde.
    Merci

      +2

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    • moshedayan // 10.03.2017 à 11h01

      Je ne crois pas à cette construction théorique sur l’Ukraine et le Heart Land. Il n’y a aucun précédent historique et même pas le début d’un précédent dans ce domaine. L’Ukraine est certes une zone tampon, mais c’est une notion relative : la Hongrie, la Tchécoslovaquie et la Pologne le seraient tout autant entre l’Est et l’Ouest. Le seul intérêt de l’Ukraine pour l’Ouest c’est les « Terres noires » qui existent aussi en Russie du Sud et le renforcement de la stratégie d’étranglement en Mer noire.
      Par ailleurs, la Russie est par ses bases principales fondamentalement européenne -administration, armée, culture mais ensuite elle intègre des « touches eurasiennes » très fortes aussi d’où le terme « mosaîque avec un fond d’une couleur dominante européenne ». Faire des Russes des « non- Européens » est une aberration idéologique pensée pour préparer l’affrontement, la tension et peut-être la guerre.

        +15

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      • Le modéré // 11.03.2017 à 10h43

        Extrait d’un article que j’ai écrit dés le début de tension entre la Russie et l’Ukraine au sujet de la Crimée
        Or depuis l’intégration de la quasi-totalité de ces pays à l’Union Européenne ou à l’OTAN, la zone tampon assurée jadis par les satellites de l’ex Union Soviétique n’est plus assurée actuellement que par deux Etats : Ukraine et Biélorussie. De fait de leur frontière commune avec la Russie, ils constituent le dernier rempart entre d’un coté l’Occident et ses alliés et d’autre part les territoires russes qui lui font face dont l’étirement en longueur représente dans leur ensemble la majeur partie du portail avec des surface terrestres ouvertes qui s’étendent de la mer Noire à la mer Caspienne.

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  • Dominique // 10.03.2017 à 10h38

    « jusque sur les terrains de football, où les supporters du club Karpaty Lviv arborent des drapeaux nazis, s’étalent à ciel ouvert. »

    Et pas en catimini : https://www.thestar.com/content/dam/thestar/news/insight/2015/06/26/confederate-flag-debate-echoes-germanys-postwar-struggle-over-swastika/swastika-at-soccer-match-2007.jpg.size.custom.crop.1086×724.jpg

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  • Elysab Levy // 10.03.2017 à 11h55

    Il y a de la documentation sur la ré-écriture de l’histoire mais souvent en anglais a part le blog de Didier Bertin qui lui aussi alerte sur ce fait, ainsi que la réhabilitation du nazisme et des collaborateurs locaux qu’ils soient ukrainiens ou des pays baltes car c’est dans toute l’Europe de l’Est que ce fait unique se traduit par la poursuite des anciens partisans « rouges » et même juifs au titre de crime contre les « bons banderistes » qui se fait à l’heure actuelle.http://www.didier-bertin.org/pages/russia/ukraine-solution-democratique.html Lié à la décommunisation forcée, la criminalisation de la non croyance en « l’holodomor », la « chasse aux sorcières » va bon train là bas. Que fait l’Europe ? Rien elle acquiesce : http://www.didier-bertin.org/pages/history/extreme-droite-dans-l-ue-1.html et l’exaltation de ces assassins sur fond de crise sociale se poursuit : http://www.didier-bertin.org/pages/eastern-european-union/20-ans-apres-les-pays-de-l-est.html

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  • DonetskiyVasya // 10.03.2017 à 13h42

    Je comprend le désarroi des russes.
    Depuis 3 ans le régime nazie doit tomber dans 2, maximum 3 mois. Et pourtant. Les échanges commerciaux Russie-Ukraine ont été divisé par 4 en espace de 4 ans. Ils n’achètent même plus de gaz russe en direct. Il n’y a plus de levier pour faire quoi que ce soit contre ces nazi, car les russes ne veulent plus de nouveaux Grozniy (ou plutôt 5 à 10 Grozniy) avec des attentats en réponse. Il ne reste que de la propagande à l’Ouest dans l’espoir de faire basculer l’opinion public. Mais, bon, comme montre revirement de Trump, très peu de chance coté US et dans le monde réel, il n’y a que ça qui compte.

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    • Regards Extérieurs // 13.03.2017 à 14h30

      Quel est le rapport avec le sujet de la glorification de nationalistes qui ont commis d’épouvantables massacres ?

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  • Krystyna Hawrot // 11.03.2017 à 20h51

    C’est très intéressant de voir que dans les années 2005-6 l’Allemagne, qui finalement n’est pas si innocente, a appuyé le négationnisme ukrainien via l’argent de laFondation Böll, fondation du parti des Verts (notre cher Cohn-Bendit…). Apres la créature a échappé à son créateur et ils veulent la remettre dans la bouteille… trop tard! Todd a raison: il faudrait un peu contrôler les errances orientales de la politique allemande.

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    • Lysbeth Levy // 13.03.2017 à 13h07

      La « créature » en question a bien été voulue dès le départ car cette idéologie extrêmiste servait de « fuel » pour lutter contre la Russie soviétique et maintenant contre la Russie moderne. Sinon pourquoi l’OSS (future CIA) les aurait exfiltré des camps de « personnes déplacées, laissant de côté les juifs, polonais, ou esclaves ayant servi à l’économie nazie dans les camps » ? C’est là, un crime dont les Usa n’ont pas honte, que d’avoir protégés, utilisés leurs méthodes des Mengele, Barbie, Skorzeny et autres Gehlen, Hallstein, qui a donné le BND de l’Allemagne. Des criminels longtemps demandés par l’Urss et ces satellites pour y être jugés mais qui ont tous finis morts dans leurs lits ! A quoi donc a servi la Justice de Nuremberg si les Usa, Uk, France ont mis de côté ces assassins coupables de génocides si c’est pour en arriver là de nos jours ? Oui l’UE est fasciste par essence, ou les Usa sont les plus grands soutient de pires fascistes à ce jour, et maintenant ils feignent la surprise, l’ignorance, alors que la barrière « prométhéenne » de la Baltique à la Mer noire, est bien actée par le nombre de pays sous l’emprise de leurs anciens fascismes ! C’est bien l’option « prométhéenne » qui permet de contenir la Russie toujours aussi méchante quoiqu’elle soit…

        +1

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