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12.octobre.202312.10.2023 // Les Crises

Aux États-unis, la pauvreté des enfants a plus que doublé en 2022 après la fin du crédit d’impôt

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En 2022, plus de 5 millions d’enfants supplémentaires ont été plongés dans la pauvreté après l’expiration des mesures de relance.

Source : Truthout, Sharon Zhang
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

Une fille reçoit un cadeau de Noël lors d’une distribution organisée par la Food Bank For New York City à Highbridge Houses dans le Bronx, le 19 décembre 2020, à New York. KENA BETANCUR / AFP VIA GETTY IMAGES

De nouvelles données montrent que la pauvreté des enfants a grimpé en flèche en 2022 après que les législateurs ont laissé expirer les mesures de relance en période de pandémie, laissant des millions de personnes dans la misère alors même que la pandémie et ses conséquences économiques faisaient rage.

Selon le dernier rapport du Bureau du recensement sur la pauvreté aux États-Unis, le taux de pauvreté addtionnel chez les enfants a plus que doublé entre 2021 et 2022, grimpant de 5,2 % à 12,4 % en un an seulement. Cela représente une augmentation de plus de 5 millions d’enfants en situation de pauvreté en 2022, sur un total d’environ 9 millions d’enfants.

La pauvreté a également augmenté pour tous les âges de 4,6 points de pourcentage pour atteindre 12,4 % en 2022. Il s’agit de la première hausse en ce qui concerne le taux de pauvreté additionnelle depuis 2010, et de la plus forte hausse des taux de pauvreté sur une année jamais enregistrée, selon le Bureau du recensement.

L’agence explique cette augmentation par l’expiration de dispositions telles que le crédit d’impôt élargi pour les enfants, qui permettait aux familles ayant des enfants de toucher plus d’argent chaque mois, le crédit d’impôt élargi sur les revenus gagnés (EITC) et la fin des chèques de relance.

Les extensions du crédit d’impôt pour enfants et de l’EITC ont toutes deux pris fin en 2021, après avoir contribué à maintenir à flot des millions de personnes et de familles au cours des deux premières années de la pandémie. En grande partie grâce à ces dispositions et aux chèques de relance, le taux de pauvreté addtionnelle avait alors atteint en 2021 le niveau historiquement bas de 7,8 %, tous âges confondus, selon le Bureau du recensement.

L’inflation a également joué un rôle majeur dans les finances des ménages. Alors que l’inflation a été de 7,8 % entre 2021 et 2022, une hausse record, le revenu médian des ménages a baissé de 2,3 % en dollars réels, c’est-à-dire corrigés de l’inflation. Cette baisse correspond à peu près à la diminution de 2,2 % des salaires des travailleurs en dollars réels.

Le taux de pauvreté officiel est resté stable à 11,5 %. Le taux officiel est calculé différemment du taux complémentaire. Il est considéré comme obsolète parce qu’il ne prend pas en compte l’aide de certains des programmes de lutte contre la pauvreté les plus importants, comme la sécurité sociale, ou les coûts de base tels que les services publics ou le logement.

Les résultats démontrent l’adage progressiste de longue date selon lequel la pauvreté est un choix politique et que les législateurs peuvent mettre en œuvre des politiques qui réduiraient ou élimineraient la pauvreté s’ils le souhaitent.

« L’augmentation du taux de pauvreté, la plus importante jamais enregistrée depuis plus de 50 ans, tant pour l’ensemble des personnes que pour les enfants, souligne le rôle essentiel que jouent les choix politiques dans le niveau de pauvreté et de précarité du pays », a déclaré Sharon Parrott, présidente du Center on Budget and Policy Priorities (CBPP), dans une intervention.

Parrott a souligné que même si le Congrès s’était contenté de maintenir l’extension du crédit d’impôt pour enfants, il aurait pu sortir 3 millions d’enfants de la pauvreté en 2022, soit plus de la moitié des enfants qui ont été plongés dans la pauvreté l’année dernière.

Les Démocrates et les progressistes se sont battus pour étendre le crédit d’impôt pour enfants, mais ils ont été contrecarrés par les Démocrates et les Républicains conservateurs. Le sénateur Joe Manchin (Démocrate, Virginie-Occidentale) a été un adversaire particulièrement virulent de cette disposition, luttant avec acharnement pour diluer le crédit d’impôt et anéantissant finalement tout espoir de le relancer.

D’autres tentatives de relance du crédit ont été rejetées par les Démocrates et les Républicains. En août dernier, le sénateur Bernie Sanders (Indépendant-Vermont) a présenté un amendement à la Loi sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act) visant à relancer l’expansion, qui a été rejeté par 97 voix contre 1 par le Sénat. Certains Démocrates ont présenté des projets de loi visant à relancer le crédit d’impôt ou à le rendre permanent, mais ces projets n’ont guère progressé au Congrès. Bien que le président Joe Biden ait demandé le rétablissement du crédit d’impôt dans sa demande de budget pour 2024, la mesure est vouée à l’échec par la Chambre des représentants, contrôlée par les Républicains.

« Cher sénateur Manchin », a écrit le représentant Jamaal Bowman (Démocrate-New York) sur les réseaux sociaux en réponse au rapport du Bureau du recensement, « Les chiffres ne mentent pas, mon gars. Parce que VOUS avez laissé le crédit d’impôt pour enfants expirer, la pauvreté des enfants est passée de 5,2 % à 12,4 %. Beau travail ! Et je dis cela avec sarcasme et une rage incandescente. »

« 70 % des Américains soutiennent le crédit d’impôt, a poursuivi Bowman. Dormez-vous bien la nuit ? »

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Sharon Zhang

Sharon Zhang est rédactrice à Truthout et couvre la politique, le climat et le travail. Avant de rejoindre Truthout, Sharon a écrit des articles pour Pacific Standard, The New Republic, etc. Elle est titulaire d’un master en études environnementales.On peut la trouver sur Twitter : @zhang_sharon.

Source : Truthout, Sharon Zhang, 14-09-2023

Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

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Commentaire recommandé

utopiste rationnel // 12.10.2023 à 09h10

Tout le monde n’a pas accès à la finance, or la finance, surtout spéculative (la piraterie moderne), c’est développée bien au-delà du raisonnable. C’est surtout là que l’argent des Q.E, américains et autres, est aller « s’investir ». « L’élite » a pu ainsi bénéficier de « rendements » maximum, tandis que le reste de la population a obtenu un accès accru aux « minima sociaux ».

4 réactions et commentaires

  • Urko // 12.10.2023 à 08h41

    En 2021 et 2022 combinés, le déficit budgétaire américain a dépassé les 4 000 milliards de dollars. 4 000 milliards de dollars en deux ans représentent davantage que toute la dette publique américaine en 1990 au niveau fédéral. Or, ces déficits dantesques et la création monétaire qui les a permis ont alimenté l’inflation dont pâtissent les plus fragiles, comme l’article le rappelle, tout en menaçant tous les agents économiques américains à terme. Voilà en tous cas l’argument des partisans de la réduction des programmes sociaux, qui considèrent qu’il vaut mieux investir dans des programmes créant des emplois, comme l’IRA – 6% de pib ! – se propose de le faire avec le soutien de beaucoup de démocrates. Cela n’aurait pas manqué d’intérêt de fournir dans l’article un peu de ces éléments avant de se fonder sur une période exceptionnelle et très courte pour en tirer des relations prétendument directes. Le problème mérite un meilleur traitement car il s’agit de l’accroissement phénoménal des inégalités sur longue période aux états unis, que ni les progressistes ni les républicains n’ont pu enrayer sérieusement, à quelques exceptions près malgré des budgets en hausse, et pas seulement pour le département de la défense. L’Amerique s’endette et s’enrichit mais des franges de la population demeurent assignées à des niveaux de précarité inouïs. Les gens politisés indisposent quand ils se servent d’un problème pour prétendre que leur camp saurait y remédier. Les années Clinton, Obama et Biden l’auraient montré.

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    • utopiste rationnel // 12.10.2023 à 09h10

      Tout le monde n’a pas accès à la finance, or la finance, surtout spéculative (la piraterie moderne), c’est développée bien au-delà du raisonnable. C’est surtout là que l’argent des Q.E, américains et autres, est aller « s’investir ». « L’élite » a pu ainsi bénéficier de « rendements » maximum, tandis que le reste de la population a obtenu un accès accru aux « minima sociaux ».

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    • Savonarole // 12.10.2023 à 18h31

      Les deux partis ont été d’accord pour ne surtout pas faire de social et faire du sociétal à la place. Ils ne voudraient surtout pas ètre pris pour de vils Communistes !
      Le résultat est que le seul truc socialisé aux US est la dette … et les eurobéas pour lesquels on nous laisse voter sont tous en pâmoison devant tant de grandeur et de nobles fins …

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  • petitjean // 13.10.2023 à 11h36

    Rappelez moi le budget colossal que reçoit chaque année le complexe militaro industriel américain ?
    Rappelez moi le coût colossal des guerres d’agressions américaines dans le monde ?

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