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29.janvier.202029.1.2020 // Les Crises

La Lituanie imite la Pologne et propose sa loi controversée sur la Shoah – Par Haïm Goël

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Source : Lève toi !, Haïm Goël, 15-01-2019

Le gouvernement prépare un projet de loi qui stipule que ni la Lituanie ni ses dirigeants n’ont participé au génocide ; les survivants et les historiens affirment le contraire.

Le Premier ministre Saulius Skvernelis de Lituanie, en 2016. Il dirige la c ommission chargée de rédiger la législation déclarant que ni la Lituanie ni ses dirigeants n’ont participé à la Shoah. (Crédit : Petras Malukas/AFP)

L’an dernier, la Pologne adoptait une loi controversée qui lui a valu des critiques à l’international et a nui à ses relations avec Israël, les États-Unis et les groupes juifs du monde entier. Nombreux étaient ceux qui craignaient que cette loi, qui interdisait d’évoquer la complicité des Polonais dans les crimes nazis – car le pays était sous occupation nazie, selon ses dirigeants – entraverait l’éducation et la recherche historique sur le génocide.

Ces craintes ne se sont pas estompées depuis l’adoption de cette législation. En dépit de multiples tentatives d’enterrer la hache de guerre, le président polonais Andrzej Duda s’est désolidarisé la semaine dernière d’une commémoration de la Shoah à Jérusalem.

L’un de ces pays est la Lituanie, où la complicité nazie était répandue, ce qui explique comment 95 % des 250 000 Juifs du pays ont été exterminés, selon des instituts de recherches internationaux sur le génocide.

Pour tenter de s’opposer à cette version, un député lituanien du parti du Premier ministre Saulius Skvernelis a annoncé le mois dernier qu’une commission qu’il supervise rédigeait une loi déclarant que ni la Lituanie ni ses dirigeants n’avaient pris part à la Shoah.

« L’État lituanien n’a pas participé à l’Holocauste parce qu’il était occupé, tout comme la nation lituanienne n’a pas participé à l’Holocauste parce qu’elle était asservie », a déclaré le député Arunas Gumuliauskas.

Pour Rosa Bloch, une survivante du ghetto de Kovno âgée de 91 ans, ces affirmations sont « tellement fausses et scandaleuses qu’elles ne peuvent qu’être le produit de la loi polonaise », a-t-elle dénoncé auprès la Jewish Telegraphic Agency.

« Les Lituaniens ont vu que cela a fonctionné pour les Polonais, donc ils les ont suivis », a-t-elle poursuivi.

L’initiative lituanienne est peut-être même plus troublante que celle de Varsovie, pour Rose Bloch, « parce que les Lituaniens étaient des partenaires actifs et cruels pendant la Shoah. Il n’y a pas un Juif lituanien vivant qui n’a pas perdu un proche, tué par les Lituaniens », a-t-elle expliqué.

La causalité entre la loi polonaise et le projet de loi lituanien observée par Rose Bloch et tant d’autres est difficile à établir, mais les deux initiatives sont clairement liées.

En septembre, Gumuliauskas a organisé une rencontre avec des députés polonais sur la mémoire historique, citant ce qu’il a décrit comme un défi commun.

« Aujourd’hui, les relations lituano-polonaises sont bonnes, mais des parties tierces tentent de nous renverser par le prisme de la mémoire historique », avait-il dit dans une interview au sujet de cette rencontre. Arunas Gumuliauskas n’a pas nommé ces tiers.

Cette rencontre, a-t-il ajouté, visait à « promouvoir la coopération entre les historiens des deux pays, à la poursuite de buts communs ».

Quelle que soit la relation exacte entre les pressions polonaises et lituaniennes en faveur de la disculpation – le parlementaire n’a pas répondu à la question de la JTA à ce sujet – elle relève d’un effort plus large de la part des nations d’Europe de l’Est pour souligner le statut de victime de leur population et contredire ou diminuer les allégations de complicité dans la Shoah.

Si les sociétés d’Europe occidentale ont de plus en plus assumé la responsabilité de la persécution de leurs Juifs, c’est le contraire qui s’est produit dans les nations d’Europe de l’Est, où l’éducation liée à la Shoah était largement absente ou déficiente sous le régime communiste.

Nombreux sont ceux qui, en Europe de l’Est, justifient aujourd’hui la collaboration de leurs compatriotes avec l’Allemagne nazie comme le seul moyen qu’ils avaient pour « obtenir l’indépendance de l’Union soviétique » plutôt qu’une réelle motivation à tuer des Juifs, a déclaré à la JTA Michael Berenbaum, ancien directeur de l’institut de recherche du Musée américain de la Shoah. Il estimait également que la loi polonaise « encourageait » les politiciens d’autres pays à chercher à obtenir une législation similaire.

Dans un contexte de montée du nationalisme à travers le continent, les gouvernements de nombreux pays d’Europe de l’Est célèbrent désormais les collaborateurs nazis, y compris les auteurs de la Shoah, comme des héros patriotiques.

En Ukraine, le Parlement a adopté en 2015 une loi qui fait l’éloge des « partisans anticommunistes », y compris des collaborateurs nazis, et qui criminalise les « insultes » à leur mémoire. Des rues y sont nommées en l’honneur de collaborateurs tels que Stepan Bandera et Roman Shukhevych, entre autres.

En 2014, la Lettonie a introduit une loi qui prévoit jusqu’à cinq ans de prison pour ceux qui nient le rôle des « puissances étrangères qui ont perpétré des crimes contre la Lettonie et la nation lettone », sans mentionner l’implication des volontaires SS lettons dans le meurtre de la quasi-totalité des 70 000 Juifs du pays. Les vétérans SS allemands défilent chaque année dans les rues de la capitale Riga, flanqués de militants ultranationalistes.

En Lituanie, une école porte le nom de Jonas Noreika, un dirigeant de guerre qui a contribué au massacre de Juifs.

Dans ce contexte, la législation proposée en Lituanie est un ballon d’essai et « la prochaine étape dans la distorsion de la Shoah en Europe de l’Est », a déploré Efraim Zuroff, le directeur du Centre Simon Wiesenthal pour l’Europe de l’Est qui, ces dernières années, s’est concentré sur l’histoire de la Shoah et le révisionnisme en Lituanie.

Si une nation avec un passé aussi lourdement lié à la Shoah que la Lituanie adopte une loi qui l’exonère sans retombées diplomatiques significatives, « cela pourrait être un signe terrible pour les autres », a suggéré Efraim Zuroff.

Ruta Vangaite, autrice lituanienne à succès ayant écrit sur la Shoah, considère que la loi serait une « mascarade ».

« Dès la première semaine d’occupation, le gouvernement lituanien a créé le premier camp de concentration et constitué un bataillon qui a tué des Juifs. C’était le gouvernement lituanien. Et tout le monde le sait », a-t-elle relaté.

La brutalité remarquable des pogroms antisémites en Lituanie est un autre défi pour les architectes de la loi. L’un des plus tristement célèbres s’est produit à Kovno, où des dizaines de Juifs ont été massacrés par des gens du pays qui brandissaient des gourdins dans un dépôt de bus. Certains auteurs ont posé pour des photos sur les corps torturés de leurs victimes tout en exhibant les armes du crime.

D’un point de vue historique, la Pologne a des arguments bien plus solides que la Lituanie pour s’opposer aux allégations de complicité dans la Shoah, estime Efraim Zuroff.

Dans les deux pays, a-t-il expliqué, la Shoah n’aurait pas eu lieu sans les Allemands. Et dans les deux pays, les habitants ont tué des milliers de Juifs pendant l’occupation nazie.

Mais la Pologne « n’existait pas en tant que pays » quand les nazis l’ont occupée, et son gouvernement en exil « n’a pas encouragé les actions contre les Juifs ». En Pologne aujourd’hui, les expressions d’admiration pour les collaborateurs nazis sont assez rares.

En revanche, le gouvernement provisoire collaborationniste de Lituanie a été responsable d’innombrables meurtres au cours des six semaines de sa brève existence.

Le langage utilisé par les principaux historiens de la Shoah au sujet des deux pays reflète cette différence.

Au sujet de la Pologne, Sara Bloomfield, directrice du Musée américain du Mémorial de la Shoah, a écrit l’année dernière dans une lettre adressée au président du pays que « la nation polonaise a été victime de l’agression allemande et a subi une occupation exceptionnellement brutale. Les caractérisations – dues soit à l’ignorance, soit à la malveillance – de la responsabilité polonaise dans l’établissement des camps de concentration et de mort nazis sont incontestablement historiquement inexactes ».

Elle a également mentionné les nombreux Polonais ayant sauvé des Juifs aux côtés de nombreux autres qui ont contribué à leur élimination.

Yad Vashem, le mémorial et le musée de la Shoah d’Israël, écrit à propos de la Pologne que « le grand public polonais, confronté à une occupation impitoyable et engagé dans une lutte constante pour l’existence, n’a guère prêté attention à la détresse immensément plus grande » des Juifs.

Les deux musées utilisent une terminologie différente au sujet de la Lituanie.

« Les Lituaniens ont mené de violentes émeutes contre les Juifs peu avant et immédiatement après l’arrivée des forces allemandes », peut-on lire dans un résumé du Musée américain de la Shoah, qui souligne que la plupart des Juifs du pays ont été fusillés pendant la brève durée de vie du gouvernement Quisling.

La Lituanie est le seul pays occupé par les nazis dont Yad Vashem a noté « l’enthousiasme » de son peuple pour la collaboration avec l’Allemagne. Même lorsque cet enthousiasme « s’est apaisé … l’hostilité envers les Juifs et la dénonciation ont persisté », indique le musée de Jérusalem.

Efraim Zuroff appelle le gouvernement lituanien à faire face à ce bilan.

« Alors que les organisations non gouvernementales effectuent un important travail de commémoration, l’essentiel de l’éducation sur la Shoah se fait dans le système scolaire et en poursuivant les auteurs de la Shoah », dit-il. « Ce sont des choses que seul un gouvernement peut faire ».

Source : Lève toi !, Haïm Goël, 15-01-2019

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Fabrice // 29.01.2020 à 06h56

Les lois mémorielles que ce soit chez nous, les polonais, les lituaniens ,… Sont quel que soit l’idée de départ un risque pour la liberté, la paix, la recherche historique, c’est un cache qui ne permet pas à un peuple de faire le travail pour guérir les blessures du passé, une source de conflit avec les pays si pointés du doigt, et l’imposition aux chercheurs de taire et orienter des pans entiers de la véracité des faits bref de vivre dans un mythe plus ou moins proche de la réalité.

Les théoriciens de contre vérités historique ont beau jeu de passer pour des martyrs de la vérité opprimés par le pouvoir ou développer à loisir avec leur vérité car dedouanés et jouer souvent sur les haines toujours présentes sans qu’un débat prouve l’aberration de leur théorie or comme disait Churchill « un peuple qui oubli son passé se condamne à le revivre ».

40 réactions et commentaires

  • Fabrice // 29.01.2020 à 06h56

    Les lois mémorielles que ce soit chez nous, les polonais, les lituaniens ,… Sont quel que soit l’idée de départ un risque pour la liberté, la paix, la recherche historique, c’est un cache qui ne permet pas à un peuple de faire le travail pour guérir les blessures du passé, une source de conflit avec les pays si pointés du doigt, et l’imposition aux chercheurs de taire et orienter des pans entiers de la véracité des faits bref de vivre dans un mythe plus ou moins proche de la réalité.

    Les théoriciens de contre vérités historique ont beau jeu de passer pour des martyrs de la vérité opprimés par le pouvoir ou développer à loisir avec leur vérité car dedouanés et jouer souvent sur les haines toujours présentes sans qu’un débat prouve l’aberration de leur théorie or comme disait Churchill « un peuple qui oubli son passé se condamne à le revivre ».

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    • sergeat // 29.01.2020 à 08h16

      « les lois mémorielles » tout est dit dans cette phrase.

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      • gracques // 30.01.2020 à 07h04

        Oui , foin de loi memorielles comme celle sur le rôle positif de la colonisation…..😊
        Mais
        Laissons travailler les vrais historiens sans se comporter comme des histrions porteur de vérité.

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  • Fritz // 29.01.2020 à 07h25

    Comme le note Efraim Zuroff, en Pologne comme en Lituanie, « la Shoah n’aurait pas eu lieu sans les Allemands. Et dans les deux pays, les habitants ont tué des milliers de Juifs pendant l’occupation nazie. Mais la Pologne « n’existait pas en tant que pays » quand les nazis l’ont occupée », disons plutôt que l’État polonais avait cessé d’exister après les invasions allemande et soviétique.

    Et le gouvernement polonais en exil, celui du général Sikorski, « n’a pas encouragé les actions contre les Juifs ». « En Pologne aujourd’hui, les expressions d’admiration pour les collaborateurs nazis sont assez rares », et on le comprend quand on mesure ce que fut l’occupation allemande, de 1939 à 1945.

    « En revanche, le gouvernement provisoire collaborationniste de Lituanie a été responsable d’innombrables meurtres au cours des six semaines de sa brève existence. » Parler de « gouvernement Quisling » est une métaphore, Vidkun Quisling ayant dirigé le gouvernement collaborateur en Norvège après l’invasion allemande du printemps 1940.

    Au passage, il serait bon de dire le mot « allemand » de temps en temps, même si la bien-pensance impose le terme « nazi ». Tous les soldats de la Wehrmacht n’étaient pas membres du NSDAP, loin de là, et les nazis eux-mêmes n’étaient pas des extra-terrestres. Mais depuis des années, on distingue entre les gentils Allemands et les méchants nazis, comme s’il n’y avait aucun rapport entre les uns et les autres. Est-ce que les Occidentaux, Polonais, Lituaniens, Lettons… distinguent entre les gentils Russes et les méchants communistes ?

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    • Basile // 29.01.2020 à 08h16

      Ferrat ne commettait pas cette bassesse. Il chantait « les Allemands guettaient du haut des miradors »

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      • Jeremia // 29.01.2020 à 14h32

        En droite ligne du PCF qui du haut de son chauvinisme notoire disait en 1944 « à chacun son boche! » et qui au début de la résistance avait formenté des attentats lâches contre de simples soldats allemands, qui peut-être eux-mêmes étaient communistes !

        Donc non, on ne peut pas accuser collectivement tel peuple d’avoir commis tel crime, mais pour les Etats c’est différent !

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        • Fabrice // 29.01.2020 à 14h43

          Peu de chance les allemands communistes ont été les premiers à tester les camps, « lâche attentat » vous pensez que les français pouvaient faire des batailles rangé en disant messieurs les allemands tirez les premiers ?

          Vous pouvez nous dire qui était votre prof d’histoire, pour rappel c’était les allemands qui occupait la France par la force en exécutant des otages, en envoyant tsigane, juif, opposants,… Dans des camps en rétablissant le travail forcé que l’on peut appeler esclavage moderne.

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          • pauvre d’eux // 30.01.2020 à 15h31

            Effectivement, c’est d’ailleurs eux (les communistes et les socialistes) que les nazis obligeaient à construire ces camps. Raison pour laquelle certains camps, comme Buchenwald ont été noyautés pour partie par une résistance interne des 1ers prisonniers.

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        • gracques // 30.01.2020 à 07h21

          C’est bien le contraire !
          C’est commode d’accuser ‘Vichy’ ou l’état croupion d’un pays occupé , cela permet d’évacuer la responsabilité de la population !
          Le travail des historiens est justement de dévoiler les mécanismes qui ont aboutis ici (au Danemark occupé ) à ce que 90% des juifs ont été sauvés , en France 70% , moins en Hollande et que 90% des juifs lituaniens ont été exterminés…
          Comme le dit très bien Fritz,les Nazi n’étaient pas des extra terrestres et l’antisémitisme n’est pas né avec eux.

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        • Jean-François91 // 30.01.2020 à 10h38

          On doit quand même replacer les choses dans leur contexte. En 1944 les « Allemands » en France étaient tout sauf des touristes. Ils étaient à 99% des maillons d’une force d’occupation dont les méthodes étaient connues de tous. Une résistance qui cherche à chasser un occupant n’est pas vraiment dans les mêmes conditions qu’un historien qui, bien après, dépouille des archives.

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    • Fabrice // 29.01.2020 à 08h24

      Le pogrom de kielce et autres sont difficilement explicable si il n’y avait pas une haine anti-juive pendant et après la seconde guerre http://www.unlivredusouvenir.fr/pogroms.html vous me direz que c’est à cause des occupants soviétiques cette fois mais cela fait beaucoup quand même. Or ces lois empêcheront d’y voir plus clair et de fermer ces blessures encore vives.

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      • Chris // 29.01.2020 à 13h24

        Puisque vous parlez de pogroms, rappeler tout de même que les Polonais s’y mirent bien avant d’être envahis par l’Allemagne hitlérienne !
        Etait-ce par effet de miroir, les Polonais ayant signé, eux aussi leur « Ribbentrop-Molotov / Accord de Munich », pacte de non agression avec l’Allemagne hitlérien qui affichait son projet de conquête du « Lebensraum » pour mettre fin à la misère de l’après première guerre mondiale ?

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    • Anouchka // 29.01.2020 à 10h42

      Oui. Il est de bon ton de dire « les Nazis » et non pas « les Allemands » pour ne pas «essentialiser» notre puissant partenaire européen et aussi pour entretenir l’ambiguïté sur le « totalitarisme», toujours bien pratique en période de libéralisme déchainé.

      Encore faudrait-il pouvoir définir qui était « nazi » et qui ne l’était pas à cette époque. Quand on sait que des spécialistes comme J Chapoutot nous expliquent que M. Heidegger n’était pas nazi (https://www.youtube.com/watch?v=dOBBy_dkFkA), ni même C. Schmitt d’ailleurs (https://www.youtube.com/watch?v=rq1DZW2j3KI) quand bien même ces deux personnages eurent leur carte du parti jusqu’à la fin de la guerre, il y a de quoi se poser des questions.
      Chemin faisant, lesdits «vrais nazis» vraiment coupables des mauvaises pensées qui ont conduit au pire finissent par se compter sur les doigts de la main… et tous les autres devienent de malheureuses victimes injustement salies et soupçonnées.

      Il serait temps de détrôner le nazisme de son statut d’empereur du mal radical et de rappeler qu’il n’y avait pas que les nazis patentés, à l’époque, qui n’étaient pas beaux et très méchants… Pourquoi a-t-on tellement de mal à reconnaitre ça ? Qui n’y a pas intérêt ?

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      • gracques // 30.01.2020 à 07h26

        Ne faites pas de contresens avec Chapoutot , ses conférences sont remarquables , notamment sur l’idéologie Nazis et sur son terreau antérieur ….. et sa postérité …remarquable analyse de l’école du New public management et de ses sources.
        Quant à Carl schimdt , il dit qu’il n’a pas réussi à être un BON nazi …. mais que cela n’était pas faute d’avoir essayé !.

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        • Anouchka // 30.01.2020 à 14h08

          Pour Chapoutot, le nazisme, c’est une variante extrémiste du”bio pouvoir” comme aurait dit Foucault ; c’est de la “biologie appliquée” dit-il. Je ne remets pas en cause le serieux de son travail qui est parmi les plus aboutis sur le sujet.
          Pour autant, noie un peu le poisson quand même. Il ne répond pas clairement à la question du QUI étaient vraiment ces hommes qui ont déferlé depuis le territoire allemand en Europe de l’ouest et de l’est à partir de 39 ? Étaient-ils avant tout des Allemands héritiers du militarisme prussien, dont l’élite dirigeante était convertie à une version hard du darwinisme social ? Étaient-ils plutôt des masses déracinées, manipulées par l’impérialisme (qui?) allemand au nom d’une idéologie biologisante de façade ?

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          • Anouchka // 30.01.2020 à 14h09

            Et surtout qui est-on véritablement en droit de qualifier de “nazi” au sens qu’il donne à ce mot? Qui sont ceux qu’ils nomme “nazis” et dont il étudié la pensée? Les membres du parti nazi? La réponse est non, puisque pour lui, par exemple, Heidegger n’était pas nazi. La petite clique au pouvoir seule à même de définir l’orthodoxie nazie (et dont étaient exclus des sympathisants actifs comme Schmitt). Mais alors c’est un peu en contradiction avec ce qu’il dit sur le nazisme comme “bouillon de culture“ de divers courants idéologiques, parfois contradictoires, dont tous lui préexistent (et qui existent ailleurs en Europe).Et puis c’est contradictoire avec l’idée qu’il soutient également que la grande majorité des Allemands de l’époque (la wehrmacht notamment) était acquise aux idées nazies et a combattu pendant la guerre au nom de l’idéal nazi.

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        • Anouchka // 30.01.2020 à 14h36

          La n’est pas la question. Ce que je voulais dire, c’est qu’en séparant “Allemands” et “nazis” on finit par exclure beaucoup de monde de la responsabilité.

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          • Anouchka // 30.01.2020 à 14h43

            Sans compter que ces deux personnages Heidegger et Schmitt, pour n’être pas d’authentiques nazis, ont cependant des idées très proches et possiblement tout aussi néfastes (mais Chapoutot n’est pas en cause la-dedans, il dit ça aussi assez explicitement)

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    • Anouchka // 29.01.2020 à 11h33

      Oui. Il est de bon ton de dire « les Nazis » et non pas « les Allemands » pour ne pas «essentialiser» notre puissant partenaire européen et aussi pour entretenir l’ambiguïté sur le « totalitarisme», toujours bien pratique en période de libéralisme déchaîné.

      Encore faudrait-il pouvoir définir qui était « nazi » et qui ne l’était pas à cette époque. Quand on sait que des spécialistes comme J Chapoutot nous expliquent que M. Heidegger n’était pas nazi (https://www.youtube.com/watch?v=dOBBy_dkFkA), ni même C. Schmitt d’ailleurs quand bien même ces deux personnages eurent leur carte du parti jusqu’à la fin de la guerre, il y a de quoi finir par perdre son latin.

      Et chemin faisant,on en arrive à se retrouver avec uniquement des malheureuses victimes injustement salies et soupçonnées…
      Il serait temps de détrôner le nazisme de son statut d’empereur du mal radical. Pourquoi a-t-on tellement de mal à faire ce travail de mémoire-là ? Qui n’y a pas intérêt ?

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    • Basile // 02.02.2020 à 06h35

      je reviens tardivement (4 jours après) sur cette affaire, usage du mot nazi au lieu d’Allemand.

      Jean Ferrat en passant chez Michel Drucker en 1980 a dit que l’Élysée conseillait aux chaines de radio de ne pas diffuser Nuit et brouillard, pour ne pas déplaire aux Allemands.

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  • Jean-Do // 29.01.2020 à 07h37

    Tout comme la religion, l’État ne devrait pas se mêler de la science, fût-elle humaine. Même si l’on partd’une bonne intention (ce n’est pas le cas ici) et arriver à des déconnexions du réel, caractéristiques de vrais totalitarismes. C’est typique de l’actuel néo-libéralisme qui affirme ouvertement « créer la réalité ».

    Comme l’on dit d’autres intervenants à bien d’autres occasions: « 1984 était une alerte, pas un mode d’emploi. »

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  • Basile // 29.01.2020 à 08h06

    on va faire comme d’ab, fermer les yeux sur le passé noir de nos nouveaux amis. C’est qu’on savait tout ça avant de les faire rentrer dans l’uE. Mais les intérêts géostratégiques étaient au dessus.

    Ah excusez moi, on frappe à la porte. Ah c’est le Kosovo !. Mais entrez donc

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    • Arkhenes // 30.01.2020 à 11h10

      Vous vous rendez compte que tous les membres fondateurs de la CEE ont collaboré à la politique de déportation nazie? On fait comment du coup?…

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  • TEROUINARD // 29.01.2020 à 08h12

    Quand la Loi des Etats fait l’Histoire, l’Histoire n’est plus qu’un mensonge d’Etat.

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  • joebardoc // 29.01.2020 à 08h19

    J’aimerai bien entendre l’avis d’historiens sérieux sur le sujet de ces lois mémorielles qui tentent d’interférer avec la perception de l’histoire de la part des peuples. C’est quand même fort de café que nous critiquions les pays de l’est dans cette démarche , alors que nous l’avons initiée avec la loi Gayssot. L’histoire il me semble devrait être l’affaire des historiens, et apprise par les écoliers sans filtre d’aucune sorte, mais avec le recul nécéssaire. La principale conséquence de toutes ces lois semble être le développement de théories complotistes, et la résurgence d’une certaine forme d’antisémitisme en fait partie.

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    • MaisOui // 30.01.2020 à 11h45

      « nous l’avons initiée avec la loi Gayssot »…nous? De qui parlez vous? Législateurs ou historiens? S’il s’agit des historiens, ils ont sortis eux même leur discipline du domaine scientifique (qui exige le débat libre et public de toutes les hypothèses qui peuvent surgir) . S’il s’agit des législateurs, les historiens sont devenus par contrainte des fonctionnaires au service d’idéologies politiques. Ils existeraient donc : les historiens idéologisés, les historiens soumis, et les autres.

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  • J // 29.01.2020 à 08h35

    Historiquement parlant, la Lituanie (peuple et dirigeants) a été bien plus mouillée que la Pologne, elle-même bien plus mouillée que la France (par exemple http://bouquinsblog.blog4ever.com/la-delation-sous-l-occupation-andre-halimi), elle-même bien plus mouillée que le Danemark, les autres se plaçant quelque part sur cette échelle.

    Mais les lois mémorielles françaises, si bonnes qu’aient été les intentions, ont créé un précédent calamiteux, pas seulement dans ce domaine. Quand les premières thèses négationnistes ont surgi, il aurait été très facile, et autrement plus pédagogique, de considérer qu’elle s’inscrivaient en faux contre des milliers voire des millions de témoins, donc qu’elles les qualifiaient implicitement de menteurs. Donc on pouvait poursuivre en diffamation, ce qui permet des peines dissuasives. A présent c’est un peu tard.

    Au passage, il y a aussi des velléités japonaises récurrentes d’escamoter plus ou moins leur propre passé abominable. Mais la Chine, concernée au premier chef en tant que victime et très sensible sur cette question, dispose de moyens de pression plus conséquents qu’Israël.

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    • Garibaldi2 // 30.01.2020 à 06h11

      Il faut quand même rétablir les faits quand on parle de loi mémorielle concernant la déportation de millions d’êtres humains, leur détention en dehors de toutes les règles de la guerre dans des conditions inhumaines, la Shoah par balles, les chambres à gaz et le génocide des Juifs et des Tziganes : le législateur a simplement rappelé que la contestation de la réalité de ces crimes contre l’humanité est incompatible avec les attendus du jugement de Nuremberg, qui est le résultat de débats contradictoires au cours desquels les accusés ont pu se défendre. La France étant membre de cette cour de justice.
      La loi  »Gayssot » n’interdit pas de faire des recherches sur ces crimes, elle interdit simplement de contester leur existence :
       »Seront punis des peines prévues par le sixième alinéa de l’article 24 ceux qui auront contesté, par un des moyens énoncés à l’article 23, l’existence d’un ou plusieurs crimes contre l’humanité tels qu’ils sont définis par l’article 6 du statut du tribunal militaire international annexé à l’accord de Londres du 8 août 1945 et qui ont été commis soit par les membres d’une organisation déclarée criminelle en application de l’article 9 dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction française ou internationale. ».

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      • MaisOui // 30.01.2020 à 11h55

        1945, Nuremberg, definition des crimes contre l’humanité et … Hiroshima.
        La recherche sur ces crimes n’est pas rendu facile en réalité. A ce sujet, si quelqu’un pouvait m’indiquer ou on peut trouver le compte rendu de l’intégralité du procès de Nuremberg en français, je lui en serais reconnaissant…

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  • Gérard // 29.01.2020 à 10h16

    Sans remettre en cause les horreurs du passé et des responsabilités passives actives ou masquées des uns et des autres, cette histoire de mémoire devient pornographique et va à l’encontre de ce pour quoi elle devrait contribuer (pour un esprit sincère et honnête).
    Les mots Shoa, holocauste et antisémitisme, sont devenus les LBD et autres GLIF4 dans les mains de certains pour justifier des politiques qui ressemblent fort à celles qui ont conduit à ces horreurs du passé.
    A qui le débordement de ces égouts mémoriels profitent t-il ? et pourquoi ?

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  • Carayon // 29.01.2020 à 10h42

    « Le Livre Noir, textes et témoignages réunis par ILya Ehrenbourg et Vassili Grossman » rassemble mille pages de témoignages et de transcription de documents. Paru aux éditions Actes Sud en 1995. Le rôle des Lituaniens, Lettoniens, et Ukrainiens aux côtés des troupes allemandes y est omniprésent.

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    • Bouddha Vert // 30.01.2020 à 01h30

      Ecrire: « le rôle des Lituaniens, Lettoniens et Ukrainiens… » c’est incriminer ces peuples dans leur entier, cela rappelle pourtant des discours politiques que l’on ne voudrait pas voir revenir.

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  • Dominique65 // 29.01.2020 à 12h15

    « les nations d’Europe de l’Est, où l’éducation liée à la Shoah était largement absente ou déficiente sous le régime communiste. »
    Ah, c’est la faute des russes ! Je suis rassuré : l’article peut passer sur les média reconnus.
    Rappelons que cette révision de l’histoire se passe trente ans après la dislocation de l’URSS.

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    • Chris // 29.01.2020 à 13h39

      « les nations d’Europe de l’Est, où l’éducation liée à la Shoah était largement absente ou déficiente sous le régime communiste. »
      C’est pourtant vrai !
      J’ai fait cette constatation dans les années 70-80 avec mes amis/connaissances bulgares, roumains, hongrois, yougoslaves. Non pas qu’ils étaient prêts à bouffer du juif, mais montraient une superbe indifférence, réelle ou calculée.
      Faut quand même pas oublier que la quasi disparition des populations juives de cette époque permit à nombre de propriétés et outils de production de passer dans les mains des natifs non juifs…

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      • Philippe, le Belge // 29.01.2020 à 22h51

        Dominique65 ne dit pas le contraire! Il/elle dit juste qu’en 30 ans ils ont eu le temps de s’éduquer et qu’il est facile de tout mettre sur le dos des soviétiques!

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      • moshedayan // 30.01.2020 à 07h36

        A l’Ouest, on aime toujours sur-interpréter ce qui se passait dans le monde soviétique. Ah, le temps béni de la Guerre froide… qu’on aime ressasser. Vu vos événements, je pense que vous avez bien obtenu ce que beaucoup vouliez… et vous êtes dans une belle m…. !
        Il est vrai que dans des pays comme l’Ukraine, la Pologne et les Pays baltes, les communistes n’osaient soulever ce problème de la Shoah, parce qu’ils savaient pertinemment que les atrocités avaient été aussi perpétrés sous le slogan de la lutte contre le « judéo-bolchévisme »… et que l’existence de cadres communistes d’origine juive et anciens partisans renforçaient l’hostilité des anti-communistes… Quand on parle de la Shoah , un historien doit aussi parler des massacres contre les Tziganes, les Résistants et … sous la bannière anti-judéo-bolchévique

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  • lon // 29.01.2020 à 12h48

    Je serais curieux de connaître les ressorts économiques éventuels sous-jacents à ce genre de décisions….quand on voit comment les Israëliens ont tiré de l’Allemagne des compensations se chiffrant en milliards d’euros , et je ne parle pas de la mise en accusation grotesque de la SNCF
    https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2014/12/05/etats-unis-paris-va-indemniser-les-victimes-de-la-shoah-transportees-par-la-sncf_4535530_3222.html
    en Pologne ça s’agite à ce niveau-là , la fameuse loi 447
    http://www.cclj.be/actu/politique-societe/premier-ministre-polonais-decrit-restitution-biens-juifs-comme-victoire-posthume-hitler

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  • Ando // 29.01.2020 à 14h01

    Je suppose que passer par une « loi mémorielle » plutôt que par une simple déclaration officielle vise à criminaliser toute expression qui contredit le contenu de cette loi mémorielle.

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  • Louis de Constance // 30.01.2020 à 07h37

    Hi from DC ❤ ✌ 💙. Thx a lot. Very interesting. Basically, there is the the historical reality. And it’s so embarrassing, the fact is they can’t quietly admit it; still they are feeling so ashamed . Therefore the Populists must vote that kind of laws to comfort their ‘nationalism’ ! But they are not innocent though !

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  • Julien // 30.01.2020 à 12h18

    La question principale, c’est à t’on encore le droit aujourd’hui sur les forums et autres centre d’expression sociale, d’écrire notre mécontentement ou désaccord au sujet de ce thème qui honnêtement rempli nos médias de manière répétée et sans aucune retenue (cause du désaccord ou du ras le bol)? La réponse à cette question est interdite. Bonne journée.

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