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15.novembre.202115.11.2021 // Les Crises

Le Royaume-Uni autorise la vente de 543 fusils snipers au Bahreïn, au Bangladesh et à Israël

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Le gouvernement britannique approuve l’octroi de licences de fusils de précision à des pays figurant sur sa propre liste noire…

Source : Byline Times, Sascha Lavin
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

La police utilise des grenades assourdissantes et des balles en caoutchouc lors d’une manifestation à Dhaka, au Bangladesh. Photo : Firoz Ahmed/Alamy

De nouvelles données révèlent comment des licences d’armes de précision (pour snipers) ont été accordées à Bahreïn, au Bangladesh et à d’autres régimes figurant sur la liste des « pays classés prioritaires en matière de droits humains » du ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a autorisé la vente de fusils de sniper à trois pays identifiés par le gouvernement comme étant parmi les pires en matière de droits humains, selon une analyse de l’association caritative Action on Armed Violence (AOAV) et de la Byline Intelligence Team.

Entre le 1er juillet 2020 et le 31 mars 2021, les ministres et fonctionnaires britanniques ont accordé des licences pour 543 fusils de précision et des équipements supplémentaires à exporter à Bahreïn, au Bangladesh et en Israël.

Ces trois pays figurent sur la liste la plus récente du Foreign Office des 30 « pays prioritaires en matière de droits humains » – identifiés par le gouvernement comme étant « ceux où nous sommes particulièrement préoccupés par les questions de droits humains, et où nous considérons que le Royaume-Uni peut faire une réelle différence ». Aucun de ces pays n’est soumis à des sanctions.

Les données révèlent également que les autorités britanniques ont accordé des licences pour des fusils de précision à neuf autres pays au bilan douteux en matière de droits humains, dont la Jordanie, le Koweït et la Thaïlande.

Le commerce au détriment des droits ?

L’analyse de l’AOAV et de la Byline Intelligence Team a révélé que des entreprises britanniques ont été autorisées à exporter 362 fusils de sniper, ainsi que des composants et des technologies destinés aux tireurs d’élite vers le Bahreïn au cours de cette période de neuf mois.

Le Foreign, Commonwealth and Development Office (FCDO) classe Bahreïn parmi les pays dont la situation en matière de droits humains est préoccupante en raison de l’approche du régime en matière de liberté d’expression et des allégations de torture.

Sayed Ahmed AlWadaei, directeur du plaidoyer à l’Institut bahreïni pour les droits et la démocratie, a qualifié la délivrance de ces licences « d’extrêmement préoccupante. »

« Le Royaume-Uni fournit à un ministre d’État des outils de répression supplémentaires qui peuvent être utilisés soit pour la répression interne, soit pour les utiliser dans le conflit au Yémen », a déclaré AlWadaei à Byline Times.

Bien que reconnu par le CFDO comme l’un des pires pays en matière de droits humains, des licences pour la vente de 180 fusils de précision, ainsi que des composants et des technologies pour ces fusils d’une valeur de 586 000 livres ont été accordées au Bangladesh par les autorités britanniques.

Le Foreign Office a invoqué 225 exécutions extrajudiciaires par les forces de l’ordre pour justifier l’inscription du Bangladesh sur la liste de surveillance des droits humains, qui en compte 30.

Démontrant une tension au sein du gouvernement entre les intérêts commerciaux et les droits humains à l’étranger, le Bahreïn et le Bangladesh sont reconnus par le ministère du Commerce international comme des « marchés clés » pour des ventes d’armes potentielles.

Une licence d’exportation d’un fusil de précision et de ses accessoires à destination d’Israël, d’une valeur de 4 489 livres, a été accordée au cours de la période analysée, malgré les nombreuses critiques formulées à l’encontre du bilan du gouvernement israélien en matière de droits humains.

Une commission d’enquête de l’ONU sur les manifestations de 2018 dans la bande de Gaza a constaté que « plus de 6 000 manifestants non armés ont été abattus par des tireurs d’élite militaires ». Les experts des droits humains de l’ONU ont trouvé des motifs raisonnables de croire que les tireurs d’élite israéliens ont sciemment tiré sur des journalistes, des professionnels de la santé, des enfants et des personnes handicapées.

Les Forces de défense israéliennes (FDI) ont régulièrement pris pour cible des enfants palestiniens avec des fusils de sniper. En 2019, un enfant de 11 ans et un autre de 13 ans ont été abattus par un sniper des FDI dans un camp de réfugiés près de Ramallah. La même année, un enfant de neuf ans est resté paralysé après avoir reçu une balle dans la tête d’un sniper des FDI en Cisjordanie. Un garçon de 14 ans a été tué par un sniper israélien en 2018.

Une récente enquête du journal israélien Haaretz a révélé que plus de 200 Palestiniens ont été tués et près de 8 000 ont été handicapés à vie par des tireurs d’élite des FDI sur une période de deux ans.

Roy Ibster, chef de l’unité Armes de Saferworld, une organisation axée sur la prévention des conflits, a déclaré à Byline Times : « Le Royaume-Uni a une longue histoire, apparemment continue, de vente de nombreux fusils de sniper à toutes sortes de clients douteux. »

Absence de garanties

Le rôle du gouvernement dans les exportations d’armes a également fait l’objet d’un examen minutieux pour ne pas être en mesure de garantir que les fusils de précision exportés vers les Émirats arabes unis (EAU) ne soient pas transmis à des auteurs de violations des droits humains.

Entre le 1er juillet 2020 et le 31 mars 2021, une licence d’exportation d’une valeur inférieure à 100 000 livres pour sept fusils de sniper, ainsi que des accessoires, a été accordée aux EAU. Et ce, malgré l’utilisation d’armes émiriennes dans les conflits meurtriers du Yémen et de la Libye.

Amnesty International a signalé que des armes des Émirats arabes unis ont été fournies à des milices alliées à la coalition dirigée par l’Arabie saoudite, qui ne rendent pas de comptes et dont certaines sont accusées de crimes de guerre au Yémen.

Les EAU ont fourni des armes à l’Armée nationale libyenne (ANL) autoproclamée, au mépris d’un embargo sur les armes imposé par les Nations Unies. Ce mois-ci, le Congrès américain a adopté une loi ordonnant que le chef de l’ANL, Khalifa Haftar, fasse l’objet d’une enquête pour crimes de guerre.

Un porte-parole de Saferworld a déclaré : « Il est difficile de voir comment cela peut être concilié avec les lois britanniques, qui interdisent en théorie de vendre des armes lorsqu’il existe un risque certain qu’elles soient utilisées pour commettre une violation grave des droits humains. »

Le Royaume-Uni a l’habitude d’exporter des armes de précision vers des pays au bilan inquiétant en matière de droits humains. Une enquête du Telegraph a révélé que le fabricant d’armes britannique, Accuracy International, avait envoyé des fusils de sniper à Kadhafi en Libye quelques semaines avant que le même type d’armes ne soit utilisé pour tirer sur des manifestants lors du soulèvement du Printemps arabe en 2011.

Un porte-parole du ministère du Commerce international a déclaré au Byline Times que « le Royaume-Uni prend ses responsabilités en matière de contrôle des exportations très au sérieux et applique l’un des régimes de contrôle des exportations les plus robustes et les plus transparents au monde et que nous examinons rigoureusement chaque demande de licence d’exportation au cas par cas par rapport aux critères consolidés de l’UE et des pays en matière de licences d’exportation d’armes. »

Ils ont ajouté que les licences d’exportation ne seraient pas délivrées « lorsque cela serait incompatible avec ces critères. »

Compléments d’information par Anna Crossland, Emma Hutchinson et Murray Jones.

Source : Byline Times, Sascha Lavin, 15-10-2021

Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

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Commentaire recommandé

LibEgaFra // 15.11.2021 à 08h21

Droits humains, droits humains, droits humains… et alors?! Et le droit de faire du commerce et du fric, ce n’est pas aussi un droit humain?! Et de toute façon qui se ressemble s’assemble, les britanniques sont connus pour ne pas les respecter les « droits humains » (colonisation, Dresde, Assange, etc.).

12 réactions et commentaires

  • Fabrice // 15.11.2021 à 06h57

    Quand on voit ce qui arrive à Assange, je m’étonne plutôt que certains se posent la question sur la vente de fusils, la réponse est assez évidente (pas forcément simple) mais il est clair que chaque pays qui favorise les droits de l’homme bénéficie d’un certain « luxe » qui disparaît dès que l’économie tousse.

    La bonne conscience disparaît quand certains voient leurs bénéfices disparaître ou le PIB diminuer voir stagner, on sacrifie volontiers cette notion pour satisfaire les tableaux de bord financiers qui remplacent désormais l’éthique et la morale, peu importe les valeurs morales tant que les valeurs financières, économiques continuent à progresser fussent-ils sur le dos des humains.

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  • LibEgaFra // 15.11.2021 à 08h21

    Droits humains, droits humains, droits humains… et alors?! Et le droit de faire du commerce et du fric, ce n’est pas aussi un droit humain?! Et de toute façon qui se ressemble s’assemble, les britanniques sont connus pour ne pas les respecter les « droits humains » (colonisation, Dresde, Assange, etc.).

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    • calal // 15.11.2021 à 08h46

      mais non c’est pas possible puisque les pays occidentaux donnent des sanctions economiques aux pays qui ne respectent pas les droits humains. Deux poids deux mesures ? nooon pas de ca chez nous monsieur….

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    • Savonarole // 15.11.2021 à 13h17

      Ils avaient le choix entre ne pas vendre des armes à des fous et le pognon , ils ont pris le pognon et devront surtout bien la fermer le jours où un de leurs gosses se fera sniper par un fou.

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  • RGT // 15.11.2021 à 10h51

    « Le commerce au détriment des droits ? »

    Mais non, mais non, c’est du complotisme forcené à l’encontre du gouvernement de sa gracieuse majesté qui place les droits humains et l’équité sociale en tête de ses préoccupations.

    D’ailleurs, dans l’esprit des personnes qui ont fabriqué, autorisé l’exportation et vendu ces armes l’utilisation de ces dernières sera exclusivement réservée à la population qui, une fois libérée des tyrans, pourra ainsi avoir des moyens de défense contre un éventuel retour de ces régimes criminels.

    Les Bisounours n’ont rien compris et divulguent des informations fallacieuses à la population pour faciliter une révolution anarcho-islamo-marxiste.

    Comme tout le monde le sait, depuis la nuit des temps, les dirigeants anglais sont tous pétris d’humanisme et ne feraient aucune action qui puisse nuire à d’autres populations.
    Bien au contraire ils leur apportent le progrès et les libèrent de leurs satrapes féodaux.

    Et il en va de même pour toutes les grandes nations de la communauté internationale.

    Ils sont à l’exact opposé des dirigeants russes, chinois, vénézuéliens, cubains et de toutes les autres dictatures sanguinaires présentes dans de nombreuses nations.

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    • Grd-mère Michelle // 16.11.2021 à 15h09

      « …les personnes qui ont fabriqué, autorisé l’exportation et vendu ces armes… »
      À noter que ce ne sont pas les mêmes personnes qui ont posé ces types d’actes différents…
      En Belgique, c’est une seule personne, le Ministre/Président de la Région Wallonne, qui est responsable des autorisations d’exportation des produits fabriqués dans la Région, en vertu des compétences attribuées aux Régions(entités politiques constituant, à côtés d’autres, l’État fédéral belge).
      Depuis 2017, plusieurs associations civiles (dont la Ligue des Droits Humains) ont déjà déposé plainte contre la Région concernant cette question de vente d’armes à l’Arabie Saoudite. D’ailleurs, une xieme plainte est en cours, que tout le monde a la possibilité de soutenir:

      http://www.cnapd.be/stop-a-la-vente-darmes-wallonnes-a-larabie-saoudite/

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    • Grd-mère Michelle // 16.11.2021 à 15h24

      Suite: Pour la question de savoir QUI fabrique les armes, ce sont bien évidemment des ouvrier-es salarié-es, de plus en plus remplacé-es par des machines/outils.
      Mais comme la « Fabrique Nationale » d’armes (située à Herstal, en Wallonie) fut un des fleurons du syndicalisme (et du féminisme), à l’origine de puissantes grèves qui ont amélioré l’ordinaire des ouvriers(principalement des ouvrières, à l’époque) de cette usine, comme de tout le monde ouvrier belge lorsqu’elles s’étaient généralisées, cette fabrique de mort est quasiment « intouchable ».
      Pourtant, elle devrait être, au plus tôt, reconvertie (en entreprise de vie et d’espoir) afin d’éviter le profond malaise de ces hommes et ces femmes qui, chaque jour, doivent s’empêcher de penser aux victimes innocentes de leur travail quotidien destiné à nourrir leurs propres enfants (et leurs « rêves » de consommateurs/trices).
      À moins que leurs « dirigeants », avec leurs complices, aient déjà réussi à transformer ces personnes en robots dénués d’émotions…!?

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  • Merlin // 15.11.2021 à 14h37

    N’oublions pas qu’un « fusil de sniper » n’est rien qu’une carabine de calibre intermédiaire ou plus, équipé d’organes de visée permettant un tir à longue distance(500+ mètres) et éventuellement accompagnée d’outils de mesures/calculs(anémomètre…).
    Dit autrement il s’agit d’une arme couramment utilisée pour la chasse au gros gibier(sangliers, cervidés…) dans de nombreux pays, dont la France, et donc faciles à se procurer tout autour du globe.

    On peut regretter que des armes servent d’outils à des être humains dénués de scrupules.
    Comment leurs cibles humaines peuvent elles se prémunir de cette violence illégitime?

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  • koui // 15.11.2021 à 16h15

    Si chaque fusil de sniper vaut 4 489 livres, cela fait une valeur totale de 25 000 000 livres environ pour 543 fusils. Cela ne compte pas pour le royaume uni. La raison de ces ventes n’est donc pas l’argent des armes. Ce sont des pays amis avec lesquels le commerce des armes est libre, c’est tout. D’ailleurs, UK ne vends pas d’armes à l’Iran, la Russie ou la Chine qui sont les ennemis officiels de la reine (et des USA). Les histoires de droits de l’homme ne servent que pour occuper les enfants.

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  • Myrkur34 // 16.11.2021 à 09h41

    Et après, ils en font des tonnes sur la Reine qui a mal au dos ou qui conduit sa voiture dans les allées du château comme si on en avait quelque chose à faire de cette famille de forbans légaux.
    Par contre, plus aucune nouvelles sur les licences de pêche….

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  • petitjean // 19.11.2021 à 12h54

    On parle, on parle, mais rien ne change !

    Des millions de victimes au Moyen Orient à cause des « ingérences » américaines et de leurs supplétifs !

    qu’est-ce que quelques centaines de fusils de précision feront de plus !

    Tirer sur des civils désarmés est une grande spécialité d’un pays de la région, mais curieusement celui ci n’est jamais inquiété

    alors, faire des phrases, à quoi bon ,………………

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    • Grd-mère Michelle // 20.11.2021 à 19h16

      Petitjean, se parler, et se fournir des informations rigoureusement correctes, vérifiables, c’est déjà une possibilité de faire évoluer les mentalités…
      La domination des « va-t-en guerre » et des marchands de canons(pour employer des expressions quelque peu dépassées) ne peut s’exercer sans l’acceptation et la participation des masses laborieuses, gagnées par la désinformation, la publicité et le « bourrage de crâne » qui créent de la confusion et remplacent leurs aspirations naturelles et légitimes par des « rêves » irréalisables pour le commun des mortel-le-s(voir le tas de pognon et d’énergie claqué dans la « conquête spatiale », par ex, et imaginons les mêmes sommes/recherches consacrées à la fin de la faim dans le monde…)
      En ce sens, la majorité des « simples » citoyen-ne-s ont leur rôle à jouer, en forçant leurs représentant-e-s politiques à prendre en compte leurs volontés, notamment en préservant de toutes leurs forces l’indépendance de la Justice, le seul contre-pouvoir capable de statuer sur des situations problématiques.
      Voir mon commentaire ci-dessus, et le lien proposé…

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