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31.mars.202331.3.2023 // Les Crises

En Turquie, l’effroyable bilan du tremblement de terre n’a rien à voir avec une catastrophe naturelle

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Deux semaines après le double tremblement de terre qui a frappé la Turquie, on retire encore des milliers de cadavres des décombres. Ils auraient été bien moins nombreux si l’administration Erdoğan n’avait pas fait preuve de laxisme vis-à-vis d’entreprises de construction peu scrupuleuses.

Source : Jacobin Mag, Anil Kemal Aktas, Kubilay Cenk Karakas
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

Une rue transformée en impasse par les débris d’immeubles effondrés, le 24 février 2023 à Hatay, en Turquie. (Mehmet Kacmaz / Getty Images)

Le 6 février, deux tremblements de terre dévastateurs d’une magnitude de 7,8 et 7,7 ont frappé le sud de la Turquie, faisant près de 50 000 morts et rendant les villes inhabitables, avec des scènes terribles dignes d’une zone de guerre. Plus de deux semaines plus tard, le bilan s’alourdit de jour en jour et des dizaines de milliers de personnes se trouvent encore sous les décombres. Les premiers rapports indiquent que le total pourrait dépasser les 70 000 morts. Cette situation épouvantable est sans aucun doute la pire catastrophe naturelle de l’histoire moderne de la Turquie.

Bien que le pays soit depuis toujours exposé aux tremblements de terre, la réponse du gouvernement turc a été loin d’être à la hauteur. Au fil du temps, l’industrie de la construction a connu une importante prolifération, les entrepreneurs ayant des liens avec les cercles politiques du président Recep Tayyip Erdoğan profitant des institutions de l’État pour financer un régime autoritaire par le biais de la spéculation dans le secteur de la construction.

(İzel Sezer – İleri Haber)

Il en résulte un boom massif dans la construction de bâtiments inadaptés – et une législation gouvernementale pour les excuser – dans le but de générer des recettes fiscales. L’autoritarisme néolibéral turc est directement responsable de la catastrophe sociale et matérielle. Face au désastre, la Gauche se bat pour changer le statu quo – une approche qui rencontre déjà une réponse très positive de la part de l’ensemble de la population.

Un État paralysé

Lorsque le double tremblement de terre a frappé le sud-est de l’Anatolie, la première réaction de chacun de nous a été de contacter notre famille et nos amis résidant dans la région touchée pour vérifier s’ils étaient saufs. Mais nous n’avons pas pu les joindre, les lignes téléphoniques étaient coupées. Peu après, des vidéos et des photos ont commencé à circuler, montrant des scènes catastrophiques qui se produisaient dans la région. Des tweets avec des adresses et des numéros de bâtiments se sont propagés à grande échelle sur les médias sociaux, les gens cherchant leurs proches.

Le gouvernement et les représentants de l’État semblaient bien plus intéressés par leur campagne de communication que par l’organisation des secours et de l’aide humanitaire.

Il est choquant de constater que toutes les organisations liées à l’appareil d’État ou au gouvernement sont restées pratiquement aux abonnés absents. L’inefficacité des équipes de recherche et de sauvetage est apparue dès le début, les quelques équipes de secours existantes ayant été dépêchées sur place sans l’équipement ni l’effectif élémentaires.

Même les citoyens ordinaires d’Istanbul, Izmir et Ankara ont pu se rendre dans la zone sinistrée, mais les institutions et les fonctionnaires de l’État, pour une raison ou une autre s’en sont montrés incapables. Le « tout puissant » Erdoğan, qui se considère comme un leader mondial, est resté muet sur les ondes et n’a pas prononcé de discours. La première apparition d’un représentant du gouvernement a été celle du chef de l’Autorité de gestion des catastrophes et des urgences (AFAD), qui était tout simplement désemparé. Ensuite, des représentants du Parti de la justice et du développement (AKP) d’Erdoğan ont affirmé que l’Alliance populaire au pouvoir, qui comprend également le Parti du mouvement nationaliste (MHP), travaillait activement dans les zones sinistrées, ajoutant ainsi, à la première occasion, une dimension politique à la « catastrophe naturelle ».

(İzel Sezer – İleri Haber)

Le gouvernement et les représentants de l’État semblaient beaucoup plus préoccupés par leur campagne de communication que par l’organisation des secours et de l’aide humanitaire. Pendant ce temps, Twitter, la principale source d’informations concernant les recherches et les secours, a été officiellement fermé, le gouvernement craignant toute critique ou agitation politique. Les médias sociaux sont donc restés muets, peut-être au moment le plus crucial pour les opérations de secours.

L’aide humanitaire envoyée par les partis d’opposition et les groupes tels que le Parti démocratique des peuples (HDP) a été saisie par l’État, et toutes les équipes de recherche et de sauvetage indépendantes se rendant dans la région ont été interdites. L’AKP a exigé que tous les efforts, l’aide ou les groupes de volontaires passent par l’appareil d’État et reçoivent une validation officielle. Ainsi, alors que les programmes d’aide officiels étaient presque totalement absents le premier jour, toutes les autres initiatives devaient dorénavant être centralisées sous l’égide de ceux avaient échoué à faire face. À Antakya et dans d’autres villes, il a fallu trois jours entiers pour que la capacité de gestion des catastrophes soit pleinement opérationnelle et, même alors, elle s’est limitée aux centres urbains, sans tenir compte des banlieues ou des villages.

L’aide humanitaire envoyée par les partis d’opposition et les groupes tels que le Parti démocratique des peuples (HDP) a été saisie par l’État.

La gestion des catastrophes et Turquie néolibérale

La vulnérabilité de la Turquie et des territoires qui l’entourent aux catastrophes naturelles n’est un secret pour personne. Cependant, les désastres accablants auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui n’ont rien à voir avec la « nature ». Ils sont le résultat direct de la néolibéralisation de la gestion de catastrophe en Turquie. Pour bien saisir cette réalité, il faut d’abord comprendre comment se sont constitués les groupes dominants en matière de capital, à savoir l’industrie de la construction (BTP) et les sous-industries connexes qui entretiennent des liens étroits avec les administrations de l’État.

(İzel Sezer / İleri Haber)

Les classes dirigeantes turques ont pris conscience de la valeur tangible des espaces urbains lorsqu’Izmit, un centre industriel proche d’Istanbul, a été frappé par un tremblement de terre catastrophique de magnitude 7,6 en 1999, tuant plus de 18 000 personnes. Cette catastrophe s’est avérée bénéfique pour les acteurs du secteur de la construction et a entraîné un boom immobilier dû à la migration intérieure.

Deux ans plus tard, le gouvernement de coalition de l’époque s’est effondré, ouvrant la voie à Erdoğan et à l’AKP, qui ont remporté une victoire quelque peu inattendue [en 2002, NdT]. Son parti a toujours été étroitement lié aux « Tigres d’Anatolie », surnom donné aux capitalistes conservateurs qui ont profité de l’industrie de la construction. À partir des élections locales de 2004, des politiques d’urbanisation et « d’investissement dans l’immobilier » ont été progressivement mises en œuvre. Le but premier en était d’augmenter et d’optimiser les profits des secteurs liés à la construction urbaine et à l’immobilier.

Alors que les programmes d’aide officiels étaient presque totalement absents le premier jour, toutes les autres initiatives devaient dorénavant être centralisées sous l’égide de ceux avaient échoué à faire face.

Afin de tout placer sous le contrôle total de l’AKP et de ne laisser aucune autonomie aux différentes entités, Erdoğan a remodelé de nombreuses agences. Pour centraliser la gestion de catastrophe, le gouvernement AKP a créé l’AFAD en 2009. Après le 6 février, il est devenu évident que les efforts officiels n’avaient rien à voir avec une réponse d’urgence ou une gestion de catastrophe, mais visaient plutôt à donner une façade à cette institution, tout en dissimulant les ambitions plus sérieuses du gouvernement en matière de rentabilisation. Comme d’autres institutions publiques, l’AFAD a déménagé ses bureaux, passant de modestes bâtiments à de vastes et splendides esplanades. Cette méthode est souvent considérée comme un « trou noir » dans le budget de l’État et elle est devenue un moyen de financer les entrepreneurs.

Le Croissant Rouge turc (Kızılay) a connu le même sort. Alors qu’il jouait un rôle pivot lors de catastrophes et de situations d’urgence, il est aujourd’hui incapable de coordonner la moindre opération de secours. Le Croissant Rouge possède la plus grande usine de production de conteneurs du pays, à Malatya. L’usine peut produire deux cents conteneurs en vingt-quatre heures grâce à ses 120 employés travaillant en trois huit. Cependant, on a découvert que l’usine, qui est considérée comme l’une des plus grandes usines de production de conteneurs au monde, avait cessé de produire, en dépit de la catastrophe provoquée par le tremblement de terre. Dans le cadre d’une opération de communication, le responsable du Croissant Rouge a diffusé une vidéo de l’usine produisant des conteneurs. On s’est vite rendu compte qu’il s’agissait d’une vidéo ancienne, et que les conteneurs n’étaient pas destinés à pallier les effets du tremblement de terre, mais – comble de l’ironie – à une entreprise de construction influente du nom de Rönesans.

(İzel Sezer – İleri Haber)

Les milieux politiques, dont le rôle aurait dû être de venir en aide aux organismes institutionnels pour leur permettre de mieux se préparer aux catastrophes naturelles, ont au contraire adopté des lois qui ont aggravé la situation en faisant fi des procédures légales. La loi d’amnistie sur le zonage de 2018 en est une illustration flagrante. Cette loi accorde une amnistie pure et simple aux personnes qui ont construit ou été propriétaires de bâtiments sans avoir obtenu les autorisations nécessaires, sans avoir suivi les processus de construction ou sans avoir effectué les vérifications nécessaires – rendant ainsi nulles et non avenues toutes les amendes et poursuites éventuelles. Pendant deux ans, des millions de demandes de permis de construire ont été déposées sans analyse structurelle appropriée, ce qui a permis de collecter des milliards de dollars de recettes fiscales au lieu d’amendes et de poursuites judiciaires bien méritées. Ce signe manifeste d’une politique non réglementée du logement en Turquie, qui illustre bien une approche néolibérale, a privé des millions de personnes vivant dans des zones à haut risque de toute protection appropriée.

Depuis deux décennies, le gouvernement AKP transforme tout le le pays en chantier et, au nom de son ambition à dégager une valeur ajoutée à partir des espaces urbains, encourage les projets de construction anarchiques et sauvages. Aujourd’hui, sa capacité de gestion de catastrophe est quasiment réduite à néant, alors que les institutions sont incapables d’organiser la moindre aide dans les zones sinistrées et que le reste du pays s’inquiète pour sa sécurité.

Lignes de faille politiques

Comme imprégné du concept d’hégémonie d’Antonio Gramsci, le gouvernement AKP a manœuvré politiquement, construisant (et brisant) les blocs de pouvoir, trouvant de nouveaux partenaires et obtenant le consentement d’une partie importante de la population. C’est ainsi qu’à partir de 2002, il a réussi à franchir tous les seuils critiques qui ont marqué l’histoire politique récente de la république turque. Les tremblements de terre dévastateurs qui ont frappé les provinces du sud-est de la Turquie ont révélé que le régime d’Erdoğan est désormais incapable de mener à bien de telles manœuvres politiques. La structure de l’appareil d’État en Turquie, incarnée par le pouvoir et la personnalité d’Erdoğan, n’a plus son visage d’antan.

La loi d’amnistie sur le zonage de 2018 accorde une amnistie pure et simple aux personnes qui ont construit ou été propriétaires de bâtiments sans avoir obtenu les autorisations nécessaires, sans avoir suivi les processus de construction ou sans avoir effectué les vérifications nécessaires.

Une fois le choc initial passé, il est devenu évident qu’à tous les niveaux de l’État, du plus haut au plus bas, il avait été impossible de réagir efficacement. En effet, les institutions censées intervenir en temps de crise ont été détournées par des bureaucrates, leurs proches et des groupes de capital affiliés au régime, qui en ont fait des instruments au service de leurs intérêts. On ignorait complètement où étaient passées les taxes destinées à l’aide aux victimes du tremblement de terre, les nouveaux bâtis censés avoir passé avec succès les inspections sismiques se sont effondrés, les institutions censées intervenir en cas de crise étaient absentes, et celles qui ont fini par arriver se sont révélées totalement inefficaces. De plus, le président ne s’est rendu dans la zone sinistrée que trois jours après la catastrophe. Même après deux semaines, la distribution des tentes qui devaient être envoyées dans la région sinistrée n’avait pas été organisée.

(İzel Sezer – İleri Haber)

Au lieu de cela, l’État a mis en place une campagne de type émission de téléréalité mettant en scène diverses célébrités afin de rallier le soutien de larges pans de la société et de créer un nouveau consensus social. Toutefois, cette campagne a également permis au régime en place de récompenser les investisseurs qui partageaient son idéologie, y compris ceux qui étaient impliqués dans la recherche du profit dans le secteur de l’immobilier. Le régime a encouragé ces groupes en les autorisant à déduire leurs dons de leurs déclarations fiscales.

Il est intéressant de noter que le gouvernement a déjà accordé d’innombrables amnisties fiscales à ces magnats de la construction. Suite à la collecte des fonds d’aide, le sentiment dominant dans la société a été que la détresse de la population avait été exploitée au profit de l’affichage soi-disant patriotique et auto-sacrificiel de certaines entreprises. Même après la tragédie du 6 février, les groupes en mal de profits y ont vu une chance, en appelant à la reconstruction rapide dans la région – et pas seulement dans un souci humanitaire de reloger les personnes démunies. En effet, même en pleine crise meurtrière, les avantages politiques et économiques liés aux services logistiques, à la reconstruction et à l’enlèvement des débris sont incontournables pour certains grands groupes turcs.

Les mineurs, bien que risquant de perdre leur emploi, sont immédiatement arrivés dans la zone du tremblement de terre pour extraire les gens des décombres.

Si le gouvernement avait fait sa part, le rôle de ces organisations serait resté symbolique. Cependant, aujourd’hui, la principale fonction de l’État semble être de coordonner une campagne publique de communication, principalement centrée sur sa propre image, et, bien sûr, de réprimer tous les gens qui osent exprimer leur mécontentement et leur désapprobation.

Une vague de solidarité

Même si l’État et le gouvernement n’ont pas réussi à organiser les secours et l’aide humanitaire, la gauche turque s’est mobilisée et les citoyens ordinaires ont également participé aux efforts. Dans les premières heures qui ont suivi le tremblement de terre, le Parti des travailleurs de Turquie (TİP) a rapidement mis en place un centre de coordination des catastrophes chargé de coordonner, de collecter et de distribuer l’aide dans la région. Le TİP, avec sa poignée de députés, a été l’un des premiers à arriver dans les zones touchées par la catastrophe, aux côtés de sept cents volontaires parmi lesquels des professionnels tels que médecins, équipes de recherche et de sauvetage et travailleurs du secteur de la santé.

(İzel Sezer – İleri Haber)

Actuellement, le parti est en train de mettre en place dans la région une ville provisoire constituée de conteneurs et fait appel à la solidarité internationale, et cela dans le but de répondre aux besoins de base de nombreuses familles, ce que l’AKP et les agences de l’État ne font toujours pas. Plusieurs mouvements ont exprimé leur soutien à la campagne, tels que le mouvement démocratique socialiste İVME et le centre de recherche de gauche Universus. Bien qu’il s’agisse d’une solution temporaire à un problème de grande ampleur, cette campagne peut tracer une nouvelle voie en matière de solidarité et d’avenir des espaces urbains en Turquie à partir d’une perspective de gauche.

La principale force d’opposition, le Parti républicain du peuple (CHP) de centre-gauche, a également déployé des efforts notables en matière d’aide humanitaire et de secours, les responsables des municipalités métropolitaines d’Istanbul, Izmir et Ankara se montrant très efficaces sur le terrain et répondant aux besoins fondamentaux et urgents de milliers de gens. Le chef du CHP, Kemal Kılıçdraoğlu, plus particulièrement, a été présent dans la zone sinistrée dès les premiers instants. Kılıçdaroğlu, qui est souvent enclin à s’aligner sur le discours de l’État, a immédiatement désigné (peut-être pour la première fois) Erdoğan et ses fonctionnaires comme étant les principaux responsables de la catastrophe, affirmant qu’il (Kılıçdaroğlu) refusait de considérer cette question comme indépendante du contexte politique.

Depuis deux décennies, le gouvernement AKP transforme tout le pays en chantier et, au nom de son ambition à dégager une valeur ajoutée à partir des espaces urbains, encourage les projets de construction anarchiques et sauvages.

Les mineurs, bien que risquant de perdre leur emploi, sont immédiatement arrivés dans la zone du tremblement de terre pour extraire les gens des décombres. L’attitude agressive de la police à certains moments témoigne de l’embarras du gouvernement face au travail des forces progressistes, des syndicats et des organisations populaires qui mènent des opérations de secours dans les villes détruites. C’est l’Association des avocats progressistes (ÇHD) qui a aidé ceux qui avaient besoin d’avocats, et beaucoup ont monté la garde pendant des heures pour s’opposer à la décision controversée de démolir un bâtiment public dans la zone du tremblement de terre, bâtiment qui abritait des documents importants concernant les permis de zonage et les autorisations d’inspection des bâtiments.

(İzel Sezer – İleri Haber)

Des membres du Parti communiste de Turquie (TKP) ont été arrêtés sous l’inculpation d’« insulte envers l’État » alors qu’ils participaient aux opérations de secours. Nombreux sont les autres groupes de gauche et socialistes qui opèrent dans les zones sinistrées, établissant des abris temporaires pour les victimes et fournissant une aide humanitaire bien plus efficace que celle de l’État. Au lieu d’être dirigés vers des institutions publiques, les dons ont été envoyés à des organisations indépendantes et politiques. Même Haluk Levent, un chanteur qui, au nom de la société civile, a fondé une organisation caritative, AHBAP, a été pris pour cible bien qu’il ait affirmé travailler en coordination avec l’État. Les initiatives prises en dehors de l’appareil d’État dans un large éventail de domaines n’ont fait que mettre en évidence l’incurie de l’État.

Pour la première fois peut-être, depuis dix ans, grâce cette immense vague d’aide, de coopération et de travail d’équipe, la société turque a retrouvé le sens de la solidarité. Il est trop tôt pour dire que l’ancien statu quo est en train de mourir, mais un nouvel ethos progressiste peut se construire si cet effort de solidarité va au-delà de la satisfaction des besoins de base, et devient une mobilisation qui peut faire pression sur le régime pour qu’il réponde aux autres demandes des victimes du tremblement de terre. Face à la désinvolture du gouvernement, les forces de gauche turques ont prouvé leur capacité à agir dans ce sens, et potentiellement à faire bien plus encore.

Contributeurs

Anıl Kemal Aktaş est militant et cofondateur de İVME Hareketi, une plateforme politique socialiste démocratique, et chercheur indépendant dans le domaine des politiques de l’écologie et des droits humains.

Kubilay Cenk Karakaş est un analyste politique marxiste, actuellement président d’Universus, un centre de recherche de gauche situé à Istanbul.

Source : Jacobin Mag, Anil Kemal Aktas, Kubilay Cenk Karakas, 25-02-2023

Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

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Commentaire recommandé

Auguste Vannier // 31.03.2023 à 11h59

Maintenant que Erdogan ne semble plus un allié fiable des USA (qui ont déjà essayé leur habituel « regime change »), rien ne va plus.
La Turquie, magnifique pays, avec d’immenses ressources naturelles et une culture millénaire, s’est considérablement développée ( j’ai pu le constater à 25 ans de distance entre 2 longs séjours). Pas beaucoup plus de problèmes socio-politiques que dans le reste de « l’occident collectif », et en réalité pas moins de démocratie qu’en France.
Désormais tourné vers le pôle géopolitique asiatique (comme la Russie), Erdogan est placé dans le camp des « méchants » et du mal, par tous ceux qui se pensent dans le camp du bien.

10 réactions et commentaires

  • Auguste Vannier // 31.03.2023 à 11h59

    Maintenant que Erdogan ne semble plus un allié fiable des USA (qui ont déjà essayé leur habituel « regime change »), rien ne va plus.
    La Turquie, magnifique pays, avec d’immenses ressources naturelles et une culture millénaire, s’est considérablement développée ( j’ai pu le constater à 25 ans de distance entre 2 longs séjours). Pas beaucoup plus de problèmes socio-politiques que dans le reste de « l’occident collectif », et en réalité pas moins de démocratie qu’en France.
    Désormais tourné vers le pôle géopolitique asiatique (comme la Russie), Erdogan est placé dans le camp des « méchants » et du mal, par tous ceux qui se pensent dans le camp du bien.

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    • Moussars // 31.03.2023 à 13h36

      C’est sans doute pourquoi la Turquie est toujours dans l’OTAN et occupe toujours une partie d’un pays européen, Chypre…
      L’OTAN n’attaque pas la Turquie qui un de ses pays membres depuis 30 ans ? Il y a quelque chose que je n’ai pas compris ?

        +8

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      • Zop // 31.03.2023 à 21h49

        Apparemment oui. Renseignez-vous du côté de l’histoire, apprenez ce que voulait dire EOKA-B et ENOSİS. Ne vous arrêtez en si bon chemin et voyez les massacres perpétrés par les Chypriotes Grecs. Désormais il y a 2 états car toutes les solutions proposées ont été rejetées par les Grecs y compris le plan Annan. (Chypriotes et autres) Et surtout ne parlez pas de l’Europe dont personne, hélas, ne prend au sérieux. On sait pourquoi !

          +4

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    • alain maronani // 31.03.2023 à 15h03

      Pas de problème socio-politique..plus de 30 % des gens de moins de 25 ans sont au chomage, Erdogan cultive sa base électorale la plus bornée et la plus radicale, l’islamisme turc, celui qui construit des mosquées radicales en France, comme a Strasbourg, clés en main, imman ne parlant pas francais avec..Il a osé réinstaller une mosquée a Sainte-Sophie a Istambul, pays ou la presse et les journalistes sont harassés en permanence..

      L’inflation est a 80 % par année, la désertification des campagnes s’accélère, l’émigration turque est considérable un peu partout dans le monde, pas seulement en Europe, vous devez confondre paysages (magnifiques) et ressources naturelles.

      La Turquie est surtout une zone de bas voire de très bas salaires et c’est ce qui explique la relocation massive du secteur du vêtement dans ce pays depuis quelques années.
      [modéré]

        +5

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      • Jaaz // 02.04.2023 à 01h01

        Ecoutez, l’inflation et la Turquie, cela fait juste 60 ans que ça dure. Juste avant l’arrivé de RTE, il y avait des billets de 1 million de lire, équivalent à une lire. L’inflation actuelle n’a rien de délirant pour la population, même s’il y a des abus au niveau des forces économiques: le pouvoir, au moins, réagit et ajuste les revenus minimums et les pensions de retraite en conséquence. Il y a une résilience turque sur ce point au moins. En France, où certains se moquaient de l’inflation turque et de la chute de son économie, on découvre les affres de ce phénomène, sans y être préparé, en sans aucun amortisseur.
        Concernant, erdogan,, l’islam politique, sainte-sophie…franchement vous mélangez tout, et surtout avec la vision binaire très franco-française qui consiste à ne voir, parmi la diversité des pays à majorité musulmane, soit des pays islamistes, soit des régimes militaires anti-islamiste (pas laïc pour autant). La Turquie est un pays de paradoxes très difficile à appréhender pour un esprit binaire.

          +2

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    • alain maronani // 31.03.2023 à 19h51

      Désormais tourné vers le pôle géopolitique asiatique…la Turquie fait partie du continent asiatique…et les changements de régime en Turquie étaient une spécialité des militaires. La Turquie s’intéresse avant tout a l’Asie Centrale.

      La crise financière qui a débuté en 2018 a frappé l’ensemble de la population. La valeur de la livre turque s’est effondrée, les prix des produits de base ont grimpé en flèche, l’inflation – qui atteignait 85,5 % en octobre dernier et n’est plus « que » de 55 % – a érodé le pouvoir d’achat des Turcs. Des milliards de dollars ont quitté le pays, les coûts du carburant et de l’énergie ont grimpé en flèche et le tremblement de terre de février a tué au moins 45 000 personnes (le total n’est pas encore connu) et laissé des millions de sans-abri.

      L’article traduit du site américain explique très bien ce qui se passe en Turquie et les aventures extérieures de Erdogan n’arrivent plus a masquer son bilan.

      Il n’y a eu aucune volonté des USA de changer Erdogan pour quelqu’un d’autre ou alors je ne suis pas l’actualité et les USA ont contribué a la capture du dirigeant du PKK Abdullah Öcalan a la condition que celui-ci ne soit pas exécuté.

      Erdogan n’est pas dans le camp des méchants ou des gentils mais dans celui des imprévisibles

        +3

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      • Lt Briggs // 31.03.2023 à 20h13

        « L’article traduit du site américain explique très bien ce qui se passe en Turquie et les aventures extérieures de Erdogan n’arrivent plus a masquer son bilan. »

        Quand on pense qu’en matière de politique étrangère Erdogan n’avait que le slogan « zéro problème avec nos voisins » à la bouche depuis son arrivée au pouvoir en 2003… Là, c’est plutôt problèmes avec tous ses voisins ou presque ! Ça peut paraître incroyable mais ça fonctionne, parce que le pays occupe une position exceptionnelle : à cheval sur 2 continents, contrôlant les détroits, un héritage culturel qui s’étend loin en Asie centrale, un accueil massif de réfugiés sur son sol ce qui lui assure une mise en sourdine des critiques venant des pays européens de peur qu’il n’ouvre grand les frontières…
        Mais avoir le verbe haut ne fait pas une politique cohérente. Je ne suis pas certain que lorsque le règne d’Erdogan s’achèvera, il en reste grand chose.

          +1

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      • Castor // 01.04.2023 à 18h56

        « ll n’y a eu aucune volonté des USA de changer Erdogan…  »

        Vous ne devez pas beaucoup suivre l’actualité en effet. En juillet 2016 le gouvernement Turc réclame aux Etats-Unis l’extradition du prédicateur musulman en exil, Fethullah Gülen, accusé tour à tour d’être l’instigateur du putsch contre Erdogan ou d’être un pion aux mains de la « force » qui a planifié le coup d’état.

        Fethullah Gülen est la bête noire d’Erdogan. Les Etats-Unis le savent et ce n’est sans doute pas un hasard s’ils l’hébergent. Le rapprochement de la Turquie avec la Russie peut être le motif principal de ce soutien.

        La « force » en question ne pouvait être que les Etats-Unis. Et il est probable que l’union des gülénistes et de l’armée turc ait été favorisée par une force extérieure.

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  • Louis // 01.04.2023 à 10h36

    Je ne suis jamais hélas allé en Turquie 🇹🇷 Mais c’est un pays magnifique. Je regarde assidûment sur Netflix des séries turques. J’ai remarqué que les portraits d’Ata Turk, le fondateur de la République turque, étaient partout ainsi que les drapeaux turcs. Les séries évitent soigneusement d’aborder les sujets politiques et sociaux mais ces derniers finissent toujours par transpirer d’une façon ou d’une autre, pour peu que l’on soit attentif. Ce qui me frappe avant tout, c’est ce tiraillement permanent entre modernité et traditions, cette nostalgie d’une grandeur ottomane disparue. Et puis, cette sensibilité , ces sentiments romantiques, façon turque qui donne un charme très particulier, et qui imprègne toutes les séries y compris celles qui décrivent des militaires… Un jour je l’espère, j’irai en Turquie 🇹🇷

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  • Jaaz // 02.04.2023 à 01h13

    Article très orienté, manifestement rédigé par des militants du parti des travailleurs ou du TKP, c’est-à-dire, pour essayer d’expliquer cela pour les esprits français: un mélange d’extrême-gauche, de nationalisme, de kémalisme, de militarisme, d’anti-americanisme et d’anti-erdoganisme. De là à en venir à dire que l’Etat était totalement défaillant, alors que les services de secours et notamment l’AFAD ont une grande expérience, et notamment sur des théâtres d’opération à l’étranger, c’est franchement faire une propagande que même le principal opposant, le CHP, n’aurait pas osé.
    La zone du sinistre était aussi grande que le Portugal. Imaginons donc un peu ce qu’auraient fait les services de secours portuguais, si le désastre s’était produit dans leur pays.
    Concernant le prétendu souci premier de communication des autorités, là encore c’est contraire à la réalité: très vite conscient de l’étendue géographique de la catastrophe, le gvt turc n’a pas hésité à solliciter l’aide technique internationale, qui est arrivée massivement, et qui n’était même pas suffisante au vu de l’étendue.
    Rony Brauman avait bien expliqué cela sur un plateau de France 24, et leur reporter, Ludovic de Foucaud, faisait des tournages intéressant. Mais cet article est un grossier exercice de propagande très franchement.

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