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14.décembre.201114.12.2011 // Les Crises

[Invité] Les moutons de Panurge de la finance, par Joe Chip

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Introduction : J’ai le plaisir de publier ce jour un billet invité d’un lecteur du blog, Joe Chip, qui m’a proposé un billet sur la finance moderne. J’aimerais qu’il y ait plus de témoignages personnels de ce type sur le blog ; ainsi, si vous avez envie de me proposer un billet de ce type, anonymement, n’hésitez pas. Je sais ô combien sont nombreux les personnes qui « subissent » les dérives du financiarisme quel que soit leur niveau de responsabilité, qui pensent « mais ce système déraille complètement, nous allons dans le mur, et je ne peux rien faire » : exprimez-vous au moins sur ce qui se passe pour enrichir nos visions ! Olivier Berruyer

Présentation de l’auteur. Je suis programmeur, j’ai travaillé comme tel pendant une douzaine d’années (1985-1996) pour des traders, essentiellement pour informatiser leur analyse technique. J’ai commencé par hasard, à 24 ans : j’ai répondu à une petite annonce d’une boîte qui cherchait un informaticien pour utiliser le PC, tout récent, avec deux disquette 5 pouces et un écran VGA, imprimante à aiguilles, du beau matos, quoi.

Ce qui suit est ma vision des traders, qui est biaisée par le fait que j’ai surtout croisé des « petits » traders, et non des gestionnaires de gros fonds de placement ; cependant, je ne suis pas sûr qu’ils soient très différents ; il est probable que parmi eux certains sont vraiment compétents et jouent le jeu comme il faut : comme une partie de cartes, avec des mains aléatoires et une prévisibilité probabiliste, en évaluant et en gérant les risques et les couvertures de ces risques.

Cependant, même cette manière de faire ne peut pas garantir le succès : le gain et le risque sont indissolublement liés… Ils essaient tous de trouver des failles, des situations où le risque est sur- ou sous-évalué, et donc l’espérance de gain intrinsèquement positive.

Les traders

Un trader est quelqu’un qui gagne de l’argent en faisant augmenter la valeur d’un portefeuille de titres comportant des risques, c’est-à-dire une probabilité non nulle de perdre de la valeur. Il peut, en général, gagner (ou perdre) de l’argent sur ces titres à la hausse comme à la baisse. Une partie des gains peut aussi provenir du produit de ces titres (intérêts des obligations, dividendes des actions).

Ces titres peuvent représenter des obligations, des actions, des devises, des matières premières, et tous les produits dérivés de ces titres. Un produit dérivé, ça peut être une promesse de vente ou d’achat d’un titre, à un prix donné, ce qui équivaut à une assurance contre la hausse ou la baisse. Ca peut être aussi un « panier de valeurs », un mélange de titres censé changer le rapport entre les risques et les gains. Il existe des produits dérivés de produits dérivés, par exemple les options sur contrat futur de matière première, ou des contrats futurs sur un index boursier.

Un trader peut ainsi jouer sur son propre portefeuille, ou bien sur de l’argent qu’on lui confie ; dans ce cas il est globalement payé par un pourcentage des gains effectués, parfois comparés à un indice : par exemple il va gagner 5% des gains, ou alors 50% de ce qui est gagné en plus que le Dow Jones etc. Tout est, dans ce monde, négociable. Il peut aussi être employé par une banque ; il gagne alors un salaire fixe, mais surtout des primes, également liées à ses performances boursières.

Il est donc payé pour sa sagacité, sa capacité à prendre des décisions de placement qui feront augmenter la valeur globale du portefeuille. Il est censé prendre ces décisions en analysant le marché, globalement et dans le détail. Par exemple il va analyser le marché des actions, globalement, et en détail une série d’actions précises.

Les marchés

On peut hiérarchiser les différents placements en fonction de leur risque et de leur potentiel de gain, qui sont liés : plus le risque est grand, plus le potentiel de gain est élevé, bien sûr. Le rythme des transactions est corrélé aussi : plus le marché est risqué, plus on a tendance à effectuer des transactions rapides, pour encaisser tout de suite un gros gain ou éviter tout de suite une grosse perte. D’une façon générale, la vitesse maximale d’un aller-retour est liée au rapport entre le gain possible et les frais de transaction (commission fixe ou spread). Si les frais augmentent, le rythme des transactions ralentit.

Les Bons du Trésor US (« Treasury Bonds »)

Considérés comme à risque nul (pour beaucoup de traders, le dollar est la monnaie de base, ils considèrent donc qu’il n’y a pas de risque de change), et ne rapportant quasiment que l’inflation. Quand on sort de toutes ses positions, l’argent qui est chez le broker (l’agent de change) est en fait placé en TB. Certains traders sont payés en fonction de la différence entre leur performance et celle des TB. Rendement de l’ordre de 3-4% par an.

Les Obligations (« Bonds »)

Placement à risque faible, dont les intérêts, prévisibles, comptent autant que la plus-value ; en général on les garde plusieurs années. Les rendements sont de l’ordre de 10% maximum par an.

Les Actions

Placement à risque un peu plus grand : la plus-value peut être vraiment beaucoup plus élevée que les dividendes, qui peuvent être surprenants (en bien ou en mal), mais sont la plupart du temps significatifs. On peut les garder des années, ou bien quelques mois, voire quelques semaines. En-dessous, la commission (soit fixe, soit le spread) devient trop élevée. Les rendements maximums sont de l’ordre de quelques dizaines de pourcents par an. On peut aussi gagner à la baisse, avec les mêmes risques, en vendant à terme (« short ») : on emprunte une action et on la vend, en espérant pouvoir la racheter moins cher plus tard, quand il faudra la rendre. Pour faire cette opération on dépose une « marge », une fraction de la valeur de l’action, qui est une garantie sur la perte possible : le prêteur de l’action ne prend aucun risque. En cas de perte, si on veut conserver la position, on doit payer la perte subie, pour reconstituer la marge (« appel de marge »). On peut aussi faire des achats sur marge…

Les Futures

Là, on arrive aux choses sérieuses. Il s’agit de contrats d’achat ou de vente (de matières premières, de devises, de Treasury Bonds, d’indices genre SP500…) à terme. Par exemple, du jus d’orange qui sera produit dans 6 mois.

Le principe de base est sain : un producteur a besoin d’argent tout de suite pour assurer sa future récolte d’oranges, qu’il vend d’avance. L’industriel doit être certain d’avoir suffisamment d’oranges dans 6 mois, et achète la récolte d’avance. Mais en fait, ce contrat n’est pas passé directement entre le producteur et l’industriel : il est émis sur un marché « presque liquide », et circule tant que la livraison n’est pas faite ; à la fin, la livraison est effectuée à celui qui détient le contrat, donc l’industriel, qui a pu l’acheter à n’importe quel moment. Les risques sont donc pris par les traders, qui s’achètent et se vendent ce contrat.

L’effet de levier est très grand, parce qu’on n’immobilise qu’une faible marge : par exemple, on achète en juin un contrat de livraison de 100.000$ de pétrole brut en septembre ; comme il est évident qu’on ne va pas se le faire livrer, qu’on va le revendre avant l’échéance ; on ne bloque donc que 1.000$ en garantie. On peut prendre une position à la hausse (« long ») ou à la baisse (« short »).

Si le pétrole monte (ou baisse, si on est « short ») de 1%, on gagne sa mise ; s’il baisse de 1% (ou monte, si on est « short »), on perd sa mise, et on doit payer 1.000$ pour conserver la position. Donc en fait on paie ce qu’on perd, ou on reçoit ce qu’on gagne, jour après jour, ou alors on sort de la position et on récupère sa mise. Si par exemple je gagne 1.000$ le premier jour, je peux acheter un deuxième contrat dans le même sens, et donc doubler le levier, et ainsi de suite… Ce qui amplifie le mouvement, et donc les risques… Mais donne des possibilités de progression géométrique des gains (et des risques…), et donc facilement une progression exponentielle des cours, si tout le monde fait pareil, ce qui ne manque pas d’arriver en cas de forte hausse.

Les Options

Là, c’est du délire… On peut acheter ou vendre des promesses d’achat ou de vente sur à peu près n’importe quoi, n’importe quand, et à n’importe quel prix… A la base, ça sert à couvrir les risques sur le cours du « sous-jacent » : on paie une petite prime, et on est assuré (en prenant donc le risque que ce soit inutile), ou alors on reçoit une petite prime, et on assure le sous-jacent, en prenant donc le risque de devoir payer la différence entre le prix du marché et celui que garantit l’option.

Donc on peut faire des montages sur différents termes et objectifs de prix, et construire des courbes de gains en fonctions du cours du sous-jacent à telle ou telle date… Là on peut gagner ou perdre plusieurs fois sa mise en quelques instants…

Les placements exotiques

On arrive dans le « n’importe quoi », à proprement parler: il s’agit de « coups » ponctuels, de manières provisoires de faire de l’argent avec des risques ostensiblement incalculables, et donc considérés comme nuls : par exemple, acheter des diamants, ou du whisky, une option sur un immeuble aux Canaries, ou une monnaie qui ne soit pas une devise, voire une firme de transport au Congo, le temps de la revendre plus cher, suite à l’information selon laquelle telle route sera bientôt praticable…

Souvent, ces placements sont vendus pendant quelques mois ou années par des vendeurs dont c’est le métier provisoire, qu’ils ne font que pour gagner de l’argent ici et maintenant : on peut retrouver les mêmes en agent immobilier ou en vendeur de brosse-miracle au marché ou en porte-à-porte. Comme ils sont bons vendeurs, ils développent le marché, multipliant dans un premier temps le nombre d’acheteurs.

Leur activité provoque donc des bulles, qui facilitent la vente en faisant miroiter à l’acheteur les gains probables si on prolonge les courbes… Il y eu ça notamment sur le diamant (des petits diamants vendus sous blister, avec garantie de rachat au dos, style « non-valide si l’emballage est abîmé »), le vin ou le scotch (qui prennent de la valeur en vieillissant), que sais-je encore ? Peut-être le « boom/krach » des tulipes en Hollande était-il aussi de leur fait ?

Les deux types d’analyse boursière

Il y a deux grands types d’analyse sur les placements boursiers : l’analyse fondamentale, et l’analyse technique. Elles reposent toutes les deux sur des croyances, mais diffèrent par ce qu’elles considèrent comme informations nécessaires à la décision de vente ou d’achat. La plupart du temps, ces deux analyses sont plus ou moins mixées, par exemple la stratégie est dictée par l’analyse fondamentale, et la tactique par l’analyse technique. Mais il y a des traders qui sont quasiment ou totalement des puristes de l’une ou de l’autre.

L’analyse fondamentale

La croyance fondatrice est que le marché trouve toujours le juste prix d’une valeur.

L’analyse fondamentale s’occupe de calculer ce juste prix à partir des informations objectives extérieures à son cours actuel, par exemple, dans le cas d’une action, elle s’attache à calculer la valeur comptable de la société concernée et donc d’une action, ainsi que du dividende fourni. Elle applique un « PER » (price-earning-ratio) qui est un multiplicateur pour calculer la valeur d’une action par rapport à son dividende, en modulant en fonction notamment de la valeur comptable, de la conjoncture, etc.

Le but du jeu est d’acheter une valeur quand elle est sous-évaluée; ou de la vendre « short », en supposant que le marché va automatiquement ajuster le prix à sa valeur « réelle », et bien sûr de la vendre quand elle est surévaluée. Malheureusement, le PER réel varie énormément, donc ça ne marche pas…

L’analyse technique

L’analyse technique, elle, est fondée sur la croyance que toute l’information nécessaire à la prise de décision au sujet d’une valeur est contenue dans son prix, ou plus exactement dans la succession de ses prix, autrement dit dans la forme de son graphique de cours. Cette croyance n’exclut bien sûr pas celle selon laquelle le marché trouve toujours le juste prix.

L’analyse de la forme des courbes de cours peut être de forme géométrique, avec identification de « niveaux de résistance » (des lignes droites qui sont sensées définir des seuils) et de tendances (peut-être la seule chose un peu réaliste, mais qui n’a aucune valeur prédictive), et aussi de choses plus exotiques du genre « patterns » : « head & shoulders », qui a la forme de trois pics successifs, avec celui du centre qui est plus haut, et aussi parfois des systèmes tout faits, par des génies auto-proclamés, qui les vendent, s’exposant à la question proverbiale « if you’re so smart, why ain’t you rich ? »…

Elle peut aussi être arithmétique : on fait des calculs qui disent si ça va monter ou descendre ou plutôt s’il faut acheter ou vendre… L’exemple de base est la moyenne mobile : on achète quand le cours passe au-dessus, on vend quand ça passe en-dessous… Mais il y a des tas de recettes plus ou moins empiriques, basées sur des indicateurs parfois pertinents, mais qui n’ont aucune valeur prédictive, contrairement à ce que croient la plupart des traders techniques. Il y a un exemple permanent de tels raisonnement sur

http://www.boursorama.com/conseils/detail_conseils.phtml?num=6b26ce379aa326f69cfb263c250a2fc5

Bien sûr, il est amusant que ces gens semblent croire qu’ils font les choses de manière scientifique, alors que jamais leurs théories ne peuvent être remises en cause par un contre-exemple. Si on décortique ce qu’ils disent, la plupart du temps ça équivaut à « si ça continue à monter, ça va continuer à monter, sinon ça va baisser »…

Premier trader : le père tranquille

J’ai d’abord travaillé, vers 1984, au début de l’ère des PC, pour un vieux conseiller en investissements « traditionnel », qui était en fin de carrière et conseillait des clients encore plus vieux que lui, notamment sur leurs placements en actions, qu’il considérait comme un investissement à risque. Il tendait à conseiller globalement : quel pourcentage de sa fortune il fallait placer à risque, etc. J’ai croisé chez lui des investisseurs traditionnels, dont l’ambition était de gérer et de faire croître leur fortune en bon père de famille.

Il employait à temps-plein un vieux comptable scrutait les bilans et calculait la valeur théorique des sociétés cotées, afin de détecter les différences avec les capitalisations boursières. Mais ce comptable ne répugnait pas à téléphoner à de mystérieux contacts, qui avaient des informations, apparemment difficile à trouver, sur les boîtes étudiées.

Il s’agissait donc essentiellement d’analyse fondamentale des actions, mais ce père tranquille ne répugnait pas à miser un peu sur des marchés plus risqués, et il m’avait engagé pour l’aider à faire de l’analyse technique sur les Futures.

Pour lui, la question à se poser quand on faisait un placement à risque était « combien suis-je prêt à perdre ? », et la réponse à cette question permettait de prendre des décisions ; par exemple de sortir de tous les placements à risque à partir du moment où on avait gagné sur l’année un certain nombre de fois (3 ou 4) ce qu’on était prêt à perdre. Il était plutôt cultivé (littéraire), et politiquement actif : il finançait des mouvements très à droite, tendance traditionnalistes chrétiens. Il était consommateur de havanes et de bon scotch.

Ses résultats étaient raisonnablement bons ; il avait une vraie vision à long terme, et une gestion des risques efficaces, qui rendaient ses croyances personnelles peu influentes : de toutes façons, il trouvait dangereux de placer plus de 5% de son capital en placements à risques (y compris en actions).

Il avait une vision très saine de ce qu’est un placement : par exemple, quand un client lui demandait si acheter du diamant était un bon placement, il répondait que si on voulait acheter un diamant, il fallait le placer sur une bague et l’offrir à une femme, et que ce n’était pas un placement mais un bijou ; que le jour où l’on doit vendre ses bijoux, on se moque de la plus-value effectivement réalisée.

Il se moquait des placements exotiques. C’est lui qui m’avait parlé du coup du whisky : à une époque, des vendeurs proposaient le single malt jeune comme placement sûr à une dizaine d’années. Si on le vendait à au moins 12 ans d’âge, on réalisait mécaniquement une bonne plus value calculable dès à présent, sans aucun risque. En plus, marché liquide (!) : on peut vendre à n’importe quel moment un whisky de n’importe quel âge. Séduisant, non ?

Sauf que, beaucoup de gens achetant du whisky jeune, ça a multiplié les stocks par rapport à la situation précédente, qui était économiquement saine. Le prix du whisky vieillissant étant lié à sa rareté, les plus-values se sont trouvées, année après année, bien inférieures à ce qui était espéré, rendant trop chers les frais de stockage. On a donc, disait-il, jeté des mètres cubes de whisky dans la Tamise… Pour lui, ça prouvait que le marché revenait toujours à la sagesse… Pour moi, ça veut plutôt dire que le marché peut entraîner des conséquences absurdes, et tout de même assez durables…

Deuxième trader : le cow-boy

J’ai ensuite travaillé un bon moment pour un trader plus jeune, qui ne faisait que du placement à haut risque et du trading plutôt rapide, essentiellement sur les « commodities » (les contrats futurs de matières premières, de devises et d’indices boursiers). Il me payait pour écrire et mettre au point un programme de tests de systèmes basés sur les cours, analyse purement technique, donc.

Il était pratiquement inculte, politiquement à droite, mais sans excès, juste le libéral de base, vaguement raciste par ignorance et ascendance coloniale, consommateur modéré de cocaïne, et lui aussi de havanes et de bon scotch (ça semble plus ou moins obligatoire dans ce milieu).

J’ai croisé pas mal de ses copains traders, parfois des fils de famille qui jouaient l’argent de papa, parfois des « conseillers » comme lui, parfois des traders employés par des banques. La plupart fortement « techniques », parfois un peu « fondamentaux », mais tous sur du trading plutôt risqué et rapide : le but était d’avoir des résultats spectaculaires, afin de faire rapidement une énorme fortune, ou montrer qu’on est pas seulement un héritier. La classe, c’est d’être celui qui a gagné plein de sous en spéculant, et à qui ses pairs téléphonent pour demander conseil.

Ils ne répugnaient pas à examiner la possibilité d’un placement exotique, parfois suffisamment sérieusement pour que ça leur coûte un peu d’argent, mais je n’en ai jamais vu un aller jusqu’au bout… Même à l’époque, j’aurais aimé voir ça. Au moment de la chute de l’URSS, quelques opportunités se sont présentées, notamment dans l’achat de métaux « physiques »… Mais rien ne s’est jamais concrétisé, peut-être parce que c’était trop compliqué, bien plus compliqué que de téléphoner pour donner un ordre d’achat ou de vente.

Les croyances

Tous les traders « techniques » semblent partager la croyance selon laquelle l’évolution des cours est déterministe et prédictible. J’ai fabriqué des fausses courbes à partir de variations aléatoires selon le même spectre de puissance que les vraies variations ; on y détecte aussi des patterns et des niveaux de résistance… Ce qui a convaincu « le père tranquille » de l’inanité de l’analyse technique en ce qui concerne les prévisions.

Cependant, comme tout le monde partage les mêmes croyances, ou presque, certaines choses deviennent vraies : par exemple, les seuils de résistance psychologiques : « si ça tombe en-dessous de 18, ça ira à 16 », peut se vérifier si tout le monde y croit, ce qui arrive. On peut d’ailleurs se demander si les systèmes vendus par les « petits génies » n’essaient pas de provoquer des croyances collectives prédictibles.

Le « cow-boy » m’a fait concevoir un programme avec lequel on pouvait faire des calculs sur les courbes et simuler des prises de position en fonction de ces calculs ; mais il n’a jamais réussi à assimiler les principes mathématiques évidents nécessaires à un système : il s’obstinait par exemple à optimiser des règles sur le passé d’une seule valeur, en croyant en la valeur prédictive du système ; or c’est idiot : si on prend un système qui fait n’importe quoi et qui perd lourdement, il suffit de jouer l’inverse pour qu’il gagne énormément ; ça n’en fait aucunement un système prédictif…

En plus, il ne voulait pas toujours faire ce que le système disait, il voulait « manuellement » éliminer les transactions perdantes effectuées par le système, ce qui le rendait du coup complètement inopérant, même selon ses critères à lui… Puisqu’une fois sur deux il supprimait une opération gagnante… Je pense que c’était parce que sans ça, il aurait eu l’impression de ne servir à rien. Il a fini par craquer et arrêter après avoir beaucoup perdu…

La plupart des traders sont irrationnels, tout en se croyant rationnels, mais comme ils partagent souvent la même irrationalité (« en bourse, il vaut mieux avoir tort avec tout le monde que raison tout seul »), ils peuvent parfois gagner beaucoup pendant des périodes suffisantes pour leur faire croire en leur propre expertise, un peu comme les joueurs pathologiques au casino, qui le deviennent en général parce qu’ils ont beaucoup gagné au début.

Les seuls vrais experts « techniques » sont probablement ceux qui disposent parfois d’informations privilégiées (et donc illégales), et les partagent, déguisées en informations techniques, une fois qu’ils ont pris les positions correspondantes ; du coup ils peuvent parfois lancer des rumeurs infondées, mais efficaces : ils sont crédibles, donc crus, donc leurs prédictions se réalisent…

Mentalité

Bien que ma vision soit biaisée parce que je n’ai vu de près que la pratique et la mentalité de ces deux traders-là, il ne me semble pas que cette pratique ni cette mentalité soient très différente de celles de leurs collègues. Leurs points communs (incompétence en mathématiques, croyance en une espèce de justice divine incarnée par les marchés et aussi en leur propre clairvoyance) m’avaient semblé assez générales dans tout le milieu.

J’ai quitté complètement ce milieu vers 1996 ; depuis, tout s’est fortement informatisé, les transactions ont encore accéléré, mais de ce que je lis à gauche et à droite, il ne me semble pas que la mentalité ait fortement changé ; je suis porté à penser qu’elle est inchangée depuis très longtemps. C’est un mélange de rationalité, de froid calcul apparent, mais dont les décisions reposent souvent sur une base irrationnelle.

Par exemple, lors de la chute du prix de pétrole début ’86, tombé en quelques semaines d’environ 33$ à environ 14$, ce qui permettait de gagner des dizaines de fois sa mise dans le même temps. J’avais prévu cette chute sur des critères fondamentaux (réunion de l’OPEP conclue sans accord sur la production), mais mon client (le père tranquille) n’a pas voulu prendre la position, parce qu’il voulait des critères techniques… Alors qu’à la base c’était un fondamentaliste…

J’ai vu aussi le krach boursier de 1987, et ses conséquences chez les traders… En fait, la bourse étant globalement toujours orientée à la hausse, beaucoup d’entre eux étaient considérés comme bons, parce qu’ils avaient battu le Dow Jones chaque année depuis des années… Mais le hasard peut suffire : imaginons 10.000 traders, ils ont environ une chance sur deux, chacun, de battre le Dow Jones… Donc après 5 ans, ils ont une chance sur 32 de l’avoir fait chaque année… Le hasard va donc créer environ 300 experts absolus, qui battent chaque année la bourse, et le double d’experts qui l’ont battue chaque année sauf une… Et de toute façon, il suffit d’une seule bonne année pour penser qu’on est bon… Les 4 autres, en plus, on n’a pas forcément perdu de l’argent : on en a juste gagné mois que le Dow…

Dans le pire des cas, on gagne à peu près ce qu’a gagné la bourse, puisque si on perd au début on devient plus prudent… Donc, la compétence nécessaire pour gagner dans un marché continuellement haussier (ce qui est le cas général) est proche de zéro.

Quand le krach s’est produit, ces gens ont perdu toute confiance en eux, leur estime d’eux-mêmes s’est effondrée, et certains sont devenus carrément dépressifs, d’autant que pas mal d’entre eux consommaient de la cocaïne, ce qui rend euphorique sur le moment mais dépressif ensuite… Or pour eux, la cocaïne, c’est festif, ils en prennent dans les périodes d’euphorie, quand ils gagnent… Quand ils perdent ils arrêtent, ce qui rend la dépression explosive… En tout cas, ça montre qu’ils croyaient vraiment en leurs raisonnements, en leur capacité prédictive, bref, en leur compétence.

Conclusion

C’est peut-être dû à mon parcours, mais j’ai l’impression que les « pères tranquilles » ont été remplacés par les « cow-boys », eux-mêmes peut-être remplacés par des « gangsters », genre de super-cow-boys, encore moins cultivés, encore plus opportunistes et dépourvus de scrupules, et encore moins aptes à réfléchir hors de leur cadre habituel.

Je pense qu’on se trouve actuellement dans une situation métastable : les gens qui sont sur les marchés restent dans la mentalité précédente, car changer serait reconnaître que ce qu’on a cru et utilisé avec succès pendant 15 ans n’était qu’une illusion, ainsi que la compétence qu’on s’auto-attribuait. Mais ce succès ne reposait que sur le fait que le marché était exponentiellement haussier…

Apparemment, on est dans un temps où les traders, toujours aussi inconscients de « l’effet -whisky » cherchent les bulles qui restent à gonfler : j’ai entendu conseiller d’acheter de l’immobilier, récemment. Ils prennent les bulles pour la réalité, sans voir que c’est leur propre activité de mouton de Panurge qui provoque les mouvements des cours, et non leur expertise qui leur permet de les prévoir,,,

Leur vision hallucinée de la réalité influence cette réalité dans un sens qui a tendance dans un premier temps à renforcer leurs illusions, et dans un deuxième temps les pousse à refuser d’y renoncer, même quand la réalité s’y conforme de moins en moins. Il est possible que ce soit vrai pour bien d’autres gens que les traders…

28 réactions et commentaires

  • bruno // 14.12.2011 à 06h46

    Très bonne idée que de donner place à l’expérience de gens de terrain autres que les analystes.
    Sans formation économique mais intéressé depuis quelques années, je dois vous dire qu’on apprend décidément beaucoup chez vous. On en arriverait presque à se croire un peu intelligent d’enfin parvenir à déchiffrer l’herméneutique économico-financière.
    Félicitations.

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  • pana // 14.12.2011 à 06h52

    J’avais déjà entendu une discussion sur les formules mathématiques appliquées journellement aux marchés boursiers par des super diplômés qui ne touchent pas le sol et sont complètement déconnectés de la vie réelle.
    Parce qu’effectivement, les mathématiciens gagnent aussi plus d’argent à travailler pour le monde financier qu’à construire des ponts !
    Comme les politiciens d’ailleurs qui ne pensent qu’à leur survie dans leur cercle journalier.
    Et ensuite, on vient demander au tout petit épargnant d’assumer les pertes et d’aller voter !
    Merci pour ce commentaire

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  • logique // 14.12.2011 à 08h11

    Les nouveaux traders sont plutot calé en mathématiques et informatiques, se qui renvoit l’analyse technique et fondamentale a la préhistoire. Du coup tout n’est que jeux de mathématiques et qu’il ne reste plus rien d’économique, si ont peut encore utiliser se terme dans le trading. Avant il était bon en économie, analyse fondamental, aujourd’hui la technique c’est le short massif seul ou en groupe, c’est vrai trés efficace lorsque l’on a la possibilité de supprimer les transactions de maniére massive sur les orders books. Les temps chagent les méthodes aussi. Par contre il semblerait que les derniers changement se fasse en obliant de prendre en compte le futur, puisque la gestion a long terme n’existe plus pour ainsi dire. La vision c’est demain, donc a trés court terme. C’est surement pour cela que tout se dégrade aussi vite, puisque plus rien n’est fait pour durer. 

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    • JoeChip // 14.12.2011 à 08h58

      « Du coup tout n’est que jeux de mathématiques et qu’il ne reste plus rien d’économique »

      Oui, c’est de l’analyse technique quoi.

      « Les nouveaux traders sont plutot calé en mathématiques et informatiques »

      C’était aussi comme ça qu’était vu – de l’extérieur – le « cow-boy ».

      « La vision c’est demain, donc a très court terme. »

      C’était déjà le cas à l’époque dont je parle. Parfois la vision n’était même pas demain, mais dans une heure.

      « ce qui renvoie l’analyse technique et fondamentale a la préhistoire »

      Je ne vois pas trop en quoi. La nouveauté technique, qui change tout à la gestion des risques, est un mythe constant, dans la finance, cf « La crise de 1929 » par Galbraith. A mon avis, les spéculateurs hollandais sur la tulipe, au XVIIème siècle, ont vraiment cru qu’il y avait du nouveau dans le monde de la tulipe…
       

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      • logique // 15.12.2011 à 08h40

        il ne faut pas confondre analyse et spéculation, dans la spéculation l’analyse qu’elle soit fondamentle ou technique n’as aucune importance. Se qui compte c’est la quantité de transactions est la quantité de fond disponiblea un momment T. Tout le reste les traders s’en tapent. L’analyse technique resemble plus a une analyse de flux tendu ou le stockage de fond tant a disparaitre du coup la volatilité augmente. Certes ont peut appéler cela de l’analyse technique mais cela n’as plus rien a voir avec se que cela était il y a 15 ans ou le marché n’en était qu’as ses débuts surtout en volume. M’enfin l’article reste trés interessant.

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        • JoeChip // 15.12.2011 à 09h52

          Je ne sais pas, je ne pense pas que tout ait changé juste au moment où j’ai quitté le milieu… En plus, je vois encore partout des textes d’analyse technique, des réflexions sur les « head&shoulders », « niveau de résistance », etc… Je ne vois pas bien comment on peut prendre une décision d’achat ou de vente en ne considérant que « la quantité de transactions est la quantité de fond disponibles » …

          « L’analyse technique ressemble plus a une analyse de flux tendu ou le stockage de fond tant a disparaitre du coup la volatilité augmente »

          Je ne comprend pas cette phrase…? On peut prendre des décisions d’achat ou de vente soit en pensant que tout l’info nécessaire est dans les cours, soit en pensant qu’il n’y a pas assez d’infos dans les cours. Je vois mal comment on peut spéculer sans tenir compte des cours…

          « le marché n’en était qu’à ses débuts surtout en volume »

          😀 euh non.

          Disons qu’on en était qu’à la première phase exponentielle… Tu confonds « le marché » et « la bulle » ….

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          • logique // 15.12.2011 à 11h20

            En fait c’est le « tout l’info est dans le prix qui n’as plus sens aujourd’hui » puisque le prix ne refléte en réalité aucune information a part le prix. Concernant les « shoulder » et autre fractales, il y a aussi l’analyse fréquentiel de la volatité. Mais encore une fois le passé ne permet toujours pas d’expliquer le futur surtout sur le marché.

            Je maintiens donc que la finance d’aujourd’hui se base plus sur l’effet médiatique + l’autoprédiction que sur n’importe quel analyse fondamentale ou technique. Comment expliquer une volatilité moyenne de 3% par semaine sinon qu’en terme de volume d’échanges et de quantité de transactions.

            M’enfin entre 1985 et 1996 les choses ont deja beaucoup changé, et entre 1996 et 2011 les choses ont encore changé. Le futur ne ressemble jamais au passé il est souvent pire que ne l’as été le passé, puisque les technologie utilisé son toujours beaucoup plus éfficace dans le bon sens comme dans le mauvais.

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  • BA // 14.12.2011 à 08h18

    En 2012, les « petits » traders et les « gros » traders vont s’éclater avec les dettes souveraines.

    Mercredi 14 décembre 2011 :
     
    Dettes : besoins de financement record en 2012.
     
    Les gouvernements vont encore emprunter des sommes colossales en 2012. L’OCDE estime que les besoins bruts de financement de ses pays membres vont atteindre 10.500 milliards de dollars, le double qu’en 2005.
     
    L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) n’a pas de doute : en 2012, on aura « un environnement hautement incertain, marqué par des préoccupations croissantes sur le rythme du redressement économique, des coûts d’emprunts en hausse, la persistance d’un risque souverain et la menace de contagion ».
     
    Un contexte macroéconomique défavorable qui placera les Etats face « à des défis inédits » quand il s’agira de financer leurs budgets. Les chiffres avancés par l’Organisation sont inquiétants : les besoins bruts de financement des pays membres de l’institution se sont élevés à 10.400 milliards de dollars en 2011, et culmineront à 10.500 milliards de dollars l’an prochain.
     
    Des montants en hausse de 1.000 milliards de dollars par rapport à 2007 et pratiquement doublés par rapport à 2005.
     
    Source : lesechos.fr

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  • bourdeaux // 14.12.2011 à 11h19

    La lecture de ce billet est bien instructive. Je croyais naïvement que les décisions de placement était prises après examen profond des derniers bilans de la société concernée, il s’agit en fait de placements moutonniers, qui ne se font que sur la foi des précédents représentés sur les courbes. J’ignorais que la bourse « prailleçait » le passé ! Olivier n’exagère peut-être pas tant que cela lorsqu’il parle de casino…
    Si le petit épargnant savait cela, risquerait-il encore son pécule en actions boursières ? Peut-être préfèrerait-il aller voir directement le tôlier de la petite boîte au bout de sa rue pour lui proposer un prêt ? Nous nous ferions tous traders…
    Je m’interroge depuis longtemps sur la différence fondamentale qu’il y a entre une petite boîte et une société du CAC. La première finance son développement avec son banquier, la seconde avec  un collectif  de joueurs en ligne. La différence, c’est le temps, la durabilité des engagements, et la solidité des croyances. Mon banquier ne suit pas que mon bilan, il ME suit, moi, petit entrepreneur, parce qu’il me connait et connait mon projet, mes ambitions.
    Puisqu’on en est à livrer nos expériences, en voici un petit bout de la mienne, qui n’a rien à voir avec la finance, et qui aura beaucoup moins d’intérêt  pour les lecteurs de ce blog. Je co-dirige une petite entreprise de bâtiment de 10 personnes, au CA de 3,4M l’année dernière, avec une partie sous-traitée non négligeable. J’ai donc affaire à des acheteurs, en tous genres, publics ou privés, toute l’année, qui me demandent des devis ou des tarifs annuels. Hors, ces acheteurs ont un point commun : il ne connaissent pas le coût de ce qu’ils achètent , et prennent le moins cher, quoi qu’il arrive. Ils ne le font pas tous dans le privé, certes, mais la pratique sur les marchés publics est omniprésente. Deux anecdotes pour l’illustrer :
    1°.  Un gros agenceur me convoque pour examiner avec moi un tarif annuel pour 2012 qu’il m’avait demandé 8 jours avant. Après examen comparatif avec le tarif d’un de mes concurrents qui fait partie des prestataires de mon interlocuteur, ce dernier m’annonce la couleur : « sur telle prestation, vous êtes 25% plus cher, sur telle autre, 28%, sur telle autre, 15 % plus cher, etc… » Je lui demande de m’indiquer le prix auquel il achète la prestation X : « je l’achète 11€ le m2 ». Je fais un petit calcul rapide et lui réponds : «  à ce prix-là je ne sais pas comment votre prestataire y arrive, c’est mon coût de revient », ce à quoi l’ « acheteur » m’a répondu : « …ben lui il y arrive ». 3 minutes plus tard, j’étais dehors.
    Analyse : les coûts de matériaux ne pèsent pas plus de 25% du coût global des prestations que je vends, le reste est de la main d’œuvre. Les entrepreneurs achètent plus ou moins bien leurs matériaux, mais les différences sont minimes entre celui qui achète bien et l’autre. La bataille se gagne vraiment sur 3 choses : la rapidité de pose et son coût, les frais généraux, et le bénéfice demandé. 3 critères sur lesquels notre entreprise est, en toute modestie, plutôt bien placée : pas de dividendes distribués depuis 4 ans, les bénéfices sont réinvestis ou ajoutés aux capital social ; Des locaux très modestes et loués à bas prix,pas de X5 ni de Q7 sur le parking, mais des kangoo, une 5008 et une golf (oui Olivier, je sais :la fausse note…). Je prends donc langue avec un ami qui fut salarié de cet agenceur il y a plusieurs années et qui y  a gardé des contacts, pour lui demander comment ils peuvent acheter leurs prestations si bas auprès de certains de mes concurrents. Sa réponse fût lapidaire : «  ben c’est simple, 75% des mecs qui bossent sur leurs chantiers sont pas déclarés » Un autre copain salarié d’un de mes fournisseurs de matériaux : « les gérants des boites que tu as en face de toi ont des casseroles au cul chez la moitié des distributeurs de matériaux d’ile de France ».
    2°.   L’acheteur public, lui est plus rapide à raconter, mais il commet le même « péché » : il achète moins cher que ce que cela vaut. Nous avons remporté l’année dernière un marché pour refaire deux salles de réunion à l’assemblée nationale (dont celle de la commission des finances…) Etonné d’avoir gagné là où, d’habitude nous perdions toujours, j’avais demandé à un membre de l’équipe de maitrise d’œuvre pourquoi nous avions été choisis. Réponse : « l’entrepreneur qui travaille généralement à l’assemblée nous fait vraiment trop de misères, alors là, on a fait pression pour en changer, car ces deux salles sont un chantier sensible qui doit absolument être terminé à la date dite ». J’ai appris le lendemain qu’en fait de « misères », il avait surtout oublié de déclarer certains ouvriers, ce qui avait rendu un contrôle de l’IT un peu pénible…
    Le chantier s’est bien passé pour nous, contrat rempli, tout le monde était content.
    Depuis, que s’est-il passé ? Deux consultations, deux échecs :les deux amants incestueux (l’état et le fraudeur) se sont rabibochés, et tout est reparti comme avant.
    Je suis bien long, il est temps de conclure. J’ignore où sont formés les acheteurs, n’ayant moi-même qu’un piteux niveau d’études, mais il est urgent de leur apprendre qu’acheter le moins cher n’est pas forcément mieux acheter. Si j’achète une voiture moins cher sans vérifier que ses freins fonctionnent, je vais mourir plus riche au premier virage, c’est tout. Passer commande à des entreprises qui vendent à des prix intenables pour celles qui alimentent notre système social, c’est se condamner à payer, plus tard, le sauvetage dudit système. Mais les objections que trouvent à ce raisonnement ceux qui cherchent le profit court sont si nombreuses et bien organisées, qu’  elles leur paraissent être des arguments solides et sincères, quand elles ne sont que la suite de leur propre inclination.

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    • Bahut02 // 15.12.2011 à 15h49

      Bonjour, 

      J’ai moi-même une solide expérience des appels d’offre et marchés publics (côté fournisseurs) et je suis parfaitement d’accord avec ce que vous dites, à une nuance près. Si le concurrent s’est fait attraper et a été condamné pour travail dissimulé, il ne peut logiquement plus présenter sa candidature à un AO. 

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  • ER // 14.12.2011 à 11h51

    Anodin, partage d’un conversation téléphonique hier:
    Etude de la renégociation de mon prêt immo avec ma banque…le gars de la banque m’annonce un taux à 3.68% hors assurance pour les 5.5 années restantes. Je lui dit c’est plutôt élevé comparé au taux de la BCE, qui à plutôt tendance à diminuer ces derniers temps. Il me répond « Oui mais les banques manquent de liquidité…bla bla bla ». Je lui répond simplement « encore un moyen de pomper sur le dos des petits » réponse ‘un sourire (audible) à peine embarrassé’… C’est pitoyable

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  • BA // 14.12.2011 à 11h59

    Mercredi 14 décembre 2011 :
     
    L’Italie lève 3 milliards d’euros de titres à cinq ans à un taux record.
     
    Le Trésor italien a levé mercredi 3 milliards d’euros d’obligations à cinq ans, soit le maximum prévu, à des taux d’intérêt qui ont atteint un nouveau record.
     
    Les taux ont en effet progressé à 6,47 %, contre 6,29 % lors de la dernière opération similaire le 14 novembre, atteignant un nouveau record depuis la création de la zone euro.
     
    Dépêche AFP.

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    • bourdeaux // 14.12.2011 à 12h06

      pourquoi les investisseurs se priveraient-ils de souscrire ? Ils savent pouvoir refiler le paquet à la Benne à Créances Extralucides la semaine prochaine .

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  • Marcus // 14.12.2011 à 12h02

    Témoignage intéressant !
    La grande mode aujourd’hui en trading ce sont les CFD.
    Pout l’AT voyez le lien qu’il y a sur le Blog d’Olivier : Pro-AT. Ils sont excellents en AT.
    Certains gagnent leur vie avec le trading pour compte propre comme Johnlee (pour ceux qui le connaissent un garçon super sympa) mais c’est à mon humble avis assez rare.
    Tout est dans le money management c’est-à-dire la gestion du risque ET la psychologie de la personne.
    Si on n’a pas ces deux qualités on se fait ramasser rapidement, analyse fondamentale et technique n’y peuvent rien.
    Je pense qu’il y a de moins en moins de petits investisseurs Long Terme car il n’y a aucune visibilité actuellement. Nous ne sommes plus dans les années fastes 1980-2000 où tout montait.
    Par contre le trading permet à certains de combler ce manque de visibilité Long Terme par le court-termisme et même ce qu’on appelle le scalping qui est de plus en plus en vogue. Le but c’est d’être exposé le moins longtemps possible au marché, quelques secondes.
    Mais c’est tout aussi dangereux ne vous y trompez pas….
     
    Amicalement.
    Marc

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  • Marcus // 14.12.2011 à 12h15

    Il y a un site qui pourrait être mis dans les Liens sur ce Blog c’est :
    http://www.unmondeencrise.com/category/non-classe/
    Bon aprèm.
    Marc

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  • bruno // 14.12.2011 à 12h43

    Un vieil article (2008) des Echos d’un ancien risk manager de Calyon :
    HERVE GLASEL : « Contrôle des risques : la leçon incomprise »
    http://archives.lesechos.fr/archives/2008/lesechos.fr/11/12/300308177.htm

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  • Jacques Coeur // 14.12.2011 à 15h28

    Bon ben, puisqu’on se lâche sur les boursicoteurs, je peux vous faire part d’une expérience scientifique qui a eu lieu en mars 2001.

    La société Barclays Stockbrockers, une équipe de chercheurs britanniques appartenant à la « British Association’s National Science » aidés par un psychologue de l’université de Hertfordshire, Richard Wiseman, ont imaginé et mis sur pied une expérience, certes de courte durée, une semaine du 15 au 22 mars, mais tout de même révélatrice quant au rôle du hasard en bourse et dans les performances des produits financiers vendus au grand public via les réseaux bancaires et autres sociétés de bourse.

    A l’identique que la célèbre expérience du singe mené par le Wall Street Journal avec un chimpanzé choisissant ses actions en lançant ses fléchettes sur des étiquettes représentant ces actions qui célébra au final la victoire du singe face aux « excellents » traders de Wall Street, un portefeuille d’une valeur fictive de 5.000£ (environ 7600 €uros) fut constitué par trois « investisseurs » : une fillette de 4 ans, Tia Laverne Roberts ,un financier, Mark Goodson, 39 ans et une astrologue, Christeen Skinner. Si le choix de la fillette ne s’explique que par l’action de son bras libre de tout mouvement plongeant dans le chapeau, celui de l’astrologue fut évidemment guidé par la position des planètes et celui du financier par ses connaissances approfondies des marchés financiers sans doute sanctionnés par de hautes études.

    Au terme d’une semaine boursière chaotique, le Footsie (l’indice phare de la bourse de Londres) s’étant effondré durant cette période, le vainqueur fut finalement celui qui réalisa le moins de pertes, c’est-à-dire Tia, 4 ans, réalisant une performance de -4,5% sur son investissement de départ, moins pire que celui de ses concurrents : -7% pour le broker et (tant pis pour les astres) -10% pour l’astrologue.
    http://www.charlatans.info/bourse.shtml

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  • Jacques Coeur // 14.12.2011 à 15h36

    Et puisque décidemment c’est leur fête, je ne résiste pas à vous faire part d’une étude pour la préparation d’une thèse à l’université de Saint-Gall, en Suisse, de Pascal Scherrer, un expert légiste, et Thomas Noll, un administrateur de la prison de Pöschwies (Zurich), qui date de cette année et qui est dédiée à la psychologie des traders.
     
    Conclusion : 

    les traders sont plus psychopathes que les psychopathes, du point de vue des caractères de tension et d’agressivité de la psychologie. Noll a déclaré au Spiegel : «Evidemment, on ne peut pas dire que tous les traders sont dérangés. Mais il s’est avéré qu’ils ont eu un comportement plus égocentrique et ont été plus enclins à prendre des risques que le groupe de psychopathes qui ont été soumis aux mêmes tests.»

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  • gibusw // 14.12.2011 à 18h36

    Pour ceux qui aiment la lecture, instructive :
    Le hasard sauvage, comment la chance nous trompe. Nassim Nicholas Taleb. Ed les belles lettres. 
    Sommes-nous vraiment capables de distinguer le génie visionnaire de l’imbécile chanceux ? Pourquoi nous obstinons-nous à vouloir trouver des messages sensés dans des événements dus au seul hasard ?
    Et n’aurions-nous pas une fâcheuse tendance à ordonner le réel selon une routine mentale biaisée, plutôt que de le voir tel qu’il est, avec toute son incertitude ?
    S’inspirant de disciplines aussi diverses que la littérature, la philosophie, la théorie des probabilités, la science cognitive et la finance, Nassim Nicholas Taleb montre comment notre esprit nous conduit à voir le monde, et en particulier les mécanismes de la Bourse, comme beaucoup plus prévisible qu’il ne l’est…
    Il étaye sa démonstration sur maintes anecdotes significatives et analyse la pensée et les actes d’individus qui ont su, chacun à sa manière, comprendre la chance : Karl Popper, le philosophe de la connaissance, Solon, l’homme le plus sage de la Grèce, le financier George Soros ou le voyageur Ulysse, nous emmenant de la cour de Crésus à la salle des marchés de Wall Street via la méthode de Monte-Carlo et la roulette russe…
    Réflexion essentielle, mais écrite avec un humour constant, ce livre remet en cause nos idées reçues sur nos représentations du monde et nous montre comment, malgré notre ignorance du hasard sauvage qui gouverne l’univers, nous pouvons quand même y vivre bien.
    Il est aussi l’auteur du Cygne Noir, best-seller mondial.
    Libano-américain, Nassim Nicholas Taleb est écrivain et philosophe des sciences du hasard. Depuis 2007, il est l’essayiste le plus lu et le plus traduit dans le monde, le seul à avoir anticipé la crise financière et son ampleur. Ancien trader des marchés, Taleb se consacre aujourd’hui à l’écriture et enseigne les rapports entre l’épistémologie et les sciences de l’incertitude à l’Institut polytechnique de la New York University où il a reçu le titre prestigieux de distinguished prof essor.
    Ceci est la 4è de couverture du bouquin, où il décrit de façon totalement concordante avec JoeChip, les comportements du monde des traders en 2005.

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  • labforecast // 14.12.2011 à 22h28

    Si une personne doit être lue en finance comportementale, ce n’est autre que Daniel Kahneman, Prix Nobel en 2002 (Théorie des perspectives). 
    Son dernier livre Thinking Fast and Slow:
    http://labforecast.blogspot.com/2011/12/la-bataille-dun-prix-nobel-pour-un-homo.html
    Le livre actuellement le plus reconnu par les théoriciens, écrit en Français est:
    « Psychologie des investisseurs » de Mickaël Mangot
     

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  • Nicolas Guillaume // 15.12.2011 à 15h22

    @joechip @logique
    Dans l’approche mathématique, il faut distinguer l’analyse technique (dite aussi « chartiste ») qui ne fait que plaquer des tendances sur les cours (des « charts »), très utilisées en France mais peu dans les pays anglo-saxons (car ne reposant que sur une base empririque et pas « scientifique » et ne faisant appel qu’a des mathématiques simples) et les modèles de valorisation de marché reposant sur la théorie des marchés (le « random walk » de Black & Schole) faisant appel à une mathématisation avancée, très prisées des anglo-saxons mais où les français sont aussi très renommés. 
    Tous deux, eux-mêmes, distincts de l’analyse fondamentale qui est de l’analyse financière des documents comptables des entreprises ou d’étude de marché ou « d’informations privilégiées » pouvant faire l’objet de modélisation, notamment à base d’indice (résultat/CA, PER,..)

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  • Fallen Leaf // 15.12.2011 à 16h23

    Superbe texte, très intéressant. L’anecdote du whisky devrait servir à bien des éditocrates comme métaphore de l’absurdité et de la nocivité d’une économie virtuelle sur l’économie réelle. Merci, Mr Chip 🙂

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  • Moi // 15.12.2011 à 19h21

    Excellent ce texte, ça se lit avec grand plaisir.

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  • Un_passant // 17.12.2011 à 09h49

    Cela me fait penser aux journaux lorsqu’ils s’étonnent d’une baisse après plusieurs jours de hausse (généralement 3, plus rarement 4 ou une semaine, les traders semblent souvent vendre le vendredi et acheter le lundi en période calme haussière). Pour moi, vu le côté quasi-systématique, c’est presque prévisible et s’explique en trois mots  : prise de bénéfices. Et certains font mine de s’étonner. C’est flagrant que le comportement est moutonnier pour peu que l’on prenne un peu de distance.

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