Source : Consortium News, Emily Benfer, Gregg Gonsalves, Danya Keene
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises
Les auteurs demandent instamment au CDC [ Centre pour le contrôle des maladies, NdT] de prolonger immédiatement son moratoire sur les expulsions d’urgence jusqu’au printemps prochain.
Un événement qui pourrait mettre en danger bien d’autres vies se dissimule dans la couverture médiatique de la pandémie, à savoir l’expiration de l’ordonnance temporaire des Centers for Disease Control and Prevention visant à mettre fin aux expulsions.
Cette décision, qui a pris effet le 4 septembre et qui prévoyait certaines protections contre les expulsions après l’expiration du moratoire temporaire de la loi CARES, pourrait expirer prochainement, à moins que le gouvernement fédéral ne prenne des mesures immédiates.
Nous demandons instamment au CDC de prolonger immédiatement son ordonnance d’urgence jusqu’au printemps prochain afin de donner à l’administration Biden et au Congrès le temps de décréter un moratoire efficace et de fournir une aide locative d’urgence supplémentaire.
Le CDC a émis l’ordonnance au début de l’automne, reconnaissant le danger que représentaient les expulsions pour la santé publique et la propagation de la Covid-19. Bien qu’elles soient rarement traitées comme telles, les expulsions constituent une menace pour la santé publique.
Comme nous l’illustrons dans notre nouvel article sur la politique de logement en cas de pandémie, même une simple menace d’expulsion peut augmenter le niveau de stress, l’anxiété et la dépression, ce qui peut affaiblir le système immunitaire. Les expulsions touchent de manière disproportionnée les populations à haut risque qui connaissent des taux plus élevés de maladie et d’infection, et peuvent entraîner certaines des comorbidités qui rendent les gens plus vulnérables aux complications de la maladie de la Covid-19 et à la mortalité.
En plus de ces problèmes de santé sous-jacents, les expulsions entraînent une situation de vulnérabilité, de clochardisation et de surpeuplement des logements qui augmente à la fois la fréquence et la proximité des contacts avec les autres et rend impossible le respect des stratégies de réduction de la pandémie.
Beaucoup de ceux qui perdent leur logement vont aller vivre chez des amis ou des parents, ce qui augmente le risque d’exposition à la Covid-19 pour tous les membres de la famille. En fait, des études sur d’autres maladies contagieuses ont montré qu’ajouter, ne serait-ce que deux nouveaux membres dans un ménage peut doubler le risque de maladie. Les personnes expulsées peuvent également voir leur accès aux tests Covid-19 et aux soins médicaux diminuer parce qu’elles sont obligées de déménager dans des quartiers plus pauvres, mal desservis et médicalement délaissés.
S’il est clair depuis un certain temps que la Covid-19 nuit de manière disproportionnée aux communautés de couleur, l’épidémie d’expulsions qui se profile risque également de peser le plus lourdement sur les personnes non blanches. Avant la pandémie, des études menées dans différentes villes ont montré que 80 % des personnes menacées d’expulsion appartenaient à des ménages non blancs. En fait, les ménages noirs étaient deux fois plus susceptibles d’être expulsés que les ménages blancs. Mais les plus vulnérables sont de loin les femmes noires, dont une sur cinq déclare avoir déjà été expulsée et qui, dans de nombreux États, sont deux fois plus nombreuses à être expulsées que les locataires blancs.
À un niveau sans précédent
Il se pourrait que nous soyons sur le point d’assister à une vague d’expulsions d’une ampleur sans précédent. Le manque à gagner estimé pour les loyers devrait dépasser les 24 milliards de dollars d’ici janvier. Une étude de l’Institut Aspen estime que 30 à 40 millions de personnes en Amérique pourraient être menacées d’expulsion au cours des prochains mois, certaines étant déjà contraintes de quitter leur logement.
Le laboratoire des expulsions de Princeton a retracé les expulsions depuis le début de la pandémie et a constaté que les moratoires fonctionnent, en réduisant les expulsions à 83 % en dessous des moyennes historiques. Dans le Massachusetts, par exemple, les demandes d’expulsion sont en augmentation depuis que le moratoire de l’État a expiré à la mi-octobre. De même, à Richmond, en Virginie, celles-ci ont dépassé de 395 % les niveaux historiques lorsque le moratoire fédéral sur la loi CARES a expiré.
Et, parallèlement à ces moratoires expirés, une tendance de plus en plus inquiétante se dessine : les cas de Covid-19 dans les États qui ont levé les moratoires ont augmenté à un taux 2,1 fois plus élevé que dans ceux qui les ont conservés. Le nombre de décès a été multiplié par 5,4. En fait, avec la levée des moratoires d’État, les États-Unis ont connu, selon les estimations, 433 700 cas supplémentaires dont 10 700 ayant entraîné la mort dus à la Covid-19 du seul fait des expulsions.
Comme nous le demandons instamment dans notre article, si nous voulons protéger la santé de chacun pendant une pandémie, alors nous devons protéger les personnes les plus susceptibles de contracter, de propager et de mourir d’une maladie infectieuse. Cela signifie qu’il faut donner la priorité aux personnes vivant dans la pauvreté et aux personnes de couleur, qui sont plus susceptibles d’être expulsées et donc de subir de graves préjudices sanitaires du fait de la Covid-19.
Si la première étape doit être une prolongation du moratoire fédéral contre les expulsions, nous devons faire bien plus. Les gouvernements des États et les collectivités locales doivent adopter des moratoires efficaces associés à des mesures de soutien sur le plan juridique et financier, telles que l’aide au loyer, les programmes d’alternative aux expulsions et le droit à un avocat. Il faut également adopter l’extension de Medicaid, qui peut offrir des voies pérennes pour réduire et prévenir les expulsions et les préjudices de santé publique qui y sont associés. Les gouvernements locaux doivent s’assurer que les protections des locataires soient appliquées et mises en œuvre correctement et que les locataires connaissent leurs droits.
Enfin, le gouvernement fédéral pourrait faire beaucoup pour empêcher de nombreuses personnes déjà sur le fil du rasoir de perdre leur maison, leur santé et même leur vie en instaurant une nouvelle série d’aides indispensables dont les bénéficiaires seraient les gens qui, dans tout le pays, sont confrontés aux conséquences de cette situation de crise.
Emily Benfer est professeure de droit invitée à Wake Forest Law, directrice fondatrice de la clinique de justice sanitaire Wake Forest Law, et présidente du comité du groupe de travail Covid-19 de l’American Bar Association sur les expulsions.
Gregg Gonsalves est professeur adjoint d’épidémiologie à l’école de santé publique de Yale, et professeur associé (auxiliaire) de droit à la faculté de droit de Yale.
Danya Keene est professeure associée de santé publique à l’école de santé publique de Yale.
Source : Consortium News, Emily Benfer, Gregg Gonsalves, Danya Keene, 11-12-2020
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises
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Commentaire recommandé
Selon la « théorie » économique dominante, il est tout à fait normal que les profits passent avant la vie de la population.
Ne vous étonnez donc pas si vous risquez de vous retrouver SDF du jour au lendemain et qu’on vous laisse crever en toute « bonne conscience » car TINA.
Ne vous en faites pas, les habitants des anciennes « colonies » de l’URSS ont déjà connu ce massacre et l’ont toujours en travers de la gorge après près de 30 ans de « liberté ».
Et comme me disait un vieux tchèque qui faisait un « bullshit job » en occident car son diplôme d’ingénieur agronome ne lui permettait plus de trouver un travail dans son propre pays : « Les occidentaux ne se révoltent pas car ils ne sont pas encore tombés assez bas »…
Et j’ajouterai que quand ils auront enfin l’idée de se révolter il sera bien trop tard car ils seront si profondément tombés en esclavage qu’ils en pourront plus ne serait-ce que penser à se rebeller.
Je suis très loin d’être fan des hypocrisies pseudo-socialo-marxistes qui dirigeaient d’une main de fer tout le « bloc soviétique » mais c’était pour la population un moindre mal car pour justifier leurs existences ces « gouvernements démocratiques » (pas pires que ceux que nous subissons aujourd’hui) avaient au moins l’avantage de permettre à l’ensemble de la population d’être nourrie, logée, soignée, éduquée et d’avoir un job qui n’était pas aussi inutile que la majorité de ceux que l’on trouve actuellement en occident.
Les « bouches inutiles à nourrir » doivent donc être exterminées pour le plus VOLER la « société » car c’est NORMAL.
C’est du moins ce que pensent les « élites » qui détiennent réellement les rennes du pouvoir, les « divins élus » n’étant que des pions jetables et facilement remplaçables qui leur sont totalement dévoués.
7 réactions et commentaires
Selon la « théorie » économique dominante, il est tout à fait normal que les profits passent avant la vie de la population.
Ne vous étonnez donc pas si vous risquez de vous retrouver SDF du jour au lendemain et qu’on vous laisse crever en toute « bonne conscience » car TINA.
Ne vous en faites pas, les habitants des anciennes « colonies » de l’URSS ont déjà connu ce massacre et l’ont toujours en travers de la gorge après près de 30 ans de « liberté ».
Et comme me disait un vieux tchèque qui faisait un « bullshit job » en occident car son diplôme d’ingénieur agronome ne lui permettait plus de trouver un travail dans son propre pays : « Les occidentaux ne se révoltent pas car ils ne sont pas encore tombés assez bas »…
Et j’ajouterai que quand ils auront enfin l’idée de se révolter il sera bien trop tard car ils seront si profondément tombés en esclavage qu’ils en pourront plus ne serait-ce que penser à se rebeller.
Je suis très loin d’être fan des hypocrisies pseudo-socialo-marxistes qui dirigeaient d’une main de fer tout le « bloc soviétique » mais c’était pour la population un moindre mal car pour justifier leurs existences ces « gouvernements démocratiques » (pas pires que ceux que nous subissons aujourd’hui) avaient au moins l’avantage de permettre à l’ensemble de la population d’être nourrie, logée, soignée, éduquée et d’avoir un job qui n’était pas aussi inutile que la majorité de ceux que l’on trouve actuellement en occident.
Les « bouches inutiles à nourrir » doivent donc être exterminées pour le plus VOLER la « société » car c’est NORMAL.
C’est du moins ce que pensent les « élites » qui détiennent réellement les rennes du pouvoir, les « divins élus » n’étant que des pions jetables et facilement remplaçables qui leur sont totalement dévoués.
+19
AlerterBien oui, mais le probléme n’est pas économique. On organise juste l’économie pour qu’elle serve mieu ses maitres. Hors aujourd’hui avec des aides aux pauvres il refusent de bien servir. il faut donc rendre leur condition plus misérable pour qu’ils redeviennent obéissants.
+1
Alerter« Ne vous en faites pas, les habitants des anciennes « colonies » de l’URSS ont déjà connu ce massacre et l’ont toujours en travers de la gorge après près de 30 ans de liberté ».
La Russie serait-elle une ancienne « colonie » de l’URSS ? Car les russes ont connus ce massacre également.
Lire l’excellent recueil de témoignages « La fin de l’homme rouge ».
+3
AlerterA étudier également : les problèmes en cascade.
Si le gens ne paient pas leur loyer , les bailleurs sont privés de rentrée d’argent , qu’est-ce qui se passe alors ?
Si le bailleur est un grand groupe , il doit avoir les reins assez solides pour résister à une série d’impayés… quoique !
Si le bailleur est un « petit » , un particulier ou si il est endetté , il coule.
Donc cette crise va avoir des suites , et pas seulement pour les locataires qui n’ont plus un rond.
+6
Alerter« Si le bailleur est un grand groupe , il doit avoir les reins assez solides »
Oui et puis surtout il recevra des aides de L’État.
+3
AlerterOui les secousses sismiques, quand les crises économiques puis financières succéderont à la crise sanitaire, finiront d’achever les plus fragiles.
Mon locataire ne paye plus depuis 5 mois. Ma surface financière me permet d’éponger le manque à gagner. Mais cela n’aurait pas été la même salade pour moi il y a seulement quelques années en arrière. Il y aura beaucoup de casse.
+0
AlerterNous avons outrepassé les limites de possibilités du bon fonctionnement de l’économie de marché. C’est un fait. Est en cause son inadéquation avec le progrès. Par artifices, tricheries tant bien que mal, nous sommes parvenus à maintenir un équilibre boiteux. Le délitement de la société est embrayé. Le monde ouvrier a essuyé les plâtres et c’en est pas fini pour lui. S’ensuivent les employés, techniciens, agent de maitrise et enfin les cadres ( péremption des compétences, poussée des nouveaux entrants ). Er rien ne se présente qui puisse contrecarrer cette marche infernale. De plus, et pour finir, le chômage n’est que rarement évoqué cause d’un énorme manque à gagner de la demande en économie du marché.
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