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17.novembre.202217.11.2022 // Les Crises

OPEP+, BRICS : Le nouveau leadership des coalitions des non-occidentales

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Des pays qui représentent plus de 80 % de la population mondiale et un pourcentage similaire du produit intérieur brut mondial sont parfaitement à même de voir les provocations brutales de l’administration Biden et ne les approuvent pas.

Source : ScheerPost, Patrick Lawrence
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

Le Président de l’OPEP, Bruno Jean-Richard Itoua, dirige la première réunion en présentiel de l’OPEP depuis la COVID-19. Image source : OPEP

Quelque chose d’une importance capitale s’est produit à Vienne, où l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, désormais connue sous le nom d’OPEP-Plus depuis l’inclusion de la Fédération de Russie, s’est récemment réunie pour sa première session en présentiel depuis 2020. Voilà une chose dont vous ignoreriez tout si vous vous fiez uniquement aux reportages des médias appartenant aux entreprises.

Le monde vient de prendre un virage important vers le XXIe siècle. sachons nous y adapter, et laissons à leur propre sort ceux qui refusent d’en prendre conscience.

Le président Biden, apparemment pas assez intelligent pour prendre conscience de la nouvelle ère qui se dessine et indifférent aux intérêts et aspirations des autres, a promptement semé toute la pagaille possible. La semaine dernière, il a menacé l’Arabie saoudite, qui copréside l’OPEP-Plus comptant la Fédération de Russie, de « conséquences » suite à ce qui s’est passé à Vienne. C’est ainsi que les empires agissent quand leur primauté est menacée : ils encouragent les courants de l’histoire qu’ils sont déterminés à entraver..

Comme on le rapporte partout, l’OPEP-Plus a décidé d’une réduction de la production de pétrole des nations membres à hauteur de deux millions de barils par jour à partir du mois prochain. Il se peut que cette réduction ne soit que de moitié, car de nombreux membres de l’OPEP-Plus – le Nigéria, par exemple – n’ont de toute façon pas atteint leurs quotas. Mais les prix du pétrole augmentent déjà, et nous le constaterons bientôt dans nos stations-service. L’augmentation des prix au détail risque de compliquer le destin politique de l’administration Biden et des démocrates au Congrès, juste à l’approche des élections de mi-mandat. C’est donc un problème de taille.

Mais ce n’est même pas la moitié de ce qui s’est passé à Vienne il y a deux semaines. L’Arabie saoudite, qui a longtemps été le moteur de l’OPEP, a effectivement déclaré que sa longue histoire de subordination à Washington, par laquelle la production de pétrole était échangée contre des garanties de sécurité, était sur le point de se terminer. L’un des alliés fondamentaux de Washington au Moyen-Orient, Israël étant l’autre, vient de faire un pas important vers la coalition des nations non occidentales pour former un bloc cohérent agissant dans ses propres intérêts.

Il s’agit de quelque chose de bien plus important qu’une simple formalité. Cela nous rapproche considérablement du nouvel ordre mondial dont la Russie et la Chine, les deux nations non occidentales les plus influentes, parlent depuis plusieurs années et notamment depuis l’arrivée au pouvoir de l’administration Biden en janvier 2021. En l’espace de quelques mois, Pékin et Moscou ont conclu qu’il est insensé qu’une nation, alors même que sa puissance décline, n’ait pas l’intention de travailler avec eux sur un pied d’égalité, dans un intérêt mutuel. Depuis lors, de nombreux autres pays ont facilement compris de quel côté souffle le vent.

La crise ukrainienne a envoyé un nouveau coup de tonnerre dans cette dynamique géopolitique. Des nations représentant plus de 80 % de la population mondiale et un pourcentage similaire du produit intérieur brut mondial sont parfaitement à même de voir les provocations brutales de l’administration Biden et ne les approuvent pas.

Les partenariats qui ne vont cependant pas jusqu’à l’alliance – terme diplomatique qui impliquerait des obligations explicites en matière de défense mutuelle – se sont multipliés si rapidement depuis que Joe Biden a pris ses fonctions qu’il est difficile d’en garder la trace. La relation « sans limites » de la Russie avec la Chine en est le premier exemple. La Russie a récemment consolidé ses liens de coopération avec l’Iran. La Chine aussi. L’Iran et le Venezuela, la Chine et Cuba, la Chine et le Nicaragua – la liste est longue. En ce moment même, Moscou et Pékin développent des partenariats de toutes sortes en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie.

Mais ces nations, on le constate aisément, sont dans l’ensemble de l’autre côté de la barrière pour Washington : les cliques politiques, en clair, les considèrent comme des ennemis. Chaque nation que nous venons de citer est actuellement sous le coup de sanctions américaines. Entre parenthèses, je me demande franchement ce qu’il se passe lorsque la majeure partie du monde autre que sa partie anglophone et l’Europe occidentale est condamnée de cette manière, mais c’est un autre débat.

La décision de l’OPEP-Plus nous amène à faire une distinction essentielle.

Lors du sommet entre Vladimir Poutine et Narendra Modi à New Delhi en décembre dernier, le président russe et le premier ministre indien ont négocié la conclusion de pas moins de 28 accords de coopération dans tous les domaines – investissements, transfert de technologies, énergie, défense. Il est intéressant de souligner l’intention de l’Inde d’acheter une copie du système russe de défense antimissile S-400, qui s’avère être un caillou dans la chaussure de Washington chaque fois qu’une nation en achète un.

Depuis lors, la Turquie a envoyé de nombreux signaux indiquant que, indépendamment de son appartenance à l’OTAN, elle est de plus en plus encline à s’allier à des nations non occidentales. Elle a participé en tant qu’observateur au récent sommet de l’Union économique eurasienne à Samarkand. Il est question d’une adhésion au mini-bloc des BRICS, qui comprend désormais le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud. L’Égypte du crapuleux Abdel Fattah el-Sisi et l’Argentine de son président bien-pensant, Alberto Fernández, ont également l’intention de demander leur adhésion.

Inde, Turquie, Argentine, Afrique du Sud, Égypte : Il ne s’agit pas là de nations que Washington aime à qualifier de parias, de coquins, de hors-la-loi ou d’autocraties dirigées par des « voyous » – épithète favorite du voyou Biden – même si certaines d’entre elles le méritent. Cela change la physionomie de la coalition que je décris. Nous sommes ici en train de parler de nations que les États-Unis considèrent comme des amis sous une forme ou une autre.

Il y a un point essentiel à souligner à cet égard. Les cliques politiques et les commis des médias qui les servent adorent présenter le bloc non-occidental en expansion comme anti-américain, mû par la haine, l’envie ou quoi que ces gens puissent inventer. Selon les comptes rendus de la réunion de l’OPEP-Plus, les Saoudiens se sont « rangés aux côtés de la Russie » contre les États-Unis. « Furieux de la décision du royaume de s’allier à la Russie », rapportait la semaine dernière le New York Times, « le président Biden s’est montré disposé à prendre des mesures de rétorsion ».

Chers lecteurs, comment devons-nous appeler cela ? C’est soit de l’aveuglement, soit du narcissisme, soit les deux, et je vote pour cette dernière option. Alors que le non-Occident se rassemble dans un but de coopération constructive, de bénéfice mutuel et de non-ingérence (à ne pas oublier), la seule chose contre laquelle ils luttent, c’est le désordre mondial, et les seules nations contre lesquelles ils se lèvent sont celles qui en sont responsables.

Venons-en maintenant à l’Arabie saoudite.

Nous avons là une autre nation que vous n’auriez pas envie de ramener à la maison pour la présenter à votre mère, mais en dehors de l’Occident, Washington a eu peu d’amis plus proches que Riyad depuis le début des années 1930, lorsque l’administration Roosevelt et la Maison des Saoud ont conclu l’accord « pétrole contre sécurité » (et que la Standard Oil de Californie a obtenu une concession de forage). C’est cette longue aventure que les Saoudiens – qui envisagent également d’adhérer aux BRICS, ne nous le cachons pas – semblent avoir déclarée terminée depuis la semaine dernière.

La presse occidentale a fait grand cas de la présence à Vienne d’Alexander Novak, vice-premier ministre de Moscou, qui avant la décision de l’OPEP-Plus de réduire les quotas de production aurait semble-t-il fait un peu de travail préliminaire. Mais l’idée que ces Russes aurait fait entériner la réduction de la production par la force n’est qu’une tentative d’échapper à une réalité que Washington a du mal à accepter. Les Saoudiens ont agi de leur plein gré, ni plus ni moins. Mohammed ben Salman, le prince héritier et le dirigeant de facto du royaume, est une personnalité à multiples facettes, et l’une d’entre elle est qu’il est un homme libre d’esprit (pour le meilleur et pour le pire). Le prince Abdulaziz ben Salman, ministre saoudien du pétrole, est aussi le demi-frère de MbS.

Il existe de nombreuses raisons pour lesquelles Riyad, en tant que coprésident de l’OPEP-Plus, a pris cette décision. L’intention déclarée est de protéger les prix alors que le monde sombre dans une chute vertigineuse de la demande de pétrole, conséquence de la faible croissance et de l’inflation croissante – syndrome de stagflation – que les États-Unis imposent au monde via leur régime de sanctions contre la Russie.

Il y a aussi le plafonnement des prix que Washington propose d’imposer aux exportations de pétrole russe – c’est là une des idées les plus stupides depuis des décennies, parmi tant d’autres, qui émanent des élites politiques américaines. L’acheteur fixe au vendeur le prix des marchandises ? Vous en dites quoi ? Cette idée n’a pratiquement aucune chance de fonctionner, mais MbS se demande certainement : Si ces Américains plafonnent le prix du pétrole russe en 2022, dans combien de temps s’en prendront-ils à nous ?

Et puis il y a le cas de Joe « personne n’emmerde un Biden » Biden (quel président bien élevé) [référence à la phrase prononcée par Biden oubliant que son micro était ouvert : « Nobody fucks with a Biden », NdT]. Je n’arrive pas à décider si cet homme là est un schlemiel [bon à rien, idiot, NdT] ou un schlimazel [Porte-poisse, oiseau de malheur, NdT]- comme l’explique un ami yiddishophone, le type qui renverse une bouteille de vin à table ou l’homme sur les genoux duquel le vin se répand. Après avoir suivi les années de Joe au Sénat et pas tout à fait deux années à la Maison Blanche, je me rends : il réussit à être les deux.

Pendant sa campagne de 2020, Biden a qualifié l’Arabie saoudite de paria pour faire taire le poulailler progressiste d’arrière ban au sujet de la guerre au Yémen, mais tout en n’ayant aucune intention de réduire le soutien américain à ce pays. Lorsque les choses se sont envenimées à la suite des sanctions contre la Russie, voilà notre président qui se rend à Djeddah, qui tape du poing sur la table face à MbS au cours d’un sommet manifestement éprouvant, et qui apparemment est convaincu que tout va bien se passer du côté de la production de pétrole. Avant la session de l’OPEP-Plus, des responsables de l’administration [Biden] se sont rendus à Riyad et ont pratiquement supplié MbS à genoux de ne pas annoncer de réduction de la production, au moins jusqu’à la fin des élections de mi-mandat.

Dans quelle galère notre Joe et les schlemiels confirmés qui dirigent la politique étrangère de l’Amérique se sont-ils mis, en nous entraînant avec eux ? Une fois de plus, l’homme de Scranton prouve qu’il est ce qu’il a toujours été, un politicien provincial qui pense pouvoir raconter des bobards dans le monde entier comme il l’a longtemps fait dans le Delaware et qui n’a aucune idée de la manière dont on élabore une politique responsable.

Je ne doute pas que le manque de respect de MbS envers ce pitre aux capacités mentales défaillantes lui a permis d’agir plus facilement à l’encontre les souhaits des États-Unis et plus particulièrement de la Maison Blanche de Biden. À mon avis, il a en fait rejoint les Russes et les Chinois en décidant qu’il est tout simplement impossible de travailler avec un régime aussi peu sérieux. Mais les Saoudiens ne semblent pas plus enclins à définir une politique par dépit ou par mépris que n’importe quelle autre nation du bloc non-occidental. Riyad a agi dans son propre intérêt, tel qu’il l’entend.

Interrogé lors d’une conférence de presse d’après-session pour savoir si la décision de l’OPEP-Plus était un acte d’agression, le prince Abdul Aziz, ministre saoudien du pétrole, a répondu : « Montrez-moi exactement où vous voyez un acte de belligérance. »

Mais justement. Ma main à couper, comme avait l’habitude de dire un de mes rédacteurs, c’est un correspondant américain qui a posé la question : Il faut être américain pour lire les événements avec un tel degré d’égocentrisme, comme si le monde entier tournait autour de Washington tout comme Ptolémée pensait que le soleil et toutes les planètes tournaient autour de la terre. « Les Saoudiens se sont rangés aux côtés de la Russie » n’est rien d’autre qu’une variante du thème de Ptolémée, une répétition du binaire « vous êtes soit avec nous soit contre nous » de Bush II – dont beaucoup d’entre nous se sont moqués à l’époque mais que nous considérons aujourd’hui comme une façon parfaitement rationnelle de se partager le monde.

L’idéologie, pour être clair, n’a rien à voir avec la décision de l’OPEP-Plus et n’a rien à voir avec la réunion des pays non occidentaux en une sorte de réseau inchoatif de partenariats. Ce sont les intérêts personnels éclairés – vieille expression dans un nouveau contexte – qui sont à l’origine de cette évolution des affaires mondiales.

Depuis des années j’affirme, au risque de me répéter, que le respect de la parité entre l’Occident et le non-Occident est un impératif du XXIe siècle – quelque chose d’inévitable, indépendamment du fait que quiconque, où que ce soit, souhaite ou non qu’il en soit ainsi. Ce qui s’est passé à Vienne au début du mois nous démontre la manière dont va se dérouler une telle mutation.

À la fin de la semaine dernière, Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdoğan se sont rencontrés à Astana, la capitale du Kazakhstan, c’était la deuxième rencontre des présidents russe et turc en aussi peu de mois. Dans le vif du sujet, Poutine a proposé de faire de la Turquie une plaque tournante en matière d’énergie pour la distribution du gaz russe, maintenant que les gazoducs Nord Stream I et II reliant la Russie à l’Europe sont hors service. Erdoğan a par ailleurs fait remarquer que la Turquie peut servir de point de transit pour acheminer les engrais russes vers les pays moins développés qui en ont le plus besoin.

Voici comment Erdoğan, toujours désireux de paraître important dans les affaires mondiales, a conclu sa conversation avec Poutine sur ces questions :

Nous pouvons travailler de concert parce que nous sommes plus préoccupés par les pays pauvres que par les États riches. C’est ainsi que nous devons voir les choses, et si nous le faisons, nous pourrons changer beaucoup de choses : changer l’équilibre en faveur des pays pauvres.

La Turquie et la Russie sont ensemble. Je sais que certaines des mesures que nous avons prises vont inquiéter certains milieux et certains pays, mais nous sommes absolument déterminés. Nos services compétents, nos collègues [dans nos ministères], établiront des contacts et renforceront nos relations.

Vous voyez ce que je veux dire à propos de la direction dans laquelle le vent souffle ? Vous voyez ce que je veux dire à propos de la coalition non-occidentale ?

Il sera intéressant de voir ce qui va se passer maintenant que les Saoudiens se sont joints à la fête et ont mis une certaine distance entre eux et les Américains. On ne peut guère s’attendre à une rupture brutale des relations. Tout au plus peut-on penser qu’ils sont en train de se défaire de l’étreinte qui les étouffe, comme un ambassadeur britannique a un jour décrit les relations du Japon avec les États-Unis.

Une dernière remarque concernant les BRICS et le souhait des Saoudiens de les rejoindre. Il est de notoriété publique que, dans sa composition actuelle, le groupe est en passe de développer un portefeuille de devises destiné à se substituer au dollar dans les échanges commerciaux internationaux. Voilà qui ressemble à une nouvelle entente majeure en préparation. Depuis que les Saoudiens ont accepté en 1945 de fixer le prix du pétrole en dollars, le marché pétrolier a été absolument essentiel à la suprématie de la monnaie américaine en tant que monnaie de réserve – cette dernière, à son tour, a été essentielle à la démonstration par Washington de l’hégémonie américaine.

Et maintenant, que fait-on ? Mes amis spécialistes des marchés avaient l’habitude de me dire que la dédollarisation, bien qu’inévitable à long terme, ne se produirait pas de mon vivant. Je n’entends plus beaucoup ce genre de propos. Ce qui semblait être une perspective lointaine il y a seulement quelques années semble maintenant se rapprocher d’année en année. Peu importe le nombre de coups de poing infligés par Washington : ce n’est généralement pas cela qui empêche la roue de l’histoire de tourner, comme l’a appris Biden.

Patrick Lawrence

Patrick Lawrence, correspondant à l’étranger pendant de nombreuses années, notamment pour l’International Herald Tribune, est critique des médias, essayiste, auteur et conférencier. Son dernier livre est Time No Longer : Americans After the American Century (Le temps presse : les Américains après le siècle américain, livre non traduit en français). Son site web est Patrick Lawrence. Soutenez son travail via son site Patreon. Son compte Twitter, @thefloutist, a été définitivement censuré sans explication.

Source : ScheerPost, Patrick Lawrence, 16-10-2022

Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

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Commentaire recommandé

Urko // 17.11.2022 à 07h50

L’Occident pris comme bloc homogène disposant d’une volonté autonome propre et libre représente un concept bien erroné : ce sont les États-Unis qui, dominant cet ensemble à ses dépens, imposent leurs volontés à la planète et non l’Occident. BRICS et OCS, par exemple, ne rejettent pas tant cet Occident, dont ils continuent d’adopter certains comportements sur un vaste éventail de domaines, que la domination des États-Unis. Celle-ci devient trop étouffante, intrusive et préjudiciable à ceux qui doivent s’y soumettre, puisque Washington conserve voire accentue sa propension à avoir une vision trop large de ses champs d’intervention (parfois quitte à s’auto mutiler). Il ne faut pas confondre cette résistance croissante des non occidentaux contre les prétentions des États-Unis à dicter leur agenda et en quelle devise ils doivent commercer avec le ressentiment envers l’homme occidental, perçu à tort ou à raison comme ayant voulu s’ériger en modèle universel, au travers de la colonisation mais surtout de la domination culturelle, allant du calendrier grégorien au cinéma en passant par la mode vestimentaire, le sport ou les droits de l’homme. Il s’agit de deux phénomènes différents même si les états refusant la tutelle US ont tout intérêt à les lier en alimentant le rejet de l' »homme blanc » dans leurs populations pour mieux justifier le rejet des élites de Washington… Ces états poursuivent un objectif politique légitime, mais en activant des moyens bien dangereux et… ironiques à l’heure où partout en Occident, les gens se font plus nombreux à vouloir se libérer des oukazes US

16 réactions et commentaires

  • Urko // 17.11.2022 à 07h50

    L’Occident pris comme bloc homogène disposant d’une volonté autonome propre et libre représente un concept bien erroné : ce sont les États-Unis qui, dominant cet ensemble à ses dépens, imposent leurs volontés à la planète et non l’Occident. BRICS et OCS, par exemple, ne rejettent pas tant cet Occident, dont ils continuent d’adopter certains comportements sur un vaste éventail de domaines, que la domination des États-Unis. Celle-ci devient trop étouffante, intrusive et préjudiciable à ceux qui doivent s’y soumettre, puisque Washington conserve voire accentue sa propension à avoir une vision trop large de ses champs d’intervention (parfois quitte à s’auto mutiler). Il ne faut pas confondre cette résistance croissante des non occidentaux contre les prétentions des États-Unis à dicter leur agenda et en quelle devise ils doivent commercer avec le ressentiment envers l’homme occidental, perçu à tort ou à raison comme ayant voulu s’ériger en modèle universel, au travers de la colonisation mais surtout de la domination culturelle, allant du calendrier grégorien au cinéma en passant par la mode vestimentaire, le sport ou les droits de l’homme. Il s’agit de deux phénomènes différents même si les états refusant la tutelle US ont tout intérêt à les lier en alimentant le rejet de l' »homme blanc » dans leurs populations pour mieux justifier le rejet des élites de Washington… Ces états poursuivent un objectif politique légitime, mais en activant des moyens bien dangereux et… ironiques à l’heure où partout en Occident, les gens se font plus nombreux à vouloir se libérer des oukazes US

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    • Patapon // 17.11.2022 à 13h39

      Y a-t’il une mesure sérieuse du rejet planétaire de l’abus de force États-Unienne justifié par le messianisme ? Les 3/4 de l’humanité, voire plus ?

        +2

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      • Urko // 17.11.2022 à 17h44

        Non, pourquoi ? Fallait-il donc sacrifier à cette drôle d’habitude de devoir tout chiffrer ? C’est vrai que ça aurait fait plus scientifique mais regardez nos économistes : depuis qu’ils font des mathématiques et plus d’histoire, de droit ni de psychologie des foules, font-ils encore de l’économie ?… Bref, j’imagine que personne n’avait quantifié non plus le mécontentement des pays colonisés envers les colons dans les années 1950, et pourtant, il existait. Donc, je ne sais pas s’il y a trois quarts de l’humanité que ça excède plutôt que la moitié ou un quart mais il me semblait voir ce rejet monter…

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        • Patapon // 18.11.2022 à 00h54

          Pour les économistes, c’est assez ambivalent : sans parler de la finance haute fréquence, on peut dire que l’économie n’applique les maths que dans un cadre comptable arbitraire quasi religieux et dans une réalité sélective, mettant sciemment hors-cadre les externalités, je veux dire par là qu’on peut aussi montrer qu’on ne souffre pas forcément de trop compter (ou prendre en compte si l’on veut) mais de faire semblant. Mais c’est hors-sujet, sorry, votre réflexion a juste fait résonner une vieille clochette.

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      • Jean // 17.11.2022 à 21h40

        @Patapon,

        On peut considérer que le refus des 3/4 de l’Humanité de condamner la Russie à l’ONU, au risque de déplaire à la nation exceptionnelle et de s’exposer aux multiples moyens de rétorsions dont-elle dispose, est en soit la preuve d’un rejet par la communauté internationale de la politique belliciste de Washington. En outre, malgré tous les efforts d’une diplomatie agressive, peu de pays appliquent les sanctions alors que, même parmi ceux-ci, certains ne font que semblant d’y adhérer comme le Japon et les Pays-Bas.
        Cette fronde aurait été inimaginable il y a encore quelques années et ce ne sont pas les seuls signaux qui indiquent la fin de l’unipolarité. Mais tout ceci n’est pas surprenant lorsque l’on considère avec quel succès les occidentaux ont gérés la pandémie et comment les US considèrent leurs serviles allies européens en les poignardant dans le dos. Je pense que l’Empire du mensonge ne trompe plus personne et que même Hollywood ne pourra plus changer cela. Or la puissance des USA reposait principalement sur ça capacité à entretenir une illusion qui subjuguait ses adversaires, le fameux rêve américain qui vire désormais au cauchemar.

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  • Daniel // 17.11.2022 à 10h57

    Depuis 1971, nous sommes dans une Utopie financière basée sur le « Dollar aussi bon que l’Or ». ce qui fait que la monnaie n’est plus reliée au réel, cela a permis la spéculation monétaire et financière sur soutenue par l’impression massive de monnaie-papier voire virtuelle. Dans ce sens, le dollar est devenu l’arme pour maintenir en place la « loi du plus fort » anglo-américaine qui n’est que l’expression de l’oligarchie financière.
    Le Dollar c’est le problème comme le dit cet article (avec citation de De Gaule!): https://french.news.cn/20221108/c5b1b5443a6848ea8b814a6fb76e878f/c.html
    Aujourd’hui en 2022, les USA ont confisqués les avoirs de l’Afghanistan puis de la Russie, les pays se disent qu’ils peuvent perdre toute leur réserve financière suivant les désirs du plus forts : le couple USA/GB .
    C’est depuis ce moment qu’il y a un engouement pour retourner aux monnaies nationales pour faire les échanges commerciaux.
    J’ai l’impression qu’il y a l’émergence d’une alternative plus ou moins basé sur la ligne du mouvement des pays non alignés : non-ingérence et l’économie a une finalité de diminution de la pauvreté.
    Crime de lèse majesté s’il en est : la monnaie ne va plus aux intérêts financiers occidentaux !!!

      +16

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  • Lt Briggs // 17.11.2022 à 13h24

    « le respect de la parité entre l’Occident et le non-Occident est un impératif du XXIe siècle – quelque chose d’inévitable, indépendamment du fait que quiconque, où que ce soit, souhaite ou non qu’il en soit ainsi »

    C’est la voie de la sagesse. Mais on peut compter sur nos chers médias-à-la-pointe-de-l-indépendance-d-esprit pour ne jamais aborder ce sujet. Non, ce qu’on nous sert à longueur de journée – d’année, en fait – c’est « Poutine est-il fou ? », « La menace chinoise », « La communauté internationale condamne l’agression », etc.
    Les conflits en cours ou en gestation viennent du décalage entre les institutions internationales qui sont depuis 1945 entre les mains des anglo-saxons et de leurs alliés occidentaux (banque mondiale, FMI, dollar imposé dans les échanges, etc) et les rapports de force actuels, qui sont en train de changer. Plutôt que de procéder à des réformes permettant de mieux prendre en compte les intérêts de chacun (renouvellement du Conseil de sécurité de l’ONU, fin du droit de veto des États-Unis au FMI, dialogue franc et direct avec d’autres puissances comme du temps de la guerre froide, etc), les Américains préfèrent mettre le feu à la planète : agressions militaires illégales, sanctions économiques tous azimuts, occidentalisation à marche forcée de l’Ukraine dans le seul but d’affaiblir la Russie… Le pseudo-idéalisme des dirigeants occidentaux produit in fine l’effet inverse de celui recherché.

      +11

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    • Grd-mère Michelle // 18.11.2022 à 14h13

      « Les conflits en cours ou en gestation viennent du décalage entre les institutions internationales…et les rapports de force actuels, qui sont en train de changer. »
      En effet, ces rapports de force(force destinée à favoriser « les intérêts de chacun ») sont définitivement obsolètes, compte tenu de l’impérieuse nécessité de coopération internationale en vue d’instaurer un équilibre (social et environnemental) qui prolongera l’épanouissement et la pérennité de la vie sur terre (de toutes les espèces interdépendantes, dont l’espèce humaine nullement « supérieure », qui constituent le phénomène de la vie sur terre).
      À rappeler à tous ces « dirigeants, décideurs », que l’abandon, en tout cas la réduction, de l’utilisation des énergies fossiles (dont ils tirent leur richesse, donc leur force-armée et de propagande) est une des conditions de la réalisation de cet objectif.
      À propos, il me semble que l’ONU soit la seule « institution internationale » qui s’en soucie un tant soit peu…? Comment la consolider, conforter son autorité, non pas « morale » mais pragmatique?

        +1

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      • Lt Briggs // 18.11.2022 à 19h00

        « ces rapports de force(force destinée à favoriser « les intérêts de chacun ») sont définitivement obsolètes »

        Oui, mais ni vous ni moi ne sommes au pouvoir. De ce fait, la lutte pour la domination préside encore aux destinées des différents pays et donc de l’humanité. Les discours changent mais pas les politiques, ou de façon tellement lente, mesurée… Le piège tendu par les Américains et dans lequel est tombé Poutine a encore durci le climat des relations internationales. Or sans un minimum de confiance entre équipes dirigeantes, comment peut-on imaginer que des sommets internationaux puissent aboutir à quelque chose de tangible ? Une désescalade est urgente, mais c’est tellement agréable de faire couler le sang et l’argent russes à peu de frais…

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        • Grd-mère Michelle // 19.11.2022 à 13h26

          « …ni vous ni moi ne sommes au pouvoir… »
          Erreur: dans un système politique de démocratie parlementaire, chaque citoyen-ne est au pouvoir. Malheureusement, la majorité du peuple(même vous) l’ignore, sans doute à cause de l’absence d’enseignement politique(nous avons seulement droit à de la propagande politique).
          Le meilleur moyen de sortir de l’emprise des forces (essentiellement bassement commerciales) qui gangrènent les « institutions » à tous les niveaux, local, régional, national et international, c’est de revaloriser celles-ci en exigeant leur mise en adéquation avec la situation critique que nous vivons, sans doute à l’aide de la Justice(qui DOIT en avoir les moyens), mais aussi par l’exercice et la défense de nos droits légitimes, dont le premier consiste à être correctement informé-e-s.
          Cela se passe de plus en plus(voir le raffut autour de la coupe du monde de football), mais il manque d’imagination, de détermination, de coordination, pour remplacer les manœuvres de diversion par des décisions salutaires.
          Critiquer, c’est bien, nécessaire, mais proposer serait mieux.
          Par ex, vous n’avez même pas tenté de répondre à ma question…

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          • Lt Briggs // 19.11.2022 à 14h03

            « Erreur: dans un système politique de démocratie parlementaire, chaque citoyen-ne est au pouvoir »

            Je crois que vous intervenez de Belgique et non de France, mais vous avez peut-être entendu parler du tristement célèbre référendum de 2005 sur la Constitution européenne ? Les pouvoirs en place se sont tout simplement assis sur le résultat qui était pourtant net. Les citoyens sont-ils vraiment au pouvoir comme vous l’écrivez ?

            « Critiquer, c’est bien, nécessaire, mais proposer serait mieux. Par ex, vous n’avez même pas tenté de répondre à ma question… »

            Votre question sur l’ONU ? J’ai dit ce que j’en pensais dans mon intervention initiale. Je ne voulais pas me répéter, mais je le fais pour vous. Je suis pour un renouvellement et un élargissement du Conseil de sécurité de l’ONU. Quand on pense que des continents ne sont même pas représentés… Je suis également pour la fin du droit de véto des membres permanents, pour la fin du droit de véto des États-Unis au FMI qui empêche toute évolution, et pour un renforcement de la Cour internationale de justice, donc pour la dénonciation des pays qui ne l’ont pas signée ou ratifiée et s’assoient ainsi sur le droit international.

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        • Cliquet // 23.11.2022 à 11h38

          Je n’ai pas le sentiment que Poutine soit tombé dans un piège. Il a agi en bon joueur d’échecs.
          Il savait que, depuis la chute de l’URSS, le deep state voulait détruire la Russie.
          Il travaillait dans l’ombre depuis des années et a compris que ce qui faisait la force du Deep était le monopole du dollar sur les échanges internationaux et il avait besoin des sanctions pour imposer le rouble.
          C’était le signal qu’attendaient les « non-occidentaux » pour sortir du bois.
          Or, la perte de monopole du dollar en tant que monnaie internationale condamne le dollar en tant que monnaie domestique américaine (dilemme de Triffin) et menace sérieusement le règne du Deep state

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          • Lt Briggs // 23.11.2022 à 22h05

             » Il a agi en bon joueur d’échecs. »

            Ce n’est pas mon opinion. Pour la Russie, le prix à payer pour ce (extrêmement relatif pour l’instant) affaiblissement du dollar en tant que principale devise dans les échanges internationaux est énorme humainement, financièrement et diplomatiquement. Si on additionne les soldats morts, les blessés, les Russes qui ont fui le pays, la perte de prestige d’une armée pourtant héritière d’une superpuissance, ça commence à faire beaucoup. Je vois des gagnants (USA, Chine, Inde…), mais la Russie n’en fait pas partie. C’est à dire qu’elle risque de ne pas vraiment profiter du déclin occidental face à des puissances montantes. Mais il faut déjà que le dollar cesse d’être la devise de référence pour faire un bilan et ce n’est pas encore le cas !

            « Il travaillait dans l’ombre depuis des années »

            Il ne s’est visiblement pas préparé dans tous les domaines. Je préfère ne pas imaginer ce qu’aurait donné cette « opération spéciale » si en plus il ne l’avait pas préparée pendant si longtemps…

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  • Patapon // 17.11.2022 à 13h34

    Il me semble que la citation d’Erdoğan inclut deux paragraphes et non pas un seul, dans ce cas il y a une rectification de mise en forme pour la lisibilité

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  • Savonarole // 17.11.2022 à 14h09

    L’article doit dater un peu et il y manque des choses. Déjà au niveau politique intérieure US Brandon a réussi à éviter la déculottée promise par les sondages en sacrifiant un tiers des reserves stratégiques de pétrole US aux prix à la pompe, plus une grosse montée des taux de la FED qu’il va bien falloir payer et deux fausses promesses qu’il ne peut ou ne va pas tenir : le sujet de l’avortement et celui de la dette étudiante (je vous renvoie à mon post sur le fil qui traite du sujet ici même.)
    Cependant , je vais faire une conclusion macronesque à la bavure : il n’a pas perdu les éléctions , il n’a juste pas réussi à les gagner … ^^.
    Le monopole du dollar sur le marché pétrolier est mort le jours où les dems ont coupé un bon quart des reserves prouvées de Swift , je l’avais déjà écris à l’époque ; ça se confirme et c’est pas jouer avec des assurances ou des prix plafond qui va empêcher ce cailloux de sisyphe de dévaler la colline. Les vainqueurs de la guerre froide se sont vautré dans l’exeptionalisme et laissé abuser par leur propre hubris. Et c’est pas en jouant le jeu de l’apocalypse nucleaire avec un cocaïnomane qu’ils vont rassurer le monde quand à leur bonnes intentions.
    Allez cadeau pour Strategy : https://www.youtube.com/watch?v=ICHqFl2TJrE

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  • vert-de-taire // 17.11.2022 à 19h02

    Après quelques lignes je dois faire une pause.

    Quelle est cette manière de considérer le caractère gentil, méchant, idiot …. des chefs d’Etat ?
    Les bons et les gentils, les malins et les crétins ..
    C’est vraiment s’occuper de l’écume.
    Si Biden (ou autre ) prend telle ou telle décision c’est qu’il gère des compromis intenables entre différentes mafias qui se font la guerre.
    Exactement comme dans nos gouvernements, les décisions et les arguments contradictoires se succèdent avec frénésie.
    Ces gens font n’importe-quoi du point de vue des gueux que nous sommes redevenus.
    Ils fonctionnent pour d’autres ce qui explique le n’importe-quoi et les catastrophes.

    Cette effondrement mental va de paire avec l’effondrement de la finance.
    Ces gens ont tout fait pour leurs compte en banque et maintenant ça coince.

    Donc le chemin est impraticable, la machine est cassée.
    ET pas de remède, sinon le fascisme c’est à dire se passer des lois et gérer au jour le jour les affaires.
    Leurs schémas mentaux sont incapables de trouver une solution sociale, économique politique
    sinon la guerre, tout casser, la violence folle ..

    Le monde occidental emporté par des salopards en plus paumés dans leur rôle de domination des gueux. Ils n’ont plus d’arguments, plus de ‘raisons’
    il ne reste que l’arbitraire donc la violence.
    Ils ne croient plus à un nouvel ordre sauf les fous dingues.
    Le n’importe-quoi l’emporte donc.
    en attendant les grosses catastrophes.
    Car quand une civilisation s’effondre, le pire est le plus probable.

      +14

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