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11.avril.201911.4.2019 // Les Crises

Souveraineté numérique : l’Internet russe peut-il se couper du reste du monde ? Par The Conversation

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Source : The Conversation, 18-03-2019

Quel contrôle des frontières numériques en Russie ? Wikimedia, CC BY-SA

L’infrastructure Internet obéit à un principe d’internationalisation des équipements et des flux de données et d’information. Les parties d’Internet qui se trouvent physiquement sur chaque territoire national ont besoin de ressources physiques et informationnelles hébergées sur d’autres territoires pour pouvoir fonctionner. Cependant, dans ce contexte mondialisé, la Russie œuvre depuis 2012 à l’augmentation progressive des contrôles nationaux sur les flux d’information et les infrastructures, dans une atmosphère de méfiance politique croissante à l’égard des mouvements protestataires à l’intérieur du pays et de ses partenaires internationaux à l’extérieur. De nombreuses lois ont déjà été votées en ce sens, comme celle en vigueur depuis 2016 obligeant les entreprises traitant des données de citoyens russes à les stocker sur le territoire national, ou encore celle encadrant l’utilisation des réseaux privés virtuels (VPN), proxys et outils d’anonymisation depuis 2017.

En février 2019, un projet de loi dit « sur l’isolement du segment russe de l’Internet » a été adopté en première lecture à la Douma (334 voix pour contre 47 contre) à l’initiative des sénateurs Klichas et Bokova et du député Lugovoï. Dans la note d’intention qui accompagne ce texte, il est précisé qu’il répond au « caractère agressif de la stratégie pour la cybersécurité nationale des États-Unis » adoptée en septembre 2018. Le projet porte principalement sur deux points : le contrôle du système de noms de domaine (DNS, le système d’adressage de l’Internet) et le routage du trafic, le mécanisme qui sélectionne des chemins dans le réseau Internet pour que les données soient envoyées d’un expéditeur à un ou plusieurs destinataires.

La Russie veut se libérer des contraintes étrangères

Parmi ses préconisations, figurent notamment deux mesures clés. La première est la création par la Russie de sa propre version du DNS, pour pouvoir fonctionner si les liens vers les serveurs situés à l’international sont coupés – aucune des douze entités actuellement responsables des serveurs racines du DNS n’étant située sur le territoire russe. La deuxième consiste, pour les fournisseurs d’accès Internet (FAI), à montrer qu’ils sont en mesure de diriger les flux d’information exclusivement vers des points de routage contrôlés par le gouvernement, qui devraient filtrer le trafic pour que seules les données échangées entre les Russes atteignent leur destination.

Cette législation est la pierre angulaire des efforts du gouvernement russe visant à promouvoir leur « souveraineté numérique » ; selon les législateurs russes, il est souhaitable de développer une façon d’isoler l’Internet russe sur commande, qui permettrait de répondre par l’autosuffisance aux agissements de puissances étrangères et de garantir la continuité de son fonctionnement. Inversement, une telle configuration faciliterait aussi les possibilités de blocage de tout ou partie des communications.

L’état russe n’est évidemment pas le seul à viser une plus grande capacité de contrôle sur le réseau. L’Iran essaie de faire de même depuis des années, et la Chine bien sûr avec le « Great Firewall of China ». De nombreux états cherchent à renforcer leur autorité sur « leur » Internet, au point dans certains cas de couper partiellement voire totalement le réseau (des mesures connues en anglais comme « shutdowns » ou « kill switch »). Ce fut le cas en Égypte lors de la révolution de 2011, au Congo récemment à l’occasion des élections, et c’est aussi régulièrement le cas dans certaines régions de l’Inde.

Dans le prolongement de ces projets législatifs, une initiative récente, rendue publique le 12 février dernier par l’agence de presse russe TASS, a suscité une attention particulière. Sous l’impulsion de l’état russe, un groupe qui réunit les principaux opérateurs télécom publics et privés (piloté par Natalya Kasperskaya, la co-fondatrice de la célèbre entreprise de sécurité Kaspersky), a décidé de conduire un test afin de couper temporairement l’Internet russe du reste du réseau mondialisé et notamment du World Wide Web. Cela arrivera en principe avant le 1er avril, date limite pour présenter des amendements au projet de loi, qui demanderait aux FAIs russes d’être en mesure de garantir leur capacité à fonctionner de façon autonome du reste du réseau.

Des implications techniques, économiques et politiques

Cependant, et au-delà de la charge symbolique que peut revêtir une autonomisation par la déconnexion d’un pays aussi important, de nombreuses raisons d’ordre technique, économique mais aussi social et politique, plaident en défaveur de telles tentatives, à la fois pour l’Internet mondial et russe.

D’un point de vue technique, même si la Russie essaie d’anticiper un maximum cette déconnexion, des effets inattendus se produiront inévitablement si elle cherche à se séparer du reste du réseau mondial, en raison du degré d’interdépendance de ce dernier au-delà des frontières nationales et à tous les niveaux de protocoles. Il faut préciser ici que, contrairement à la Chine qui a pensé et conçu son réseau avec un projet bien précis de gouvernance centralisée en interne, la Russie compte plus de 3 000 FAIs, et une infrastructure ramifiée et complexe, avec de nombreuses connexions physiques et économiques avec l’étranger. Dans ce contexte, il est très difficile pour les FAI et les autres opérateurs Internet de savoir précisément à quel degré et comment ils dépendent d’autres composantes infrastructurelles (points d’échange de trafic, réseaux de distribution de contenu, data centers, etc.) au-delà de leurs frontières. Cela pourrait conduire à des problèmes très importants – non seulement pour la Russie elle-même mais également pour le reste du monde.

Le test pourrait notamment poser des difficultés pour les autres pays qui acheminent le trafic à travers la Russie et ses infrastructures – quelque chose qu’il est difficile de connaître a priori. Les effets du test seront certes suffisamment étudiés et anticipés pour ne pas mener à une véritable catastrophe (par exemple, compromettre pendant longtemps le fonctionnement d’une importante infrastructure de transport ou autre). Mais les conséquences probables seraient plutôt le dysfonctionnement ou le ralentissement de sites Web fréquemment utilisés par l’utilisateur lambda. La plupart d’entre eux fonctionnent en effet à partir de multiples serveurs situés de façon distribuée sur la surface du globe. Le magazine Wired prend l’exemple d’un site d’information qui pourrait dépendre « d’un serveur cloud d’Amazon Web Services, un logiciel de traçage de Google, et un plug-in Facebook pour laisser des commentaires », tous les trois opérant en dehors de la Russie.

Sur le plan économique, en raison de l’infrastructure complexe de l’Internet russe et de ses liens très forts avec le reste de la toile, un tel essai serait difficile et coûteux à mettre en œuvre. La Cour des comptes russe s’est très récemment opposée à cette législation au motif que cela entraînerait une augmentation des dépenses publiques, nécessaires pour aider les opérateurs à mettre en œuvre la technologie et à engager du personnel supplémentaire au sein de Roskomnadzor, l’agence de surveillance des communications, qui ouvrira un centre pour la supervision et l’administration du réseau de communication. Le ministère des Finances s’inquiète aussi des coûts entraînés par ce projet. La mise en œuvre de la loi pourrait coûter cher aux entreprises et favoriser la corruption.

Enfin, du point de vue des libertés politiques, la nouvelle initiative suscite la mobilisation des mouvements citoyens. La « souverainisation » porte des risques de censure encore accrus. Le système devrait être supervisé et coordonné par l’agence de surveillance des communications de l’État, Roskomnadzor, qui centralise déjà le blocage de milliers de sites web – et notamment des sites d’information critiques. La mise en œuvre de ce projet élargirait les possibilités d’inspection et de censure du trafic en Russie, affirme l’association Roskomsvoboda. Comme évoqué plus haut, il pourrait faciliter la possibilité de couper l’Internet ou de contrôler certaines de ses applications, comme Telegram (que le gouvernement russe a cherché à bloquer sans succès au printemps 2018). Un essai d’une telle coupure ou « Internet black-out » a eu lieu en République d’Ingouchie, dans le cadre d’une mobilisation de masse en octobre 2018 où le gouvernement avait réussi à couper presque totalement le trafic. Une manifestation « contre l’isolation du runet » a rassemblé 15 000 personnes à Moscou le 10 mars 2019 à l’initiative de nombreux mouvements et partis de défense des libertés en ligne, témoignant des inquiétudes qui s’expriment dans la société.

Est-il possible de divorcer de l’Internet mondial aujourd’hui, et avec quelles conséquences ? Il est difficile d’anticiper toutes les implications de changements aussi importants sur l’architecture globale d’Internet. Lors de la discussion du projet de loi à la Douma, le député Oleg Nilov, du parti Russie juste, a qualifié l’initiative de « Brexit numérique » dont souffriront d’abord les simples utilisateurs en Russie. Comme on a pu le voir (et étudier) à nombre d’occasions dans un passé récent, les infrastructures des réseaux d’information et de communication sont devenus des leviers décisifs dans l’exercice du pouvoir, sur lesquels les gouvernements comptent bien peser de tout leur poids. Mais comme ailleurs, l’espace numérique russe est de plus en plus complexe, et les résultats des expérimentations isolationnistes en cours y sont plus que jamais imprévisibles.

Source : The Conversation, 18-03-2019

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Commentaire recommandé

Max // 11.04.2019 à 06h47

Sous une forme soit disant académique et posé, le texte malicieusement inverse les causes et les effets.
Après avoir presque perdu la guerre technologique, des brevets et des normes, il reste les tuyaux comme instrument de domination et cela concerne en 1er lieu l’internet et ses nombreux dérivés dont notamment les cartes bancaires, Swift, les GAFAM, le Dollar et maintenant la 5G. Et donc le contrôle sans partage des DNS est indispensable. Ce sont les armes de destruction massives du système occidental.
En matière internationale elles ont été massivement utilisées et continuent de l’être, elles sont la continuation de l’embargo contre la Russie et d’autres pays comme l’Iran et le Venezuela.
La Russie n’a donc pas eu le choix, elle a donc avec d’autres pays crée ses outils alternatifs pour un système bancaire autonome mais tout cela ne peut fonctionner qu’avec un internet capable de résister a un isolement décidé par les USA, il fallait donc pour la Russie créer son internet pour dissuader les USA de tenter une coupure unilatérale.
Un exemple, il y a quelques jours, Facebook a décidé d’exclure Zerohedge et cela n’a eu aucune incidence pour une simple raison, 94% des connections s’y font en dehors de Facebook et donc Facebook a reculé et remis la connexion.
Pour éviter la coupure, le camp d’en face doit comprendre, par avance, que cela ne sert a rien c’est le principe même de la dissuasion.
Cela a été permit car le camp occidental n’a plus la maitrise des technologies permettant de résister.

24 réactions et commentaires

  • chr bernard // 11.04.2019 à 06h36

    « Enfin, du point de vue des libertés politiques, la nouvelle initiative suscite la mobilisation des mouvements citoyens. La « souverainisation » porte des risques de censure encore accrus. »

    C’est vrai que c’est beaucoup plus excitant, plus ‘moderne’, d’être censuré par Facebook et Twitter, et espionné par Apple et Microsoft ! Voire d’être un jour soumis à un chantage Etats-unien …
    N’ont rien compris au bonheur 2.0, ces Russes ..

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    • Glbert Gracile // 11.04.2019 à 15h02

      comme vous dites ! …l’article a le mérite de soulever une question que personne ne pose… enfin les gens vont comprendre qu’internet n’est pas le bisounours geek anarchiste décentralisé participatif de la démocratie horizontale de l’avenir participatif antitotalitaire citoyen et festif… il aura fallut que Poutine s’y mette pour que les gens commencent à réfléchir ! Quant aux chinois, que tout le monde méprise et personne n’écoute, eux ont construit leur internet indépendant dès les années 1990… ils sont les seuls au monde à être (à peu près) indépendants de l’empire bienveillant et libéral des américains… Maintenant, il est un point commun entre tous ces gens : ce sont tous des dictatures impitoyables (libérale, autoritaire ou totalitaire pour l’habillage). Et internet ne répond par à un objectif de liberté, mais au contraire de centralisation et de contrôle.

        +7

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  • Max // 11.04.2019 à 06h47

    Sous une forme soit disant académique et posé, le texte malicieusement inverse les causes et les effets.
    Après avoir presque perdu la guerre technologique, des brevets et des normes, il reste les tuyaux comme instrument de domination et cela concerne en 1er lieu l’internet et ses nombreux dérivés dont notamment les cartes bancaires, Swift, les GAFAM, le Dollar et maintenant la 5G. Et donc le contrôle sans partage des DNS est indispensable. Ce sont les armes de destruction massives du système occidental.
    En matière internationale elles ont été massivement utilisées et continuent de l’être, elles sont la continuation de l’embargo contre la Russie et d’autres pays comme l’Iran et le Venezuela.
    La Russie n’a donc pas eu le choix, elle a donc avec d’autres pays crée ses outils alternatifs pour un système bancaire autonome mais tout cela ne peut fonctionner qu’avec un internet capable de résister a un isolement décidé par les USA, il fallait donc pour la Russie créer son internet pour dissuader les USA de tenter une coupure unilatérale.
    Un exemple, il y a quelques jours, Facebook a décidé d’exclure Zerohedge et cela n’a eu aucune incidence pour une simple raison, 94% des connections s’y font en dehors de Facebook et donc Facebook a reculé et remis la connexion.
    Pour éviter la coupure, le camp d’en face doit comprendre, par avance, que cela ne sert a rien c’est le principe même de la dissuasion.
    Cela a été permit car le camp occidental n’a plus la maitrise des technologies permettant de résister.

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    • Graindesel // 11.04.2019 à 07h19

      Merci pour cette information sur ZH ! Personnellement je ne comprendrai jamais comment on peut se soumettre à Fake Book Et oui, c’est aussi une critique de ZH et… du site les-crises.fr..

        +11

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    • Eric83 // 11.04.2019 à 14h40

      ZH dérange, notamment le Deep State aux US, avec ses articles à charge contre les néocons et contre les médias corrompus. ( Je ne sais pas si la volonté de nuire à ZH va jusque là mais la traduction par Google des articles publiés par ZH est médiocre, voire souvent incompréhensible, alors qu’elle est très correcte voire excellente sur d’autres sites US ou anglophones ).
      A ma connaissance et à mon grand regret, je ne connais pas de site équivalent de ZH en France, site qui traite aussi bien de politique, de géopolitique, d’économie, de finance…( Il est d’ailleurs à noter que ZH, loin de ne s’intéresser qu’aux affaires US, a publié nombre d’articles, par exemple, sur les Gilets Jaunes ).

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      • NiFuNiFa // 12.04.2019 à 20h21

        Le Saker Francophone est un très bon agregateur de certains articles que l’on peut retrouver sur ZH, la traduction en plus ! Pour d’autres sources francophones, Le blog de Bruno Bertez est un régal sur l’économie, (faut s’accrocher), Insolentiae également et les chroniques du grand jeu ne manquent pas de piment concernant la géopolitique ( je cite également DeDefensa et Proche et Moyen Orient.Ch dans un registre plus sérieux).

          +3

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  • aleksandar // 11.04.2019 à 07h15

    – Dommage de ne pas avoir précisé que le président de la cour des comptes , Koudrine est le patron de  » libéraux  » en Russie prêts a toutes les trahisons pour obtenir les bonnes grâces ( et les $ ) des américains.
    – Il n’a jamais été question de  » divorcer  » de l’internet mondial, mais de créer les conditions de mise en mode autonome de l’internet russe en cas de crise ou de guerre.Ceci de façon a protéger les infrastructures critiques qui dépendent du flux d’information d’internet ( électricité, transports, etc ). N’importe quel état souverain devrait avoir la même logique.
    – La « grande  » manifestation a Moscou. D’une part évoquer une manifestation de 15 000 personnes pour une ville de 12 millions d’habitants, est juste tout bonnement ridicule, ensuite les images prises par le haut et non face au cortège montre qu’ils étaient a peine un millier.
    Comme  » témoignage des  » inquiétudes qui s’expriment dans la société  » c’est un peu léger.
    De fait la majorité de la population russe si elle ne souhaite pas être  » divorcé d’internet  » soutient probablement cette démarche de sécurité nationale.
    – Mettre en avant un lien entre cette loi et  » des mouvements protestataires à l’intérieur du pays  » relève du procès d’intention tant ces mouvements protestataires sont marginaux.
    – En matière de censure , entre Twitter et Facebook, l’occident est mal venu de donner des leçons.

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  • aladin0248 // 11.04.2019 à 07h16

    La mainmise des Etats Unis sur l’ICANN est le problème stratégique numéro 1 de toute puissance souveraine. L’administration américaine n’a eu aucune difficulté à supprimer le nom de domaine de l’Irak en 2003 (ce nom lui a été rendu en 2005). Je suppose qu’il suffit d’un clic de souris pour isoler un pays entier. La politique d’indépendance numérique de la Russie et de la Chine est donc une nécessité quelle qu’en soit le coût. La seule solution rationnelle serait de rendre l’ICANN indépendant de l’administration américaine … et on se doute bien que l’empire hégémonique ne l’acceptera jamais.

      +37

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    • M2FraJM // 11.04.2019 à 07h37

      Effectivement,la donne a changé au niveau de la domination de l' »empire »,il est plus que temps que russes,chinois et américains agissent de « concert et de conserve ».

        +5

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    • Dominique65 // 11.04.2019 à 11h06

      « La seule solution rationnelle serait de rendre l’ICANN indépendant de l’administration américaine »
      A ce propos, savez-vous que les États-Unis se sont appropriés la moitié des adresse IP (V4) alors qu’ile ne représentent que 5% de la population mondiale !

        +9

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    • JMD // 11.04.2019 à 16h45

      Tout à fait d’accord. Malgré son statut « indépendant » , 2/3 du conseil d’administration de l’ICANN est composé d’organismes tels que la Chambre de Commerce Américaine et la DARPA (Agence de recherche de l’armée américaine).
      En pus de l’attribution des noms de domaine et adresses Internet, l’ICANN charge des entreprises de la gestion des « serveurs racines » (10 des 13 « serveurs racines » sont aux États-Unis et gérés par des entreprises américaines).
      Tout cela offre indirectement aux Etats-Unis la gouvernance de l’Internet et la maîtrise en temps réel des flux d’informations pays par pays.

        +5

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  • tchoo // 11.04.2019 à 07h37

    Que la Russie cherche à s’exonérer des robinets US et de leur fermeture intempestive parait légitime et induspensable vu le comportement américain.
    Que pour cela il faille aux russes créer leur propre robinets et par là même maîtriser leur fermeture risque de les tenter d’agir pour tout un tas de raison autre que celle qui a presidée à cette évolution.
    La neutralité du net, si elle a jamais existé en prend un sacré coup

      +4

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  • RGT // 11.04.2019 à 08h11

    Si de plus l’isolement du net russe permet aussi de fermer les portes dérobées de la NSA ce serait tout bonus…

    En France, ne l’oublions pas, les diverses lois qui ont commencé à apparaître sous Mollande et qui ont atteint leur paroxysme sous Micron ne sont pas en reste concernant la censure des pékins lambda mais laissent toujours grandes ouvertes les portes de la domination US sur les tuyaux français.

    Sans parler des lois « anti-fèces niuozes »…

    Selon vous, quel est le pays qui « respecte » le plus ces cons-citoyens?

    Internet n’a eu qu’une (toute) petite fenêtre de liberté dans les années 90 avant qu’il ne soit phagocyté par les barbouzes US puis par les GAFAM…

    De plus, l’isolement du net russe serait aussi une contre-mesure pour le Cloud Act qui permet aux administrations US d’aller fouiner en toute « légalité » (vis à vis du droit US) dans les serveurs de sociétés US basés à l’étranger, même dans ceux de leurs filiales pourtant 100% sous droit français, russe ou chinois.

    Qui est selon vous le plus hypocrite et le plus malveillant ?

    Jusqu’à présent, en dehors des « fuites des mails du DNC », les russes ne se sont pas permis d’aller fouiner (dans la mesure des règles de la barbouzerie traditionnelle) dans les serveurs de leurs « partenaires » pour aller les plomber et en retirer des avantages économiques écœurants.

      +32

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  • moshedayan // 11.04.2019 à 09h58

    Le texte The Conversation est d’une pauvreté conceptuelle affligeante. C’est comme si on avait dit à l’étudiant finlandais Linus Torvalds : « mais pourquoi donc vous vous fatiguez les méninges à concevoir un système OS PC ? » puisqu’on a déjà Unix-Windows? »
    Une toile nationale, avec des serveurs contrôlés est parfaitement concevable et même un standard DNS spécifique « made in Russia » plus performant. On a bien eu VHS, Pal, Secam, etc… comme d’ailleurs on aura tôt ou tard des protocoles internet via les ondes courtes passantes 49m, 31m, 25m, etc… c’est à la portee de plusieurs pays qui ont bien avancé dans le cryptage et la compression des langages informatiques. Quant au passage des flux à travers le territoire russe, c’est parfaitement faisable avec des flux parallèles (qui ont déjà lieu en fait). Tout dépend ensuite de la qualité des récepteurs-décodeurs DNS (et futur DNS-ru)

      +13

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  • Kokoba // 11.04.2019 à 10h30

    Les Russes ne sont pas fous.
    Ils ont bien compris que les USA étaient entrés dans une phase d’agressivité sans limite.
    Ils vont utiliser toutes les structures de puissance et de domination possibles.
    Et ils en ont beaucoup : quasiment toutes les structures internationales mises en place depuis la 2ème guerre mondiale sont aux mains des US.
    Aux USA, cela s’appelle Full Spectrum Dominance.

    Par contre, ce qu’ils n’ont pas compris, c’est que passer de la menace à l’action amène évidemment les autres pays à comprendre que ces instances et structures internationales ne sont plus fiables et qu’il faut les remplacer.
    C’est un pistolet à 1 coup.

    La Russie et la Chine ont parfaitement compris et sont en train de se réorganiser pour se mettre hors de portée du controle US.
    Cela prendra du temps mais à moyen terme, les USA perdront leur controle.
    Le monde sera alors sommé de choisir son camp : avec ou contre les US.
    On sait déjà ce que choisiront nos dirigeants carpettes.

      +21

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    • Kiwixar // 11.04.2019 à 11h43

      Difficile de prédire l’avenir de l’Europe de l’ouest et de ce que feront nos dirigeants. On est déjà à l’ère du dégagisme politique alors que les prix du pétrole sont tout doux. De nombreux pays qui étaient exportateurs sont devenus importateurs. Bientôt des pays exportateurs cesseront d’exporter pour garder pour eux. Les US s’occuperont de leurs problèmes internes.

      D’ici à 2025, on va se mettre à chercher comment importer notre pétrole et notre gaz (gaz russe que les Allemands voudront garder pour eux). Les gentils 100.000 Gilets Jaunes pacifistes risquent de se transformer en millions ayant non pas « la haine » mais tout simplement faim. Honnêtement, il est difficile de dire comment ça va tourner, mais ça risque de ne pas se régler avec des canons à eau. Et, pour ne rien arranger, on a une classe politique complètement déconsidérée. Qui et quoi va émerger de tout ça?

        +17

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      • Chris // 11.04.2019 à 15h33

        D’ici à 2025, on va se mettre à chercher comment importer notre pétrole et notre gaz (gaz russe que les Allemands voudront garder pour eux).
        Depuis 2016, Total (qui a investi dans les terminaux GNL US) exporte du gaz de schiste en France :
        https://www.francetvinfo.fr/monde/usa/du-gaz-de-schiste-americain-en-europe-et-en-france_3064351.html

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      • moshedayan // 11.04.2019 à 15h40

        «gaz russe que les Allemands voudront garder pour eux» vous êtes optimiste sur cette perspective pacifiste.
        Une chaîne allemande ARD ou ZDF a récemment fait en direct un scénario fiction d’une attaque des forces de l’OTAN pour arrêter une invasion russe de l’Estonie. – comme par hasard.
        C’est bien une démarche allemande à la « Gleiwitz », pareille attitude. Le Kremlin a clairement fait savoir à Mme Merkel ce qu’il pensait de ce geste d’un média officiel.
        Pour résumer : les relations économiques russo-germaniques sont actuellement l’équivalent de ce qu’elles furent entre 1939-juin 1941. La Russie se prépare à l’affrontement avec l’Allemagne et à une riposte fulgurante contre l’OTAN « américano-germanique ». Votre pays ne semble pas comprendre qu’il lui serait profitable et judicieux de changer, de changer de camp tout court.
        Mes amis russes âgés le répètent, « cette fois on ne s’arrête pas à Berlin ! si l’OTAN nous agresse… » et je crois bien que ce n’est pas le coca-cola qui empêchera les jeunes Russes d’avoir le même état d’esprit en cette situation.

          +6

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        • Kiwixar // 11.04.2019 à 16h51

          Une attaque classique (i.e. non-nucléaire) de l’Otan contre la Russie est une grosse blague. Les Russes ne s’inquiètent pas de ça. Lire cet excellent article de quelqu’un qui connaît le domaine militaire (bien mieux que les fanfarons d’ARD ou ZDF) : https://lesakerfrancophone.fr/lotan-na-aucune-chance-dans-une-guerre-contre-la-russie

          La France « ne comprend pas qu’il lui serait profitable et judicieux de changer de camp », tout simplement parce qu’elle est dirigée par des tr*îtres qui travaillent pour le bénéfice d’une puissance étrangère (US).

          Et oui, s’ils veulent être tranquilles sur leur continent-monde, les Russes auront bien raison d’aller se débarrasser définitivement de la menace du Rimland US qui ne souhaite qu’une chose, « que la Russie n’existe plus »… Seul problème, ça aura toutes les chances de finir à coups de bombes nucléaires et d’hiver très très long.

            +5

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  • lucmars // 11.04.2019 à 16h50

    Concevoir un réduit du net pour des raisons de sécurité nationale n’a de sens que si on dispose d’une industrie informatique concernant le matériel nécessaire pour ce faire.

      +2

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  • Haricophile // 12.04.2019 à 01h54

    D’un point de vue purement technique, créer des DNS n’est pas si compliqué. Dans l’état actuel du réseau, les DNS racines, seul truc d’internet non prévu pour être décentralisé, sont difficile à ignorer.

    Qui distribue les plages d’adresses et résout les conflits ? pour le moment les US, Mais :

    1) Si les US coupent le réseau, ils perdent tout contrôle. Le fait qu’ils commencent depuis quelques temps à « jouer » avec les DNS fait déjà grincer le système. S’ils font trop les andouilles il sera remplacé immédiatement par un autre système.

    2) Comme ça fait longtemps que le problème est connu, il existe déjà des solutions alternatives opérationnelles ; dont des solutions totalement décentralisées mais ce n’est pas forcément ce qu’aucun gouvernement centralisé souhaite voir se développer…

      +0

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    • Haricophile // 12.04.2019 à 01h55

      3) La chine est dans l’équation avec a la fois des compétences et du matériel et a mon humble avis la Russie + la Chine sont devenus totalement capables de se passer des US, le tout étant d’y être préparé pour ne pas être pris brutalement au dépourvu avec des conséquences transitoires désagréables.

      4) Sauf action folle, les US n’iront jamais jusqu’au bout de la démarche : le simple fait que l’URSS et la Chine y soit préparés rend la chose vaine. Ils peuvent tirer un peu sur la corde en espérant qu’elle ne s’usera pas trop vite avec un pouvoir de nuisance certain mais limité. Ceux qui ont le plus a craindre des folies des néocons sont « les alliés » qui eux ne sont pas du tout préparés ! Heureusement qu’on a des bricolos dans les garages capables de fabriquer des IP !

      5) Enfin au dela du logiciel, il y a le matériel, mais là encore je ne parierais pas que les US restent longtemps en position favorable face au tandem Russie+Chine+alliés. Si les US déclarent aujourd’hui une guerre de ce type, ils vont très probablement tout perdre. En face ce n’est pas seulement la Corée du Nord…

      6) on peut prédire tout ce qu’on veut, les gros changements viennent généralement de là où on ne les attendait pas.

        +0

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  • Jacques // 12.04.2019 à 18h10

    [modéré]
    Bien évidemment, la Russie a parfaitement raison de vouloir contrôler l’Internet sur son territoire. Il faut savoir, en effet, qu’Internet est un système qui fonctionne juridiquement sous droit californien (mieux que « étatsuniens », donc !).
    Tout comme il existe une frontière physique pour chaque Etat, il doit exister une frontière informatique et électronique. Ca tombe sous le sens ! Nier cette évidence revient à nier le droit à l’existence d’un Etat !

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