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18.décembre.202118.12.2021 // Les Crises

18 décembre 1971 : la fin de Bretton Woods

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Ce fut l’un des événements les plus marquants de l’année 1971. Le 18 décembre, la conférence de Washington au Smithsonian Institute signe la fin du système monétaire international défini en 1944 à Bretton Woods. Ce système était basé sur la convertibilité en or de la monnaie centrale, le dollar, sur la fixité des taux de change et sur la solidarité entre les signataires.

Source : Les Echos, Florence Renard

L’accord du Smithsonian Institute prévoit l’inconvertibilité or du dollar et la dévaluation de la monnaie américaine de 7,89%, ce qui fait passer l’once d’or de 35 à 38 dollars. Il passe aussi par la réévaluation de plusieurs monnaies étrangères par rapport au dollar. C’est notamment le cas du yen (+16,88%) ; du deutsche mark (+13,57%) et du franc belge (+11,57%).

Pourquoi avoir mis fin au système de Bretton Woods ? Parce que, pour la première fois, les Etats-Unis ont accusé un déficit commercial qui a provoqué une vague de fuite devant le dollar. Face à cette situation critique, le président Nixon, a été forcé, le 15 août précédent, d’annoncer des décisions spectaculaires : outre la fin de la convertibilité en dollar (qui dans les faits n’existait plus que pour les banques centrales depuis 1968), l’hôte de la Maison Blanche annonce l’imposition d’une taxe sur les importations et le blocage des prix et des salaires. A ses partenaires et alliés, le président Nixon impose des concessions commerciales et demande à plusieurs pays –notamment le Japon et la RFA- de revaloriser leurs monnaies.

Le « coup Nixon » sème la panique sur le marché des changes. Tous les grands pays mettent leur monnaie en flottement pour ralentir l’entrée massive de dollar. Washington est alors en position de force pour imposer en décembre l’accord du Smithsonian Institute.

L’histoire du système monétaire international Jusqu’en 1914, l’ « étalon-or » fait référence :

Avec la guerre de 1914, les gouvernements mettent en place un système de contrôle des changes et abandonnent l’obligation de convertir leurs monnaies en or.

Après guerre : l’hyperinflation fait son apparition
De 1918 à 1922, les taux de change flottent librement, c’est-à-dire que le prix d’une monnaie résulte de la confrontation de l’offre et de la demande. Un épisode aux conséquences parfois fâcheuses comme l’illustre l’hyperinflation apparue dans plusieurs pays, notamment en Allemagne.

1922 : la conférence de Gênes
La conférence de Gênes crée le premier système d’étalon de change or. Les Etats peuvent alors émettre de la monnaie en contrepartie d’une devise de référence dite « étalon » convertibles en or. L’étalon fut la livre jusqu’en 1931 et ensuite le dollar. Ce système fonctionne avec plus ou moins de succès. Il n’empêchera pas l’émergence de la crise de 1929.

24 octobre 1929 : le krach
Surproduction industrielle, spéculation boursière et excès de crédit conduisent à la journée du « jeudi noir ». 13 millions d’actions sont mises en vente. Les cours s’effondrent. Suit une grave crise économique et bancaire aux Etats-Unis et dans le monde entier.

Début des années 30 : la spirale déflationniste
En 1931, Allemagne et Japon instaurent un contrôle des changes, la Grande-Bretagne suspend la convertibilité de la livre en or et crée la zone sterling. En 1933, les Etats-Unis font de même et créent une zone dollar. La France abandonne la convertibilité du franc en or en 1936. Partout, les dirigeants tentent d’endiguer la crise par des dévaluations monétaires et du même coup accélèrent les spirales déflationnistes.

1944 : les Accords de Bretton Woods consacrent le dollar
La première conférence financière internationale des Nations unies se réunit à Bretton Woods (New Hampshire) entre le 1er juillet et le 22 juillet 1944. Les Accords sont signés le 20 juillet. Selon le nouveau système monétaire, chaque Etat doit assurer la convertibilité de sa monnaie et une parité fixe en or ou en dollars américains, avec une marge de fluctuation de 1%. En fait, le système consacre la puissance des Etats-Unis et du dollar.

1945 : Création du FMI et de la Banque mondiale
Les Accords de Bretton Woods prévoient la création du Fonds monétaire international et de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (Bird), ancêtre de la Banque mondiale. Le 3 octobre 1969, un amendement aux Accords de Bretton Woods permet la création de Droits de tirage spéciaux (DTS), panier de devises fortes qui est la nouvelle unité de compte du FMI, et le nouvel instrument de paiement visant à remplacer l’or. Le FMI créé ainsi sa monnaie, ce qui lui avait été refusé à sa création.

1957-1971 : les Accords de Bretton Woods montrent leurs limites
A partir de 1957, le système se désagrège peu à peu du fait des poussées inflationnistes aux Etats-Unis qui entraînent une perte de confiance dans le dollar. A la fin des années 60, le dollar fluctue énormément, mouvements que les banques centrales ne parviennent plus à arrêter. Les Etats-Unis sont alors contraints de mettre fin à la convertibilité du dollar en or le 15 août 1971. En décembre 1971, les accords de Washington prévoient une dévaluation du dollar et un élargissement des marges de fluctuation des monnaies (2,25% au lieu de 1%).

1972 : création du serpent monétaire européen
Le serpent monétaire européen est créé pour maintenir des marges de fluctuation étroite entre les monnaies

1973 : le flottement des monnaies se généralise
En mars 1973, le système des taux de change fixe s’écroule définitivement. Les banques centrales européennes refusent de continuer à soutenir le dollar et renoncent désormais à être rattachées au billet vert. Le régime de changes flottants est adopté. Encore en vigueur aujourd’hui, il fut entériné par les accords de la Jamaïque le 8 janvier 1976.

1973-1985 : d’un dollar faible au « dollar fort »
De 1973 à 1979, le dollar continue sur sa lancée et se déprécie régulièrement et considérablement par rapport au Deutsche Mark, perdant près de 50% de sa valeur. La violente remontée des taux d’intérêt décidée à la fin de 1979 par le nouveau gouverneur de la banque centrale américaine, Paul Volcker, pour combattre – avec succès – l’inflation, inverse la tendance.

Septembre 1985 : les Accords du Plaza
Après les premières crises liées à la dette en Amérique latine et les faillites à répétition des caisses d’Epargne américaines, les accords du Plaza visent à organiser un repli du dollar. L’effet est immédiat et spectaculaire. En à peine quinze mois, le dollar efface tous ses gains par rapport au Deutsche Mark.

22 février 1987 : les Accords du Louvre
Désireux de stopper la machine infernale qu’ils ont mise en route et tenter d’enrayer la baisse du dollar, les pays du G6 (G7 moins l’Italie) signent à Paris les Accords du Louvre. Mais après une pause, le dollar va continuer pendant dix ans, tendanciellement, à se déprécier.

1992 : la crise du Système monétaire européen (SME)
A partir du printemps 1992, le Système monétaire européen créé en 1979 subit une violente crise spéculative : la lire et la livre sterling sortent du dispositif de fixité le 17 septembre. La crise se poursuit jusqu’en 1993, avec les fortes dévaluations de la punt irlandaise (10%), du peseta (8%) et de l’escudo (6,5%).

1994 : la crise du peso mexicain
Fin 1994, la forte inflation pèse sur la compétitivité et les comptes extérieurs du Mexique. Les sorties de capitaux s’accélèrent et le peso dévisse. Les autorités sont contraintes de dévaluer la monnaie puis de l’abandonner à un flottement libre. Du même coup, il devient plus coûteux pour les Mexicains de rembourser leurs dettes en devises
étrangères, ce qui paralyse le système financier et l’économie. La crise se répercute dans le monde entier, et notamment en Amérique du Sud.

1997 : la crise asiatique
Le 2 juillet 1997, les autorités thaïlandaises décident de laisser flotter le bath. La monnaie chute et entraîne avec elle la roupie indonésienne, le ringgit malais et le peso philippin. A l’automne, la crise s’étend à la Corée, Taïwan, Singapour et Hong Kong. La situation financière des banques et des entreprises locales se détériore et les Bourses dégringolent.

1998 : la crise russe
Le 17 août 1998, la crise des finances publiques pousse le gouvernement russe à la fois à dévaluer le rouble et à se déclarer en défaut de paiement sur ses bons du Trésor (GKO). Une décision qui entraîne la chute du fond spéculatif LTCM et fait craindre un risque systémique mettant en péril le système financier international.

1er janvier 1999 : lancement de l’euro
La devise européenne est lancée. Elle remplacera les monnaies nationales des pays de l’Union européenne le 1er janvier 2002.

2001 : la crise argentine
Après deux années de récession et d’hyperinflation, l’Argentine connaît à partir de fin 2001 une grave crise financière. En décembre, le pays se déclare en défaut de paiement sur sa dette extérieure.

2007 : la crise des subprimes
Commencée début 2007 aux Etats-Unis, la crise des « subprimes », ou prêts à risques, s’étend rapidement au monde entier.

Elle entraîne à l’automne 2008 une crise bancaire sans précédent.

Aujourd’hui, entre un dollar roi sur le déclin, mais qui s’accroche, un euro chahuté par la crise des dettes souveraines et un yuan qui amorce son internationalisation, le cycle ouvert depuis la fin des accords de Bretton Woods approche de son terme. Une réforme du système monétaire international apparaît plus que jamais indispensable.

Nous vous proposons cet article afin d'élargir votre champ de réflexion. Cela ne signifie pas forcément que nous approuvions la vision développée ici. Dans tous les cas, notre responsabilité s'arrête aux propos que nous reportons ici. [Lire plus]Nous ne sommes nullement engagés par les propos que l'auteur aurait pu tenir par ailleurs - et encore moins par ceux qu'il pourrait tenir dans le futur. Merci cependant de nous signaler par le formulaire de contact toute information concernant l'auteur qui pourrait nuire à sa réputation. 

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RGT // 18.12.2021 à 10h02

Il y avait une alternative à la suprématie du sacro-saint dollar US mais elle a été rejetée par les USA qui ne pouvaient pas dans ce cas bénéficier de leur position dominante afin de se faire financer par la planète entière.

Ce système était proposé par Keynes lui-même et permettait d’éviter qu’une nation puisse aller piller les ressources monétaires de ses voisins : Le Bancor.

En principale innovation, le Bancor obligeait à un pays fortement exportateur à fortement réévaluer sa monnaie et un pays fortement importateur à dévaluer.

Ce système aurait permis, selon Keynes, de permettre à limiter la prédominance des économies les plus développées en rendant leurs monnaies inaccessibles pour les plus démunis et leur aurait permis de développer leur propre économie en étant protégés des prédateurs les plus voraces.

Cette solution n’a bien sûr pas été retenue car elle aurait été un frein puissant à la « libre circulation des biens et des investissements »…

Comme le Bancor a été refusé nous ne saurons jamais si cette solution aurait été bénéfique (du moins pour les plus faibles) et nous nous retrouvons désormais dans la situation que cette proposition souhaitait combattre.

Pour résumer : Les plus forts imposent leur solution aux plus faibles (du niveau individuel à celui des états – dirigés officieusement par les plus forts) en il devient chaque jour plus difficile pour les plus faibles de ne pas se faire dépouiller par les plus puissants.

Et la modification actuelle de la situation économique mondiale (montée irrésistible de la Chine) n’en est que la conséquence directe.

Un pays seul ne peut pas imposer ses « souhaits » à l’ensemble des autres s’il n’a accès qu’à ses propres ressources.
Pour avoir une « force de frappe » suffisante il doit aller dépouiller d’autres pays afin d’être assez fort pour imposer sa volonté.
C’est ce qu’a fait le Grèce antique, Rome, l’Angleterre colonialiste, les USA et désormais la Chine (différemment : Elle est a grande usine mondiale qui fabrique tout au détriment des autres).

Le seul moteur de ces systèmes conquérants n’a jamais été le « progrès » pour les populations mais simplement la cupidité de quelques « élites » qui souhaitaient accroître encore plus leurs profits, certains comme la Chine profitant de la soif de profits des puissants pour avancer leurs pions.

Rien de neuf dans les sociétés humaines. Les « gueux » se font presser comme des citrons pour les les « puissants » puissent continuer à les asservir.

7 réactions et commentaires

  • RGT // 18.12.2021 à 10h02

    Il y avait une alternative à la suprématie du sacro-saint dollar US mais elle a été rejetée par les USA qui ne pouvaient pas dans ce cas bénéficier de leur position dominante afin de se faire financer par la planète entière.

    Ce système était proposé par Keynes lui-même et permettait d’éviter qu’une nation puisse aller piller les ressources monétaires de ses voisins : Le Bancor.

    En principale innovation, le Bancor obligeait à un pays fortement exportateur à fortement réévaluer sa monnaie et un pays fortement importateur à dévaluer.

    Ce système aurait permis, selon Keynes, de permettre à limiter la prédominance des économies les plus développées en rendant leurs monnaies inaccessibles pour les plus démunis et leur aurait permis de développer leur propre économie en étant protégés des prédateurs les plus voraces.

    Cette solution n’a bien sûr pas été retenue car elle aurait été un frein puissant à la « libre circulation des biens et des investissements »…

    Comme le Bancor a été refusé nous ne saurons jamais si cette solution aurait été bénéfique (du moins pour les plus faibles) et nous nous retrouvons désormais dans la situation que cette proposition souhaitait combattre.

    Pour résumer : Les plus forts imposent leur solution aux plus faibles (du niveau individuel à celui des états – dirigés officieusement par les plus forts) en il devient chaque jour plus difficile pour les plus faibles de ne pas se faire dépouiller par les plus puissants.

    Et la modification actuelle de la situation économique mondiale (montée irrésistible de la Chine) n’en est que la conséquence directe.

    Un pays seul ne peut pas imposer ses « souhaits » à l’ensemble des autres s’il n’a accès qu’à ses propres ressources.
    Pour avoir une « force de frappe » suffisante il doit aller dépouiller d’autres pays afin d’être assez fort pour imposer sa volonté.
    C’est ce qu’a fait le Grèce antique, Rome, l’Angleterre colonialiste, les USA et désormais la Chine (différemment : Elle est a grande usine mondiale qui fabrique tout au détriment des autres).

    Le seul moteur de ces systèmes conquérants n’a jamais été le « progrès » pour les populations mais simplement la cupidité de quelques « élites » qui souhaitaient accroître encore plus leurs profits, certains comme la Chine profitant de la soif de profits des puissants pour avancer leurs pions.

    Rien de neuf dans les sociétés humaines. Les « gueux » se font presser comme des citrons pour les les « puissants » puissent continuer à les asservir.

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    • Calvez // 18.12.2021 à 19h26

      Vous confirmez qu’il n’y a rien de neuf sous le soleil : les forts dominent, les faibles subissent, les riches s’enrichissent, les pauvres s’appauvrissent.

        +1

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  • hyac // 18.12.2021 à 11h03

    2022 crise des banques centrales, inflation galopante, effondrement des marchés, émeutes….

      +4

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  • JF // 18.12.2021 à 14h25

    Erreur dans le titre: La date est 15 Aout 1971

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    • Incognitototo // 18.12.2021 à 14h59

      Oui, absolument ; et globalement, c’est très « bizarre » comment ce changement fondamental de paradigme monétaire et économique est présenté.

      On pourrait croire à la lecture que ce fut « au cours d’une conférence » que tout le monde s’est mis d’accord pour la fin de Bretton Woods. Pas du tout, c’est une décision unilatérale totalement imposée par les USA au reste du monde (en leur mettant des missiles sur la tempe).

      On pourrait croire que « des poussées inflationnistes » ont produit une « perte de confiance » dans le $. Pas du tout, c’est parce que les USA pour financer leur course aux armements et leur conquête de l’espace faisaient fonctionner la planche à billets en continu (au lieu de prélever plus d’impôts) que le $ se dépréciait, et que l’inflation explosait.

      Et on peut reprendre comme ça tous les faits présentés, sans que jamais les vraies causes et la responsabilité hégémonique des USA ne soient jamais relevées.

      Oui, vraiment bizarre cette « lecture » de l’histoire déconnectée des responsabilités politiques, ainsi que des vraies causes et conséquences. Sors de ce corps, Farah… 🙂

        +10

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      • Moussars // 20.12.2021 à 13h45

        Faut dire que que les sources sont des Echos, le prêt-à-penser libéral de D. Seux et consorts… Le successeur de Sylvestre sur Rance Inter. Soit 20 ans de dictature d' »infos » économiques avec nos impôts…

          +2

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  • Casimir Ioulianov // 22.12.2021 à 13h44

    Ça n’a pas empêché l’inflation, l’explosion des dettes, le financement des états par les banques centrales au final, l’explosion de la masse monétaire et enfin les taux négatifs…
    Ce qui est amusant c’est que c’est en train de péter à la gueule de tout le monde et que soit les gens s’en foutent, soit ils essayent de créer encore plus de papiers différents pour masquer le fait que la planche à billets ne sert plus à grand choses au point où on en est, les deux exemples à la mode sont les cryptos et les NFT … si il y a des gens pour trouver ça plus sur que de la monnaie, à la place d’un banquier central, moi j’investis dans une cabine à suicide.
    Bref, on a deux problèmes vu que le pognon est encore un mal nécessaire ; la masse monétaires et les règles de fixation des prix, surtout pour les biens immatériels d’ailleurs. Bretton Woods c’est une tentative malheureuse des décorrélation des prix et de la masse monétaire, au final ça a abouti à mettre un prix sur l’argent, ce qui est con car le seul truc qui ne devrait pas avoir de prix c’est paradoxalement l’argent. On a déjà fait la connerie, on réitère; l’histoire est encore bègue, prions pour qu’elle ait oublié la fin de la phrase.

      +3

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