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29.décembre.201529.12.2015 // Les Crises

Giorgio Agamben : « De l’État de droit à l’État de sécurité »

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Source : Le Monde, 23-12-2015

Giorgio Agamben

Pour le philosophe italien Giorgio Agamben, l’état d’urgence n’est pas un bouclier qui protège la démocratie. Il a, au contraire, selon lui, toujours accompagné les dictatures.

On ne comprend pas l’enjeu véritable de la prolongation de l’état d’urgence [jusqu’à la fin février] en France, si on ne le situe pas dans le contexte d’une transformation radicale du modèle étatique qui nous est familier. Il faut avant tout démentir le propos des femmes et hommes politiques irresponsables, selon lesquels l’état d’urgence serait un bouclier pour la démocratie.

Les historiens savent parfaitement que c’est le contraire qui est vrai. L’état d’urgence est justement le dispositif par lequel les pouvoirs totalitaires se sont installés en Europe. Ainsi, dans les années qui ont précédé la prise du pouvoir par Hitler, les gouvernements sociaux-démocrates de Weimar avaient eu si souvent recours à l’état d’urgence (état d’exception, comme on le nomme en allemand), qu’on a pu dire que l’Allemagne avait déjà cessé, avant 1933, d’être une démocratie parlementaire.

Or le premier acte d’Hitler, après sa nomination, a été de proclamer un état d’urgence, qui n’a jamais été révoqué. Lorsqu’on s’étonne des crimes qui ont pu être commis impunément en Allemagne par les nazis, on oublie que ces actes étaient parfaitement légaux, car le pays était soumis à l’état d’exception et que les libertés individuelles étaient suspendues.

On ne voit pas pourquoi un pareil scénario ne pourrait pas se répéter en France  : on imagine sans difficulté un gouvernement d’extrême droite se servir à ses fins d’un état d’urgence auquel les gouvernements socialistes ont désormais habitué les citoyens. Dans un pays qui vit dans un état d’urgence prolongé, et dans lequel les opérations de police se substituent progressivement au pouvoir judiciaire, il faut s’attendre à une dégradation rapide et irréversible des institutions publiques.

Lire la suite sur : Le Monde, 23-12-2015

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Commentaire recommandé

Henri Tanson // 29.12.2015 à 10h18

Ouf ! Hollande n’est pas d’extrême-droite !
Ça fait du bien de l’entendre dire….
Mais on peut penser le contraire:
– la destruction des acquis sociaux et de notre modèle social (retraites, assurance chômage, sécurité sociale, Services publics…)
– l’acceptation, soumission, aux décisions imposées par un pouvoir extérieur à la France… (Que ce soit la Commission, la BCE ou le FMI, l’OTAN…)
– les interventions militaires illégales en Syrie sans mandat de l’ONU et sans avoir été appelé par la Syrie, qui ont entraîné des actes terroristes sur notre sol: quelle aubaine pour les Régionales: on va jouer sur la peur…
– les attaques contre la démocratie sur notre territoire: la loi Macron et le 49.3, la ratification du Traité de Lisbonne sans conditions, alors que le référendum… L’utilisation des attentats pour faire peur au brave peuple pour qu’il continue à voter (…) pour des partis dont ils ne veulent plus ! Sans compter la loi de modernisation électorale qui va encore mieux protéger ce pouvoir contre l’emergence de partis d’ambition nationale, qui défendraient la démocratie…
– l’absence, donc, de choix, à chaque élection, puisqu’à chaque fois, que l’on vote pour la peste ou pour le choléra, nous avons toujours la même politique: celle de Bruxelles, de l’austérité et de la finance…
Nous ne sommes plus en démocratie depuis longtemps. Et le gouvernement Hollande en profite bien. Imaginez qu’il arrive à se faire ré-élire…
Mais bon, c’est vrai, Hollande est de gauche ! Je suis rassuré…

23 réactions et commentaires

  • Charles // 29.12.2015 à 02h37

    En complément de ce billet si juste sur le fond (et la forme!), je recommande le lire un texte remarquable de Cédric Mas, qui explique que la décision soudaine d’adopter la déchéance de nationalité n’est pas seulement le renoncement à toutes les valeurs républicaines, mais une manœuvre politicienne pour détourner l’attention et faire passer le pire: l’état d’uburgence, qui servira à mettre en place une dictature, au milieu de la crise sans précédent qu’annonce la poursuite de l’accumulation capitaliste.
    Le texte de Cédric Mas est ici: http://wp.me/s5oNrG-69200

      +17

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  • Pegaz // 29.12.2015 à 03h33

    Observation pessimiste

    Quel plus bel exemple et démonstration de la mue démocratique. Non pas des lois liberticide mais sécuritaire nous dira-t-on ! Ceci pour demain, le super libre marché pour après demain. Bel ancrage des fondamentaux chers à l’idéologie libérale, les fonctions régaliennes de l’État sont bientôt à quai. Crise économique, politique et sociale du pain béni pour les marchands du NOM.

    Les Libéraux
    Les fonctions régaliennes de l’État sont limitées aux grandes fonctions souveraines qui fondent l’existence même de l’État et qui ne font, en principe, l’objet d’aucune délégation. Elles sont aussi appelées prérogatives régaliennes.
    Elles sont au nombre de quatre :
    – assurer la sécurité extérieure par la diplomatie et la défense du territoire ;
    – assurer la sécurité intérieure et le maintien de l’ordre public avec, notamment, des forces de police ;
    – définir le droit et rendre la justice ;
    – détenir la souveraineté économique et financière en émettant de la monnaie, notamment par le biais d’une banque centrale. @Wikipédia

    Puisque mon quatrième n’est et ne sera plus, que reste-t-il ?

    Les derniers remparts, la paix sociale, la désobéissance civile, la migration…. ?

      +8

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  • DUGUESCLIN // 29.12.2015 à 06h33

    Pour le moment ce n’est pas un état d’extrême droite qui a établi l’état d’urgence et les dérives totalitaires potentielles.

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    • Henri Tanson // 29.12.2015 à 10h18

      Ouf ! Hollande n’est pas d’extrême-droite !
      Ça fait du bien de l’entendre dire….
      Mais on peut penser le contraire:
      – la destruction des acquis sociaux et de notre modèle social (retraites, assurance chômage, sécurité sociale, Services publics…)
      – l’acceptation, soumission, aux décisions imposées par un pouvoir extérieur à la France… (Que ce soit la Commission, la BCE ou le FMI, l’OTAN…)
      – les interventions militaires illégales en Syrie sans mandat de l’ONU et sans avoir été appelé par la Syrie, qui ont entraîné des actes terroristes sur notre sol: quelle aubaine pour les Régionales: on va jouer sur la peur…
      – les attaques contre la démocratie sur notre territoire: la loi Macron et le 49.3, la ratification du Traité de Lisbonne sans conditions, alors que le référendum… L’utilisation des attentats pour faire peur au brave peuple pour qu’il continue à voter (…) pour des partis dont ils ne veulent plus ! Sans compter la loi de modernisation électorale qui va encore mieux protéger ce pouvoir contre l’emergence de partis d’ambition nationale, qui défendraient la démocratie…
      – l’absence, donc, de choix, à chaque élection, puisqu’à chaque fois, que l’on vote pour la peste ou pour le choléra, nous avons toujours la même politique: celle de Bruxelles, de l’austérité et de la finance…
      Nous ne sommes plus en démocratie depuis longtemps. Et le gouvernement Hollande en profite bien. Imaginez qu’il arrive à se faire ré-élire…
      Mais bon, c’est vrai, Hollande est de gauche ! Je suis rassuré…

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      • loki // 29.12.2015 à 20h48

        Arrêtez de croire que le président Hollande gouverne ! Quand il y avait cohabitation Mitterrand/Chirac c’était bien Chirac qui gouvernait et quand la cohabitation était Chirac/Jospin, c’était Jospin qui gouvernait ! En l’occurrence c’est bien Valls qui gouverne point ! Un type qui a fait un score minable aux primaires socialistes et n’a pas été élu en quoi que ce soit pour gouverner le pays !
        Notre constitution nous fait élire un « pot de fleur » qui va choisir un type pour gouverner et en prendre plein la figure quoiqu’il fasse ! La seule responsabilité du « pot de fleur » est de ne pas changer de gouvernement et sa seule ambition est de se faire réélire pour jouer au « pot de fleur » !

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        • Wilmotte Karim // 31.12.2015 à 10h40

          La France a un régime présidentiel hybride: en cas de cohabitation, c’est le premier ministre qui domine.

          La France n’est pas dans une situation de cohabitation. Hollande est le leader du parti au pouvoir et assume la responsabilité de toutes les décisions prises.

          Si Vals s’oppose à Hollande… Il sera démissionné!
          D’autant que seul une petite clique soutiendra Vals.

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    • Macarel // 29.12.2015 à 22h43

      Je dirais un régime proto-fasciste. Hollande/Valls sont gauches, pas adroits, mais à droite…

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  • John V. Doe // 29.12.2015 à 08h25

    J’ai rarement lu un texte aussi pertinent et général sur un sujet aussi chaud.

    Merci à tous ceux qui en ont rendu l’accès possible.

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  • gilles // 29.12.2015 à 08h25

    Ajoutons qu’en France, les « états d’exception » divers et variés sont toujours venues par la gauche y compris lorsque celle-ci ne reconnait plus ses enfants ensuite !

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  • georges glise // 29.12.2015 à 11h33

    si marine le pen devient présidente en 2017, elle n’aura qu’à décréter l’état d’urgence sécuritaire pour prendre toutes les mesures hitléro-mussoliniennes qu’elle voudra.né en provence pendant la deuxième guerre mondiale, combien de fois n’ai-je pas entendu, sous la quatrième république, que ce dont le pays avait besoin pour mettre fin à la chienlit parlementaire, c’était d’une bonne dictature. et, née d’une tentative de coup d’état en 1958, la constitution de 1958 est déjà en elle-même une atteinte à la démocratie.

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  • lvzor // 29.12.2015 à 11h46

    « …on imagine sans difficulté un gouvernement d’extrême droite se servir à ses fins d’un état d’urgence auquel les gouvernements socialistes ont désormais habitué les citoyens. »

    Ce qu’on imagine, par contre, avec la plus grande difficulté c’est qu’une différence entre un tel gouvernement socialiste (?) et un tel gouvernement d’extrême droite puisse être perceptible.

    Je suis aux antipodes du FN, mais force est de constater qu’entre Marine Le Pen et Manuel Valls ce n’est pas la première qui correspond le mieux à ce qu’Adorno avait défini comme « personnalité autoritaire ».
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Personnalit%C3%A9_autoritaire

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    • Crapaud Rouge // 29.12.2015 à 13h33

      « Ce qu’on imagine, par contre, avec la plus grande difficulté c’est qu’une différence entre un tel gouvernement socialiste (?) et un tel gouvernement d’extrême droite puisse être perceptible. » : il reste une grande différence sur le plan idéologique/communication. L’extrême-droite avance à visage découvert, ce « gouvernement socialiste (?) » se justifie par des mensonges alambiqués.

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  • Le Rouméliote // 29.12.2015 à 12h07

    Rien de plus normal, puisque la démocratie est morte et enterrée au Berlaymont, à Bruxelles !

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  • Spectre // 29.12.2015 à 13h03

    Je parlerais plutôt d’État d’insécurité, puisque malgré les moyens démentiels dont il dispose, cet État est toujours infoutu d’assurer la sécurité des citoyens. Pire, comme le dit justement l’auteur, il n’en a même pas l’intérêt — tant les brebis apeurées (et ce malgré les risques objectivement infimes que font peser les attentats pour un citoyen lambda) sont aisément manipulables et dociles.

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  • lemoine001 // 29.12.2015 à 13h41

    Il se gaspille beaucoup de salive et beaucoup d’encre à discuter si une mesure est de gauche, de droite ou d’extrême droite, si elle est progressiste ou conservatrice. Tout cela ne fait qu’embrouiller et perdre de vue l’essentiel : quels sont les intérêts qu’une politique sert ?

    Faut-il être conservateur ou progressiste ? Pour répondre à cela un exemple suffit : un illustre écrivain à qui l’on reprochait d’être conservateur répondit : « Quoi, il n’y aurait donc rien à conserver ». C’était il y a bien longtemps et à cette époque on lisait encore Marx. L’interpellateur fut bien embarrassé et ne trouva rien à répliquer. Il avait en tête ce passage célèbre du manifeste du parti communiste : « La bourgeoisie a joué dans l’histoire un rôle éminemment révolutionnaire. Partout où elle a conquis le pouvoir, elle a foulé aux pieds les relations féodales, patriarcales et idylliques. Tous ces liens complexes et variés qui unissent l’homme féodal à ses supérieurs naturels, elle les a brisés sans pitié pour ne laisser subsister d’autre lien, entre l’homme et l’homme, que le froid intérêt, les dures exigences du paiement au comptant ». Eh oui ! Le progrès quelque fois peut avoir des aspects problématiques tout autant que le conservatisme !

    A une époque où on se réclame du progrès et de son envers « le retard de la France » dans tel ou tel domaine pour aller toujours plus loin dans les bouleversements sociétaux, il ne faut pas s’étonner de voir qu’une partie de la population veut s’y opposer. Les politiques qui veulent brusquer les évolutions sociales ne font qu’attiser les divisions et les hostilités réciproques. Qui cela sert-il ? Cela sert les puissances d’argent évidemment puisque cela divise le peuple.

    Faut-il être de droite ou de gauche ? Là aussi la réponse est facile : il est absurde de vouloir classer des idées sans restriction, et tout d’un bloc, à droite ou à gauche. Ce classement en droite ou gauche ne fait que brouiller la compréhension des choses. Je voudrais bien qu’on me dise en quoi la politique que nous subissons actuellement est tellement plus à gauche que celle du gouvernement précédent. Je vois bien que ceux qui se proclament de gauche font d’autant plus de tapage sur les réformes sociétales ou sur la sacro-sainte « sécurité » qu’ils sont plus discrets sur les réformes sociales. Quand ils parlent de réforme en matière sociale ou de sécurité, c’est pour remettre en cause ce qu’ils appellent les « archaïsmes » tels que la sécurité de l’emploi, l’indemnisation des chômeurs, ou l’indexation des salaires sur les prix. On nous dira après cela que la bourgeoisie est conservatrice. Quelle erreur ! Elle ne l’est que pour ses intérêts !

    Ces classements en progressistes et conservateurs ou en droite et gauche ne valent pas grand chose. Il suffit de lire les auteurs les plus libéraux pour voir qu’ils se présentent comme les vrais progressistes et même parfois comme des révolutionnaires prêts à faire table rase du passé. Ils ne seraient pas gênés pour répondre à notre illustre écrivain qu’il n’y a effectivement rien à conserver, que tout doit céder devant la puissance des « marchés » qui sont la réalité et la révolution en action.

    Le seul classement qui ne ment pas est celui qui oppose les idées qui servent les intérêts des travailleurs et celles qui servent ceux des exploiteurs (c’est-à-dire ceux qui s’enrichissent par le travail d’autrui).

    On voudrait déchoir de la nationalité française quelques fous furieux qui n’en ont que faire. Les auteurs même de cette proposition reconnaissent qu’elle sera sans effet. Mais pendant ce temps, le pays est ouvert au capital international qui peut faire main-basse sur nos richesses, nos savoir-faire. Sa langue est abâtardie : les journalistes ne connaissent plus les formes du passé (ils usent du présent pour en parler). Ils n’utilisent plus la forme interrogative. Et bien-sûr ils ne savent rien de la concordance des temps. La seule langue qu’ils semblent un peu connaitre, c’est un globish anglo-américain. Le pays est dépouillé de sa souveraineté, de sa culture : il est vassal de son puissant voisin, lui-même piloté par plus puissant que lui. Bientôt la nationalité française ne sera qu’une coquille vide, on sera français comme on est aujourd’hui normand ou auvergnat ! Ce ne sont pas les terroristes binationaux qui seront privé de leur nationalité, c’est nous tous. C’est tous les travailleurs qui n’appartiennent pas à l’élite internationalisée.

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    • Henri Tanson // 29.12.2015 à 17h47

      Certainement.
      À part l’avant-dernier paragraphe, on ne peut qu’être d’accord avec vous.
      Par contre, diviser le monde en gentils travailleurs d’un côté et vilains exploiteurs de l’autre, ça « date » un peu…
      Mais ce débat n’a rien à voir avec l’excellent sujet de Giorgio Agamben, sur lequel vous ne vous prononcez pas.
      La dérive de notre société, de l’état de droit à l’état de sécurité.

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      • lemoine001 // 29.12.2015 à 18h17

        Ce qui « date », ce qui dure, c’est ce qui résiste à la réfutation.

        Ils ne s’agit pas de dire que les travailleurs (plus précisément encore la classe productive) sont plus gentils que les autres. Mais ils sont le plus grand nombre. Ils constituent la base de la société qui ne se conçoit pas sans eux. La noblesse a disparu (au moins comme couche dominante) sans que la société en soit affaiblie (bien au contraire). De même les financiers peuvent disparaitre sans dommage (sinon un désordre passager). Mais si les producteurs arrêtent de produire, il ne se passera pas longtemps avant que la société tout entière s’écroule. Car la France c’est eux qui la font.

        Quand on les dépossède comme cela a été fait avec les privatisations, quand on cède aux féodaux du moyen-orient, aux chinois ou aux fonds de pension et autres milliardaires à la Soros, nos industries, nos vignes, notre terre, c’est le produit du travail de nos ancêtres qui est bradé. C’est nous-mêmes et notre avenir qui sont liquidés. C’est bien autre chose que le problème de savoir qui mérite et qui ne mérite pas la carte d’identité ou le passeport.

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        • lemoine001 // 29.12.2015 à 18h21

          Pour savoir ce que signifie la dépossession d’un peuple comme désastre lire : le second anschluss – l’annexion de la RDA de Vladimiro Giacché – éditions Delga

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    • TuYolPol // 29.12.2015 à 18h38

      Vous attirez l’attention sur l’orientation du repère droite / gauche.
      L’orientation progressiste / conservateur comme vous le faites remarquer est piégée, on peut soutenir qu’elle n’a aucune signification structurante pour ce qui nous intéresse réellement.
      Ce qui nous intéresse, si je peux parler à la première personne du pluriel, c’est des notions comme la justice, l’humanité, la liberté. Vous connaissez peut-être l’analyse d’Emmanuel Todd qui montre l’effet historique des structures familiales traditionnelles selon les dimensions égalitaire / inégalitaire et libéral / autoritaire. Ce que nous appelions la gauche, en France, autrefois, se situait clairement sur l’axe de l’égalité, celui de l’intérêt des travailleurs comme vous dites, et pouvait en revanche être plus évasif sur celui de la liberté.
      Todd dit que l’axe de la liberté est resté prépondérant après la révolution britannique, alors que c’était celui de l’égalité après la révolution française.
      Or l’axe de la liberté est finalement celui qui brouille les cartes et permet au PS de renier cette ancienne gauche, la gauche sociale, la gauche du combat pour le peuple, effet résultant d’intérêts de classe du personnel politique, d’intérêts géopolitiques d’un empire anglo-saxon, de l’épouvantail soviétique, de l’exil de l’industrie, de la dilution des groupes et de l’individualisation consumériste, etc etc. L’individualisme est sacré pour un américain moyen, j’imagine, et la nation est fétichisée.
      Le peuple est ringardisé, ses porte-paroles sont populistes, les classes sociales sont bannies du vocabulaire.
      Malgré cela, le mot gauche n’est pas pour autant à jeter, ne serait-ce que pour sa charge historique, ici en France. C’est le camp de la générosité contre la mesquinerie, de la justice contre le cynisme, de l’intelligence collective contre le casino individualiste, de l’humanisme contre le profit. De la liberté bien sûr, mais attention, pas la liberté du prédateur, la liberté à l’anglo-saxonne serais-je tenté de dire. La naturalisation des rapports de force, le romantisme de la barbarie, très peu pour moi.
      Si seulement on retrouvait cette flamme du peuple, ne serait-ce qu’une ambition de justice et de solidarité. Pour cela, je soupçonne qu’il faut non pas abandonner, mais relativiser les exigences de liberté. Le combat collectif requiert un sacrifice, mais moins important que ce que l’on va perdre, désarmés, mesquins et petits devant l’oligarchie, au-dessus des lois et des nations.
      Il nous faut une gauche forte, intransigeante, structurante, de combat, pas une aspirine pour supporter l’amputation de notre humanité.

        +0

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      • Henri Tanson // 29.12.2015 à 20h22

        TuYolPol
        « Il nous faut une gauche forte…. »

        Il faut que la France retrouve UN pouvoir politique avant de rêver d’une gauche forte… Ou droite forte, ou autre…
        Vous rêvez. Le pouvoir n’est PLUS en France !
        Ça vous aurait donc échappé ?
        Tant que la France n’aura pas retrouvé son autonomie politique, toutes ces réflexions se résumeront à du blabla.
        (Je parle du vrai pouvoir politique, qui met en place des représentants du peuple, démocratiquement, qui rendent des comptes sur leurs actions… On en est très, très, loin !)
        Désolé…

        Par contre, le pouvoir de nuisance de nos gouvernants est intact…
        Et ils en usent à merveille !

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  • Garibaldi2 // 29.12.2015 à 16h22

    ‘’Alors qu’il est entendu dans un Etat de droit qu’un crime ne peut être certifié que par une enquête judiciaire, sous le paradigme sécuritaire, on doit se contenter de ce qu’en disent la police et les médias qui en dépendent …/… D’où le vague incroyable et les contradictions patentes dans les reconstructions hâtives des événements, qui éludent sciemment toute possibilité de vérification et de falsification et qui ressemblent davantage à des commérages qu’à des enquêtes. ‘’

    Ca a commencé avec le 11 septembre, à la suite duquel aucune enquête judiciaire n’a été diligentée (et pas de mandat d’arrêt contre Ben Laden pour cette affaire!). Puis on a eu droit à l’affaire … (je vous laisse compléter …)

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  • Andrae // 29.12.2015 à 19h33

    Texte excellent.

    Les USA sont dans un perpétuel ‘état d’urgence’, qui dure depuis des décénnies. Les lois, distribution de pouvoir, conséquences sur le terrain, sont difficile à détailler, évaluer.

    En gros, l’état d’urgence offre aux acteurs puissants – président, congrès, police, autres forces de l’ordre comme le ‘Homeland Security’, etc. de faire ce qui bien leur semble, la loi est vague, comme en France actuellement.

    Une police militarisée et agissant de son propre chef terrorise la population et ne fait qu’exacerber toutes les tensions, ethniques, entre quartiers, entre groupes, etc. La France fait un simulacre mini-me des USA, et les résultats seront strictement identiques. (Avec les Arabes en position des Noirs aux US.)

    Notons que sur le plan de l’agression militaire et diplomatique coercitif la France essaye de se placer aux premières loges derrière, et en support, des USA: Lybie, Syrie (Mali..), et *contre* la Russie – elle a été, est, bcp plus aggressive que l’Allemagne p. ex. sur tous ces chapitres.

    La France tente de compenser sa faiblesse face à l’Allemagne, de prendre le dessus, par une soumission au chef surprême, en occupant la place du meilleur élève. (1) Pour continuer, et réussir, dans cette ligne, elle a besoin de reprimer, effrayer, sa propre population, et donc de l’état d’urgence, copie conforme des démarches US.

    un article, mainstream USA sur ‘states of emergency’

    http://www.usatoday.com/story/news/politics/2014/10/22/president-obama-states-of-emergency/16851775/

    1. Toujours une erreur. Toute soumission amène plus de domination. Je suppose que Hollande ne se compare pas à Milosevic, Saddam Hussein ou Kadafi.

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  • orenkomp.ru // 07.01.2016 à 03h50

    Pour le philosophe italien Giorgio Agamben, l’etat d’urgence n’est pas un bouclier qui protege la democratie. Il a, au contraire, selon lui, toujours accompagne les dictatures.

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