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29.mai.201729.5.2017 // Les Crises

Chomsky à Paris – Novembre 2016

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Source : NoamChomsky.fr, 16-02-2017

Paris a eu la chance d’accueillir Noam Chomsky fin novembre 2016. Il est revenu recevoir la Médaille de la La Société internationale de Philologie (SIP) qui est l’équivalent du Prix Nobel de Linguistique.

Il a prononcée un discours lors d’une conférence organisée par la SIP en partenariat avec Philosophie magazine et le Centre Wallonie Bruxelles de Paris.

Je remercie chaleureusement les bénévoles qui ont permis de réaliser cette vidéo 🙂

I. Introduction

Dans cette introduction, Florent Montaclair, Président d’honneur de la Société internationale de Philologie, raconte les rocambolesques conditions de l’organsiation de la venue de la Chomsky à Paris – la France s’étant encore distinguée – en mal – au niveau mondial, dans son accueil de Chomsky. Avec également Martin Legros, rédacteur en chef de Philosophie magazine.

II. Le discours de Chomsky

Intervention exceptionnelle au lendemain de l’élection de Donald Trump : crise écologique, crise politique, crise de la vérité et des médias. Chomsky répond. Et invite les jeunes à s’engager pour modifier les termes du débat public.

III. Remise de la médaille

Zoom sur la remise de la médaille :

Source : NoamChomsky.fr, 16-02-2017


Le discours de Noam Chomsky le 30 novembre 2016 à Paris

Le philosophe Noam Chomsky, figure mondialement réputée de la linguistique et intellectuel engagé à la gauche de la gauche, devait recevoir le 30 novembre 2016 une distinction scientifique à l’Assemblée nationale, à Paris. L’événement a finalement été annulé en dernière minute à la demande du groupe socialiste. Pris de court, les organisateurs se sont donc tournés vers le Centre Wallonie-Bruxelles à Paris qui a accepté d’accueillir cette cérémonie dans l’urgence. Voici le discours de Noam Chomsky traduit par le site www.les-crises.fr.

L’espèce humaine est sur Terre depuis environ 200 000 ans. C’est un séjour très bref à l’échelle de l’évolution. Durant cette période, les humains ont fait face à de nombreuses crises. Pour s’en tenir à l’Europe et à l’époque moderne, la guerre de Trente Ans au XVIIe siècle fut dévastatrice, exterminant peut-être un tiers de la population de l’Allemagne. Il est inutile de passer en revue les détails de la guerre de Trente Ans du XXesiècle, de 1914 à 1945. Cette guerre abominable prit fin en août 1945; le 6 août, nous apprenions que l’intelligence humaine avait découvert les moyens de mettre un terme à 200 000 ans d’expérience humaine.

Il n’y avait aucun doute au fait que la capacité de destruction augmenterait, se diffuserait dans de nombreuses mains, augmenterait le risque d’autodestruction de l’humanité. Il y eut de nombreuses opportunités pour réduire significativement ou même éliminer la menace. La plupart ont été ignorées, parfois de façon vraiment surprenante: je n’ai pas le temps d’entrer dans les détails, mais c’est une histoire stupéfiante. Des opportunités existent encore et éliminer ce fléau n’est pas un rêve utopique, bien que les obstacles soient importants. Il y a beaucoup à dire sur cette histoire révélatrice et les options actuelles, mais mettons cela de côté pour l’instant.

Revenons au 6 août 1945. En ce jour sinistre, l’humanité entra dans une nouvelle ère, celle de l’âge nucléaire. Une ère qui a peu de chances de perdurer. La liste des cas où on l’a échappé belle est absolument effarante; nous sommes parfois passés à quelques minutes du désastre final. Ce fut souvent à cause d’accidents ou d’erreurs, dans quelques cas marquants à cause de l’inconscience de nos dirigeants.

De plus, juste en ce moment, la menace s’amplifie à la frontière russe, entraînant l’inquiétude des autorités, à juste titre, que la menace d’une guerre nucléaire n’approche le niveau des phases les plus critiques de l’ère atomique. Et l’histoire est sans équivoque: soit nous mettons fin à l’ère atomique, soit l’ère atomique sera notre fin.

Certes, nous n’en avions pas conscience en 1945, mais nous savons aujourd’hui qu’une ère nouvelle et néanmoins tout aussi dangereuse a débuté à ce moment-là : une nouvelle époque géologique baptisée l’Anthropocène, une époque définie par l’impact extrême de l’humanité sur l’environnement.

Nous savons aujourd’hui que nous sommes bel et bien entrés dans cette nouvelle époque ainsi que dans une période de destruction des espèces, que l’on nomme la 6e extinction, comparable à la 5e extinction qui s’est produite il y a 66 millions d’années lorsqu’un astéroïde a percuté la Terre, détruisant 75% des espèces, mettant fin à l’âge des dinosaures et ouvrant la voie aux petits mammifères, et finalement à l’espèce humaine très récemment.

Il ne nous a pas fallu longtemps pour reproduire les mêmes effets que l’astéroïde, à quelques différences près. Lors de la 6e extinction, celle qui est en cours, les grands animaux sont décimés à une vitesse démesurée, une particularité caractéristique de l’histoire humaine qui a moins de 200 000 ans, a contrario des précédentes extinctions.

Il y a aujourd’hui un large consensus sur le fait que nous sommes pleinement dans l’Anthropocène, néanmoins il existe certains désaccords sur le moment exact où les changements devinrent suffisamment extrêmes pour marquer le début de cette nouvelle époque géologique. Il y a quelques mois, le groupe de travail officiel sur l’Anthropocène est parvenu à une conclusion sur ce sujet. Et a recommandé au Congrès Géologique International que l’on date le commencement de l’Anthropocène à la naissance de l’âge atomique, à la fin de la Seconde Guerre mondiale en août 1945, c’est-à-dire lorsque les bouleversements radicaux de l’environnement liés à l’impact humain sont devenus véritablement dramatiques. Ainsi, selon leur analyse, l’Anthropocène et l’âge atomique coïncident pour constituer une double menace pour la perpétuation de la vie humaine organisée.

On peut, sans exagérer, comparer la fin de la Seconde Guerre mondiale au moment critique où les lemmings, sous forme humaine, se mettent en route et se jettent avec une détermination méthodique dans le précipice, vers leur désastre final. Nous en avons appris beaucoup plus sur cette marche déterminée et méthodique vers le désastre le 8 novembre dernier, une date qui sera peut-être historique à en juger par la gigantesque couverture médiatique et l’examen minutieux que les événements de ce jour ont reçu.

Le ton général de la couverture médiatique a été élégamment capturé par la Une de l’hebdomadaire allemand Der Spiegel. Une caricature représentait une énorme tête de Donald Trump, en forme de météorite, fonçant vers une Terre minuscule, avec la bouche béante pour la dévorer, et comme titre : « Das Ende der Welt » (La Fin du Monde). En plus petites lettres, en dessous, on pouvait lire « Wie wir sie kennen », soit « tel qu’on le connaît », donc « La fin du monde tel qu’on le connaît ». Et il y a effectivement des raisons de penser que les événements du 8 novembre sont un signe de la fin du monde tel qu’on l’a connu, même si pour moi ça n’est pas dans le sens de cette caricature et d’autres du même style. Il y a eu en fait deux événements majeurs le 8 novembre dernier.

Le premier est l’élection américaine durant laquelle le Parti Républicain a pris le contrôle des 3 branches du gouvernement : le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif, et très bientôt le pouvoir judiciaire avec la Cour Suprême. Cet événement a bénéficié d’une couverture médiatique hors du commun pendant de nombreuses semaines. Il est difficile de trouver une frénésie comparable dans le passé.

Le deuxième événement majeur de ce 8 novembre n’a presque pas été couvert par les médias même si on peut démontrer qu’il a une portée bien plus grande que les élections et peut être vu comme un présage de la fin du monde tel qu’on le connaît.

Je veux parler d’un événement qui a eu lieu le 8 novembre à Marrakech, au Maroc, à la COP22 où 200 pays se rencontraient pour essayer de continuer les efforts engagés lors de l’accord obtenu à la COP21 de Paris en décembre 2015. A Marrakech, le 8 novembre, l’Organisation météorologique mondiale a présenté une étude évaluant le stade actuel de l’Anthropocène. L’étude indique que les 5 dernières années ont été les plus chaudes enregistrées, et que cette année est destinée à établir un nouveau record. Le niveau des mers monte à une vitesse qui va probablement encore s’accélérer, et ce de façon brutale, en raison de la fonte des calottes glaciaires, qui est bien plus rapide que prévue, en particulier celle de l’Antarctique.

L’Organisation météorologique mondiale (OMM) a déjà indiqué que la surface des calottes glaciaires de l’Arctique sur les 5 dernières années est presque 30% en dessous de la moyenne des 30 dernières années. C’est particulièrement notable car cela réduit l’effet bénéfique de la glace polaire qui renvoyait les rayons solaires, et ainsi accélère les effets désastreux du réchauffement climatique, en particulier celui de la montée du niveau des mers. L’étude de l’OMM a également ajouté que la hausse des températures était déjà dangereusement proche du seuil de 1.5°C, qui était établi comme la limite lors de la COP21 à Paris. Elle incluait également d’autres rapports et prévisions dramatiques. Le but à Marrakech était de négocier des façons de mettre en œuvre l’accord de la COP21 en fournissant un plan d’action détaillé. Cela n’a pas fonctionné en raison du second événement du 8 novembre, l’élection américaine.

La conférence de Marrakech s’est ouverte et mise au travail le 7 novembre. Le 8 novembre sortait le rapport de l’Organisation mondiale de météorologie. Le 9 novembre, le mandat de la conférence changea complètement. La question qui domina dès lors la conférence fut de savoir si le président élu aux États-Unis retirerait effectivement les États-Unis de l’Accord de Paris comme il avait promis de le faire. Et chacun se posait la question de savoir si l’accord pourrait survivre à un tel coup. La conférence s’est poursuivie avec cette ombre et s’est terminée presque sans résultat significatif. Ce dont nous avons été témoins est très marquant. À la conférence de Marrakech, il y a eu un pays qui a montré la voie pour soutenir les espoirs d’une survie civilisée, la Chine. La Chine est en tête pour porter les espoirs de la survie. En montrant au monde la voie vers le désastre, ce fut le leader du monde libre. C’est le pays le plus puissant dans l’histoire du monde qui a porté un sérieux coup aux espoirs de survie d’une société humaine organisée. Ce n’est pas facile de trouver les mots pour décrire ce spectacle. Tels sont les faits.

En fait, ce dont nous avons été témoins ces derniers mois n’est pas moins stupéfiant que la folie électorale des États-Unis qui a fasciné le monde. Mais pour des raisons étranges, ce qui a capté l’attention du monde sont les mots de Mitt Romney « l’intimidation, la cupidité, la frime, la misogynie, les scènes absurdes dignes de l’école primaire de Donald Trump. » Voilà ce qui a fasciné le monde.

En attendant, le fait le plus important du processus électoral a à peine été mentionné, à savoir le strict évitement des problématiques dont les deux crises les plus importantes auxquelles l’espèce humaine n’a jamais été confrontée en 200 000 ans sur Terre. La menace de guerre nucléaire et la menace de catastrophes environnementales, n’ont quasiment pas été mentionnées.

Le changement climatique n’a pas été entièrement ignoré. Durant la primaire des Républicains, sur laquelle l’attention du monde était braquée, chaque candidat, sans exception, a rejeté les espoirs des conférences de Paris et du Maroc. Et la plupart ont tout simplement nié que ce qui est en train de se passer arrive.

Les seules exceptions sont ceux salués comme raisonnables et modérés, comme Jeb Bush, qui a dit que la science est dans l’incertitude, que nous n’avons pas à faire quoi que ce soit, parce que nous produisons plus de gaz naturel grâce à la fracturation. L’autre modéré était le gouverneur de l’Ohio, John Kasich, qui a convenu que le réchauffement climatique était probablement en cours et a ajouté : « Nous allons brûler du charbon dans l’Ohio, et nous n’allons pas nous excuser pour ça. » C’est un déni total.

Le candidat élu appelle à une augmentation rapide de l’utilisation des combustibles fossiles, y compris le charbon, le plus dangereux, à l’élimination des réglementations, et, en pratique, au démantèlement de l’Agence de protection de l’environnement, à refuser d’aider les pays en développement qui cherchent à progresser vers l’énergie durable – qui est une pierre fondatrice des conférences de Paris et de Marrakech – et en général à courir vers le précipice le plus rapidement possible.

Le déni des Républicains a déjà un impact significatif. On avait espéré que les négociations de la COP21 à Paris aboutiraient à un traité viable mais cet espoir a été abandonné parce que le Congrès des États-Unis, républicain, n’a accepté aucun accord contraignant. Et donc l’engagement était un accord volontaire beaucoup plus faible, évidemment.

Et maintenant les suites. La conférence de Marrakech s’est terminée avec un problème réel du fait de l’inquiétude que tout cela soit vain et du fait de la position du leader du monde libre. Là encore, il est difficile de trouver les mots pour décrire ce qui arrive, car c’est à peine mentionné dans la couverture massive de ces problèmes et de ces événements ? À vrai dire, l’impact du réchauffement climatique global pourrait bientôt être plus clairement apparent qu’il ne l’est déjà.

Par exemple, prenez le Bangladesh. Rien qu’au Bangladesh, des dizaines de millions de personnes devront fuir les basses plaines dans les années à venir, à cause de la hausse du niveau de la mer et d’un climat plus violent. Cela va créer une crise migratoire qui fera passer celles d’aujourd’hui pour insignifiantes. Le principal climatologue du Bangladesh a déclaré, à juste titre, que ces migrants devraient avoir le droit d’émigrer dans les pays d’où proviennent tous ces gaz à effet de serre. Des millions devraient pouvoir venir aux États-Unis et dans les autres pays qui se sont enrichis en instaurant une nouvelle ère géologique qui pourrait, en fin de compte, être la dernière pour notre espèce.

Ces conséquences catastrophiques ne peuvent que croître, non seulement au Bangladesh mais également dans toute l’Asie du Sud puisque les températures qui sont déjà intolérables pour les pauvres augmentent inexorablement, et que les glaciers de l’Himalaya continuent de fondre, menaçant la totalité des réserves d’eau du Sud de l’Asie. On a déjà compté, en Inde, quelque trois cent millions de personnes qui manquent d’eau potable. Un moment de réflexion suffit pour rendre plus qu’évident que ces deux menaces pour la survie commencent à se rejoindre à l’heure actuelle.

L’Inde et le Pakistan possèdent, bien sûr, l’arme nucléaire et seront probablement exposés à de sévères manques d’eau dans un futur proche. Ils sont déjà à deux doigts d’entrer en guerre, et les conflits sur l’eau pourraient déclencher la catastrophe. Ils en viendraient sûrement rapidement aux armes nucléaires, avec des conséquences désastreuses pour la région. Et pire encore, un très grand recours aux armes nucléaires pourrait entraîner la malédiction finale de l’hiver nucléaire et de la famine globale. C’est un désastre final pour les espèces sur lequel les scientifiques nous ont alerté depuis des années. Tout cela se produit sans commentaire.

Pendant ce temps, à la frontière russe, les deux côtés s’engagent dans des actions provocatrices, dans des escalades militaires dangereuses, et, notez-le bien, à la frontière russe, pas à la frontière mexicaine, il y a une histoire importante là. Et l’Occident qui devrait être le premier dans la lutte sur ces questions existentielles, est dans le désarroi, avec la plus grande partie de sa population pleine de colère, de peur,de méfiance et de mépris pour les institutions établies.

Alors la phrase « Das Ende der Welt » n’est peut-être pas complètement inappropriée, si ce n’est pour les raisons attendues. Cependant, bien qu’il soit facile d’évoquer d’autres scénarios sinistres mais malheureusement pas invraisemblables, il y a des raisons aussi d’avoir de l’espoir. Pour rester sur les

élections américaines, le Parti républicain a pris le contrôle de la totalité du gouvernement, ils ont en fait obtenu une minorité de votes, 2 millions de moins que les démocrates, bien que le décompte ne soit pas encore fini.

Clinton a facilement gagné parmi les jeunes votants et, de manière encore plus significative, une majorité écrasante de jeunes votants a écrit « Sanders » au-dessus des deux candidats officiels et a soutenu ce qu’il appelle une « révolution politique ». C’est une formule intéressante. Sanders est en fait un démocrate honnête et dévoué, favorable à un New deal, et son programme n’aurait pas surpris le général Eisenhower, Dwight Eisenhower, président dans les années 50.

Le fait que ses propositions soient décrites comme une révolution politique montre aussi à quel point notre politique s’est décalée à droite pendant l’ère néolibérale. Les élections françaises qui arrivent en sont une autre illustration dramatique. Par ailleurs, de nombreux électeurs de Trump avaient en fait voté pour d’Obama. Dans les élections précédentes ils ont été séduits par les slogans « espoir » et « changement », puis ils ont été désabusés quand il n’y a eu aucun changement et bien peu d’espoir. On peut facilement concevoir la possibilité d’une coalition progressiste qui apporterait le changement et l’espoir qui sont justement réclamés par les victimes de l’agression du néolibéralisme sur les populations de la précédente génération.

Et par exemple, durant le pic de ce miracle économique tellement glorifié de 2007, juste avant le krach, les salaires réels des travailleurs des États-Unis étaient bien en dessous de ce qu’ils étaient vingt-cinq ans auparavant quand le programme néolibéral venait juste de commencé. Avec des effets similaires et souvent plus durs en Europe. L’impact de politiques similaires en Europe a été encore plus graves qu’aux USA, et en particulier depuis le krach et les programmes d’austérité destructeurs qui ont suivi, qui peuvent encore être renforcés, en France par exemple. Pour en rester aux États-Unis, certaines décisions de Trump pourraient être sensées, suivant comment elles sont formulées. On peut noter la proposition d’un grand investissement dans les infrastructures, qui sont vraiment terriblement nécessaires aux États-Unis. C’est en fait un des programmes initiaux de l’administration Obama, qui a été torpillé par la machine destructrice républicaine qui était ouvertement dédiée à rendre le pays ingouvernable aussi longtemps qu’ils n’étaient pas aux commandes. Eh bien, maintenant qu’ils sont aux commandes, ils vont peut-être appliquer la politique d’Obama, même si cela se fera de façon bien plus périlleuse que cela ne l’aurait été dans le passé, à cause des mesures d’accompagnement fiscal, à savoir des coupes franches dans les impôts pour les plus riches et pour les entreprises, pas de nouvelles sources de revenu, et une augmentation du budget déjà bien gonflé du Pentagone. Et pour ces raisons, les plans prévoient une augmentation conséquente des déficits. À ce stade, le Parti républicain aura probablement recours aux instructions de Dick Cheney au secrétaire au trésor Paul O’Neil en 2002 : « Ronald Reagan a prouvé que les déficits n’ont pas d’importance. Je veux dire, les déficits que nous, républicains, créons pour gagner le soutien de la population, et laissons à d’autres, de préférence les démocrates, le soin de réparer les dégâts. » La tactique peut marcher, pour un temps au moins. Et quand elle échouera, car elle échouera de manière inévitable, il y aura probablement un recours répugnant à faire des plus vulnérables les boucs émissaires : les immigrés, les Afro-Américains, les Latinos, d’une manière trop familière dans l’histoire, bien connue en France en ce moment.

Il est peut-être utile de continuer de commenter le spectacle étrange de l’isolement des États-Unis, le leader du monde libre, à la conférence du Maroc. Cela reproduit aujourd’hui de manière bien plus inquiétante le rejet par les États-Unis du traité de Kyoto sur le réchauffement global qui tua plus ou moins cette initiative. Et de plus en plus, ces dernières années, les États-Unis sont devenus isolés sur d’autres aspects, c’est un développement curieux et significatif des affaires mondiales. Un des exemples les plus frappants est dans l’hémisphère ouest. Il a été longtemps perçu comme « notre petite région par ici », d’après les mots du secrétaire à la guerre du président Roosevelt, Henry Stimson, la région que les États-Unis dirigent comme ils le veulent sans interférence et où toute désobéissance doit être punie. Cela a été un schéma historique pendant longtemps, jusqu’à ce siècle. Au 21ème siècle, les relations ont changé radicalement. Pour la première fois en 500 ans, l’Amérique latine s’est considérablement libérée de la domination occidentale. Au siècle dernier, cela signifiait la domination des États-Unis.

Le Fonds monétaire international, qui a pendant longtemps été l’instrument de la politique gouvernementale des États-Unis, a été complètement exclu de la région. Les crédits du FMI ne vont plus en Amérique, ils vont en Europe. Les bases militaires des États-Unis ont disparu. Des organismes récents de l’hémisphère ont exclu les États-Unis et le Canada, et, au Sommet des Amériques en 2015, il a aussi semblé que les États-Unis pouvaient être renvoyés des organisations de l’hémisphère, à cause de sa position sur Cuba, qui était fortement combattue par tout l’hémisphère ; en fait par le monde entier. Et ce furent certainement les raisons qui ont poussé le président Obama vers la normalisation des relations avec Cuba, pour empêcher que les États-Unis soient expulsés de l’hémisphère. Est-ce que ces initiatives seront défaites par l’administration Trump, nous ne le savons pas encore. Et si elles le sont, l’isolation des États-Unis dans l’hémisphère s’ensuivra, les relations sont bien sûr déjà dégradées par l’extrémisme anti-immigrés de Trump.

À une plus grande échelle, le même scénario se déroule en Asie. Une des principales initiatives de politique étrangère du président Obama, ce qui a été nommé son pivot en Asie, une tentative de former un espace allié des États-Unis dans la région Asie-Pacifique pour contrer l’influence chinoise. Le Partenariat Trans-Pacifique qui excluait la Chine, à dessein, avait pour but d’ancrer cette structure dans la réalité. Cet accord, le TPP, sera probablement abandonné, alors qu’au même moment en Chine, le RCEP (partenariat économique régional global) des Chinois se développe. Les alliés américains comme le Pérou, l’Australie, le Japon rejoignent le partenariat économique proposé par la Chine. Les États-Unis en seront probablement exclus. Les États-Unis ont pratiquement été les seuls à refuser de rejoindre la Banque Asiatique d’Investissement pour les Infrastructures (AIIB), banque mondiale à laquelle les États-Unis se sont opposés depuis longtemps, mais maintenant rejointe par ses proches alliés, dont la Grande-Bretagne, alors que les États-Unis n’en font pas partie.

En même temps, l’Organisation de coopération de Shanghai basée en Chine et le projet chinois de route de la soie se sont étendus, de la Chine vers l’Ouest, et ont intégré des États d’Asie centrale, la Sibérie avec ses ressources, l’Inde et le Pakistan, et probablement bientôt l’Iran et peut être même la Turquie, qui a déjà un statut de partenaire et envisagerait l’adhésion. C’est donc un système qui s’étend de la Chine à l’Europe.

Les États-Unis ont demandé un statut d’observateur en 2005, qui a été rejeté.

On ne sait pas pour l’instant si Trump annulera l’accord sur le nucléaire avec l’Iran, comme il a menacé de le faire.

S’il le fait, il est possible que les autres pays qui font partie de cet accord, des pays européens, continuent à l’appliquer, et peut-être même ignorent les sanctions unilatérales des États-Unis.

Si cela arrive, cela augmentera l’isolement des États-Unis, même vis-à-vis de l’Europe.

Ce sont des développements assez conséquents, qui sont liés au vaste débat sur le déclin de la puissance américaine.

La puissance américaine a atteint son apogée en 1945. À ce moment, les USA détenaient, au moins, la moitié de la richesse mondiale.

À cette époque, les autres puissances industrielles avaient été dévastées ou sévèrement touchées, mais les USA eux-mêmes ont grandement bénéficié de la Seconde Guerre mondiale. Le secteur manufacturier ayant pratiquement quadruplé, les États-Unis avaient une sécurité incomparable.

Il était clair que cette si écrasante domination ne pouvait persister, et, de fait, elle a subi ses premiers coups sévères en 1949, quand les nationalistes chinois, alliés des États-Unis, ont été expulsés de Chine. Cet événement est appelé « la perte de la Chine » aux États-Unis. Si vous y réfléchissez, c’est une locution intéressante, « la perte de la Chine ».

Dans les années suivantes, d’autres puissances industrielles se sont reconstruites des dégâts de la guerre, et la décolonisation a pris une tournure atroce.

En 1970, le monde était économiquement tripartite, avec 3 centres majeurs : l’Amérique du Nord, l’Europe, l’Asie du Nord-Est. À l’époque s’appuyant sur le Japon, la Chine s’est hissée à la position de puissance majeure.

En 1970, la part américaine du PIB mondial avait diminué jusqu’à environ 25%. Aujourd’hui légèrement moins. C’est le récit standard du déclin de la richesse américaine.

C’est néanmoins tout à fait trompeur.

Ça ne tient pas compte des changements importants de l’économie mondiale pendant la période de mondialisation néolibérale. L’appropriation par les entreprises de la richesse mondiale devient une mesure plus réaliste du pouvoir mondial que la richesse nationale. Et la raison en est que le monde s’écarte, encore plus que jamais, du modèle des économies politiques nationales discrètes. Il y a des études récentes, assez intéressantes, de la propriété d’entreprise et elles en tirent quelques conclusions assez frappantes. Il s’avère que dans pratiquement tous les secteurs économiques, fabrication, finance, services, commerce de détail et autres, dans tous ces secteurs, les sociétés américaines sont bien placées dans la possession de l’économie mondiale. Globalement, la propriété des sociétés américaines est de près de 50% du total. C’est à peu près la proportion de la richesse nationale américaine en 1945. Et, bien sûr, ces sociétés américaines sont soutenues par les contribuables américains.

J’ai donc une mesure différente du pouvoir économique mondial. Elle n’indique pas trop de changements depuis 1945, excepté dans la nature de la puissance, des faits malheureusement ignorés dans les commentaires habituels mais qui sont tout à fait cruciaux.

Dans le domaine militaire les États-Unis règnent bien sur leurs compétiteurs. Les dépenses militaires US sont presque aussi importantes que celles du reste du monde réunies. Les États-Unis sont bien plus avancés technologiquement. Les États-Unis à eux seul ont des centaines de bases militaires dans le monde et des forces engagées partout dans le monde. Là aussi il pourrait y avoir des changements. L’Europe pourrait choisir d’être plus d’indépendante et pourrait faire revivre, d’une certaine façon, la vision de Mikhaïl Gorbatchev d’une maison commune européenne et d’un système de sécurité intégré depuis l’Atlantique jusqu’au Pacifique sans alliance militaire. C’était sa proposition en 1991 et elle a été rejetée par le camp occidental en faveur d’une expansion de l’OTAN jusqu’à la frontière russe avec les conséquences que nous voyons maintenant.

Ce concept, le concept de Gorbatchev, a des racines traditionnelles en partie dans les concepts de de Gaulle et en partie dans l’Ostpolitik de Willy Brandt. Cela pourrait se produire et cela pourrait conduire à une détente des tensions très dangereuses qui montent à la frontière russe. Ce serait un développement bienvenu.

Il y a évidemment beaucoup plus de choses à dire au sujet des peurs, des espoirs et des perspectives. Les menaces et les dangers sont très réels, les opportunités existent. Et alors que nous y faisons face nous ne devrions jamais négliger le fait que parmi les menaces les plus graves, il y en a deux qui sont les plus sérieuses que les humains aient jamais rencontrées, et qui menacent littéralement la survie de la société humaine organisée. Ce sont des problèmes urgents qui ne peuvent être remis à plus tard, auxquels il faut faire face directement, la charge de les résoudre revenant à votre génération, et il faut s’en occuper rapidement si l’on veut avoir les perspectives d’un avenir décent.

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Commentaire recommandé

Theoltd // 29.05.2017 à 09h57

Oui, juste pur confirmer les deux commentaires précédents, voici un extrait au hasard.
(bon, c’est pas vraiment du hasard)

« Pendant ce temps, à la frontière russe, les deux côtés s’engagent dans des actions provocatrices, dans des escalades militaires dangereuses, et, notez-le bien, à la frontière russe, pas à la frontière mexicaine, il y a une histoire importante là. Et l’Occident qui devrait être le premier dans la lutte sur ces questions existentielles, est dans le désarroi, avec la plus grande partie de sa population pleine de colère, de peur,de méfiance et de mépris pour les institutions établies »

Si je resume bien, Chomsky, que j’apprécie par ailleurs renvoie au meme niveau
1/ Ceux qui massent leurs troupes a la frontière Russe. Mais qui sont HORS de leurs propres frontieres.
2/ Et les Russes qui eux, sont chez eux!

Bref, c’est la mauvaise foi habituelle, qui devient une forme de pensée, une nouvelle philosophie.
On ne s’étonne pas de la lire chez les médias traditionnel, mais il est surprenant de la retrouver chez Chomsky, qui a ouvert les yeux de beaucoup par ailleurs.

Il est incroyable qu’a un moment ou un autre, tous, je dis bien tous, se mettent au rétro pédalage.

21 réactions et commentaires

  • Catalina // 29.05.2017 à 06h30

    Bonjour à tous.
    Je suis assez déçue de ce texte qui évite de dire qui a utilisé la bombe à la fin de la guerre sans une réelle justification, les USA. et englobe le monde dans cette action car il évite de nommer les coupables de cette incommensurable horreur que furent Nagasaki et Hiroshima. Je suis assez déçue que ce texte parle des millions d’allemands morts ( n’est-ce pas eux qui ont déclaré la guerre ?) et omerte volontairement les plus de 20 millions de morts des défenseurs russes de notre liberté face aux allemands.

      +14

    Alerter
    • Sandrine // 29.05.2017 à 09h57

      Dire comme vous le faites : les Allemands ont déclaré la guerre, donc c’est juste qu’ils en crèvent, est un raisonnement de type fasciste qui comprend les peuples comme un bloc indivis et légitime la violence et la vendetta.
      Je ne voit pas en quoi les bébés allemands morts sous les bombes américaines méritent plus leurs sort que les enfants exterminés par les Einsatztgruppen et/ou la Wehrmacht. En outre, les Soviétiques luttaient avant tout pour leur survie et je doute fort que c’est la liberté des petits français qui les motivait dans le feu de l’atroce combat qu’ils ont mené pour garder leur patrie et leur vie (ce qui est tout à fait legitime)…

        +6

      Alerter
      • Vladimir // 29.05.2017 à 10h16

        C’est aussi vrai, mais même s’ils ne pensaient pas aux petits français, ils les ont libéré dans la foulée et c’est pas mal quand même, aux sacrifices de leur vies, non? Et aujourd’hui demandez, juste par la curiosité autour de vous, qui a gagné la WW2? Faites le Sandrine, please, et dites-moi ensuite qu’est ce que s’en est suivie:)

          +9

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        • Fabrice // 29.05.2017 à 11h21

          Restons aussi lucide, les soviétiques ne sont pas contentés d’un pacte de neutralité avec les Nazis avant de se faire envahir, n’oublions pas l’invasion de la Pologne, l’agression contre la Finlande (on verra aussi aussi cet évènement la poussant dans les bras des nazis par la suite), des pays baltes et de la Roumanie.

          Comme beaucoup de riches américains ont investis énormément dans le régime nazis et ont tirés de gros profits (voir le père Joseph Kennedy pour exemple).

          On ne parlera pas du pacte de non agression signé par les Français et Anglais qui était d’une lâcheté sans nom avec les nazis.

          Bref la simplification de la situation est à double sens, on ne peut se détacher totalement de la vision propre à sa culture, alors je pense que l’on peut admettre certains points discutable de notre point de vue à Noam Chomsky, qui fait un travail réel d’ouverture de conscience dans son pays, alors que je n’entends guère ceux qui le critique vertement lors d’une visite faire le même travail dans le notre (et se gargarisent de l’avoir mouché).

            +11

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          • Theoltd // 29.05.2017 à 14h45

            On sait très bien que Staline a envahit la Finlande car celle-ci a refusé la securisation de St Petersbourg, dont la frontière se trouvait a 70 km seulement de la Finlande. Staline sentait bien venir l’invasion des Nazis et a proposé a la Finlande de bouger la frontière en echange de nouveaux territoires. Proposition refusée et pour défendre l’URSS Staline a choisit d’envahir la Finlande (qui avait été province russe auparavant).
            Pour la Pologne idem: les Nazis ayant envahit la Pologne sans AUCUNE réaction des allies, Staline a senti venir le coup et a envahit le flanc Est, pour se protéger d’une invasion Nazie, a laquelle d’ailleurs il n’a pu resister dans ses débuts. Dire qu’il y avait une volonté d’expansionnisme comparable entre Hitler et Staline est tout simplement faux. Pour Staline, la fin justifiait les moyens, et il fut prêt a tous les sacrifices de son peuple, (et hélas des autres également) pour sauver l’URSS. meme si bien entendu, il y avait sans doute (mais qui sait) d’autres moyens.
            La situation comme vous le dites d’ailleurs était particulièrement tordue a l’égard de l’URSS, l’opération unthinkable de Churchill en est la preuve. La paranoïa de Staline était donc en partie justifiée.

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            • Fabrice // 29.05.2017 à 16h11

              Même si j’entends l’idée cela ne justifie pas ses agressions qui étaient planifiée les cartes de partage avait été établis et corrigé (par molotov et connu) donc non Staline ne s’attendait pas à une telle invasion sinon les allemands n’auraient jamais pu progresser aussi loin peu importe les pertes que cela aurait demandé et qui furent fait une fois la surprise passée chez Staline.

              Bref personne n’est clair dans cette histoire et chacun à mis un voile malsain sur ses erreurs pour le rejeter sur les autres pour soit passer pour une pure victime pour faire oublier ses trahisons.

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            • Fabrice // 29.05.2017 à 17h36

              et cet article sur les relations spéciales avec certains hommes d’affaires américains et nazis :

              http://franceusa.blogspot.fr/2008/01/comment-les-firmes-us-ont-travaill-pour.html

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            • Pierre Bacara // 29.05.2017 à 21h03

              GUIDE DU ROUTARD HISTORIQUE, PAGE 23 AOUT 1939

              Les faits « on a shoestring » : à la suite du violent coup de semonce diplomatique d’Hitler et de Joachim von Ribbentrop, le ministre des Affaires étrangères allemand, contre la Pologne le 21 mars 1939, les négociations entre le Royaume-Uni, la France et l’Union Soviétique, dans l’anticipation de la campagne de Pologne, commencent en avril.

              Le 12 août, soit au bout de QUATRE MOIS DE DISCUSSIONS, le ministre soviétique des Affaires étrangères, Viatcheslav Molotov, n’a toujours rien obtenu de concret : les Britanniques réfléchissent toujours et les Français atrendent ce que vont dire les Britanniques. Le 14, les Soviétiques, qui voient tourner les aiguilles de la montre, disent aux Allemands qu’ils sont finalement prêts à écouter ce qu’ils avaient à leur dire. Le 23, Ribbentrop atterrit à Moscou avec une délégation de soixante personnes. A deux heures du matin le 24, le pacte de non-agression est signé, l’armée rouge gagne 250 kilomètres de profondeur statégique face à la Wehrmacht.

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        • Sandrine // 29.05.2017 à 12h15

          Je suis consciente des problèmes engendrés par le phénomène de cécité historique par rapport au rôle décisif de l’URSS dans l’écrasement de l’Allemagne nazie – phénomène savamment orchestré par un certain nombre de gens pour, notamment, éviter que les Européens ne se posent trop la question de l’intrusion impérialiste des USA chez eux depuis 45.
          Pour autant, il ne me semble pas que Chomsky néglige cet aspect. Il me souviens avoir lu un texte de lui (que malheureusement je ne retrouve plus) où il critiquait l’usage fait par les Américains des tribunaux internationaux et du droit international après la guerre 39-45 : il disait en substance (de manière ironique) que pour savoir ce qu’est un crime contre l’humanité il faut d’abord se demander si c’est un acte que les Américains ont pu commettre un jour ou l’autre. Si les Américains l’ont fait, alors c’est que ce type d’action ne peut pas rentrer dans la catégorie des crimes contre l’humanité. Donc, j’espère que par rapport à la rivalité russo-américaine aujourd’hui, il n’est pas dupe non plus – même si il ne le dit peut être pas assez clairement.

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          • Vladimir // 29.05.2017 à 20h00

            C’est ça, j’ai pas entendu, ni lu qu’il en parle pas « clairement »… à dire vrai jamais. Si tu trouves le texte, dont tu parles, envoie le moi s’il te plait:)

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            • jp // 29.05.2017 à 22h38

              je pense qu’il s’agit de ce texte
              « le principe d’universalité. Mais le jugement de Nuremberg viola cruellement ce principe. Le Tribunal devait définir le « crime de guerre » et le « crime contre l’humanité ». Le tribunal rédigea les définitions de manière à ce que les crimes ne soient pas considérés comme des crimes lorsqu’ils étaient commis par les alliés. Le bombardement de zones à forte densité de population civile fut exclu, parce que les alliés s’y étaient livrés d’une manière plus barbare encore que les Nazis.  »

              sur http://www.noam-chomsky.fr/la-guerre-contre-le-terrorisme/

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      • Catalina // 29.05.2017 à 23h30

        C’est vous qui le dites et pas moi. J’appuyais juste la fait qu’il parle des Allemands et pas des Russes, qu’il ne nomme pas les usa, après, vous interprétez comme vous voulez mais ne faites pas votre sénécat en me faisant dire ce que je n’ai pas dit.

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  • Vladimir // 29.05.2017 à 09h25

    @Catalina. J’y étais, grâce à Olivier. J’ai même posé une question in my broken english et c’était celle qui l’a achevé, il n’en pouvait plus et il s’est sauvé aussi vite qu’il a pu soutenu par son jeune épouse. Ce jour marqué d’un feutre rouge dans mon agenda:) mon niveau d’anglais m’a pas permis de comprendre quoique ce soit! Donc, je suis contant de cette transcription, pour deux raisons, primo, de constater que j’ai mimais bien (la réaction du publique m’aidant) la compréhension de ses propos, secundo, que tout Chomsky qu’il est il a dit pas mal de conneries. Cette obsession de croire qu’il y a encore une différence entre les démocrates et les républicains, tandis que c’est la même bande des criminels de guerre! Et sur la Russie en particulier il n’a jamais, au grand jamais n’émit quelque chose de positive, Staline y doit être pour quelque chose. Donc, des standards de bien – pensance. C’est un peu long pour ce comment, donc si vous voulez connaitre la suite allez sur page de FB:)

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    • Sebno // 30.05.2017 à 09h03

      @vladimir. Tout à fait d’accord… et j’ajouterais que Israël est un pays bien sage et respectable tant qu’on y est…

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  • Theoltd // 29.05.2017 à 09h57

    Oui, juste pur confirmer les deux commentaires précédents, voici un extrait au hasard.
    (bon, c’est pas vraiment du hasard)

    « Pendant ce temps, à la frontière russe, les deux côtés s’engagent dans des actions provocatrices, dans des escalades militaires dangereuses, et, notez-le bien, à la frontière russe, pas à la frontière mexicaine, il y a une histoire importante là. Et l’Occident qui devrait être le premier dans la lutte sur ces questions existentielles, est dans le désarroi, avec la plus grande partie de sa population pleine de colère, de peur,de méfiance et de mépris pour les institutions établies »

    Si je resume bien, Chomsky, que j’apprécie par ailleurs renvoie au meme niveau
    1/ Ceux qui massent leurs troupes a la frontière Russe. Mais qui sont HORS de leurs propres frontieres.
    2/ Et les Russes qui eux, sont chez eux!

    Bref, c’est la mauvaise foi habituelle, qui devient une forme de pensée, une nouvelle philosophie.
    On ne s’étonne pas de la lire chez les médias traditionnel, mais il est surprenant de la retrouver chez Chomsky, qui a ouvert les yeux de beaucoup par ailleurs.

    Il est incroyable qu’a un moment ou un autre, tous, je dis bien tous, se mettent au rétro pédalage.

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  • TuYolPol // 29.05.2017 à 11h16

    Tout d’abord merci OB et tous les contributeurs pour notre pain intellectuel critique quotidien.
    Une découverte me tient à cœur depuis peu. Quand j’ai entendu la première fois le mot Anthropocène cela m’a paru évident et juste : cela désigne une ère géologique, sans doute dans le temps long, où le métabolisme de la planète est déterminé par l’espèce humaine.
    Mais je pense que ce mot masque une vérité plus précise : il ne s’agit pas de l’homme en tant qu’espèce, car d’autres modalités d’habitation de notre planète par l’homme ont existé, et existent encore. Incriminer l’espèce humaine c’est taire le vrai déterminant.

    Je vous invite donc à considérer le mot Capitalocène.

    Méditons là-dessus, sur le changement de solution que cela implique, sur le point douloureux véritable, et sur le débat moins féroce pour l’homme (impersonnel) et plus féroce pour une certaine organisation du monde.

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    • Renaud 2 // 29.05.2017 à 23h43

      Capitalocène est un peu réducteur. L’URSS de Staline a eu les mêmes effets destructeurs sur la biosphère. Le problème principal selon moi est le productivisme. Productivisme permis par le crédit et la révolution industrielle. La seule vraie solution pour la biosphère, c’est que les hommes (tous, pas question que les « élites » y échappent) consomment moins de ressources naturelles. Mais ce n’est pas dans la nature de l’homme, qui consciemment ou non, pense qu’il faut posséder plus que le voisin pour être dans les meilleures dispositions pour assurer la survie de sa progéniture.

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      • TuYolPol // 30.05.2017 à 10h02

        Vous citez la « nature de l’homme ». Je trouve que c’est un concept piégé. Il permet de naturaliser des tares qui sont d’ordre organisationnel. L’homme porte une maladie proportionnelle à son propre pouvoir, mais l’homme sain existe, capable de jugement correct. On ne sait jamais trop d’ailleurs si on parle de l’espèce homme, ou de la catégorie « société humaine », ce n’est pas le même phénomène.
        Par ailleurs, même si d’autres modèles humains ont détruit la biosphère, le capitalisme favorise plus que tout autre la pulsion de possession et de compétition, c’est son carburant. Le carburant du capitalisme se situe au-dessous de la ceinture et dans l’immaturité, c’est pour cela qu’il infantilise les gens et se régale du discours dégradant sur la nature humaine, cela l’exonère de son influence.
        Il y a un lien direct entre l’empreinte écologique et la richesse. Le capitalisme consiste à glorifier cela et à le rendre désirable, la culpabilité sera aussi un marché.

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        • Sandrine // 30.05.2017 à 15h26

          @TuYolPol,
          René Girard a des analyses très intéressantes sur la pulsion d’imitation présente chez tous les êtres vivants, en particulier les etres humains (que l’on peut observer par exemple chez les bébés à la naissance), et qui les pousse irrésistiblement à désirer ce que possède leur voisin. Selon ce point de vue, la concurrence capitalise et la course effrénée à la croissance serait inhérente à la nature humaine (mais les humains en ce sens ne différeraient pas radicalement des autres êtres vivant, ce serait juste une question d’échelle). Même chose pour la technique et le productivisme qui serait juste des moyens d’assouvissement du désir d’imitation.
          Le monde serait-il radicalement corrompu dès l’origine et courait-il irrémédiablement à sa perte ?

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          • TuYolPol // 30.05.2017 à 18h02

            Par définition une pulsion pousse à quelque-chose, mais l’adverbe irrésistiblement a à voir avec la faiblesse du surmoi. La nature humaine a quand-même fait advenir le désir de civilisation, une pulsion esthétique, un désir spirituel, une préférence pour le bien social. Contrarié, certes, par son contraire pathologique et malsain, mais aussi spécifiquement humain. La nature humaine exerce son jugement, contrairement à une météorite percutant une planète. C’est la nature humaine, encore, qui résiste précisément au déterminisme de la nature. Si le capitalisme est ni plus ni moins qu’une soumission au nihilisme et au déterminisme des pulsions, c’est encore la nature humaine qui pousse à résister à cette fatalité, qui fait que nous sommes là à écrire cette rage.
            Finalement, le capitalisme exploite et pervertit la nature humaine, inocule son venin, s’en prétend indissociable, et celle-ci essaie quand-même de lui résister.
            Ce sont des pouvoirs distincts, des entités différentes. C’est une maladie parasitaire, un métaprédateur.

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