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27.août.202027.8.2020 // Les Crises

Emmanuel Todd : « En bas l’intelligence progresse, tout comme le taux de crétins diplômés en haut »

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Source : Marianne, Emmanuel Todd

Propos recueillis par Kévin Boucaud-Victoire et Franck Dedieu

Au cours d’un entretien fleuve, nous avons interrogé Emmanuel Todd pour « Les luttes de classes en France au XXIe siècle », son livre-évènement.

Dans son dernier ouvrage, Les luttes de classes en France au XXIe siècle, inspiré par Karl Marx – auteur de Les luttes de classes en France (1850) – Emmanuel Todd réalise une photographie sociale de la France. Il cherche à répondre à un paradoxe : alors que l’euro a échoué économiquement, il a triomphé politiquement, au prix du retour de la lutte des classes.

Marianne : Pour vous, l’inégalité n’est pas le problème central en France. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Emmanuel Todd : Il y a un groupe de 1% supérieur qui se détache nettement, mais dont la situation dans le monde n’est pas tellement brillante quand on compare à ses homologues. Les 1% français à l’échelle mondiale sont des petits bras. Bernard Arnault est dans le top 5, mais je pense le mettre à sa juste place en rappelant qu’il s’occupe de biens de luxe dont les classes dirigeantes mondiales ont besoin. Il doit sans doute être considéré comme un larbin planétaire. Mais au-dessous de cela parmi les 99% qui restent, l’analyse en terme de revenus montre une certaine stabilité des inégalités – pour une fois, j’ai repris sans critiquer les analyses de l’INSEE. Le décrochage des 10% supérieurs que nous pouvons observer dans les pays anglo-américains n’a absolument pas lieu en France.

Le problème central, qui là est nié par l’INSEE à travers ses indices de prix qui ne tiennent pas assez compte du coût du logement, c’est qu’en fait la France est engagée dans une période de baisse du niveau de vie et du pouvoir d’achat, depuis 2007 au moins mais probablement depuis 2000. Les gens le ressentent, comme l’expriment les sondages. Le rejet de la réforme à points universelle le prouve. Les gens craignent l’organisation de leur appauvrissement futur. Mais il n’y a pas que des données économiques pour mesurer ce phénomène. J’ai observé les premiers mini-mouvements de hausse de la mortalité infantile, le ralentissement de la mobilité géographique, la chute de la fécondité qui finit par toucher toutes les catégories sociales. Les indicateurs démographiques sont généralement plus fiables que les indicateurs économiques purs. J’ai passé beaucoup de temps sur la recherche des données et l’interprétation. Ce qui m’a frappé, c’est la montée de l’homogénéité de la France. La chute de la fécondité touche toute la société. De même pour la chute programmée du niveau éducatif. Elle touche les enfants de cadres supérieurs presque autant que les enfants d’ouvriers.

Et la baisse du niveau de vie généralisée, par-delà les classes…

Depuis 1981, je travaille sur l’hétérogénéité familiale. Là encore, la convergence des indicateurs de fécondité révèle qu’aujourd’hui, la France est sur le plan culturel homogène comme jamais. Sous réserve d’une petite différence maghrébine, dont j’évalue l’importance et qui est quantitativement moins importante que celle qui pouvait distinguer la Vendée de la Seine-et-Marne vers 1900.

Même si c’est par le bas, nous avons plutôt l’impression que la France se fragmente…

C’est la thèse de mon ami Jérôme Fourquet (L’Archipel français, Seuil, 2019). C’est en effet le ressenti des commentateurs. Mais j’ai au fond écrit un livre sur « la fausse conscience ». C’est un effort de dévoilement de la réalité, dans un monde où toutes les classes se racontent des choses inexactes sur la France et sur elles-mêmes. Une fois de plus, je suis en train de dire à tous les gens qu’ils se trompent sur eux-mêmes et j’ai peur de blesser.

Il y a néanmoins un point, sans doute le plus important, quand même, où je suis d’accord avec le ressenti : la question de la baisse du niveau de vie. La télévision est devenue folle, ou de type soviétique : elle suggère que la politique de Macron marche, à partir d’exemples non représentatifs. Cela explique la défiance, la déconnexion de la France réelle et de ses représentants politiques et médiatiques, ainsi que le complotisme. On pourrait aussi dire que mon livre est un livre contre le complotisme parce que si la réalité est acceptée par les élites, le complotisme doit tomber.

Outre la baisse généralisée du niveau de vie, vous évoquez aussi un mépris en cascade : chaque classe méprise la classe inférieure. Est-ce cela la nouvelle lutte des classes ?

Non, pas exactement. Depuis quelques décennies, dans notre société, tout le monde regarde vers le bas. Je définis une nouvelle théorie du ruissellement où « l’aristocratie stato-financière », ces gens qui ne viennent pas du néo-capitalisme, mais de l’ENA, méprisent ce que j’appelle la petite bourgeoisie CPIS (cadres et professions intellectuelles supérieures), soi-disant la « France ouverte » de Macron. Ensuite, celle-ci méprise les prolos français (ouvriers et employés non qualifiés). Cette cascade de mépris descendant oublie le groupe central, atomisé, majoritaire avec son axe des professions intermédiaires, auquel j’ai ajouté les employés qualifiés, ce qu’il reste de paysans, et les petits commerçants. Il représente 50% du corps social.

A la fin du livre, je finis par intégrer de plus en plus l’idée que le groupe d’en haut, l’aristocratie financière, va mal aussi dans sa tête…

Ces 50% jouent aussi le jeu du mépris social. Les « classes moyennes » se plaignent souvent de payer trop d’impôts, tandis qu’en dessous d’eux on profite des aides sociales…

Je n’emploie pas le terme de « classes moyennes » parce que tout le monde l’utilise de façon différente. Ce modèle ne prétend pas décrire toute la réalité. Je ne dis pas que tel ou tel groupe n’a pas telle ou telle attitude. Je dis que, globalement, cette catégorie (infirmières, techniciens, etc.) n’a pas, comme les autres, conscience de son existence. Les professions intermédiaires – que je prends comme centrales dans ce groupe atomisé majoritaire – ont une trajectoire électorale aléatoire, dépourvu de sens politique. C’est le symptôme d’une non-conscience d’être. A l’inverse, les ouvriers ont, à part le vote sarkozyste en 2007, un vote modal pour le Front national. La petite bourgeoisie CPIS (pour cadres et professions intellectuelles supérieures) au départ divisée, hésitant entre droite, classique et PS, a choisi le macronisme.

Cette dernière a certainement une conscience d’être qui est une fausse conscience puisqu’elle se raconte qu’elle est privilégiée. Ses enfants galèrent déjà. Parmi eux, les enseignants qui ont voté Macron à un taux très élevé – 50% chez les agrégés –, sont train de se retourner actuellement avec la retraite à points universelle. Mon livre parle d’ailleurs déjà de la précarisation des enseignants. C’est devenu un groupe stratégique.

Chaque groupe a ses problèmes. A la fin du livre, je finis par intégrer de plus en plus l’idée que le groupe d’en haut, l’aristocratie financière, va mal aussi dans sa tête. Elle est ridiculisée au niveau international et une bonne partie de ses motivations n’est plus d’améliorer la situation de la population mais de la sadiser, se venger sur elle. En fait, ce sont des groupes qui évoluent parallèlement vers l’appauvrissement. Ils vont rentrer les uns après les autres dans un phénomène de passage dans de réelles difficultés économiques. La bonne lutte des classes, ce serait que tous ces groupes qui coulent ensemble arrêtent de regarder vers le bas, en essayant de faire plus minable celui qui est en dessous, et se remettent à regarder vers le haut. Ils verront alors quel est leur persécuteur réel, l’aristocratie financière.

Un mot sur les immigrés, en bas de l’échelon, selon vous…

Les gens d’en bas, ceux qu’on appelle « les petits blancs », veulent trouver plus bas qu’eux, des gens un peu colorés, bronzés, pour se faire les nerfs et se retourner contre les immigrés. A partir de cela, je redéfinis les winners ou la « France ouverte », c’est-à-dire les cadres et professions intermédiaires et supérieures, comme des « losers d’en haut ». Pour moi, il s’agit de « petits blancs au deuxième degré » et au final l’aristocratie financière se compose de « petits blancs au troisième degré ».

Vous parlez de la stratification des diplômés notamment ceux du supérieur, en quoi cette distinction est si importante ? Et est-ce aussi un élément de la lutte des classes ?

J’avais parlé de l’importance de la stratification éducative dès mon livre L’illusion économique (Gallimard, 1997). J’avais suggéré que c’était cette stratification éducative qui avait entrainé l’affrontement du populisme et de l’élitisme. J’expliquais que les gens qui ont fait des études supérieures, qui représentent en moyenne, avec des variations selon les pays, autour du tiers d’une génération, finissent par se sentir supérieurs. Ensuite, ce groupe compte assez de membres pour se permettre de vivre en vase clos. En prétendant regarder les autres d’en haut, un mécanisme de séparation culturelle s’est mis en place. Il existe toujours, j’ai pu le mesurer dans des discussions avec des professeurs en Bretagne, qui n’étaient pas hostiles aux gilets jaunes, mais qui pensaient qu’ils étaient vraiment différents d’eux. Ils n’avaient donc pas approché les ronds-points.

Il y a eu une époque où, effectivement, avoir un diplôme supérieur vous mettait dans une situation qui était plus favorable, de façon homogène. On avait plus de possibilités culturelles, intellectuelles. De plus, à une époque, les gens qui intégraient cette frange supérieure étaient réellement recrutés par un mécanisme méritocratique. Ils apprenaient vraiment des choses, avaient des salaires correspondants et donc étaient vraiment privilégiés. Mais là, c’est différent.

La mobilité scolaire tend vers 0. Le système ne fonctionne plus. Je me rends compte que c’est vraiment un livre où je déclare, non pas fausse, mais obsolète une bonne partie de ma vie de recherches. Si la description de la société par le niveau éducatif reste pertinente pour décrire les phénomènes, c’est surtout pour décrire des phénomènes de fausse conscience parce que la réalité économique ne suit plus. Et pour moi, l’intelligence réelle est en train de se séparer du niveau éducatif.

Vous dites que c’est même distinct…

Il ne faut pas être dogmatique, ni exagérer. La plupart des bons élèves qui font de bonnes études sont des gens intelligents qui méritent leur diplôme. J’ai un peu forcé le trait.

En terme de tendance, il y a eu une phase où la France a été véritablement méritocratique. A l’après-guerre, le secondaire, puis le supérieur, se sont développés. Une proportion importante de gens des milieux populaires ont pu accéder aux études supérieures. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas eu reproduction au sens de Bourdieu. Mais en fait il y avait de la place pour tout le monde, pour les enfants de bourgeois et pour les bons élèves des milieux populaires.

Ce que l’on n’a pas vu c’est que cela a produit un désarmement des milieux populaires parce que ceux-ci ont perdu leurs élites naturelles. Maintenant, si la mobilité scolaire tombe à 0, c’est certes une catastrophe selon l’idéal méritocratique, mais d’un point de vue révolutionnaire c’est une excellente nouvelle. Cela signifie qu’en bas, il y a de plus en plus de gens intelligents qui n’ont pas de diplôme particulier et qu’en haut le taux de crétins diplômés progresse.

Ce sont les profs qui ont accepté Maastricht. Ils ont effectivement un niveau éducatif supérieur, ce sont eux qui forment les enfants, et si les profs basculent dans une opposition au système, alors nous basculons dans une autre phase historique.

Cela s’est traduit dans le face-à-face entre les jeunes leaders gilets jaunes et les jeunes gens des cabinets macronistes. L’intelligence des gilets jaunes face aux diplômes des crétins d’en haut. Dès que tout le monde descend dans la rue, quand les routines explosent, il y a mise en évidence et dramatisation de cette tendance, parce que tout le monde doit soudain s’adapter très vite.

Vous critiquez beaucoup l’enseignement supérieur ou plutôt les diplômés enclins à se croire supérieurs aux autres alors que le niveau baisse. Le diplôme conduirait seulement à une distinction sociale ?

Les étudiants cherchent d’abord à décrocher un emploi. Ils vivent dans un grand état d’anxiété économique, ils veulent leur diplôme et éprouvent comme une peur de la spéculation intellectuelle. En tant que chercheur racontant des choses un peu décalées, j’ai eu beaucoup de problèmes avec des publics étudiants parce que j’avais le sentiment que je leur faisais perdre leur temps. Et il faut les comprendre : faisant mon métier de chercheur dans la phase heureuse des Trente glorieuses et un peu après (je suis un petit bourgeois CPIS des générations encore protégées), je pouvais travailler sur les structures familiales en tant que déterminants profonds de l’histoire (pour comprendre le communisme, le nazisme ou la liberté anglaise) mais parce que je vivais moi-même dans une période d’abondance et de paix et que je pouvais oublier les questions économiques. Mais il est temps de ré-investir ce champ du social.

C’est une des thèses de votre livre. Vous croyez au retour des problématiques économiques et sociales, à rebours de ceux qui mettent au premier plan la question identitaire…

Je ne nie pas, bien au contraire, la diversité anthropologique. Le phénomène du populisme ou de l’élitisme présentent des points communs entre toutes les sociétés avancées – sauf le Japon – qui peuvent se donner l’impression qu’elles vivent la même chose. Mais les issues peuvent être très différentes selon les pays puisque les valeurs anthropologiques propres à chacun d’eux sont toujours actives. L’après crise de 1929 a donné le nazisme en Allemagne, Roosevelt aux Etats-Unis et Léon Blum en France. En ce sens, le modèle que j’ai développé durant la période heureuse d’après-guerre va être très utile pour comprendre pourquoi les Etats-Unis ont Trump, l’Angleterre Johnson, et la France Macron, ou un autre peut-être bientôt.

Donc à chaque pays son ressort particulier. Les Anglais ?

L’idée de la souveraineté et le parlementarisme, invariablement.

Les Américains ?

Difficile à dire, mais l’idole de Trump est Andrew Jackson, le président de la première démocratisation réelle des Etats-Unis, qui était, plus encore que Trump, xénophobe et anti-élites. Il y a de la permanence, je ne sais pas quel genre d’équilibre ils vont trouver.

Et les Français ?

On est dans une phase de tentative d’absolutisme louis-quatorzien mêlée à une phase de non conscience des groupes, d’atomisation de la société et surtout d’autonomisation de l’État, une découverte que j’ai faite grâce à la lecture de Marx. Dans le cas de la France, il ne décrit pas la toute puissance du capitalisme à venir, mais un processus d’autonomisation de l’État. C’est d’ailleurs cela qui d’après Marx conduit à porter au pouvoir au XIXème siècle un personnage insignifiant comme Louis Bonaparte. Et en 2017, Emmanuel Macron, pourrait-on ajouter.

La liquidation de la démocratie représentative par Maastricht et l’entrée dans l’euro conduisent à définir comme priorité absolue le retour à l’indépendance nationale. Dans cette posture néo-gaulliste et à ma modeste échelle, je parle à toutes les classes.

Étonnamment vous semblez ne plus croire au discours sur les méchants capitalistes du Medef. Tout viendrait de l’aristocratie d’État, stato-financière selon votre expression.

En théorie, le Medef devrait représenter une bourgeoisie industrielle qui, de fait, a été liquidée par les évolutions récentes. Il y a à l’échelle mondiale le développement d’une idéologie néolibérale venue des Etats-Unis, d’Angleterre, que, depuis Thatcher, Reagan, les élites « françaises » ont cherché à singer. Mais celles-ci sont centrées sur l’Etat. Les hauts fonctionnaires habitués à la vérif’, à la compression des dépenses publiques, peuvent produire des mots néolibéraux, peuvent parler de marché, de flexibilité mais ils représentent la haute administration, ils incarnent ce qu’ils dénoncent, l’État. En fait, ils n’arrivent pas à concevoir des politiques économiques réellement capitalistes, flexibles, néolibérales. L’exemple absolu de cette incapacité est la création de l’euro, qui est une monnaie, comme le voient tous les économistes anglo-saxons, allemands ou suédois, par essence antilibérale. La tendance générale est la flexibilité monétaire, ça n’est pas d’enfermer les nations différentes dans une seule monnaie.

Ces fonctionnaires du haut se croient des néolibéraux mais, en pratique, ils mènent des pratiques monétaires incompatibles avec la loi de l’offre et de la demande. Le paradoxe est qu’ils voudraient bien privatiser, ils nous parlent de société civile mais tout ce qu’ils ont réussi à faire, c’est détruire l’industrie et la société civile. Au fond, ils réalisent leur nature profonde en accroissant sans cesse le rôle de l’État. Un État sans marge de manœuvre économique, comme réduit à exister par sa force brute, par sa capacité répressive dans une société en voie d’appauvrissement. Il y a eu une époque où le néocapitalisme était le problème. Avant l’euro. Mais la contestation retarde. Toutes ses forces, et pas seulement à gauche d’ailleurs, prennent le néocapitalisme comme adversaire. Mais le problème de la France, c’est un État autonomisé, libéré du contrôle des partis politiques explosés.

Vous pensez que l’on se trompe de cible en visant le capitalisme et montrez que les ouvriers sont en plein déclin. Pensez-vous que la gauche devrait changer de cible sociale et se concentrer sur la masse atomisée ?

Non. J’observe seulement que les modèles de polarisation Le Pen/Macron sont faux mais que, en plus, au niveau des forces sociales sous-jacentes, cette polarisation va être de plus en plus fausse. La liquidation de la démocratie représentative par Maastricht et l’entrée dans l’euro conduisent à définir comme priorité absolue le retour à l’indépendance nationale. Dans cette posture néo-gaulliste et à ma modeste échelle, je parle à toutes les classes. Sauf à l’aristocratie stato-financière. Et je pense en termes de réconciliation des classes contre des dirigeants imbéciles.

Pour rester sur la question des partis politiques, vous considérez que le vote Le Pen explique le vote Macron parce qu’il lui préexiste. Voter Macron c’était voter contre Le Pen, comme si le macronisme en tant que programme n’existait pas. Pouvez-vous développer ?

Sans entrer dans la technique statistique, j’ai calculé la corrélation entre Le Pen et Macron et celle-ci atteint un niveau extrêmement mêlé. Une variable ancienne explique 85 % de la variation d’une variable nouvelle. On peut donc parler de causalité. Le vote Le Pen, stable, préexiste au macronisme. Autrement dit, dès le premier tour de 2017, le vote Macron se résume à un vote anti-Le Pen et sans doute anti-peuple. L’élitisme n’existe plus en tant que tel, avec des gens diplômés, soucieux de s’émanciper mentalement et de porter des projets modernes et grandioses, l’élitisme n’a plus comme but que de dénoncer le populisme. Le bulletin Macron n’a pas été un vote, mais un effort pour exister, une d’hystérisation théorique du concept de petit blanc – au deuxième degré. Les gens de la petite bourgeoisie CPIS se définissent encore plus contre les prolos français que les prolos français ne se définissent contre les immigrés. Un phénomène similaire apparaît aux Etats-Unis avec Trump. Le programme des Démocrates, de l’establishment, du New York Times, du Washington Post et des très bonnes universités consiste essentiellement à dire du mal de Trump. Cette procédure d’impeachment, alors même que le Président est au bout de son mandat, est la signature d’une absence de projet.

Pour vous, nous terminons une séquence sociétale de cinquante ans (1968-2018), pour entrer dans une séquence gilets jaunes, 2018-2068, au cours de laquelle leurs représentants ou assimilés prendront le pouvoir. Aventureux, non ?

Toutes les classes (aristocratie stato-financière mise à part) sont appelées à se confronter au problème que les gilets jaunes ont eu à affronter les premiers : l’appauvrissement économique et la fin de la démocratie représentative. Les luttes actuelles ne sont encore que défensives. Tout comme le mouvement de sympathie à l’égard des gilets jaunes ou à l’égard des syndicats opposés à la réforme des retraites. Ce qui a fait se lever le mouvement des gilets jaunes, c’est une attaque venue d’en haut, l’émergence historique haute administration cinglée qui propose des mesures mettant l’équilibre économique des ménages et la vie des Français en péril. Alors les gens se soulèvent parce qu’ils n’ont pas le choix. Avec la retraite à points universelle, rebelote : c’est la promesse d’une baisse du niveau de vie jusqu’à la mort, du minimum vieillesse pour tous. Et donc évidemment, des catégories sociales nouvelles entrent dans la danse. L’une d’elles doit être regardée de près : les profs. C’est le cœur idéologique de la nation. Ce sont les profs qui ont accepté Maastricht. Ils ont effectivement un niveau éducatif supérieur, ce sont eux qui forment les enfants, et si les profs basculent dans une opposition au système, alors nous basculons dans une autre phase historique.

Pensez-vous que le phénomène des violences politiques va perdurer ?

Les gilets jaunes ont opposé à la violence de la haute administration une contre violence défensive beaucoup moins brutale. Ce sont tout de même des gilets jaunes qui ont eu des yeux et des mains arrachées. Chez les gilets jaunes appartenant à des professions souvent manuelles, l’engagement physique était naturel. Au cours des deux prochaines années avant la présidentielle, les manifestations ne vont pas cesser. Si la police commence à cogner sur les enseignants ou à leur arracher des yeux ou des mains dans les manifestations, on va vraiment passer dans un autre monde. Je ne m’en réjouis pas, j’analyse la violence pour éviter qu’elle n’advienne. Je commence à avoir en horreur ces journalistes qui, sur des plateaux télé s’indignent de coupures d’électricité, présentées comme des actes violents, et oublient les dégâts physiques engendrés par le comportement de la police – macroniste ? Ou plutôt lepéniste puisqu’elle vote à 50% pour le Front, pardon le Rassemblement national. Ces journalistes justifient et légitiment la violence, avec entrain et constance.

On va peut-être avoir quelques jours de triomphalisme macroniste sur la fin de la grève, si elle cesse. Mais il serait absurde de dire que les grévistes de la SNCF et de la RATP ont perdu. Ils ont réussi le tour de force de conscientiser la société française au problème de la retraite à points pour tous (je ne supporte pas qu’on applique le beau mot d’universel à un mécanisme de mise au pas de la société par un État qui s’enfonce dans la folie, le concept de « Gleichschaltung macroniste appliqué à la retraite » me parait le mieux adapté). Les grévistes ont été les activateurs de la conscience nationale, c’est grâce à eux que les profs ont fini par comprendre qu’ils étaient sur la liste des groupes visés par cette Gleichschaltung. La grève nous a aussi révélé le rôle de la CFDT : une trahison programmée dès l’origine. La CFTC, son ancêtre, reposait, comme le montrait sa géographie, sur un catholicisme actif. La CFDT, « déconfessionalisée », fut l’une des expressions institutionnelles du « catholicisme zombie » : libérée de la croyance en Dieu mais gardant le souci des pauvres tout en restant animée par un désir de collaboration de classe. L’assise zombie elle-même s’est évanouie, ainsi que l’a montré Fourquet : la direction de la CFDT est désormais est au service de l’aristocratie stato-financière, mais le syndicat dans son ensemble repose sur du vide culturel et pourrait imploser si la CGT joue bien.

Source : Marianne, Emmanuel Todd

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Commentaire recommandé

Rémi // 27.08.2020 à 10h29

Il parle d’un mécanisme de compensation psychologique.
Il ne dit pas que les immigrés sont victimes des petits blancs.
Il dit que les petits blancs pour se rassurer méprisent les immigrés. c’est très différent.

51 réactions et commentaires

  • Joe Bserve // 27.08.2020 à 07h25

    « Les gens d’en bas, ceux qu’on appelle « les petits blancs », veulent trouver plus bas qu’eux, des gens un peu colorés, bronzés, pour se faire les nerfs et se retourner contre les immigrés »

    Le mec t’explique sans trembler qu’en France les immigrés seraient victimes des petits blancs et il ose te parler de déni des classes dirigeantes et traiter les autres d’abrutis ?

    C’est dommage le reste de l’analyse en particulier sur l’aristocratie stato-financiere qui se revendique du néolibéralisme alors que ce ne sont que des apparatchiks incapables d’entreprendre quoi que ce soit me semble très juste.

      +28

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    • Alfred // 27.08.2020 à 09h46

      Pff. Quel âne parfois. Je ne pense même pas que la vieillesse soit un naufrage mais simplement que cette génération là, même chez ceux qui pensent agilement, n’a pas réussi à intégrer les changements de situations ni à dépasser ses habitudes de pensées en fonction. Les mantras comme l »ouverture sur le monde » sont autant de grumeaux dans un discours par ailleurs fluide. Ils sont là (comme des cailloux dans la soupe) surtout par habitude. Ainsi va le postulat que la populace a besoin de hair, de trouver quelque souffre douleur. C’est stupide. Il n’y a aucun besoin de haine. La haine est une condition acquise par l’éducation et la transmission sociale (haine « culturelle » des juifs chez les uns, des fachos chez d’autres, du riche ou de l’arabe encore chez d’autres). Cela est différent du sentiment d’injustice (coup de lbd versus laxisme) ou de préjugés acquis par l’expérience répétée (coup de surin dits « gratuits » ou députés d’un parti pris la main dans le mot de confiture). Un exemple de Todd lui même de cette haine acquise par le conditionnement (notamment à travers le dressage contre un parti sensé être sur représenté dans cette population (conditionnement auquel Todd participe lui même nolens volens)):
      « Les gens de la petite bourgeoisie CPIS se définissent encore plus contre les prolos français que les prolos français ne se définissent contre les immigrés »
      Exact. (La haine on vous dit)

        +8

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    • Rémi // 27.08.2020 à 10h29

      Il parle d’un mécanisme de compensation psychologique.
      Il ne dit pas que les immigrés sont victimes des petits blancs.
      Il dit que les petits blancs pour se rassurer méprisent les immigrés. c’est très différent.

        +58

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      • Alfred // 28.08.2020 à 09h39

        Je ne sais pas pourquoi j’ai été censuré mais la question reste entière:
        « Il dit que les petits blancs pour se rassurer méprisent les immigrés. c’est très différent ».
        C’est différent certes. Mais est ce seulement vrai? On peut rencontrer de la crainte mais du mépris? Je ne crois pas.

          +3

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        • Lola Fleurie // 28.08.2020 à 18h03

          Ben voyons ! Venez donc faire un petit stage dans une banlieue colorée… vous verrez ! Certes les uns éprouvent de la crainte, mais beaucoup d’autres éprouvent du mépris. D’ailleurs l’un n’empêche pas forcément l’autre, il me semble.

            +4

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          • Alfred // 29.08.2020 à 09h17

            Quand on est craint on est plus méprisé. Quand on est méprisé on est plus craint. Votre stage c’est mon quotidien (pas celui de Todd). Au passage certains immigrés méprisent ils les petits blancs? Dans les banlieues colorées? Légèrement non? En particulier ceux qui n’ont pas de dignité (c’est donc à juste titre).

              +2

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            • Lola Fleurie // 29.08.2020 à 20h23

              Certains immigrés méprisent, comme vous dites, les blancs. Mais plutôt les « grands » blancs dominants que les petits… dont ils ne peuvent pas envier les privilèges puisqu’ils sont, comme eux, parqués dans la misère des banlieues…
              Sinon, comme tous ceux qui sont blancs, noirs, jaunes, ou verts d’envie et de rage par nature, ce sont simplement d’intolérants crétins qui croient qu’en exerçant le peu de pouvoir qu’ils ont sur plus vulnérables qu’eux ça va compenser leur véritable absence de pouvoir. Et là, ni le rang social ni la couleur de peau ne justifie quoi que ce soit. Beaucoup de blancs, petits ou grands, savent parfaitement faire ça aussi… Vous pouvez appeler ça « absence de dignité », c’est pas mal après tout. Mais ce n’est pas du tout l’apanage des immigrés, loin s’en faut.

                +0

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  • Claude // 27.08.2020 à 07h37

    Un sociologue invite les Suisses à s’intégrer aux étrangers car « les migrations de masse ne peuvent pas être stoppées »

    La population indigène de la Suisse devrait abandonner les coutumes et traditions historiques du pays au fur et à mesure que sa population est remplacée et en venir à reconnaître « l’hyper-diversité » comme la culture nationale, a déclaré l’universitaire sri-lankais, soutenant que « la culture suisse n’est pas perdue, elle se développe ».

    https://www.anguillesousroche.com/actualite/un-sociologue-invite-les-suisses-a-sintegrer-aux-etrangers-car-les-migrations-de-masse-ne-peuvent-pas-etre-stoppees/?fbclid=IwAR2Aofgw0GlWa8IyKjcNhuPRZdL1AFUskA4Tp3yXDtkgzfGFWHTXdwvKy8A

    En allemand :
    https://www.tagesanzeiger.ch/es-sollte-integrationskurse-fuer-schweizer-geben-646210628393

      +13

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    • LibEgaFra // 27.08.2020 à 10h57

      Le 27 septembre, seconde votation du peuple suisse qui doit se prononcer sur une loi constitutionnelle (RIC!) qui vise à stopper l’immigration. La classe politique « classique » est vent debout contre cette loi, la droite pour continuer à importer de la main d’oeuvre bon marché, la gauche par « bons sentiments ». Nous verrons bien dans un mois. Une première loi avait été acceptée, mais le gouvernement a trouvé le moyen de noyer le poisson.

        +6

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      • RGT // 27.08.2020 à 20h29

        Les suisses sont quand-même largement moins cons que les français car ils ont réussi à conserver le droit de mettre leur nez dans les affaires de « leurs » dirigeants et peuvent légalement (et légitimement) contrer les décisions dictatoriales de « leurs » élites.

        Et comme le service militaire est « à vie » (ou presque) et que chaque suisse possède chez lui son atirail militaire (armement compris), les dirigeants préfèrent faire profil bas pour ne pas se retrouver avec une armée de conscrits « gilets-jaunisés » armés jusqu’aux dents à leurs trousses.

        Bien sûr, tout comme le font en France les hauts fonctionnaires, les politicards tentent par tous les moyens de ne pas appliquer les décisions du peuple mais dans ce cas ils risquent une seconde consultation populaire qui confirmera la première, avec un taux d’acceptation largement plus élevé car même ceux qui étaient opposés au projet initial seraient outrés du fait que la consultation populaire n’ait pas été respectée.

        En France, c’est la fête du slip permanente chez les « élites » et si vous espérez que « l’opposition » abolisse les mesures dictatoriales du gouvernement actuel vous vous fourrez le doigt dans l’œil jusqu’à vous en titiller le périnée.

        Les « dirigeants élus par le peuple pour le peuple » se foutent royalement des aspirations dudit peuple.

        Et comme les « institutions » et la « constitution » leur permettent d’exercer leur « bon vouloir » en toute légalité sans jamais avoir à rendre de comptes à personne (hormis à leurs « amis » et à leurs « mécènes ») vous comprenez pourquoi les élections sont vraiment des pièges à c…

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        Alerter
    • X // 27.08.2020 à 11h32

      C’est avec des infos comme celles-la (pas du tout relayées dans les médias) qu’on mesure à quel point Todd (amplement relayé dans les médias) est quelqu’un du siècle passé. Il projette les schémas qu’il a appris à l’école: l’aristocratie contre les entreprises et le peuple laborieux (ca c’est Saint-Simon, la revolution française, etc), l’union des classes par delà le capitalisme pour dégommer un gouvernement collabo et corrompu (ca c’est de Gaulle, la résistance pendant la seconde guerre mondiale).
      C’est sympa, ça rassure; ça donne l’impression qu’on connaît… Sauf que le monde qui vient, ça ne sera pas ça du tout: les gentils réfugiés persécutés deviendront des propriétaires exigeant et pas franchement conciliants (“parce que je le vaut bien”)… L’Allemagne et l’euro seront alors le cadet de nos soucis lorsqu’il faudra gérer l’accès aux ressources naturelles raréfiées en respectant les nouvelles normes multi-culturelles.

        +8

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      • gracques // 29.08.2020 à 09h50

        Ouai et en attendant violons nos normes plus’ou moins démocratiques concernant des minorités potentiellement revendicatives .. au nom de ces normes .
        Votre enfer est pavée de mauvaises intentions.

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        Alerter
      • Guise // 29.08.2020 à 18h11

        J’aimerais bien savoir par quel coup de baguette magique les dominés dans la société (les réfugiés acceptent les postes que les locaux refusent, qui tuent vite) vont devenir des « propriétaires exigeants »…
        Ça serait extraordinaire
        Je vois un cas où des « réfugiés » ont vaincus les peuples autochtones à leur arrivée : les protestants aux US. Mais la différence, c’est qu’ils venaient avec l’appui des plus grandes puissances mondiales, et une supériorité militaire.
        La France n’est pas menacée militairement par la Syrie, par les pays d’Afrique et du Magrheb.
        Cette peur d’être surpassé socialement par des pauvres en détresse est un fantasme. Socialement, l’ascenseur social ne fonctionne plus, pas plus pour elles et eux que pour les pauvres « blancs et blanches ».
        Et je ne comprends pas pourquoi détourner les yeux de la puissance qui est actuellement en train de nous rouler dans la farine, et dire qu’elle sera le cadet de nos soucis. Qui vous craignez le plus, celui qui est puissant ou celui qui est misérable ? Qui est le mieux armé pour vous faire les poches ? Celui qui dispose de l’appareil européen, ou les sans abris venus d’ailleurs ? Personnellement, c’est le puissant qui m’inquiète, surtout quand on voit la politique que le puissant en question a mené, par rapport à ses voisins du sud.

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        • Blabla // 02.09.2020 à 16h27

          Les retournements sociétaux ne sont pas exceptionnels : non seulement les Amériques, la Palestine et l’Afrique du Sud (avec le même rapport de force), mais aussi Jordanie (les réfugiés palestiniens ont pris le pas sur les bédouins), Grande Grèce (les Grecs ont submergé les autochtones du sud de l’Italie) et Kosovo

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          Alerter
          • Guise // 02.09.2020 à 22h43

            Vous donnez beaucoup d’exemples, mais flous :
            – les Amériques : de quoi parlez-vous ? (vraie question, je précise) Quel ex invalide l’idée de mon premier message là-bas ?
            – la Palestine : cet exemple va aussi dans mon sens. Ou je vous ai mal compris ? Parce qu’en Palestine actuellement, la colonisation se fait une fois encore par la force, et une fois encore avec l’appui de puissances étrangères (les USA, pas une « petite » puissance mondiale, du point de vue militaire)
            – la Jordanie : pas assez de connaissances là-dessus. Ça reste des réfugiés, pas des conquérants, pour le peu que j’ai compris (les Palestiniens ne détruisent pas l’Etat jordanien, ne réduise pas le peuple jordanien en esclavage etc)
            – la Grande Grèce : outre le fait que l’exemple est tellement vieux qu’on en sait pas grand-chose, ça ressemble beaucoup à ce que j’ai décrit j’ai l’impression : des colonies, appuyées par la puissance mondiale de l’époque, la Grèce (régionale, mais passons pour l’époque on va dire que c’était équivalent)

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  • Milsabor // 27.08.2020 à 08h52

    Todd ignore (dénie?) l’influence prépondérante de l’élite mondialiste en tant que groupe organisé : les hommes de Davos. Ceux-ci vampirisent le monde par le contrôle de la monnaie, la fabrication de la dette. Ils ont « dépassé » le capitalisme industriel de papa et nous promettent le nouvel ordre mondial totalitaire que l’on voit progresser en temps réel avec la dictature sanitaire en marche. Macron lui-même est leur produit par le géniteur Rotschild. L’élite stato-financière qu’il caractérise, n’est que le petit personnel de l’élite mondialiste.

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    • Dominique Gagnot // 27.08.2020 à 20h06

      Tout à fait! Je lui conseille d’ailleurs de lire ça : http://bit.ly/tragédiecapitaliste
      La longue vue, contrairement à la loupe, permet de comprendre le monde dans sa globalité, de manière intemporelle, et c’est beaucoup plus simple.

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  • Fabrice // 27.08.2020 à 09h26

    Emmanuel Todd aurait pu prendre contact avec franck Lepage cela lui aurait évité un long travail son spectacle resume tout sur la tromperie qu’est devenue l’éducation en France.

    https://youtu.be/Pr4NlZxztqs

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    • jmathon // 27.08.2020 à 10h46

      Je vois plutôt l’approche, les travaux et les propos de Franck Lepage et d’Emmanuel Todd comme complémentaires les uns des autres.

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  • Rond // 27.08.2020 à 09h40

    Excellent photographe, avec objectif au piqué exceptionnel. Et puis c’est tout. Il prend des photos insensible et détaché. A qui vont-elles servir ? Les « décideurs » en sont friands et sauront quoi en faire.
    Tenez bon !

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    • gracques // 29.08.2020 à 09h53

      C’est un intellectuel , pas un politique , il te donne à voir , à toi camarade ou citoyen à agir !

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  • Anne Rame Ascari // 27.08.2020 à 10h14

    Je suis bluffé par la richesse, la complexité, y compris linguistique, des commentaires. C’est sûr que la pensée de Todd, à côté, semble simplette. Pensez donc : une vie de recherches et de pensée ! Pffff.

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    • Gerardlionel // 27.08.2020 à 11h44

      Commentaire perspicace et doucement ironique, merci

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    • Alfred // 27.08.2020 à 18h46

      Une icôôôôôôône…. D’ailleurs pourquoi les commentaires sont ils ouverts? Ne vaudrait il pas mieux tous se taire et annoner la sainte parole.
      (Signé un admirateur de Todd).

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      • RGT // 27.08.2020 à 20h52

        Certes Todd est un « intellectuel de gôôôche » plutôt « bobo » mais ses analyses ne sont pas franchement en faveur du pouvoir français actuel.

        Et il n’est pas trop parti en croisade contre le PS lorsque ce dernier était à son apogée… Mais sans doute était-il plus jeune et occupé à d’autres combats plus importants ?

        Heureusement, il est bien remonté en ce moment contre la caste au pouvoir qui adule un pré-adolescent dont les traces d’acné juvénile sont habilement masquées par « maman ».

        Cette caste à réellement commencé à s’implanter avec l’avènement de la monarchie absolue et a réussi à s’imposer à la révolution en infiltrant les rouages de la « république » tout en pratiquant une génuflexion acharnée à l’égard des « alternances » impériales, royales ou dictatoriales.

        N’oublions jamais que ce sont les ancêtres des membres actuels de cette caste qui ont favorisé l’expansion coloniale, les guerres meurtrières et la collaboration avec les nazis (avec les rafles « bienfaisantes » de juifs français que les nazis n’avaient même pas demandé, c’est cadeau).

        Et bien sûr sans ne jamais avoir à endosser la moindre responsabilité, ne faisant que suivre les « désirs de la population » qui n’était pas informée et qui bien sûr n’avait pas son mot à dire dans ces affaires qui étaient du ressort de la « sûreté de l’état ».

        Il est quand-même préférable d’avoir des Todd et des Onfray, même si parfois leurs prises de positions peuvent être discutables, plutôt que de n’avoir qu’un troupeau de groupies bêlants s’aplatissant sans complexes devant tous les princes de droit divin électoral.

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        Alerter
        • Alfred // 28.08.2020 à 08h19

          Tout cela est exact. Il n’en reste pas moins qu’être souverainiste, anti une et remonté contre la caste débile et corrompue au pouvoir n’est pas un blanc seing de pensée parfaite et systématiquement juste. Le môooosieur peut se mettre le doigt dans l’œil aussi parfois ou être victime de ses propres préjugés comme chacun. L’idée que les gens ont besoin de voir des gens « plus miséreux qu’eux même » par exemple. Je pense que ce n’est pas un besoin ni un réflexe naturel mais u e construction sociale apprise (et enseignée par ceux qui en ont besoin pour diviser et mieux reigner). Cela me désole donc de voir Todd à sa manière ainsi diviser.. personne n’est parfait.

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          • Osmium // 31.08.2020 à 18h05

            Il est démontré que les hommes et les chimpanzés ont besoin d’un bouc-émissaire pour favoriser la cohésion du groupe.

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            Alerter
  • LibEgaFra // 27.08.2020 à 11h13

    L’intelligence d’en bas, si elle existe, consisterait à s’unir autour d’une conscience de classe. Ce n’est pas le cas. Chacun pour soi et tous pour ma pomme.

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    • Interimlover // 27.08.2020 à 11h26

      J’allais le dire. Et cependant, à la décharge de l’en-bas : c’est régulièrement et malgré elle qu’est tribalisée sa conscience de classe.

      Quasi-absence de diversité parmi les GJ (j’en fus et nous le déplorions)…mais mobilisation massive de la gens racisée (voire auto-racisée) pour les BLM suite à la fumisterie Floyd, tout va bien.

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      • Alfred // 27.08.2020 à 18h48

        Au contraire il me semble avoir vu une grande diversité chez les GJ. Absolument tous les profils étaient présents, certes et malheureusement à des degrés divers. Mais certainement la plus grande diversité de tous les mouvements sociaux vus depuis quarante ans.

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    • Osmium // 31.08.2020 à 18h11

      Les classes les plus pauvres sont encore trop riches pour être réellement miséreuses et donc privilégier le groupe à leur individualité. Tant que l’Etat pourra entretenir les miséreux, il n’y aura pas de révolution. Le jour où l’Etat n’aura plus les ressources nécessaires, même de manière passagère, le collectif primera. Ce n’est pas pour rien que la Suisse, la Russie, la Scandinavie ou le Mali ont eu des collectifs puissants par le passé : les environnements étaient durs; la pauvreté forte; donc le groupe soutient chacun de ses membres. Les USA, ou le Congo, terres d’abondances, n’ont jamais vu de collectifs forts.

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  • LibEgaFra // 27.08.2020 à 11h24

    « On est dans une phase de tentative d’absolutisme louis-quatorzien mêlée à une phase de non conscience des groupes, d’atomisation de la société et surtout d’autonomisation de l’État, une découverte que j’ai faite grâce à la lecture de Marx. »

    Encore un effort, camarade Todd et vous aurez tout compris de la dictature de la bourgeoisie et des rapports de classes.

    Il manque à votre lecture l’analyse de Marx sur le rôle du Lumpenproletariat.

      +3

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  • Michel LEMOINE // 27.08.2020 à 11h27

    Trop de psychologie et pas assez d’économie et de sociologie. Pas assez de marxisme.
    C’est le développement des forces productives qui détermine en dernier ressort la situation relative des classes sociales : la désindustrialisation, le développement des nouvelles technologies. Ces mouvements de fond provoquent le recul de la classe ouvrière qui devient conservatrice dans son espoir d’un retour à sa situation d’antan. De même les employés et professions de bureau sont bousculés par les nouvelles technologies (chute des effectifs dans la banque – disparition des métiers par l’uniformisation par l’informatique). Puis apparition d’une classe nouvelle, celle des promoteurs des nouvelles technologies, qui lutte pour trouver sa place dans une société dont elle révolutionne le mode de vie (penser à internet, au téléphone portable etc.)
    Cette dernière classe est internationale (usage du globish).
    Dans cette société en plein bouleversement, les luttes de classe sont plus que jamais présentes mais sont difficiles à décrypter. Elles s’internationalisent.

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    • X // 27.08.2020 à 11h55

      Dans ce cas, il vaut mieux miser sur Trotsky que sur Staline; Todd à gardé de son passage chez les staliniens, un goût pour l’organisation nationale et autoritaire avec l’idée qu’il faut purger les élites (celle actuellement au pouvoir)

        +4

      Alerter
      • Michel LEMOINE // 27.08.2020 à 13h39

        Nous ne sommes plus dans le monde qu’ont connu Trotsky et Staline. Ils ont connu la révolution industrielle et, impulsé par elle, la montée de la classe ouvrière. Nous vivons une révolution scientifique et technique qui n’est qu’à ses débuts. La classe ouvrière est en recul. Elle est divisée (les immigrés que méprisent la classe ouvrière selon E Todd sont aussi la classe ouvrière).
        La nouvelle classe montante est celle des promoteurs de la révolution scientifique et technique. C’est une classe internationalisée. Donc les luttes de classe s’internationalisent.
        C’est cela que sa méthode pragmatique ne permet pas à E Todd de voir.
        Mon analyse complète est ici (attention lecture un peu difficile) :
        https://lemoine001.com/2020/05/22/reponse/

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        • raoul // 27.08.2020 à 16h34

          On se rapproche de plus en plus de la fin du ‘travail’ pour les petites mains…
          Bientôt, les ‘caissières’ se raréfieront… Et quand l’Intelligence Artificielle sera plus avancée, les premiers à trinquer seront les centres d’appels téléphoniques… Il restera alors l’aide au personnes ‘vulnérables’ si il y a un peu d’argent (de dingue !)

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          • Michel LEMOINE // 27.08.2020 à 17h23

            Certainement mais un processus semblable s’est déjà produit avec l’agriculture. Il y a un siècle 75% de la population travaillait dans ce secteur. Aujourd’hui il en représente, je crois, moins de 10%. C’est un nouveau secteur (les industries) qui a absorbé le différentiel et même au-delà car il a fallu faire appel à l’immigration.
            On peut supposer que les métiers de l’environnement joueront le même rôle. Il faut faire en sorte qu’il en soit ainsi et que ce secteur connaisse une croissance rapide.

              +1

            Alerter
          • Subotai // 28.08.2020 à 00h30

            Tout ça c’est établi sur le système marchand – basé sur l’exploitation exponentielle des ressources.
            Quand il n’y aura plus rien à vendre, il n’y aura plus rien à acheter.
            Enfin, ya quand même une alternative pour maintenir le Système actuel:
            Une réduction ciblée de la population mondiale de 50% – disons 70%, pour se donner de la marge…
            Je dis bien |ciblée| – Hé hé hé…

              +1

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            • douarn // 28.08.2020 à 17h08

              Bonjour Subotai
              La « réduction ciblée de la population mondiale de 50%  » ne marchera pas!
              Mettons qu’après cette coupe claire dans la population, la croissance de la population s’établisse à +1%/an, alors la population sera revenue à son niveau antérieur en 70ans. A 3% ce retour se fait en une vingtaine d’année.
              Il faudra donc que soit exercé un contrôle reproductif après.

              Bref, c’est glaçant…

                +0

              Alerter
            • Subotai // 30.08.2020 à 19h12

              Je disais |ciblée| parce ce qui nous pend au nez, c’est la réduction sauvage.
              Comprend bien que je n’y crois pas à cette réduction ciblée, ni à sa réussite.
              Ciblée signifie qu’il ne s’agit pas d’éliminer tous les pauvres et de rester entre Bobo30% (comme j’ai pu l’entendre d’une manière feutrée ci ou là) et penser que les machines feront le boulot.
              C’était une provocation à l’intention de ceux ci 🙂
              Je pense qu’on va avoir droit à une réduction sauvage et chaotique de la population mondiale; ce qui signifie des savoirs qui disparaissent. Et qu’il va avoir un moment où les savoirs pratiques des fondamentaux nécessaires à la vie vont être très demandé.

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              Alerter
  • LibEgaFra // 27.08.2020 à 11h47

    A propos d’intelligence:

    https://www.youtube.com/watch?v=UbDD1NMf_k4

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  • Michel LEMOINE // 27.08.2020 à 11h52

    L’analyse de E Todd a les défauts de sa méthode, de son pragmatisme. Il prend la structure de classe de la société française comme un fait brut donné sans biaiser par les statistiques de l’Insee. De même il prend le discours sur eux-mêmes de ces groupes comme la lecture directe de leur situation sociale et de leur place par rapport aux autres groupes.
    Quant à tout ce qu’il dit sur l’intelligence des uns et des autres, ce n’est plus du pragmatisme mais du subjectivisme.

      +3

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  • JEAN DUCHENE // 27.08.2020 à 12h57

    Ce qui scandalise les commentateurs souverainistes et nationalistes de Todd c’est ce qui reste de Marx chez lui. Bien sûr, il n’en reste pas grand chose et pas cette idée absurde de réunir les 99% (du peuple ?) contre les 1% de la sphère « stato-financière »; Il minorise à dessein la partie industrielle du capitalisme qui en fait a fusionné – mais n’a pas disparu – avec le capitalisme financier. Il n’y a pas un « bon » capitalisme industriel et un mauvais capitalisme spéculateur-financier, ce sont les mêmes. Les créateurs de richesses sont encore au coeur de l’industrie (ici et ailleurs- à l’échelle de la globalisation la classe ouvrière est encore la classe numériquement dominante, et plus que jamais), la finance ne fait que se disputer et se répartir une richesse qu’elle n’a pas crée. Ce qui rend la stratégie des 99% contre les 1% un peu plus compliquée et renvoie à la vieille stratégie marxiste des alliances de classes qui peut se faire non au nom de l’indépendance nationale mais au nom d’intérêts (matériels et de valeurs) communs ( avec les enseignants, les « professions intermédiaires » et ce qui reste de la paysannerie individuelle).

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  • nico // 27.08.2020 à 14h11

    concernant le sentiment de supériorité des CPIS et stato-financiers un aspect qui est important c’est que Le passage des quelques % à 30% de personnes ayant fait des études supérieurs pendant les 30 glorieuses (et donc le siphonnage des meilleurs éléments des classes populaires par l’élite comme l’explique Todd) fait qu’aujourd’hui une grande majorité de cette élite a des parents ou grands parents issues des classes populaires. Du coup ces gens ont le sentiment d’être issu de la méritocratie (oubliant que ce n’est pas eux mais leur parents ou grand-parents qui ont gagnés leurs galons au mérite). La conséquence est que si le mépris de classe a toujours existé, au moins dans le passé le status social était considéré comme « hérité » alors qu’aujourd’hui il est considéré par l’élite comme de ça propre volonté (si tu es pauvre c’est que tu n’est pas fourni le travail nécessaire, puisque moi (enfin tes ancêtres coco) je suis parvenu à m’élever par mon travail , les célèbres phrases de Macron en sont l’illustration caricaturales). Ce qui rend le sentiment de supériorité encore plus flagrant !

      +9

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  • Urko // 27.08.2020 à 23h25

    Beaucoup de commentaires me paraissent bien sévères envers Emmanuel Todd et son propos. Pourtant, il donne franchement à réfléchir car l’originalité de son analyse de beaucoup de données a tout de même une certaine cohérence d’ensemble, notamment sur le besoin de se défouler sur une classe perçue comme inférieure et méprisable puisque le classement social – qu’il a l’air de confondre parfois avec les revenus – serait fondé sur le mérite, mais aussi quant à la fausse conscience et à l’homogénéité. Cela ne doit tout de même pas masquer le fonds de son constat : le niveau de vie baisse pour tout le monde.

      +6

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    • Alfred // 28.08.2020 à 09h46

      « notamment sur le besoin de se défouler sur une classe perçue comme inférieure et méprisable ». C’est justement ce que lui reproche. Autant ses analyses sur l’homogénéité me paraissent justes autant cette psychologisation me paraît fausse et contre productive. Il n’y a nul besoin naturel de se défouler contre autrui mais un schéma de pensé construit et inculqué. C’est très différent. On enseigne le mépris comme la musique. Il faut justement se garder de ce piège dans lequel Todd tombe lui même.

        +1

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  • Alfred // 28.08.2020 à 08h37

    Tout cela est exact. Il n’en reste pas moins qu’être souverainiste, anti une et remonté contre la caste débile et corrompue au pouvoir n’est pas un blanc seing de pensée parfaite et systématiquement juste. Le môooosieur peut se mettre le doigt dans l’œil aussi parfois ou être victime de ses propres préjugés comme chacun. L’idée que les gens ont besoin de voir des gens « plus miséreux qu’eux même » par exemple. Je pense que ce n’est pas un besoin ni un réflexe naturel mais u e construction sociale apprise (et enseignée par ceux qui en ont besoin pour diviser et mieux reigner). Cela me désole donc de voir Todd à sa manière ainsi diviser.. personne n’est parfait.

      +0

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  • Josy // 28.08.2020 à 14h26

    Pas grand chose dans le commentaires , qui traitent Todd avec beaucoup de condescendance , pour la justifier.
    Aucune critique qui pourrait un tant soit peu apporter des connaissances ou des faits pertinents ; les critiques restent vagues et en suspens.
    Tout comptes faits on cherche à critiquer sans y arriver . Attendons la bonne remarque qui relance le débat et les analyses d’un chercheur qui se trouve tout de même être toujours d’un excellent niveau et bon pédagogue , ce qui ne gâte rien.

      +1

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  • Anfer // 28.08.2020 à 16h50

    Le point ou je ne suis pas d’accord avec Todd, c’est sur son concept d’aristocratie statofinancière.

    Le libéralisme ou le néolibéralisme (c’est pareil), est étatiste (honteux et caché), sans état, pas de marché, et sans état pas de forces de l’ordre pour faire respecter la propriété.

    En fait, les hauts fonctionnaires français néolibéraux, en sont la quintessence caricatural, en plein dans ses contradictions et sa fausse conscience.

    Le libéralisme repose sur des erreurs historiques et des contresens, donc avoir des hauts fonctionnaires dépendants de l’état et le conspuant, comparé aux autres absurdités que charrie le libéralisme, c’est rien du tout.

      +0

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    • Interimlover // 28.08.2020 à 23h42

      Ce n’est pas pareil, non : transhumanisme et eugenisme, par exemple, etaient etrangers au logiciel du liberalisme-vintage.

        +0

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  • Louis // 29.08.2020 à 11h39

    Tant que des intellectuels de cette qualité pourront encore librement s’exprimer, il y aura de l’espoir.. J’observe que l’état est de plus en plus disons « hors sol »..

      +2

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