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21.janvier.201621.1.2016 // Les Crises

La haine a-t-elle une raison ?

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Source : Slate, Arnaud Tomès, Nonfiction, 08-01-2016

Un ouvrage qui étudie la logique de la haine: les phénomènes historiques de persécution peuvent-ils être éclairés par les concepts psychologiques de constitution du Moi?

Ce nouveau livre de Jacob Rogozinski–professeur de philosophie à l’université de Strasbourg, auteur d’une œuvre déjà importante, qui a porté en particulier sur Kant, ou plus récemment sur Artaud et sur Derrida–est un ouvrage imposant, par ses dimensions et par la multiplicité des thèmes qu’il aborde. Il constitue en quelque sorte la suite de son ouvrage Le Moi et la Chair (Le Cerf, 2007), texte ambitieux dans lequel l’auteur se présentait en fondateur d’une nouvelle discipline, l’ego-analyse. Il s’agit d’une certaine manière d’appliquer les concepts de l’ego-analyse à des phénomènes historiques et sociaux, comme Freud l’avait fait en appliquant les concepts de la psychanalyse à l’étude des cultures et des religions.

Comprendre la logique de la haine

L’ouvrage se penche sur un phénomène que l’on pensait connu, mais qui n’a jusqu’à présent guère suscité l’intérêt des philosophes, à savoir la persécution des sorcières au cours des XVIe et XVIIe siècles. Jacob Rogozinski a le mérite de nous rappeler l’ampleur du phénomène: entre 80 000 et 200 000 victimes, dénoncées, humiliées, torturées puis brûlées. Mais il nous rappelle aussi que ce phénomène ne s’est pas produit au cours d’un Moyen Âge que l’on imagine volontiers obscurantiste et sujet à des croyances religieuses irrationnelles, mais en plein processus de modernisation et de sécularisation. On brûle les sorcières au moment où Descartes écrit son Discours de la méthode (1637); et c’est ce même Jean Bodin qui prend des positions humanistes sur les guerres de religion et fonde la théorie moderne de la souveraineté (dans les Six livres de la République, 1576), qui rédige un traité intitulé De la démonomanie des sorciers (1580), écrit qui dénonce l’omniprésence des sorciers dans la société (jusqu’à la cour du roi lui-même) et détaille les meilleurs moyens de les torturer. L’idée naïve–mais encore partagée par certains historiens–d’un progrès de l’histoire vers les Lumières, n’en sort pas indemne.

Jacob Rogozinski ne se contente toutefois pas de faire œuvre de mémoire et de rappeler les circonstances historiques, politiques et intellectuelles de cette terrible persécution–en rendant par la même occasion à ces femmes persécutées leur nom et leur parole: on se souviendra longtemps de cette Aldegonde, répliquant à celui qui l’accuse publiquement: «Mais quoi. On dit que toutes les femmes sont sorcières»–, son projet est bien plus profondément de «comprendre la logique de la haine». Projet ambitieux, d’autant qu’il part d’un constat paradoxal, qui permet de comprendre le titre de l’ouvrage: c’est que la haine est «sans raison» (cf. p.29):

«Comme l’angoisse ou l’amour, la haine est sans pourquoi.»

Penser la logique des affects ne signifie donc pas les ramener à une cause explicative, manière de se débarrasser du problème plus que de le résoudre: l’ouvrage ne cède jamais à ces simplifications rationalisantes que l’on trouve dans certains livres d’histoire, où l’on explique par exemple la persécution des sorcières par la «petite glaciation» qui a lieu au XVIIe siècle.

Crises du pouvoir et constitution d’un Ennemi capital

Néanmoins, si l’on ne peut expliquer le pourquoi de ce déchaînement de haine, qui tantôt prend les lépreux pour objet, tantôt les sorcières, tantôt les Juifs, on peut décrire comment des dispositifs de persécution se mettent en œuvre, comment le pouvoir peut capter des affects de haine ou de dégoût en utilisant des schèmes de persécution ou d’exclusion. L’ouvrage de Jacob Rogozinski propose à cet égard des analyses très précises et très convaincantes de la manière dont une souveraineté en crise–et c’est bien le cas par exemple de la souveraineté de l’État français au XVIe siècle, miné par les guerres de religion et le spectre des révoltes populaires–constitue un Ennemi capital, afin de détourner contre certaines catégories de la population le mécontentement du peuple, ou encore pour conjurer le pouvoir de la multitude, cette puissance qui menace toujours de dissoudre le grand corps du Souverain. Le complot des sorciers devient ainsi «l’ombre de la multitude rebelle», sans que pour autant Jacob Rogozinski sombre dans un quelconque romantisme de la multitude, car, comme Spinoza le savait déjà, il y a des multitudes féroces.

Le dispositif de persecution comme instrument de pouvoir

Jacob Rogozinski ajoute ainsi un concept précieux–celui de «dispositif de persécution»–aux dispositifs d’exclusion et de normalisation que Michel Foucault avait déjà théorisés dans ses Séminaires ou dans Surveiller et punir, tout en contestant par ailleurs certaines positions foucaldiennes sur les rapports du sujet, du pouvoir et de la résistance. Car, ne l’oublions pas, même si le sujet persécuté participe souvent des représentations du persécuteur (et partage ainsi un même imaginaire), il y eut de la résistance au sein du sujet lui-même par rapport aux procédures qui le forcent à avouer: ces fameuses procédures inquisitoires, dont Jacob Rogozinski rappelle l’origine et le sens, au sein d’une sécularisation des dispositifs de vérité. Un autre apport théorique majeur de cet ouvrage nous semble être la notion de schème, utilisée ici d’une manière différente de celle de Kantet que Jacob Rogozinski définit (cf. p.86) comme «une représentation synthétique, unifiant plusieurs éléments hétérogènes, et dynamique». C’est l’usage de ces schèmes qui permet de comprendre comment le pouvoir peut capter des affects de haine, ou détourner la colère du peuple, son désir de vengeance à l’égard d’un ennemi réel, vers cet Ennemi capital dont le souverain a besoin pour se relégitimer.

«L’étranger en moi» au fondement de la haine de l’autre

Néanmoins, on en resterait à un niveau superficiel si l’on voyait dans Ils m’ont haï sans raison un simple travail de reconstitution des logiques politiques et historiques à l’œuvre dans les phénomènes d’exclusion et de persécution, ce qui serait déjà considérable. Car – et c’est là que l’ouvrage devient, à notre avis, le plus intéressant et sans doute en même temps le plus problématique – Jacob Rogozinski s’efforce d’articuler les concepts de l’ego-analyse et les phénomènes historiques qu’il étudie, en redescendant à un niveau plus fondamental, qui est celui de la «vie originaire du moi», cette vie qui avait fait l’objet du Moi et La Chair. Rappelons que Jacob Rogozinski a proposé dans ce précédent ouvrage une phénoménologie de la Chair, permettant de fonder une véritable analyse de la constitution du Moi, un Moi qui comporte toujours en lui une part d’étrangeté, cette part qui lui permet de ne pas s’effondrer dans l’aphanisis: l’impossibilité de sa propre manifestation. Cette part d’étrangeté, Jacob Rogozinski propose de l’appeler le restant–ce reste de ma chair, cette partie de moi qui rend possible le chiasme originaire, qui n’est donc pas étranger au Moi mais qui est l’étranger en moi. La haine correspond à ce sentiment lié au désir non pas simplement d’expulser, mais de détruire ce qui semble menacer le Moi.

Les phénomènes de persecution peuvent être reliés à des phénomènes plus originaires, qui tiennent à la relation du Moi à sa propre chair

Les phénomènes de persécution–à commencer par cette persécution des sorcières, qui ne touche pas l’Autre radical, mais au contraire le proche, celui qui appartient à la même famille ou à la même communauté que moi, l’«étranger du dedans»–peuvent donc être reliés à des phénomènes plus originaires, qui tiennent à la relation du Moi à sa propre chair: les schèmes historiques se nouent ainsi à des schème originaires (cf. p. 83), «opérant à un niveau plus élémentaire, dans l’expérience immanente du moi». Le phénomène de la persécution pourrait ainsi s’éclairer–sinon s’expliquer–par le fait que je transfère sur autrui ma propre Chair, ou plutôt les relations ambivalentes que j’entretiens avec cette Chair, que je fais donc d’autrui un «suppôt du restant», selon l’expression utilisée par Jacob Rogozinski. Il faut le reconnaître: les analyses très denses de la persécution des sorcières, dans la première partie, de la persécution des lépreux ou des Juifs, de la place des Intouchables dans la société indienne, ou encore de la logique à l’œuvre lors de la Terreur révolutionnaire dans la seconde partie de l’ouvrage, semblent confirmer avec brio les hypothèses de l’auteur.

Peut-on articuler une psychologie des masses à l’analyse du Moi?

Toutefois, il semble y avoir dans la position de Jacob Rogozinski une hésitation entre deux attitudes, qui ne parviennent jamais vraiment à se réconcilier : d’une part, une attitude qui consiste à fonder les phénomènes historiques à partir des concepts de l’ego-analyse, c’est-à-dire dans ces phénomènes plus originaires qui concernent la vie du Moi: «une généalogie historique des appareils de pouvoir doit se fonder sur une ego-analyse», écrit ainsi significativement l’auteur dans son introduction (cf. p.63); et d’autre part, une attitude qui consiste à refuser une telle fondation, en rappelant que les phénomènes propres au Moi se situent dans une sphère purement immanente, à laquelle on accède par une épochè phénoménologique, autrement dit par une suspension de la croyance dans l’existence du monde. Refusant toute comparaison avec René Girard ou ces auteurs qui tentent de penser les phénomènes historiques à partir d’un concept général (le bouc émissaire, l’homo sacer, etc.), Jacob Rogozinski affirme (cf. p.42) que «les concepts de l’ego-analyse n’ont pas pour vocation d’expliquer ce qui advient dans le monde». Mais alors, quelle peut bien être la fonction des concepts de l’ego-analyse? Le concept de «restant» ne rend-il pas raison de manière très convaincante de ces phénomènes historiques que sont la persécution des sorcières ou la relégation des Intouchables à ces tâches qui suscitent le dégoût?

Certes on peut comprendre la réticence de l’auteur à l’égard d’une attitude qui consisterait à psychologiser excessivement les événements de la vie historique ou à trouver une grille interprétative univoque à des phénomènes qui relèvent d’une multitude de déterminations. Il nous semble cependant que Jacob Rogozinski pèche par un excès de prudence méthodologique, en distinguant si radicalement le plan d’immanence (celui du Moi) et le plan des phénomènes sociaux et historiques. Il s’interdit en ce sens de faire ce que Freud faisait, d’une manière qui nous semble féconde, à savoir articuler une psychologie des masses (n’est-ce pas nécessaire à quiconque veut mettre au jour une logique de la haine?) et une analyse du Moi. Ou plutôt il ne s’interdit pas vraiment de le faire, puisqu’il montre par exemple comment les schèmes d’incorporation et de désincorporation, qui concernent pourtant la vie originaire du Moi, sont efficients lorsque l’on veut comprendre la haine qui se déchaîne à l’égard des sorcières ou à l’égard du roi Louis XVI, cet «étranger parmi nous».

Dépasser le dualisme de l’individuel et du social

Cette prudence méthodologique s’explique sans doute par la fidélité que Jacob Rogozinski manifeste à l’égard de la tradition phénoménologique, qui fait du Moi une réalité originaire, un ego transcendantal ou une Chair primordiale, qui ne peuvent pas être dérivés du monde. Pourtant, il serait temps de dépasser cette dualité de l’individuel et du social, qui est un véritable empêchement à penser: Ils m’ont haï sans raison en est bien la preuve, qui articule sans cesse des logiques proprement sociales (logique du pouvoir, par exemple, qui vise à se légitimer) et des logiques proprement psychologiques. La notion de schème, si brillamment utilisée par Jacob Rogozinski, nous semble précisément l’un de ces concepts qui permettent de dépasser l’absurde dualisme du psychologique et du social, intenable lorsque l’on veut penser des affects comme la haine. Ce qu’a par ailleurs montré Frédéric Lordon dans La Société des affects (Seuil, 2013).

Une communauté qui accepte en elle la présence de l’hétérogène est-elle possible?

Quoi qu’il en soit, on ne peut qu’être admiratif face à la densité et à la pertinence des analyses menées par Jacob Rogozinski–dont nous n’avons donné qu’un très bref aperçu, eu égard à la longueur et à l’ambition de l’ouvrage. Le livre ouvre par ailleurs, dans sa conclusion, des pistes politiques tout à fait intéressantes, puisque Jacob Rogozinski rappelle qu’il existe des «schèmes d’émancipation» qui peuvent heureusement contrebalancer les schèmes de persécution. L’humanité n’est pas condamnée à succomber aux facilités de la logique de la haine. Contre l’image de la communauté unifiée, réconciliée par l’exclusion ou par la persécution d’un restant (qui prend la figure du paria, du Juif ou encore de l’immigré, menaçant la cohésion du corps social), se dégage ainsi l’image, dans la conclusion du livre, d’une «communauté messianique» qui serait capable d’accepter la vérité de son incarnation, de la présence en elle de l’hétérogène. Reste à donner un visage plus précis à cette «communauté messianique»–communauté religieuse ou politique? Ce sera peut-être l’objet d’un prochain livre de Jacob Rogozinski.

Arnaud Tomès et Nonfiction

Source : Slate, Arnaud Tomès, Nonfiction, 08-01-2016

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Commentaire recommandé

Crapaud Rouge // 21.01.2016 à 07h23

Vraiment pas d’accord. Voir dans la haine le moyen de « Rejeter sur autrui tout notre malaise intérieur » relève de la seule psychologie (individuelle), alors que la question posée est celle de la « haine de masse », c’est-à-dire celle du peuple pour une partie de lui-même. Perso, je préfère de loin l’analyse marxiste selon laquelle les déterminants sont d’ordre économique, et « pilotés » par la bourgeoisie quand ses intérêts sont menacés.

37 réactions et commentaires

  • Patrick Luder // 21.01.2016 à 06h24

    La haine est le moyen d’éviter de se remettre en question. Rejeter sur autrui tout notre malaise intérieur est bien plus facile que de remettre en question notre propre fonctionnement. Se remettre en question demande une force au delà de nos moyens, une force telle que seule une aide extérieure est en mesure de pourvoir …

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    • Justinos // 21.01.2016 à 07h18

      La haine n’est pas une stratégie, un calcul. Elle est un « affect » pour parler dans les termes de Spinoza qui lui donne une définition très large : l’identification (qui peut d’ailleurs être erronée, car imaginaire) de la cause de ma « Tristesse ». Je ne décide pas de haïr; je suis affecté de haine, de façon nécessaire, dans telle ou telle situation, conjoncturelle ou structurelle. C’est le socle. Et, toujours selon Spinoza, des expressions comme « s’abandonner à la haine » ou « nourrir sa haine » devraient s’interpréter non pas comme procédant d’un choix mais, là encore, comme un mécanisme s’imposant à l’individu. (On trouve la même chose dans l’analyse des passions et de leur croissance chez David Hume). L’homme se croit libre parce qu’il est conscient tout en ignorant les causes qui le déterminent, dit Spinoza… L’homme serait donc victime de sa haine et non pas son grand ordonnateur, et quand nous haïssons… la haine (certaines personnes mues par la haine : les « fascistes » ou les « racistes » par exemple), c’est encore un affect et non pas une noble décision morale de notre part. Voici en tout cas le « schème » spinoziste ! C’est pourquoi, à mon avis, il n’est en rien utile (outre que c’est faux) de responsabiliser la haine en en faisant l’objet d’un mauvais choix, avec pour effet de haïr soi-même celui qui en est coupable, donc…
      Trois solutions spinozistes alors face à la haine : 1) que le haineux en comprenne grâce à la raison le mécanisme, ce qui la désarme 2) la réprimer par un affect opposé et plus fort 3) supprimer la situation qui conduit immanquablement à la haine (la plus sûre sans doute !).

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      • Patrick Luder // 21.01.2016 à 11h19

        celui qui se laisse aller à la haine (facile) sait bien, au fond de lui, qu’il aurait un travail à faire pour surmonter cette haine … que la haine soit de masse ou individuel ne change rien, c’est la même réaction.

        La haine vient de l’incompréhension comme la colère vient de l’impuissance.

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        • Crapaud Rouge // 21.01.2016 à 13h16

          « que la haine soit de masse ou individuel ne change rien, c’est la même réaction » : ça change tout au contraire ! Quand elle devient massive, ou « grégaire », et qu’elle s’étale en place publique, des tas de gens en viennent à la trouver « normale », donc à haïr eux-aussi : c’est ce qu’on pourrait appeler l' »induction » d’un sentiment collectif sur les individus. Mais il n’y a rien à dire ni à reprocher à une haine authentiquement individuelle : sa cause peut trouver son origine dans l’histoire personnelle.

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      • Anas // 21.01.2016 à 17h03

        « […] supprimer la situation qui conduit immanquablement à la haine (la plus sûre sans doute !).[…].

        Tout à fait d’accord avec vous. La haine à une cause des causes: l’ignorance. Avérroès résume bien le processus qui mène à la haine et par conséquent à la violence:
        “L’ignorance mène à la peur, la peur mène à la haine et la haine conduit à la violence. Voilà l’équation.”

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    • Crapaud Rouge // 21.01.2016 à 07h23

      Vraiment pas d’accord. Voir dans la haine le moyen de « Rejeter sur autrui tout notre malaise intérieur » relève de la seule psychologie (individuelle), alors que la question posée est celle de la « haine de masse », c’est-à-dire celle du peuple pour une partie de lui-même. Perso, je préfère de loin l’analyse marxiste selon laquelle les déterminants sont d’ordre économique, et « pilotés » par la bourgeoisie quand ses intérêts sont menacés.

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      • Joséphine // 21.01.2016 à 08h39

        Je suis pour dire que cela relève de la psychologie. Plus précisément de la paranoia. Toute la question est: peut on passer de l’individu au groupe avec la même grille d’analyse. Mes proches disent de moi que je vois des parano partout…Après les lectures de Robert Dufour ou Melman par exemple, je suis persuadée que notre ère crée un individu particulier. Donc que des phénomènes historiques puissent très bien être le contexte pour l’émergence d’un mécanisme de défense, qui ne serait plus individuel et collectif… La paranoia étant particulèrement contagieuse!

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        • Pik’ // 21.01.2016 à 09h36

          Rien n’est *que* psychologique, et rien n’est *que* sociologique. Bon, je n’apporte pas grand chose en disant ça, mais je le pense d’une manière vraiment profonde : nos mécanismes psychologiques eux-mêmes, ou en tout cas leurs importances relatives et leurs utilisations, sont construits par notre environnement, et en particulier par les gens autour de nous.

          Patrick n’a pas tord du tout quand il dit que la haine est un moyen d’exterioriser nos malaises. Mais nos malaises viennent aussi de l’environnement. Le milieu social nous prodigue à la fois nos problèmes et leurs solutions.
          Et c’est là qu’on fait le lien avec ce que dit Crapeau : une population miséreuse, ou qui se sent spoliée, va réagir à sa situation et, par le biais de mécanismes psychologiques, la traduire en certains sentiments spécifiques, et générer des actions elles aussi spécifiques. Les mécanismes en question étant affectés par la multitude et sa culture (par exemple, certains peuples, si attaqués, ont plutôt le réflexe de fuir tandis que d’autres auront tendance à se défendre).
          Les élites, se sentant en danger, vont faire la chose la plus logique : s’efforcer de désigner un autre coupable.

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      • pat // 21.01.2016 à 09h13

        pas faux mais pas que…..la pluridisciplinarité permet d’approcher une vision un peu plus holistique du fait. La psychosociale permet de soulever les problèmes d’ordre « inconscient collectif » et des influences sur les groupes. ET, il y a du lien à faire entre psycho (individuelle), psychosociale,marxisme et socio-antropo…

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      • G. // 21.01.2016 à 10h36

        C’est marrant ças, moi qui pensait que les communistes s’étaient à la grande époque de vos dieux Marx-Lénine-Staline justement retournés contre leur propre peuple… Les atrocités commises par les communistes envers les paysans par exemple?

        Mais évidemment, c’est tellement plus simple de se dire que la haine, c’est forcément toujours la faute de la bourgeoisie!

        Ouvrez les yeux, la raison essentielle pour laquelle le communisme ne marchera jamais, c’est l’être humain lui même. Nous ne sommes pas une espèce sympathique, point barre. Nous sommes des animaux légèrement évolués, des êtres plus fous que doués de raison. Les sytèmes mis en place pour brider notre folie doivent partir de ce constat, pas le nier.

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      • Justinos // 21.01.2016 à 10h48

        Tout à fait d’accord pour intégrer le marxisme et les mécanismes sociaux qu’il dévoile et qu’ignorait Spinoza. Et de fait, les processus économiques structurels produisent justement des « affects » ! Les rapports de production que font naître le développement des forces productives engendrent, de façon nécessaire, les superstructures idéologiques (valeurs, codes juridiques, représentations religieuses, etc.) qui affectent les classes, c’est-à-dire, en définitive, les individus qui les composent. Marx élargit donc, si l’on veut, le champ psychologique. Mais, en réalité, cela fait partie de la psychologie. Cf., Lucien Sève, Marxisme et théorie de la personnalité et sa récente reprise dans Penser avec Marx aujourd’hui, II : L’Homme ? Et Marx : l’essence de l’homme ce n’est pas une entité abstraite, mais l’ensemble des rapports sociaux.
        Le problème, à mon avis, c’est de savoir si, étant donné qu’il y a déterminisme et aliénation, on doit incriminer les individus qui sont davantage des affectés que des sujets souverains et libres… On ne peut haïr que ceux dont on pense qu’ils sont libres de leur crime… Mais c’est une croyance aussi bourgeoise (l’homme comme libre individu calculant rationnellement) que chrétienne (l’homme ayant une âme qui sera jugée), une croyance qui naît d’une histoire ! A mon avis, il y a une contradiction entre le déterminisme tel que le pense Marx (ou Spinoza) et la manie consistant à juger et à… « haïr » dont on ne s’aperçoit pas que la haine est nécessaire.

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      • Patrick Luder // 21.01.2016 à 11h22

         » que, et “pilotés” par la bourgeoisie qua  »

        Pour que la bourgeoise puisse piloter la haine des masses, il faut déjà que les masses acceptent d’être conditionnés …

        Il est trop facile de toujours rejeter la faute sur d’autres et jamais se remettre en question.

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        • luc // 21.01.2016 à 14h32

          il est trop facile de dire que les forces sont équilibrées, le combat est inégal patrick

          l’éducation obligatoire malsaine jusqu’à 16 ans, les médias omniprésents et orientés…

          les images des ordinateurs, du cinéma, de la télévision et des photo imprimées, la musique, les téléphones, les évênements sportifs, tout ceci offert dès la prime enfance… un assaut de distractions à faire perdre la tête

          une fois qu’on y a été exposé, cette forme de suffocation mentale semble relaxante… ce n’est pas relaxant, c’est abrutissant… les parties de la conscience qui sont contemplatives et créatrices se referment…plus l’expérience est répétée, plus la dépendance augmente… au lieu d’apprécier les expériences mentalement stimulantes, ces dernières paraissent absolument agaçantes et dérangeantes…

          c’est trop facile de dire qu’il suffit simplement de se remettre en question au lieu de rejeter la faute sur la société… en fait c’est tout simplement une erreur dans l’évaluation de la situation

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        • Justinos // 21.01.2016 à 23h43

          C’est un peu le problème de la « servitude volontaire » que vous posez à juste titre…
          Mais voir ce que dit Frédéric Lordon à ce sujet, à savoir qu’elle n’existe pas, étant en fait involontaire et nécessaire. L’aliénation n’est pas auto-aliénation : elle est à la mesure de ce que peut et comprend un individu ou une groupe à tel ou tel moment. SI nous nous libérons, c’est que nous le pouvons et que c’est devenu nécessaire, c.a.d. quand on ne peut plus faire autrement. Voir ce que dit Spinoza au sujet de l’ « indignation » qui est pour lui une force historique capable de tout renverser. Or on ne « s »‘indigne pas ; on est à ce point indigné, c.a.d. affecté par ce sentiment venant d’une situation extérieure qu’on est contraint de (se) révolter.
          Même idée chez Nietzsche : on croit qu’autrui est libre pour qu’il puisse être coupable et que le « mal » dans le monde, ayant ses responsables, ce monde puisse acquérir une dimension morale qui fasse sens. C.a.d. qu’on veut y croire, poussé par l’affect du ressentiment, d’une part, et porté par le désir de conférer un sens moral au monde qui, en fait, lui est étranger… (Cf. le même Nietzsche : « Il n’y a pas de phénomènes moraux, il n’y a que des interprétations morales des phénomènes.' »)
          Il ne s’agirait donc pas de rejeter la faute sur d’autres avec facilité, comme vous dites, puisqu’ils ne sont justement pas coupables – ce qui est encore plus scandaleux que leur culpabilité présumée… C’est l’innocence « tragique » du devenir dont parle encore Nietzsche. Ne plus pouvoir se plaindre, c’est terrible ! Penser que l’assassin de mon enfant n’est pas coupable ! Qu’Hitler était « nécessaire » !
          Nous ne pouvons donc pas ne pas croire à notre liberté comme à celle des autres, et ne pas nous culpabiliser comme ne pas les culpabiliser. C’est ce qui aurait rendu fou Rousseau, selon Clément Rosset !
          L’écart entre ce que la Raison analyse, en réduisant tout à la nécessité, et le vécu de la conscience est abyssal ! Croire à la raison (Spinoza) ou suivre le témoignage de sa conscience (Kant), tel est le dilemme. Nul n’en sort indemne, quel que soit son choix… si choix il y a !

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      • luc // 21.01.2016 à 11h38

        « les déterminants sont d’ordre économique » …

        et culturels : la bourgeoisie pilote aussi la culture, qui fait que les gens veulent un écran plat et une voiture neuve tous les 3 ans… etc

        si les gens se contentaient de vivre simplement, ils consommeraient peu, mais ils sont pilotés mentalement…

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      • Erwan // 21.01.2016 à 22h10

        J’avoue avoir un peu de mal avec le vocabulaire de l’article. Ceci étant précisé, mon intuition est la suivante :

        à la base, bien avant la haine, il y a la peur, mécanisme de survie inconscient hérité de nos ancêtres animaux. Celle-ci est exacerbée en période de crise durable, car la peur « animale » est faite pour réagir dans l’instant à une menace, pas pour se prolonger sur de longues périodes (exactement comme pour l’état d’urgence; en fait c’est exactement le même concept). La peur engendre le besoin de se protéger, et dans les sociétés humaines la protection la plus efficace est de se regrouper pour bénéficier de la protection de la communauté.

        Là commencent les problèmes : la peur devient alors la peur d’être exclu de ma communauté, me condamnant à une mort quasi-certaine (au plan du cerveau « animal » inconscient). Il devient donc vital de prouver mon appartenance à la communauté. On passe alors inévitablement à la question « qu’est-ce qui définit ma communauté ? », et le plus facile est malheureusement souvent de la définir en opposition à ce qui n’en fait pas partie : d’abord les étrangers de tout poil, mais rapidement aussi les personnes à la marge, les minorités visible, etc. S’ensuit un effet de surenchère dans le groupe, chacun voulant prouver aussi visiblement que possible son appartenance à la communauté; s’y ajoutent des calculs intéressés qui empirent et prolongent la situation, par exemple pour s’approprier des biens, des voix aux élections, ou simplement se débarasser d’un voisin qu’on n’aime pas.

        Sur le plan psychologique, il faut ajouter que la chasse aux « pas-de-chez-nous » (par exemple) a aussi l’avantage important de fournir non seulement une explication (sentiment de maîtrise relative de la situation, par opposition à l’angoisse de l’incompréhension) mais aussi une occupation utile voire gratifiante : non seulement on a moins de chance d’être rejeté de la communauté en se plaçant radicalement parmi les haineux, mais encouragé par la communauté on a même le sentiment de bien faire et de retrouver confiance en soi… En voilà une belle occasion de se rallier des bataillons de chômeurs à l’ego amoché, se dit alors le politicien sans scrupules (pléonasme)…

        Voilà, pour moi c’est comme ça que se rejoignent et s’entretiennent mutuellement :
        1) la peur individuelle
        2) la peur collective
        3) la haine collective

        Dans cette logique la haine individuelle n’a pas vraiment de raison d’être : la communauté est le moteur et le but de l’acte de haine (à l’exception peut-être de la vengeance individuelle, mais on peut classer ça comme un calcul intéressé).

          +2

        Alerter
  • gilles // 21.01.2016 à 07h59

    Relire René Girard « Des choses cachées depuis la fondation du monde » qui explique bien mieux les haines collectives par exemple religieuses.

      +11

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  • Tonton poupou // 21.01.2016 à 08h51

    « La haine s’acquiert autant par les bonnes œuvres que par les mauvaises. » Machiavel.

      +6

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  • valles // 21.01.2016 à 09h16

    « il serait temps de dépasser cette dualité de l’individuel et du social » le capital a réussi ce tour de force en reléguant l’autre et ces semblables à un produit consommation courante (voir Alain Caillé).
    L’économie de marché contrôle la haine par la circoncision spirituelle et le sacrifice de tout sens commun, cet environement artificillement neutre permet une croissance rapide mais démunie de toute ampathie par sa myopie accidentelle elle détruit tout sur son passage.

      +3

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  • toff de aix // 21.01.2016 à 11h37

    Concernant ce sujet helas intemporel, je conseille a tous la lecture « le pouvoir du moment present » d’Eckhart Tolle.

    Bien plus qu’un simple best seller, ce livre qui se veut avant tout « manuel d’éveil » explique de façon absolument limpide pourquoi les hommes en sont là, et la possibilité de s’en délivrer, loin de tout dogmatisme ou prétention religieuse (bien souvent la religion helas, participe au même mécanisme, et ne devient qu’un outil dévoyé de plus).

    Accessoirement, interessant de lire dans cet article que l’arrivée de Descartes n’a pas sauvé nombre de présumées sorcières du bûcher et des tourments…ce livre traite aussi de ces fameuses « lumières », et le suggère fort bien : et si Descartes, avec son  » je pense donc je suis », s’était totalement planté ? Ne serait ce pas plutôt « je suis, donc je pense »(et donc parfois trop, et de facon dysfonctionnelle, l’outil mental devenant le maitre au lieu de rester simple outil à sa place…) qui serait une des vérités de notre condition ?

      +4

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  • Alae // 21.01.2016 à 12h11

    En mettant toutes les formes de haine dans le même sac, l’auteur ne peut qu’aboutir à des conclusions contestables. Il y a plusieurs types de haine, dont l’une est le revers de l’amour. La lionne qui devient agressive quand on s’approche de ses petits en est une bonne illustration, le révolutionnaire qui combat un ordre inique une autre. Est-ce qu’on se peut se battre efficacement contre le nazisme, par exemple, sans le haïr ?

    Une autre forme de haine très différente naît, il me semble, de la compensation d’une fragmentation sociale. Que ce soit l’empire ottoman et son déclin génocidaire, l’Allemagne nazie, le Japon de Meiji et Hiro-Hito, l’Italie de Mussolini ou l’Ukraine d’aujourd’hui, tous ces pays se signalaient par de profondes divisions historiques, qu’il s’agissait de colmater en unissant les populations contre un ennemi extérieur inventé. Les sociétés ne pouvant survivre sans lien social, quand il est rompu, des mécanismes artificiels tels qu’une haine contre un « autre » censément responsable de tous les malheurs du monde viennent rétablir un semblant de cohésion, mais il y a un prix : la paranoïa. Les pays qui en méprisent ou attaquent d’autres sans raison valable se retrouvent tous, par retour de bâton psychologique, dans une peur permanente d’être eux-mêmes les cibles d’attaques irraisonnées. En conséquence, ils deviennent encore plus haineux, donc encore plus paranoïaques, etc, un cycle qui conduit à encore plus de guerres, à des génocides et au bout, à l’autodestruction.
    C’est, à mon sens, la raison de la paranoïa des USA, un des seuls pays à ne jamais avoir été envahi et qui, pourtant, voit le monde quasi-exclusivement en termes de « menaces » : des divisions sociales irréductibles qu’ils cherchent à résoudre par une succession de croquemitaines extérieurs fabriqués de toutes pièces, avec le corollaire habituel de cette démarche, la paranoïa. Nombre de sociologues américains eux-même expliquent que la Guerre froide, c-a-d « l’ennemi communiste », structurait les USA en lui donnant une identité. Pas d’ennemi, pas d’identité américaine. Le néant.
    La peur collective de la fragmentation et du vide engendrent toutes sortes de réponses psychologiques aberrantes, dont des haines irrationnelles.
    C’est la raison pour laquelle, à mon sens, il est très, très malavisé de diviser l’opinion.

      +11

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  • naz // 21.01.2016 à 12h38

    J’espère que l’auteur a lu Reich, et particulièrement son  » Meurtre du Christ » où tout est dit!
    La sorcière aurait dû répondre: je suis moi, et je suis libre. Mettant ainsi son persécuteur dans l’obligation de voir la prison dans laquelle sa cuirasse l’enferme. Car la sorcière n’est qu’une femme libre, en relation, en osmose avec le Grand Tout.
    Quant aux Romanichels, aux Camps-volants, aux Intouchables, il s’agit bien là d’une liberté nomade ou celle des affranchis des interdits. Ramasser des bouses pour faire du combustible n’est  » sale » que parce « qu’ils » l’ont décrété!!

      +4

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  • lon // 21.01.2016 à 13h24

    « ….Projet ambitieux, d’autant qu’il part d’un constat paradoxal, qui permet de comprendre le titre de l’ouvrage: c’est que la haine est «sans raison» (cf. p.29):
    «Comme l’angoisse ou l’amour, la haine est sans pourquoi.»…. »

    A mon très humble avis, on peut se passer de lire le reste de l’article après une telle profession de foi . Ou comment nier les relations du petit moi au monde sous l’affirmation du Moi avec un grand M .

    Mais tout ceci rentre bien dans l’ambiance de l’époque , où une caste culturelle socialiste a décidé d’ériger toutes les formes de haine avec un petit h en une entité surhumaine avec un grand H , responsable de tous nos maux, dans le but sous-jacent au projet européen de créer un homme nouveau et rationnel, aux affections légères et aux passions discrètes .

      +4

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  • Astatruc // 21.01.2016 à 15h14

    La haine serait peut-être une des réponses à la terreur.

    Pas une terreur d’être bombardé mais une terreur indicible, qui s’insinue, qui tel un serpent, se faufile, se loge dans une case du cerveau, vous empêche de bien dormir, vous déstabilise, vous use et finit pas vous nuire.
    « En somme, la terreur peut être considérée comme un phénomène psychosocial, dont la spécificité serait le blocage devant un danger important, menaçant ou un individu, ou une collectivité humaine »

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Terreur

    « Le mot terreur, dans le sens de peur collective qu’on fait régner dans une population pour briser sa résistance ; régime politique fondé sur cette peur, sur l’emploi des mesures d’exception, apparaît en 1789. « 

      +1

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  • christian gedeon // 21.01.2016 à 16h05

    Bon… on n’a pas aimé mon commentaire moqueur. Pas assez intello sans doute.Je pense être parmi tous ceux qui ont écrit sur ce forum le seul à avoir vu la haine de très près, avec toute sa violence,toute sa laideur,et toute son …odeur,parce que figurez vous qu’un être humain déchiqueté par des schrapnels ou pratiquement coupé en deux par une rafale,c’est sale et çà pue! J’ai donc été modéré parce que j’ai ramené la dimension de la haine et des violences qu’elle engendre à un plat de lentilles,celui de Caïn et celui d’Abel.Evidemment,çà ne fait pas bien sérieux par rapport à l’avalanche de connaissances philosophiques ici assenées, et je reconnais que çà peut paraître indigent, quasiment. Quels que soient les agents de « fermentation  » de la haine (prêtres,dirigeants et autres),la haine préexiste à tout çà…Elle EST,tout simplement. C’est pourquoi j’avais écrit que la haine est un plat de lentilles…M. le modérateur,sous la moquerie,il y avait une pensée…

      +6

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  • Anas // 21.01.2016 à 16h08

    “L’ignorance mène à la peur, la peur mène à la haine et la haine conduit à la violence. Voilà l’équation.” [Averroès]

      +3

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  • Carabistouille // 21.01.2016 à 19h05

    Il y a une part de l’argumentation de l’auteur que je comprends mal.
    Quand il parle de la dislocation de la souveraineté française au XVIe siècle pour expliquer la haine de la sorcière.
    Aux XVIe siècle, on a brulé beaucoup plus de sorcières chez les Flamands, Allemands(empire) et autres Suisses qu’en France. Par ailleurs, on a trucidé plus de sorcières chez les protestants que chez les catholiques.
    Gillian explique que la généralisation des procès en sorcellerie, loin d’être le fruit d’une quelconque haine populaire, était l’organisation de la reprise en main phallocratique de la société après un XVe siècle, qui, par ses calamités, avait donné beaucoup de pouvoir aux femmes.
    Il est normal qu’un pouvoir se serve de la haine, Orwell l’explique très bien avec la minute de la haine dont on peut voir un avatar à chaque fois qu’un organe de presse occidental parle de Poutine.
    C’est normal puisque la haine est l’envie viscérale, pavlovienne de détruire ce qu’on considère comme nuisible pour son intérêt vital. Et la notion du sacré fait partie de l’intérêt vital. Or les populations cherchent les chefs à même d’écarter, si possible définitivement , ce qui peut nuire à leur intérêt vital.
    Maintenant, un pouvoir peut effectivement créer un ennemi vital de toute pièce. Comme le franc maçon, cher à l’extrême droite, l’irakien et ses armes de destructions massives imaginaires qui a quand même réussi à se faire haïr par 60% d’américains dégénérés. Ou encore le Milosevic ou le Kadhafi prétendument génocidaires qu’on a réussi à faire haïr par 60% de Français.
    Il y a une différence entre instrumentaliser une haine latente et en construire une de toute pièce

      +8

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  • Fred // 21.01.2016 à 19h14

    Comment gérer les pulsions destructrices présentes chez l’homme?
    Freud répondait par la civilisation, c’est à dire par l’éducation et par le politique. A cet égard, toutes les sociétés ne se valent pas, loin de là.
    Or les deux connaissent une grave crise et nous avons tous le sentiment plus ou moins confus de vivre un recul de la civilisation. Les institutions politiques et l’éducation du monde néolibérale favorisent les forces de déliaison et s’attaquent au symbolique à travers les valeurs qu’il promeut.
    Ce sont ces mêmes forces dia-boliques qu’il faut combattre sans trêve et sans répit pour remettre du sens et du lien et promouvoir le sym-bolique. Il nous faut changer nos valeurs et préserver celles qui sont saines.

      +3

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  • georges glise // 21.01.2016 à 21h30

    la haine n’a pas besoin de raison, elle n’a pas de rapport avec la construction du Moi. elle est d’ordre viscéral, c’est-à-dire de l’ordre de la pulsion; elle apparaît lorsque le sujet a le sentiment que l’autre est dans la transgression des valeurs fondamentales qui en principe cimentent le corps social, surtout quand cette transgression débouche sur une injustice permanente et violente. avec hollande, j’en suis au stade de la détestation, avec sarko j’en étais au stade de la haine. si j’étais palestinien, je hairais certainement netanahyu. la haine que les syndicalistes de goodyear récemment condamnés ont pu éprouver pour leur ancien patron était une réponse à l’extrême violence sociale que celui-ci a exercée.alors l’analyse psychanalytique que propose ce texte me semble faite pour les bisounours.

      +2

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  • Subotai // 21.01.2016 à 23h18

    «Comme l’angoisse ou l’amour, la haine est sans pourquoi.»
    **********
    Des conneries.
    Seul l’amour est « sans pourquoi ».
    Et encore ce « sans pourquoi » n’est juste que par rapport à la raison.
    Si on se rapporte à la génétique, le pourquoi de vient évident. Émotion favorisant la perpétuation de l’espèce.
    L’angoisse est d’abord relative à un sentiment d’insécurité donc de peur, sans que la justification soit obligatoirement perceptible par le sujet ou les témoins.
    Je dis bien sentiment, donc personnel, intime et non perceptible par autrui. Ce que perçoit l’autre sont les réactions conséquentes du sujet à ce sentiment.
    La haine est d’abord la radicalisation extrême d’une détestation raisonnée. Elle peut ensuite se transmettre et s’enseigner sans que la raison de la détestation existe encore.
    Donc, il y a toujours un pourquoi.

      +2

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  • nobody // 22.01.2016 à 01h03

    «Comme l’angoisse ou l’amour, la haine est sans pourquoi.»

    1. L’angoisse et la peur sont provoquées par des situation non maîtrisées par le Moi.
    2. L’amour est le produit de la valorisation du Moi.
    3. La haine est produite par ce qui empêche la valorisation/préservation du Moi.

    Exemple pour le cas des sorcières: des calamités naturelles provoquent l’angoisse des populations, elles mettent en péril les « Moi-s » de la communauté, situation qui produit ensuite de la haine à l’encontre des responsables supposées ou désignées (la peur ne conduit pas nécessairement à la haine).

      +0

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  • Vincent // 22.01.2016 à 03h25

    La haine relève pour moi d’un instinct de survie, de colère, de réaction rétroactive à la peur; on est touché au fond de soi et on réagit.

    Maintenant la notion de fiction est tellement forte chez l’homme; qu’à partir d’histoire ou de faits éloignés, des hommes inventent des choses imaginaires en total décalage avec la réalité.

    Souvent la haine est le fait d’ignorance et de manque d’ouverture d’esprit.

    Je ne sais pas s’il faut chercher très loin dans la psychologie et écrire une thèse de 1000 pages.

    Par ailleurs nous vivons dans un monde où les mots sont manipulés par des gens mal intentionnés de sorte à prendre des proportions irrationnelles et à opposer les peuples entre eux.

    Le sujet qui m’intrigue le plus c’est la difficulté de pénétration de certaines cultures comme l' »arabe », « indienne », « Balkan », « russe » dans la culture française.

    Le riz cantonné, les mangas de Dorothée, coca cola, la capuera, le zouk, la paella, la rougaille ; ça va.
    Le couscous par contre on le digère pas pareil. Faut dire que la femme française symbole de l’élégance est à l’opposée de l’image renvoyée par l’islam.

    Il y a des images d’épinal indélébiles difficile pour certaines cultures.

      +0

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  • AlainCo (@alain_co) // 22.01.2016 à 17h27

    Bon, je lance une bombe, avec ce post de laurent berthod sur le besoind e bouc émissaire.
    Pour lui le bouc émissaire renforce le lien social et chaque idéologie le plus souvent en trouve un , parfois une myriade ce qui facilite le travail.

    http://laurent.berthod.over-blog.fr/article-on-a-toujours-besoin-d-un-bouc-emissaire-64575709.html

    vous n’aimerez pas la fin.

    vous connaissez l’amée des 12 singes…
    un bouc émissaire ca fini normallement par un génocide.
    Indonésie 1695, shoah, 12singes, rwanda, …

    bonne lecture.

    ma peur des fascistes est très sérieuse car daech et Lepen ne sont rien face a ceux qui ont la science, les média, le business, la presse, la morale et désormais pas mal de religions.

    tremblez, et pas pour ce pour quoi tout le monde tremble, mais pour ceux qui désignent les boucs émissaires, que nous appelons tous des coupables avce l’impression de découvrir une conspiration, que l’on nous as pourtant souflé a coup de propagande et de faux scoop.

      +0

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    • Subotai // 23.01.2016 à 17h36

      Le « Bouc Emissaire » est un classique des sociétés humaines.
      C’est le fond des religions mésopotamiennes et donc aussi celui du christianisme.
      Votre lien oublie la quintessence du Bouc émissaire: le Christ
      Rappelé à chaque messe : sacrifice humain suivi de cannibalisme rituel.

        +0

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  • pentha rhei // 22.01.2016 à 20h01

    Ce site est très soucieux de vérité et d’information de première main…sauf quand il s’agit de philosophie. Voir la béatitude récente concernant Onfray et maintenant un livre que deux ou trois propositions de l’Ethique de Spinoza ou quatre aphorismes de Nietzsche rendent inutile et incertain. Faut-il rappeler que l’Amérique a été découverte ? Et les portes ouvertes enfoncées ?

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  • Christophe // 22.01.2016 à 20h24

    Et comme le dit si bien maître yoda à propos de la peur :

    https://www.youtube.com/watch?v=bYyQdQOLXnA

    version anglaise :

    https://www.youtube.com/watch?v=kFnFr-DOPf8

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  • Bobforrester // 24.01.2016 à 21h20

    la haine se nourrit de la concurrence aux deux visages : économique et sexuelle issue des rapports sociaux.
    Elle trouve un de ses déterminants ds la vengeance aveugle à l encontre de l humanité qui ne l a pas protégé d un individu maltraité ds sa famille .
    L intensité de la haine est fonction du niveau de l instinct de meurtre qui nous reste de l animal après sa répression sociale.

      +0

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