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10.octobre.201810.10.2018 // Les Crises

Les ingrédients d’une récession et crise financière d’ici 2020. Par Nouriel Roubini & Brunello Rosa

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Source :Project Syndicate, Nouriel Roubini & Brunello Rosa, 13-09-2018

NEW YORK – Dix ans après l’effondrement de Lehman Brothers, des interrogations demeurent autour des causes et conséquences de la crise financière, de même que la question de savoir si les leçons qu’il faudra appliquer face à la prochaine crise ont été intégrées. Mais dans une perspective d’avenir, la question la plus pertinente consiste à déterminer ce qui provoquera la récession et la crise mondiale de demain, ainsi que le moment de leur survenance.

L’actuelle expansion mondiale devrait se poursuivre l’année prochaine, dans la mesure où les États-Unis enregistrent d’importants déficits budgétaires, où la Chine applique des politiques budgétaires et de crédit assouplies, et où l’Europe reste sur une trajectoire de reprise. Seulement voilà, d’ici 2020, les conditions tendront vers une crise financière, suivie d’une récession mondiale.

Dix raisons expliquent cela. Premièrement, les politiques de relance budgétaire qui poussent actuellement la croissance annuelle américaine au-dessus de son potentiel de 2 % ne sont pas tenables. D’ici 2020, la relance se sera épuisée, et un freinage fiscal modéré réduira la croissance de 3 % jusque légèrement en dessous de 2 %.

Deuxièmement, le timing de cette relance ayant été inadapté, l’économie américaine connaît actuellement une surchauffe, et l’inflation s’élève au-dessus de la cible. La Réserve fédérale des États-Unis devrait ainsi continuer d’augmenter le taux cible des fonds fédéraux, l’amenant de son niveau actuel de 2 % à 3,5 % au moins d’ici 2020, ce qui élèvera probablement les taux d’intérêts à court et long terme, ainsi que le dollar américain.

Dans le même temps, l’inflation augmente également au sein d’autres économies majeures, tandis que le prix du pétrole contribue à des pressions inflationnistes supplémentaires. Cela signifie que les autres grandes banques centrales suivront la Fed sur la voie d’une normalisation de la politique monétaire, ce qui réduira la liquidité mondiale tout en exerçant une pression à la hausse sur les taux d’intérêt.

Troisièmement, les tensions commerciales opposant l’administration Trump, à la Chine, à l’Europe, au Mexique, au Canada et à d’autres sont vouées à l’escalade, engendrant une croissance plus lente et une inflation plus élevée.

Quatrièmement, les autres politiques américaines continueront d’alimenter une pression stagflationniste, ce qui conduira la Fed à rehausser encore davantage les taux d’intérêt. L’administration restreint actuellement les investissements entrants/sortants et les transferts technologiques, ce qui perturbera les chaînes d’approvisionnement. Elle limite également le nombre d’immigrants nécessaire pour maintenir la croissance à l’heure du vieillissement de la population américaine. Elle décourage par ailleurs les investissements dans l’économie verte. Enfin, elle ne dispose d’aucune politique infrastructurelle susceptible de remédier aux goulets d’étranglement du côté de l’offre.

Cinquièmement, la croissance dans le reste du monde devrait elle aussi ralentir – d’autant plus que les autres pays jugeront bon de riposter contre le protectionnisme américain. La Chine est contrainte de réduire sa croissance pour gérer son excès de capacité et d’endettement, sans quoi interviendra un atterrissage brutal. Enfin, les marchés émergents d’ores et déjà fragilisés continueront de subir les effets du protectionnisme et des conditions monétaires resserrées aux États-Unis.

Sixièmement, l’Europe connaîtra elle aussi une croissance plus lente, en raison d’un resserrement monétaire et de frictions commerciales. Par ailleurs, les politiques populistes appliquées dans des pays comme l’Italie risquent d’engendrer une dynamique de dette intenable au sein de la zone euro. Le cercle vicieux encore non résolu entre les États et les banques détenant de la dette publique amplifieront les problèmes existentiels caractéristiques d’une union monétaire incomplète, appliquant un partage inadéquat des risques. Dans ces conditions, une nouvelle récession mondiale pourrait conduire l’Italie et d’autres pays à .

Septième point, les marchés boursiers américain et mondial sont en effervescence. Les ratios cours/bénéfice aux États-Unis sont supérieurs de 50 % à leur moyenne historique, les valorisations de capitaux privés sont devenues excessives, et les obligations d’État trop coûteuses compte tenu de leur faible rendement et de leurs primes de terme négatives. Le crédit à haut rendement devient également de plus en plus coûteux, à l’heure où le taux d’endettement des entreprises américaines atteint des sommets historiques.

Par ailleurs, l’endettement sur de nombreux marchés émergents et dans certaines économies développées se révèle clairement excessif. L’immobilier commercial et résidentiel est beaucoup trop coûteux dans de nombreuses régions du monde. La correction des marchés émergents en termes de titres, de matières premières et de détention de revenus fixes se poursuivra à mesure que s’épaissiront les nuages d’une tempête planétaire. Enfin, les investisseurs d’avenir commençant à anticiper un ralentissement de croissance d’ici 2020, les marchés refixeront le prix des actifs d’ici 2019.

Huitième explication, une fois cette correction amorcée, le risque d’illiquidité, de ventes en catastrophe et de sous-évaluations se fera plus sérieux. Les activités de tenue de marché et de gestion de portefeuille des courtiers-négociants sont limitées. L’excès d’opérations algorithmiques et à haute fréquence augmenteront la probabilité de « krachs éclairs ». Par ailleurs, les instruments à revenu fixe sont devenus plus concentrés en fonds ouverts cotés en bourse et en fonds de crédit dédiés.

En cas de marché baissier, les secteurs des marchés émergents et des économies développées présentant d’importants passifs libellés en dollar n’auront plus accès à la Fed en tant que prêteur de dernier recours. Avec la hausse de l’inflation et la normalisation des politiques, il ne faudra plus compter sur le filet de sécurité qu’ont assuré les banques centrales dans les années d’après-crise.

Neuvième aspect, Trump attaquait déjà la Fed lorsque le taux de croissance s’est récemment élevé à 4 %. Imaginez son comportement dans le cadre des élections de 2020, lorsque la croissance aura probablement chuté en dessous de 1 %, et lorsque les pertes d’emploi surviendront. Pour Trump, la tentation de « » en fomentant une crise de politique étrangère sera forte, notamment si les Démocrates récupèrent la Chambre des représentants cette année.

Trump ayant d’ores et déjà lancé une guerre commerciale contre la Chine, et n’osant guère s’attaquer à une Corée du Nord nucléairement armée, sa cible idéale pourrait être l’Iran. En provoquant une confrontation militaire avec Téhéran, il créerait un choc géopolitique stagflationniste comparable aux pics pétroliers de 1973, 1979 et 1990. Il va sans dire que ceci rendrait la prochaine récession mondiale encore plus sévère.

Enfin, une fois apparue la tempête évoquée, les outils politiques susceptibles d’y remédier manqueront cruellement. La marge de relance budgétaire est d’ores et déjà réduite par une dette publique massive. La possibilité de nouvelles politiques monétaires non conventionnelles sera limitée par des bilans hypertrophiés, et par un manque de capacité à réduire les taux directeurs. Par ailleurs, les sauvetages dans le secteur financier seront intolérables pour des pays marqués par la résurgence de mouvements populistes, et dirigés par des gouvernements quasi-insolvables.

Aux États-Unis en particulier, le législateur a limité la capacité de la Fed à fournir de la liquidité aux institutions financières non bancaires et étrangères présentant des passifs libellés en dollar. En Europe, la montée des partis populistes complique l’adoption de réformes au niveau de l’UE, ainsi que la création des institutions nécessaires pour combattre la prochaine crise financière et récession.

À la différence de 2008, époque à laquelle les gouvernements disposaient des outils politiques permettant d’empêcher une chute libre, les dirigeants politiques qui affronteront la prochaine récession auront les mains liées, sachant par ailleurs que les niveaux globaux de dette sont supérieurs à ceux d’avant-crise. Lorsqu’elles surviendront, la crise et la récession de demain pourraient se révéler encore plus sévères et prolongées que celles d’hier.

Traduit de l’anglais par Martin Morel

Source :Project Syndicate, Nouriel Roubini & Brunello Rosa, 13-09-2018

Nous vous proposons cet article afin d'élargir votre champ de réflexion. Cela ne signifie pas forcément que nous approuvions la vision développée ici. Dans tous les cas, notre responsabilité s'arrête aux propos que nous reportons ici. [Lire plus]Nous ne sommes nullement engagés par les propos que l'auteur aurait pu tenir par ailleurs - et encore moins par ceux qu'il pourrait tenir dans le futur. Merci cependant de nous signaler par le formulaire de contact toute information concernant l'auteur qui pourrait nuire à sa réputation. 

Commentaire recommandé

BOURDEAUX // 10.10.2018 à 12h26

C’est amusant de voir que presque tous les commentaires convergent vers une sentence que je partage : la prédiction de l’effondrement du bouzin est devenue oiseuse. Pourquoi oiseuse ? Parce que ce genre d’analyse n’a de sens que dans une économie où les règles sont respectées, les faillites sont déclarées, les banqueroutes reconnues et où les dettes insoutenables mettent des créanciers sur le carreaux. Or, notre économie est devenue une table de poker menteur où tous les joueurs trichent, mentent, changent les règles en cours de partie, et où ceux qui ont perdu continuent de jouer avec de fausses cartes pour « se refaire ». Allez donc deviner, dans ce contexte, quand s’arrêtera la partie…

36 réactions et commentaires

  • Rond // 10.10.2018 à 08h21

    Ça tient la route mais est-ce LE scénario qui se déroulera? Tant de facteurs volatiles entrent en jeu.
    « Lorsqu’elles surviendront, la crise et la récession de demain pourraient se révéler encore plus sévères et prolongées que celles d’hier. » Et celle d’aujourd’hui plus qu’hier, donc … Alors pourquoi attendre ?
    Nous sommes sur le grand plongeoir dont la hauteur croit exponentiellement et à l’inverse pour la hauteur d’eau . Le bon sens nous dirait de sauter à quel moment ? Puisqu’au final, nous sauterons …

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    • calal // 10.10.2018 à 08h49

      nous ne sauterons pas.Nous serons pousses au moment opportun.
      Il se peut que ce moment soit arrive, pour influer sur les midterms et handicaper trump.Peut etre a t il deja gagner assez d’influence pour contrebalancer ce risque.

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    • marc // 10.10.2018 à 09h08

      on en a eu à la pelle des scénarios qui tiennent la route…
      mon sentiment est que « le système occidental dominant » a encore de nombreuses cordes à son arc pour tenir son rôle de leader bien plus longtemps que 2020
      la crise économique grave inévitable tôt ou tard, je pense qu’il la déclenchera artificiellement en fonction de l’évolution de l’opinion publique, à un moment où il sera sûr qu’elle réagira en lui donnant carte blanche…

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  • la vieille gauloise // 10.10.2018 à 08h44

    Marre de ces histoires de crise ! Qui ne sont déclenchées en temps voulu que par l’ oligarchie financière elle même, et qui en feront du profit également….

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  • Duracuir // 10.10.2018 à 09h00

    Le problème des vrais crises, c’est que personne ne les attend, sauf quelques charlatans qui s’inventent des prévisions à postériori plus vaseuses les unes que les autres une fois lues dans le texte.
    29, 73, 87, 98, 2000, 2008, 2010, absolument personnes ne les a vu venir.
    Par contre, aucune, AUCUNE de celle qui était prévue n’est intervenue.
    Evidemment, vous avez toujours les mêmes charlatans qui pendant dix, vingt ans, parcourent le net en frappant sur leur gong et en annonçant la fin du monde économique et là, ça doit bien arriver un jour.
    La seule chose qu’on sait c’est que:
    -il est absolument impossible qu’un crise majeur n’interviennent pas dans le futur(comme il y en a eu des milliers dans le passé)
    -il est certains qu’elle arrivera par un produit et d’un lieu où personne ne l’attendra.

    Maintenant, il n’y a plus qu’à s’assoir sur le bord de la rivière et d’annoncer sentencieusement que « La Grande Criiiiise » arrive pour avoir raison un jour ou l’autre.

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    • Fabrice // 10.10.2018 à 12h31

      Ah non renseignez vous ce n’est pas que personne n’avait prévu la crise de 2008 mais que personne n’ecoutait les bonnes personnes de mémoire en France Emmanuel Todd, Charles Gave, Olivier Delamarche, Jacques Sapir,… (à contrôler mais Todd à coup sûr mais n’est pas coutume )

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      • jdautz // 10.10.2018 à 16h05

        Tout a fait d’accord. Par exemple pour la « bulle internet », on vous expliquait que la « nouvelle économie » ouvre des territoires infinis et n’a plus rien a voir avec l’ancien monde : ça met la puce a l’oreille.

        Lorsque l’on répliquait que la cavalerie n’est pas « nouvelle », loin de là, et réprouvée par toutes les lois et règlements pour de bonnes raison quand bien même elle est pratiqué a une échelle planétaire par des organismes censés la combattre, on vous accusait d’être un homme des cavernes trop frustre pour comprendre quoique ce soit.

        Quand on continuait en disant que a petite ou grande échelle, ça finit toujours par se casser la gueule quand il n’y a plus assez de matière a escroquer a la base, on coupait court a la conversation en vous traitant de crétin incompétent et autres nom d’oiseau, incapable de comprendre quoique ce soit à l’économie.

        Et je ne suis qu’un simple citoyen sans aucune source d’information privilégiée, ni aucune formation en économie. La bulle n’est pas que économique, elle est aussi dans les têtes qui la perdent en enflant, et aussi chez les escrocs qui la manipulent. « Les marchés » ce n’est pas de l’économie, c’est un grand casino virtuel accaparé par la Mafia.

        Si on mettait en prison les escrocs, on résoudrait pas mal de problème, [modéré]

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        • Patrick // 10.10.2018 à 20h04

           » Par exemple pour la “bulle internet”, on vous expliquait que la “nouvelle économie” ouvre des territoires infinis  »
          C’était un moment fabuleux !! à l’époque je vendais de l’infrastructure aux boites internet .. j’étais effaré par leur gestion et leurs « business plan » , mais je ne disais rien , pas question de passer pour un vieux c.. et de faire fuir le client 🙂
          Mais quand même , je savais bien que la vieille comptabilité ( recettes/dépenses ) finirait par s’imposer à la « nouvelle économie ».

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          • BOURDEAUX // 10.10.2018 à 21h33

            Je ne serais d’ailleurs pas étonné que cette bonne vieille compta n’attrape bientôt aux cheveux la farandole de start’up dont les gérants ont très excessivement valorisé l’optimisme de leurs ambitions. Qu’il leur suffise de prononcer les sésames « numérique », ou « block Chain » pour lever des dizaines de millions devrait sans doute finir par susciter la perplexité.

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          • François // 11.10.2018 à 03h17

            Je confirme le moment fabuleux !
            En 99 j’étais le webmaster d’un des premiers sites d’e-commerce en France (un des rares qui a survécu jusqu’à aujourd’hui).
            Presque tous les jeudis, il y avait une grande soirée organisée à tour de rôle par des « start-up innovantes » fêtant leur dernière levée de fond, ou des sommes indécentes étaient claquées pour épater « le milieu » dont j’avais la chance de faire partie de par mon job.
            Ça donné des entrées ou l’on était accueilli par une haie d’honneur de très belles filles à demi nue, cocktail à volonté bien sûr et des nouvelles propositions pour changer de boîte à chaque soirée sur le ton « on vous paie vraiment mal la ou vous êtes venez me voir vous gagnerez le double ».
            J’aurais peut être gagner le double certes, mais pas longtemps car je ne peux pas citer le nom d’une seule de ses start-up innovantes qui a survécu à la crise de 2000.

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      • Julien // 11.10.2018 à 00h01

        N’oubliez pas Paul Jorion également qui est l’un des plus lucide…

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      • MARCO POLO // 11.10.2018 à 07h23

        Et vous oubliez surtout Mr Paul Jorion , ethnologue , qui a écrit un livre sur la crise probable des subprimes en 2007 , quelques mois avant que celle-ci n’arrive …. car ce monsieur travaillait alors au sein de la finance aux USA dans le secteur du prêt hypothécaire !

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  • DocteurGrodois // 10.10.2018 à 09h14

    Je vais faire un peu de voyance de comptoir.

    Une enquête Gallup de Septembre indique que seulement 12% des Américains citent l’économie comme souci principal, ce qui est un record absolu. Beaucoup de journaux US (surtout conservateurs) l’ont citée pour se féliciter du retour des jours heureux.

    Je suis donc allé à la source pour voir de quand datent les records précédents: 13% en 1999 (juste avant l’explosion de la bulle dotcom), 16% en 2007 (juste avant l’explosion de la bulle des subprime), et 12% en 2018…

    Personnellement je parie sur l’explosion de la « buy-back bubble », et c’est le tweet d’Elon Musk qui m’a mis la puce à l’oreille. Pas ceux où il traitait un secouriste de pédophile, mais celui ou il prétendait pouvoir racheter les actions Tesla à $420. 2008 nous aura appris les termes « subprime », « CDO », et « Ponzi », 2019 sera l’année des « buy-back », « short-sell », et « pump and dump ».

    Source: https://news.gallup.com/poll/242189/record-low-cite-economic-issues-top-problem.aspx?g_source=link_NEWSV9&g_medium=LEAD&g_campaign=item_&g_content=Record-Low%252012%2525%2520Cite%2520Economic%2520Issues%2520as%2520Top%2520U.S.%2520Problem

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  • Greg // 10.10.2018 à 09h17

    Roubini ne ressert que des platitudes dont statistiquement l’une ou l’autre sera vérifié. La vraie question est de savoir si le prochain prochain retournement conjoncturel va se transformer en crise systémique. C’est bien le dollar, l’euro et toutes les monnaies qui risquent de vaciller à la prochaine

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    • Frexit // 10.10.2018 à 12h09

      Comme on ne change rien ou peu de choses au système bancaire et financier, les mêmes causes produisant les mêmes effets, il est certain que dans les prochaines années il y aura une crise, comme il y en a eu dans le passé.
      Pourquoi ces grands économistes, au lieu de jouer les Cassandre, ne proposent-ils pas un AUTRE système bancaire, comme l’avait fait Maurice Allais en son temps? Eux seuls ont la carrure et surtout, le poids et la notoriété pour convaincre le monde financier qu’on ne peut pas continuer comme ça et vivre en permanence avec une épée de Damoclès sur la tête? Craignent-ils de s’attaquer à ce monde là?
      En outre, il y a le problème spécifique de l’euro. Peu de monde, à part l’UPR, attire l’attention du grand public sur les soldes Target2. Les plus grands économistes allemands, dont ceux de l’institut IFO, appellent à une « collatéralisation » des créances Target2, ce qui signifierait la fin de l’euro en tant que monnaie « unique ». Contrairement à ce que l’on croit et à ce qu’on nous dit, les allemands commencent à penser, même dans l’entourage de Mme Merkel, que l’euro présente pour eux plus d’inconvénients que d’avantages. Leur solde TARGET2 avoisine les 1 000 milliards d’euros, créance dont ils ne verront jamais le remboursement et qui se traduira par une perte supportée par les Banques Centrales de la zone euro. Alors pourquoi n’en parlent-t-ils pas? En revanche, ils tirent à boulet rouge sur les « populistes », ce qui est beaucoup plus facile et sans risques pour leurs carrières.

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      • V_Parlier // 10.10.2018 à 17h28

        En effet, j’ai remarqué le passage sur les « populistes », encore une fois responsables de ce qu’on fait leurs détracteurs.
        Pour ce qui est d’une meilleure méthode en général, je crois que de toute façon il est trop tard.

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      • Pinouille // 10.10.2018 à 21h19

        Tout à fait d’accord avec vous pour Target2. Je m’étonne que personne n’en parle dans les MSM. En fait, je ne m’en étonne plus…

        Pourquoi personne ne propose un autre système bancaire? quelques propositions de réponse:
        Ca plairait moyennement aux banquiers en place.
        La finance génère une partie importante du PIB avec la fausse promesse que les risques sont maîtrisés. Aucun politique ne la sacrifiera/réformera en profondeur. Et toute réglementation « excessive » pénaliserait le pays qui a besoin de croissance pour rembourser (les intérêts de) sa dette.
        Le développement de la blockchain va certainement bouleverser le secteur bancaire (pour ne citer que lui) dans des proportions difficilement prévisibles actuellement.

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      • Patrick // 11.10.2018 à 07h49

        Le Target2 est très pratique , il permet de remplacer les vrais paiements par des écritures comptables.
        ça permet à ceux qui ne pourront jamais payer de continuer à acheter aux Allemands qui font crédit à tout le monde.
        Bon d’accord , les Allemands sont en train de se dire qu’ils ne verront jamais la couleur de leurs 1000 milliards d’euros , particulièrement les 490 milliards des Italiens 🙂

        Quand tu dois 1000.000 euros à ton banquier tu as un problème.
        Quand tu dois 1000 milliards d’euros à ton banquier, c’est ton banquier qui a un problème.

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  • Theoltd // 10.10.2018 à 09h31

    Les grandes crises ont pour but de décrocher les pays dont on souhaite se séparer, dans le peloton de la croissance.
    Qu’une grande crise se prepare (pas toute seule évidemment), est evident. Car avec le mur des ressources qui se rapproche, et un Baril de pétrole deja a 85, le peloton ne peut pas être très fourni. Il faut donc au fur et a mesure que la pente augmente, porter des attaques opportunes, afin que les derniers en course puissent continuer le plus longtemps possible a avancer.
    Les crises permettent en autres de rendre au Dollar sa valeur refuge, d’attaquer les monnaies émergentes, et d’augmenter la dette qui devient insupportable pour de nombreux pays sauf pour l’Amérique, puisque c’ est le monde entier qui porte la sienne. Et de faire redescendre le prix du Baril, en raison de la chute la demande. C’est a mon avis le but principal recherché. Cela permet d’empêcher un transfert des richesses des pays consommateurs (qui contrôlent la finance) vers les pays exportateurs de pétrole.

      +8

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    • Pinouille // 10.10.2018 à 10h35

      Cette manière de considérer la crise à venir comme l’aboutissement d’une volonté de l’ombre est originale.
      Personnellement, j’ai plutôt tendance à croire que ceux qui sont aux commandes d’un bateau qui prend l’eau de toutes parts n’ont plus aucune autre marge de liberté que la dette (et dernière trouvaille: le protectionnisme) pour continuer à gratter un peu de temps avant le dur retour à la réalité.
      Le dollar comme valeur refuge risque tout de même d’en prendre un coup. L’Asie s’y prépare.

        +7

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      • Theoltd // 10.10.2018 à 12h01

        Chacun a sa manière de voir le monde. La mienne s’efforce de coller aux faits, et non pas a des croyances ou a des illusions. Les crises arrivent quand le baril est cher, est par exemple une affirmation qui colle bien a la réalité. Si la crise précédente est arrivée avec un Baril au plus haut, alors en toute logique, et sans vouloir predire l’avenir ce qui est impossible, on peut penser que lorsque le Baril sera haut, il y aura une nouvelle crise.
        A chaque nouvelle crise, le dollar retrouve son statut de valeur refuge. C’est également un fait. Lors de la dernière crise notable, le dollar est passé de 1,6 a 1, 2 euros. Penser que le dollar peut perdre son statut, est pour l’instant une croyance, et sans doute une illusion. cela arivera peut être, mais ce n’est pas dans les faits. Aujourd’hui, le dollar est a 1,15, et le cours dessine un énorme ETE (figure financière pour les initiés) pour l’euro, ce qui laisse a penser qu’une forte chute de l’euro est possible. Donc, contrairement a ce qu’espèrent beaucoup, le dollar est plutôt en position de se renforcer.

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        • Pinouille // 10.10.2018 à 14h39

          Chacun est en effet libre de choisir ses représentations. Mais vous affirmez vous efforcer de coller aux faits. Or, aucun fait ne prouve que les crises sont voulues et déclenchées par certains. Cela ne veut pas dire que c’est faux, mais que vous vous situez, vous aussi, dans la croyance.

          L’angle de lecture « cours du baril » peut avoir sa pertinence, mais il en existe d’autres.
          Par exemple:
          La corrélation entre la masse monétaire et la survenance de crises
          La corrélation entre les courbes de taux et la survenance de crises
          ou les 10 critères de l’article ci-dessus.
          En l’occurrence, certains (plusieurs) paramètres macroéconomiques ont tendance à montrer que la prochaine crise est pour bientôt alors que le cours du pétrole est moitié moindre qu’au moment de l’éclatement de la dernière crise en 2007-2008.
          Cela ne prouve rien, mais cela peut éclairer certains dans leurs choix individuels.

          En ce qui concerne le dollar comme valeur refuge, voici un article qui pourrait en éclairer certains:http://institutdeslibertes.org/guerre-commerciale-chine-etats-unis/

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      • Patrick // 11.10.2018 à 07h53

        Les mini-crises peuvent peut-être être l’aboutissement d’une volonté.
        Mais la situation actuelle est clairement hors de contrôle , plus personne ne sait quoi faire.
        Il n’y a pas de stratégie derrière même si il est évident que certains s’en sortiront moins mal que d’autres parce qu’ils ont plus d’informations pour se préparer.

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  • Le Belge // 10.10.2018 à 10h20

    A force d’avoir octroyé des exemptions fiscales aux plus riches, à force de faire de l’austérité (bloquant de ce fait les possibilités d’investissement des états), à force d’idolâtrer le dividende maximum aux actionnaires (bloquant de ce simple fait les capacités d’investissements dans la R&D des entreprises), à force d’avoir laisser la bride sur le cou aux Etats-Unis concernant leur endettement abyssal, à force d’avoir voulu en dépit du bon sens « construire » une monnaie unique qui ne fonctionnera jamais, à force de ……………………..
    A force d’avoir laisser faire tout, n’importe quoi et son contraire, on en arrive à des situations que nous vivons actuellement. La crise de 2007-2008 n’était qu’un avertissement. La prochaine est en approche et sera beaucoup plus violente.
    Tout était dit dans votre article d’hier concernant le regretté Maurice Alais (s’il eut été belge, le Roi l’aurait anobli). Tout.
    L’Europe connait un taux de chômage effrayant, la transition écologique tarde à se faire entièrement et d’autres défis tambourinent à nos portes mais rien n’y fait : on supporte la médiocratie européiste-otanesque sans broncher (mais peut être plus pour très longtemps si la crise à venir se révèle violente).
    Bonne journée à toutes et tous.

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  • Kokoba // 10.10.2018 à 11h23

    Je ne suis pas vraiment convaincu par l’article et ses 10 points.
    C’est juste une liste sans interet genre « l’inflation va augmenter » ou « la croissance va baisser ».

    Qu’il y ait une crise en préparation, c’est évident mais c’est un peu comme annoncer qu’il va pleuvoir.
    Bien sur qu’il va pleuvoir un jour mais ce qui nous intéresse, c’est où et quand (et accessoirement pourquoi pour une crise économique).

    On sait bien sur qu’il y a des déséquilibres insoutenables (les banques centrales qui impriment de la monnaie par centaines de milliards). Mais on ne sait pas encore comment cela génèrera la crise ni quand.

    Pour l’instant, je n’ai pas réussi à trouver quiconque capable de faire un scénario à peu prés crédible.

      +6

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  • Le Rouméliote // 10.10.2018 à 12h14

    « En Europe, la montée des partis populistes complique l’adoption de réformes au niveau de l’UE, ainsi que la création des institutions nécessaires pour combattre la prochaine crise financière et récession. » Le seul hic est que les partis populistes sont la conséquence des politiques menées dans la zone euro depuis le début et qu’elles démontrent que la zone euro est non réformable, car la ZMO ne peut pas être acceptée par l’Allemagne. Point barre.

      +10

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  • BOURDEAUX // 10.10.2018 à 12h26

    C’est amusant de voir que presque tous les commentaires convergent vers une sentence que je partage : la prédiction de l’effondrement du bouzin est devenue oiseuse. Pourquoi oiseuse ? Parce que ce genre d’analyse n’a de sens que dans une économie où les règles sont respectées, les faillites sont déclarées, les banqueroutes reconnues et où les dettes insoutenables mettent des créanciers sur le carreaux. Or, notre économie est devenue une table de poker menteur où tous les joueurs trichent, mentent, changent les règles en cours de partie, et où ceux qui ont perdu continuent de jouer avec de fausses cartes pour « se refaire ». Allez donc deviner, dans ce contexte, quand s’arrêtera la partie…

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    • Kiwixar // 11.10.2018 à 03h40

      La partie s’arrêtera quand les fournisseurs de joules (hydrocarbures) ne voudront plus être payés en 0 et 1 imprimables à volonté (dollars) mais voudront être payés en quelque chose qui ne se crée pas à partir d’air fin. Cf la Russie qui vend son gaz à la Chine en yuans convertible immédiatement en or à Shanghai. Cf la zone OCS qui met en place une zone dédollarisée. Les appels du pied, patients, de la Russie envers l’Arabie Saoudite. L’impuissance US en Syrie.

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      • Suzanne // 11.10.2018 à 11h11

        « A partir d’air fin ». A partir de rien. Cessons d’intégrer la langue du colonisateur.

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  • christian gedeon // 10.10.2018 à 12h53

    ce genre d’article me fait hurler…çà suffit avec ces histoires à dormir debout de « crises « . On nous prend vraiment pour des demeurés. Il n’y a pas plus de Crises que de viande dans la bouche d’un vegan. La « crise  » est inhérente au système ultralibéral et financiarisé. Sa doxa et sa respiration. C’est du bourrage de crâne,et rien d’autre. une autre couche de peur s sur la peur.Un moyen comme un autre de continuer à concentrer pouvoir et richesse,et de continuer à détruire les structures étatiques et sociales.La « crise  » est une agression voulue et planifiée. Oh pour faire joli,quelques « gros  » mordent le tapis. tapis abondamment pourvu d’amortisseurs comme pour les ex Lehmann Bros.Quand je pense aux cons auxquels on vend des obligations en masse en ce moment…et qui achètent en plus,conseillés par les « gestionnaires de patrimoine  » je suis partagé entre l’envie de rire et celle de dire,c’est bien fait pour votre gueule…parce que quand les taux vont remonter,et ils vont remonter brutalement,ils n’auront plus que leurs yeux pour pleurer.

      +9

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  • LBSSO // 10.10.2018 à 13h16

    « Les ingrédients d’une récession » et Paul Bocuse

    En plus de 100 lignes, réussir à expliquer brillamment pour quelles raisons la prochaine crise sera financière sans en rechercher les raisons sous-jacentes (inégalités,écologie,…) c’est comme si Bocuse préparait sa recette de bœuf bourguignon en oubliant comme ingrédient le vin.

    Par ses limites et par l’absurde, cet article démontre que les solutions ne peuvent se cantonner aux techniques monétaires ou financières.

      +4

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    • Pinouille // 10.10.2018 à 16h07

      « sans en rechercher les raisons sous-jacentes »
      Elles ont été abordées dans l’article sur Maurice Allais.
      Au final, on a deux articles assez complémentaires: pourquoi et comment.

        +4

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      • LBSSO // 10.10.2018 à 19h59

        @Pinouille vous avez raison et loin de moi (s’il m’en était permis) de penser que cet article est inutile et qu’il ne méritait pas une publication ici. Opinion sincère, je puis vous l’assurer.

        Mais il ne m’était pas possible de ne pas le mettre en perspective avec d’autres approches économiques d’autant qu’il est  » brillant  » et donc intellectuellement séduisant.
        Il ne m’a pas échappé que les articles sur le site étaient parfois (assez souvent en fait) à lire en miroir .Dans le cas qui nous occupe ,à un jour d’intervalle.
        Il est très amusant de le faire également à plusieurs mois d’intervalle . Aussi, les lecteurs de l’article de L Dauré sur le cinéma américain récemment publié peuvent (re) lire cette publication des Crises ,… en miroir également avec celui de P Conesa:
        https://www.les-crises.fr/un-film-a-voir-captain-fantastic/
        😉
        et si ils ont davantage de temps:
        https://www.telerama.fr/cinema/l-amerique-sous-le-feu-des-critiques-a-deauville,147103.php

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  • Pollix // 10.10.2018 à 23h49

    Après la mesurette « Moscovici » pour honorer le discours du Bourget de François Hollande contre l’ennemi financier, ce qui a bien fait rigoler les banquiers, il faut descendre de sa tour d’où on ne voit rien venir pour analyser les indicateurs qui parlent d’eux mêmes…
    https://www.dailymotion.com/video/x9qd8g
    ce sont les courbes appliquées à 2008, les actuelles sont pires, et il n’y aura plus le filet de l’état…
    [modéré]

      +2

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  • Tardieu // 11.10.2018 à 08h18

    L’homme est mortel. Je suis un homme. Conclusion je suis mortel.
    Quelle belle preuve de lucidité, de perspicacité, quelle envolée intellectuelle !

      +1

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  • Didier // 19.10.2018 à 22h17

    Il faut surveiller le cours du pétrole. Quand la croissance devient intenable, le cours s’envole, avec des conséquences sur l’inflation, les coûts de secteurs critiques comme le transport, les taux d’intérêt. De nombreuses activités cessent d’être rentables et la demande diminue. C’est la récession. Ensuite, le cours redescend. Quand les acteurs économiques refont leurs calculs, ils ont l’impression que de nombreuses activités sont rentables. Cela redémarre (mais pas pour tout le monde)…

    Vu l’évolution de la production de pétrole et des matières premières, il y a trop de « pays riches » dans le monde. Il faut ruiner une bonne partie des pays européens et asiatiques pour sauver l’Amérique et quelques alliés choisis.

    C’est beaucoup plus difficile de savoir les (gros) détails de la crise : qui craque en premier (les prêts étudiants américains ? la Chine ? l’Europe ?) mais quand on n’est pas riche, cela n’a pas grande importance, on n’en profitera pas et on paiera dans tous les cas.

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