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15.juin.202015.6.2020 // Les Crises

Mythes, Silence et Propagande : pourquoi les armes nucléaires continuent d’exister

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Source : Let’s Try Democracy, David Swanson
Traduit par les lecteurs des Crises

Importante archive d’août 2019 dans la suite de notre série « Nucléaire / Armements stratégiques ».

Il y a 74 ans cette semaine, les villes d’Hiroshima et de Nagasaki étaient chacune frappée par une bombe atomique d’une puissance comprise entre le tiers et la moitié de ce que la NPR appelle arme à faible rendement ou arme « utilisable ». Par NPR, je veux à la fois parler de la Nuclear Posture Review [Doctrine en matière nucléaire, NdT] et de la National Public Radio [Radio Publique Nationale – USA], c’est-à-dire à la fois des autorités américaines et de ce que nombre de citoyens considèrent – c’est dangereux – comme un média libre. Aujourd’hui, ces têtes nucléaires soi-disant utilisables sont conçues pour être lancées depuis des sous-marins situés à deux pas d’ici.

Elles sont deux à trois fois plus puissantes que celles qui ont détruit Hiroshima et Nagasaki, et la stratégie de l’armée américaine consiste à en utiliser plusieurs à la fois. Ces armes sont une part infime de ce que les États-Unis, entre autres nations, tiennent prêt, pour le cas où nous nous retrouverions dans un scénario malheureux nous amenant à voir dans l’anéantissement total de différentes espèces dont la nôtre la plus rationnelle des décisions. Certaines armes nucléaires américaines sont 1000 fois plus puissantes que celles qui ont servi à atomiser les populations japonaises. Chaque sous-marin peut lancer 5000 fois ce qui a été largué sur Hiroshima.

On a prétendu que les sous-marins étaient destinés à une soi-disant dissuasion. Mais les équiper de bombes nucléaires dites petites et qualifier celles-ci « d’utilisables » signifie abandonner le prétexte de la dissuasion tomber dans la démence d’un échange de bombes susceptibles de tuer jusqu’au dernier d’entre nous, sur le coup ou à la suite d’un hiver nucléaire.

J’ai l’air de plaisanter ou de me gausser quand je prétends que le gouvernement américain pourrait décider que l’apocalypse est la plus rationnelle des lignes de conduite, mais dans la partie des États-Unis où je vis, il y a, sous des collines, d’énormes bunkers conçus par d’anciens nazis, pour que différentes agences du gouvernement puissent s’y réfugier afin de vivre un tout petit peu plus longtemps que nous autres ; atteindre ces bunkers prendrait des heures même en évitant la circulation aux heures de pointe. Cela veut dire qu’une décision de nous tuer tous devrait être prise et planifiée, mais non mise en œuvre avant le long trajet vers les bunkers. Tout cela fait partie de la stratégie consistant à frapper en premier.

Et, bien sûr, le président des États-Unis a tweeté des menaces nucléaires contre d’autres pays, ce que les présidents américains précédents n’avaient jamais fait. Ils ont tous proféré leurs menaces nucléaires sans l’aide de Twitter.

Lorsque les États-Unis ont lâché les bombes nucléaires sur le Japon, une multitude de gens ont littéralement été vaporisés, comme de l’eau sur une poêle brûlante. Ils ont laissé sur le sol ce qu’on appelle des ombres qui, pour certaines, sont encore là aujourd’hui. Mais tous ne sont pas morts sur le coup. Certains ont marché ou rampé. Certains ont pu atteindre les hôpitaux, d’autres ont pu y entendre leurs os apparents claquer sur le sol comme des talons hauts.

A l’hôpital, les asticots grouillaient dans leurs plaies, leur nez et leurs oreilles. Les asticots mangeaient de l’intérieur les patients encore vivants. Les morts produisaient un bruit métallique quand ils étaient jetés dans les poubelles et les camions à ordures, tandis que parfois, tout près, leurs jeunes enfants pleuraient et les appelaient en gémissant. Une pluie noire est tombée pendant des jours, averse de mort et d’horreur. Ceux qui ont bu de l’eau sont morts sur-le-champ.

Ceux qui avaient soif n’osaient plus boire. Ceux qui n’ont pas été atteints par la maladie ont parfois développé des tâches rouges et sont morts si vite qu’on pouvait voir la mort s’infiltrer en eux. Les survivants vivaient dans la terreur. Les morts étaient empilés en des montagnes d’ossements aujourd’hui considérées comme de belles collines verdoyantes et d’où l’odeur a finalement disparu.

Certains de ceux qui étaient capables de marcher ne pouvaient s’empêcher de gémir et de tendre les bras devant eux, la peau et la chair pendantes. Pour notre société trop divertie et pas assez éduquée, cette image semble sortie des films de zombies. Mais en vérité il se peut que ce soit l’inverse. Certains critiques estiment que les films sur les zombies et autres humains non-humains sont un moyen pour échapper à la culpabilité, voire même à la reconnaissance des meurtres de masse dans la vie réelle.

Concernant les meurtres de masse commis en temps de guerre, le score des armes nucléaires est des plus modestes, probablement inférieur à celui du nombre des décès causés par la production et les essais de ces armes, les déchets et les bombes à uranium appauvri. Hiroshima et Nagasaki ont été choisies pour démontrer la puissance des bombes atomiques, parce qu’aucun haut fonctionnaire de Washington n’y était jamais allé et n’avait trouvé l’endroit charmant – c’est ce qui a sauvé Kyoto – et parce que ces deux villes n’avaient pas encore été dévastées par les bombardements comme par exemple Tokyo. Les bombardements de Tokyo sont tout aussi atroces que les explosions atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki. Les bombardements ultérieurs en Corée, au Vietnam et en Irak, entre autres, ont été bien pires.

En ce qui concerne les massacres de masse à venir, dont les opérations en cours font courir le risque, seul l’effondrement climatique et environnemental auquel le militarisme contribue de façon décisive peut rivaliser avec les armes nucléaires. Vu le temps qu’il a fallu aux américains pour commencer à accepter l’idée du génocide des nations autochtones et des horreurs de l’esclavage, on peut estimer qu’il faudra attendre autour de 2090 pour que soient regardées en face les destructions de Hiroshima et Nagasaki.

J’entends par regarder en face non pas une absence de leur apologie par le président Obama, mais une importance accordée dans nos écoles et dans notre vie citoyenne à la responsabilité d’avoir créé les clés de l’apocalypse et à l’adoption de mesures concrètes pour faire amende honorable. Mais en 2090, il sera trop tard.

Les gens ne semblent pas prendre l’effondrement climatique suffisamment au sérieux pour contraindre leurs gouvernements corrompus à agir tant que cela ne les affecte pas dans leur quotidien, mais alors il sera probablement trop tard. Au sujet des armes nucléaires, si la population ne réagit pas avant d’avoir fait l’expérience de leur emploi, il sera trop tard pour de bon. Une arme nucléaire n’est pas comme l’art ou la pornographie, ces choses qu’on ne peut appréhender que de visu : vous la voyez et terminé, vous n’êtes plus en mesure d’appréhender quoi que ce soit.

Quand bien même elles verraient la bombe, ça ne suffirait pas pour certaines personnes. La Suède a récemment refusé d’interdire les armes nucléaires au prétexte que le traité ne le prévoit pas. Sérieusement, la Suède, pensez-vous que si une arme nucléaire était lancée sur Stockholm, il y aurait un débat sur la question de savoir si oui ou non c’était bien une arme nucléaire ?

Des observateurs intelligents – peut-être un peu trop intelligents pour leur propre bien – mettent en doute la sincérité de la justification avancée par la Suède. Selon eux, la Suède n’ayant pas d’armes nucléaires, elle est tenue par ceux qui en ont – quand bien même des dizaines d’autres pays ont refusé de lui emboîter le pas et ont signé un traité visant à interdire les armes nucléaires. En fait, [la position suédoise] revient à faire passer pour rationnel ce qui est de l’ordre de la démence.

C’est une faute assez évidente pour autant qu’on cesse de considérer nos gouvernements comme représentatifs. Si vous organisiez un référendum public en Suède, je pense que le camp de l’interdiction des armes nucléaires compterait dans ses rangs une nation de plus. Il est vrai que nous avons à faire face à une population favorable aux armes nucléaires, mais son importance varie d’un pays à l’autre.

Pour autant, que ce soit dans les pays nucléarisés ou non, la grande majorité de la population exprime dans les sondages, y compris aux États-Unis, une opinion favorable à un accord négocié d’élimination de toutes les armes nucléaires. Cependant, nous nous heurtons aussi à un gouvernement corrompu. La conjonction de ces deux problèmatiques se retrouve dans la corruption de notre système médiatique.

Je pense que nous sommes confrontés à des mythes qu’il nous faut déconstruire, à un silence qu’il nous faut briser et à une propagande à laquelle il nous faut résister et que nous devons remplacer. Commençons par les mythes.

LES MYTHES

On nous dit que la guerre est une chose naturelle, normale, en quelle sorte inhérente à notre nature. On nous le dit et nous le croyons, même en sachant très bien que la plupart d’entre nous n’ont rien à voir directement avec la guerre. L’armée américaine a du mal à recruter et s’inquiète de ce que seul un faible pourcentage d’enfants ont des membres de leur famille qui ont servi dans l’armée. Pourtant, si vous faites partie de cette minorité qui servi dans l’armée, vous êtes statistiquement plus enclin à souffrir de culpabilité morale ou de stress post-traumatique, à vous suicider ou à prendre une arme pour tirer dans la foule.

Comment ce à quoi la plupart des gens échappent, et dont souffrent la plupart de ceux qui n’y ont pas échappé, peut-il être présenté comme naturel et inévitable ? Eh bien, à force de rabâchages à n’en plus finir de la part des autorités, des médias, et de l’industrie des loisirs. Avez-vous déjà navigué sur Netflix pour essayer de trouver un film sans violence ? C’est certes faisable, mais si le monde réel ressemblait à celui de nos divertissements, nous aurions tous été tués des milliers de fois.

Lorsqu’on ne nous dit pas que la guerre est inévitable, on nous dit qu’elle est indispensable, qu’il est nécessaire pour les États-Unis de faire la guerre à cause des autres, des gens moins civilisés. Le président Obama a déclaré qu’à cause d’étrangers démoniaques, il ne pourrait pas assister de son vivant à l’élimination des armes nucléaires. Le gouvernement américain pourrait inverser la course aux armements s’il le voulait, mais personne sur terre ne fait autant pour promouvoir la guerre que le gouvernement américain.

Pour justifier de fabriquer toujours plus d’armements, il faut faire comme si la haine et les menaces qui résultent des guerres offensives et d’occupations sans fin n’existaient pas, ou étaient inévitables. S’il le décidait, le gouvernement des États-Unis pourrait rejoindre et soutenir (au lieu de les violer et d’y mettre fin) les traités et tribunaux internationaux relatifs aux droits humains, les accords de désarmement et les procédures d’inspection. Avec une partie du budget qu’il dépense pour se faire haïr, il pourrait fournir au monde nourriture, médicaments et énergie. La guerre est un choix.

Tad Daley a écrit : « Oui, des inspections internationales sur notre territoire porteraient atteinte à notre souveraineté. Mais l’explosion de bombes atomiques chez nous porterait également atteinte à notre souveraineté. La seule question à se poser est de savoir laquelle de ces deux intrusions nous semble la moins insupportable. »

On nous dit que la guerre est nécessaire, mais on nous dit aussi qu’elle est bénéfique. Mais nous n’avons pas encore vu une guerre humanitaire bénéficier à l’humanité. On nous fait miroiter le mythe d’une future guerre humanitaire. Chaque nouvelle guerre va être la première à massacrer un grand nombre de personnes d’une manière bénéfique, qu’elles apprécieront et dont elles seront reconnaissantes. À chaque fois, cela échoue. Et à chaque fois nous reconnaissons que c’est un échec, aussi longtemps que le président du moment appartient au parti auquel nous nous opposons.

On nous dit aussi que la guerre est glorieuse et admirable, et que même ces nombreuses guerres que nous regrettons avoir jamais lancées sont de grands bienfaits dont nous devrions remercier les participants – ou des crimes catastrophiques dont nous devrions néanmoins remercier les participants.

Le plus grand mythe, c’est cependant ce conte merveilleux qui porte le nom de Seconde Guerre mondiale. Du fait de ce mythe, nous sommes censés accepter 75 ans de guerres criminelles désastreuses pour lesquelles nous avons consacré 1250 milliards de dollars, dans l’espoir que l’année prochaine il y aura une nouvelle version de cette Bonne Guerre que fût la Deuxième guerre mondiale [Bonne Guerre fait référence à l’ouvrage La Bonne Guerre – Histoires orales de la Seconde Guerre mondiale Studs Terkel, NdT]. Voici quelques éléments qui sont quelque peu désagréables.

Les sociétés américaines ont commercé avec l’Allemagne nazie et en ont tiré profit tout au long de la Seconde Guerre mondiale, et le gouvernement américain y a peu prêté attention. Pendant des années, dans leur folie, les nazis ont voulu expulser les Juifs, et non les tuer – une autre aberration démente qui est survenue plus tard. Le gouvernement américain a organisé de grandes conférences réunissant les nations du monde entier qui, pour des raisons explicitement et honteusement antisémites, ont publiquement convenu de ne pas accueillir les juifs.

Afin de leur sauver la vie, des militants pacifistes ont supplié les gouvernements américain et britannique pendant toute la durée de la guerre pour qu’ils négocient l’accueil des Juifs et des autres cibles de l’Allemagne nazie et il leur fut répondu que ce n’était pas une priorité. Quelques heures après la fin de la guerre en Europe, Winston Churchill et différents généraux américains ont proposé une guerre contre la Russie en utilisant les troupes allemandes, et la Guerre froide fut commencée en utilisant des scientifiques nazis.

Le gouvernement américain n’a pas été la cible d’une attaque surprise, un mythe qui justifie encore aujourd’hui le secret et la surveillance. Depuis les années 1930, les militants pour la paix manifestaient contre les préparatifs d’une guerre avec le Japon. Le président Franklin Roosevelt s’était engagé auprès de Churchill à provoquer le Japon et il a tout fait pour cela. Il savait que l’attaque de Pearl Harbour et des Phillipines était imminente et avait un projet de déclaration de guerre contre l’Allemagne et le Japon déjà rédigé le soir des attaques.

Auparavant, Roosevelt avait déjà établi des bases aux États-Unis et dans de nombreux océans, notamment en échangeant des armes contre des bases avec les britanniques. Il avait même établi une liste de tous les Américains d’origine japonaise dans le pays, fourni des avions, des instructeurs et des pilotes à la Chine, imposé des sanctions sévères au Japon, et informé les militaires américains qu’une guerre avec le Japon se préparait.

Le mythe de Pearl Harbour tient la culture américaine dans une si mauvaise emprise que Thomas Friedman a qualifié de « Pearl Harbor-scale event » [événement de portée comparable à Pearl Harbor, NdT] l’achat par une société russe d’un tout petit nombre de publicités très étranges sur Facebook, tandis que Morgan Freeman a déclaré dans une vidéo tournée par Rob Reiner « Nous sommes en guerre avec la Russie ! ». Sans doute parlait-il d’une guerre pour protéger le système électoral américain; irréprochable, non truqué, non corrompu et admiré dans le monde entier, du danger que le public apprenne comment la convention du parti Démocrate gère ses primaires.

Les bombes atomiques n’ont pas sauvé des vies. Elles en ont pris, probablement 200 000. Elles n’étaient pas destinées à sauver des vies ou à mettre fin à la guerre, et elle ne l’ont pas fait. C’est l’invasion russe qui a produit ce résultat [l’invasion des territoires occupés par le Japon comme la Mandchourie et la Corée, NdT]. L’Étude américaine des bombardements stratégiques a conclu que « …. le Japon aurait probablement capitulé avant le 31 décembre 1945, et sans aucun doute avant le 1er novembre 1945, même si les bombes atomiques n’avaient pas été larguées, même si la Russie ne s’était pas engagée dans la guerre et même si aucune invasion n’avait été prévue ou envisagée ».

Avant les bombardements, c’est dans les mêmes termes que le général Dwight Eisenhower a exprimé son opposition auprès du Secrétaire d’état à la Guerre. L’amiral William D. Leahy commandant de l’état-major interarmées, en a d’ailleurs convenu : « L’utilisation de cette arme barbare à Hiroshima et Nagasaki n’a concrètement aucunement aidé notre guerre contre le Japon. Les Japonais étaient déjà vaincus et prêts à se rendre ».

Cette opinion était partagée par les amiraux Nimitz et Halsey, les généraux MacArthur, King, Arnold et LeMay, ainsi que le général de brigade Carter Clarke et le sous-secrétaire à la Marine Ralph Bard qui avaient insisté pour que le Japon reçoive un avertissement. Lewis Strauss, conseiller auprès du secrétaire de la Marine, avait quant à lui recommandé la destruction d’une forêt plutôt qu’une ville.

Mais faire sauter des villes, c’était le but ultime, de la même façon que ça l’est aujourd’hui de faire souffrir les petits enfants près de la frontière mexicaine. Les motivations sont autres, mais elles n’enlèvent rien au sadisme. Le 23 juin 1941, Harry Truman s’est adressé au Sénat américain : « Si nous voyons que l’Allemagne est en train de gagner, a-t-il dit, nous devrions aider la Russie, et si la Russie gagne, nous devrions aider l’Allemagne, et par ce moyen les laisser s’entre-tuer le plus possible ».

Voilà ce que le président américain qui a détruit Hiroshima pensait de la valeur des vies humaines européennes. Un sondage de l’armée américaine en 1943 révélait qu’environ la moitié du contingent entier des GI estimait nécessaire de tuer jusqu’au dernier des Japonais. William Halsey, qui commandait les forces navales américaines dans le Pacifique Sud pendant la Seconde Guerre mondiale, voyait sa mission comme « tuer des Japs, tuer des Japs, tuer des Japs, tuer encore plus de Japs » et avait fait le vœu qu’une fois la guerre terminée, on ne parlerait plus japonais qu’en enfer.

Le 6 août 1945, à la radio, le président Truman mentait en disant qu’une bombe atomique avait été larguée sur une base militaire, et non sur une ville. Et il le justifiait, non pour hâter la fin de la guerre, mais comme une vengeance contre les affronts des japonais. « M. Truman jubilait », a écrit Dorothy Day. Quelques semaines avant le largage de la première bombe, le 13 juillet 1945, le Japon avait envoyé un télégramme à l’Union soviétique exprimant son désir de se rendre et de mettre fin à la guerre.

Les États-Unis avaient cassé le code du cryptage japonnais et pu en prendre connaissance. Dans son journal, Truman fait référence au « télégramme demandant la paix de l’empereur jap ». Déjà, trois mois avant Hiroshima, le président Truman avait été informé par les canaux suisse et portugais des démarches de paix entreprises par le Japon. Les seules objections du Japon concernaient sa reddition inconditionnelle et l’abdication de son empereur, mais les États-Unis se sont montrés inflexibles sur ces termes jusqu’aux bombardements, après quoi, ils autorisèrent le Japon à conserver son empereur.

Le conseiller de la présidence, James Byrnes avait dit à Truman que le largage des bombes permettrait aux États-Unis d’« imposer les conditions de l’armistice ». James Forrestal, le secrétaire à la marine a noté dans son journal que Byrnes était « très désireux d’en finir avec l’affaire japonaise avant que les Russes n’interviennent ». Truman a noté dans le sien que les Soviétiques se préparaient à marcher sur le Japon et « alors, finis les Japs ». Et quel désastre cela aurait été !

Pourquoi les États-Unis ont-ils fini par débarquer en France si ce n’est par crainte que les Russes n’arrivent à occuper Berlin tout seuls ? Pourquoi les États-Unis ont-ils largué des bombes atomiques sur le Japon ? Parce qu’ils craignaient que les Russes ne le fassent eux-mêmes et n’obtiennent la reddition du Japon ?

Truman a donné l’ordre de larguer la bombe H le 6 août ,ainsi qu’un autre type de bombe, une bombe au plutonium, dont les militaires voulaient aussi faire l’essai et la démonstration, à Nagasaki le 9 août. Le 9 août également, les Soviétiques ont attaqué les Japonais. Au cours des deux semaines suivantes, les Soviétiques ont tué 84 000 Japonais, et perdu 12 000 de leurs propres soldats et les États-Unis ont continué de bombarder le Japon avec des armes non nucléaires. Puis les Japonais se sont rendus.

Prétendre qu’il y avait des raisons d’utiliser des armes nucléaires relève du mythe. Prétendre qu’il pourrait y avoir à nouveau des raisons d’utiliser des armes nucléaires relève du mythe. Prétendre que nous pourrions survivre à l’utilisation d’armes nucléaires relève du mythe. Quant à affirmer qu’il y a des raisons pour produire et mettre en œuvre des armes nucléaires même si on ne s’en servira jamais, c’est tellement stupide que ça ne relève même pas du mythe. Et il faut être complètement dément pour croire que nous pourrons éternellement survivre en possédant et en multipliant les armes nucléaires, sans qu’un jour quelqu’un ne finisse par en faire usage, intentionnellement ou par accident.

Il y a un autre mythe, celui d’une guerre sans armes nucléaires. Je pense que nous nous plaisons parfois à imaginer que les États-Unis et l’OTAN pourront continuer indéfiniment leurs guerres, avec leurs bases militaires et leurs menaces de coups d’état, tout en interdisant et en éliminant toutes les armes nucléaires de la surface du globe. C’est inenvisageable. On ne peut pas détruire l’Irak et la Libye, et laisser tranquille la puissance nucléaire qu’est la Corée du Nord, chercher à provoquer une guerre contre l’Iran qui n’en est pas une, sans parler de la Syrie, du Yémen, de la Somalie, etc. sans véhiculer un message fort.

Si l’Iran est un jour amené à se doter d’armes nucléaires et que l’Arabie saoudite en est également pourvue, ils n’accepteront de s’en séparer que dans un monde en paix. La Russie et la Chine ne renonceront jamais à leur armement nucléaire tant que les États-Unis n’arrêteront pas leurs menaces de guerre, nucléaire ou autre. Israël n’abandonnera jamais son armement nucléaire à moins qu’il ne soit contraint de respecter les mêmes normes juridiques que les autres nations.

LE SILENCE

Venons-en maintenant au silence. La promotion des mythes se fait principalement en coulisses. Elle se construit dans les romans et les films,dans les livres d’histoire et sur CNN. Mais ce qui prédomine, c’ est le silence. Dans les écoles, on commence à enseigner certaines notions de base sur les écosystèmes, l’effondrement du climat et la soutenabilité. Mais combien de diplômés du secondaire ou de l’université peuvent vous décrire les effets des armes nucléaires, vous dire combien il y en a, qui en possède ou combien de fois elles ont failli tous nous tuer.

Les monuments commémorant l’esclavage et le génocide rejoignent les musées, mais un seul d’entre eux sera-t-il remplacé par une statue de Vassili Arkhipov [officier de la marine soviétique connu pour s’être opposé à l’envoi d’une torpille à tête nucléaire contre un navire américain pendant la crise des missiles de Cuba, évitant probablement au monde une guerre nucléaire NdT] ? J’en doute fortement et j’hésite même à essayer d’imaginer qui Rachel Maddow [présentatrice de MSNBC violemment anti-russe NdT] blâmerait pour un si fâcheux dérapage.

Nous faisons face à deux dangers parallèles, la catastrophe nucléaire et la catastrophe climatique, mais il est plutôt étrange de constater que c’est celui qui requiert de profonds changements dans leur mode de vie que les gens commencent enfin à prendre au sérieux. Personne n’aurait à changer quoi que ce soit dans sa vie si nous nous débarrassions des armes nucléaires. En fait, nous pourrions tous vivre beaucoup mieux dans tous les sens du terme si nous réduisions ou éliminions cette institution qu’est la guerre.

Il est également étrange que nous fassions la distinction entre les deux dangers, alors que le militarisme est une des principales causes de l’effondrement environnemental et qu’il serait aussi une source inestimable de financement pour un New Deal vert dopé aux stéroïdes. Le problème, c’est que cette séparation se fait essentiellement par le silence.

Personne ne parle de la menace nucléaire. Lorsque TheRealNews.com a récemment demandé au Gouverneur Inslee s’il réduirait le militarisme pour protéger le climat, sa réponse longue et alambiquée était bien un Non, mais c’est son impréparation qui était le plus significatif: on ne lui avait jamais posé cette question auparavant et on ne la lui posera probablement jamais plus.

Les directeurs du Bulletin of the Atomic Scientists de l’université de Chicago ont placé l’aiguille de l’horloge de l’Apocalypse plus près de minuit qu’elle ne l’a jamais été. Les hommes politiques à la retraite des partis dominants, disent que nous devons agir de toute urgence. La majorité des nations non nucléarisées du monde proposent une interdiction immédiate des armes nucléaires. Mais c’est encore le silence qui règne. Un silence qui est entretenu par la répugnance à l’égard de ce qui est déplaisant, par le patriotisme machiste et militariste, par les impératifs du profit et par l’absence de leadership, dans les grands partis politiques ou au sein d’une de leurs factions.

En juin, les chefs d’état-major interarmées ont mis en ligne – puis rapidement retiré – un document qui indiquait que « l’utilisation des armes nucléaires pourrait créer les conditions qui permettraient des résultats décisifs et le rétablissement de la stabilité stratégique. . . . Plus précisément, l’utilisation d’une arme nucléaire modifiera fondamentalement le cours d’une bataille et créera des conditions qui auront une incidence sur la façon dont les commandements l’emporteront dans un conflit ». En d’autres termes, les lobotomies sont gérées par les cinglés, mais les médias gardent le silence .

A ce silence vient s’ajouter le manque de prestige, l’idée que les armes nucléaires seraient le pire plan de carrière militaire, un domaine pour ceux qui manquent d’ambition ou même de sang-froid. Voilà qui devrait terrifier le monde bien plus que toute autre forme de terrorisme. La seule fois où le Congrès a tenu récemment des auditions sur le danger d’un désastre planétaire nucléaire fut juste après que Trump ait menacé la Corée du Nord des flammes du feu et de la fureur.

Les membres du Congrès ont convenu dans un consensus bipartite qu’ils étaient impuissants à empêcher un président de lancer une guerre nucléaire. Je ne sais pas si le mot destitution [impeachment en anglais, NdT] a même été prononcé. Et puis le Congrès a repris ses travaux de routine, tout comme les chaînes d’information en continu.

Il est possible que si un président avait, de but en blanc, inventé des armes nucléaires et avait proposé de les utiliser, nous aurions finalement découvert quelque chose que même Nancy Pelosi aurait jugé comme une raison acceptable pour une destitution. Il est certain que si Trump menaçait un journaliste de télévision avec une arme à feu, beaucoup de gens réagiraient d’une manière ou d’une autre. Mais menacer des millions de gens et potentiellement toute l’humanité, eh bien, heu hum. Nous avons à observer le silence, vous savez.

Heureusement, il y a des gens qui brisent le silence. Le Ground Zero Center [centre pour l’action non violente NdT] brise le silence et proteste contre la glorification des armes à la foire maritime de Seattle [Seafair est un festival d’été qui se tient à Seattle, dans l’État de Washington, et regroupe une grande variété de petits événements de quartier menant à plusieurs célébrations majeures dans toute la ville NdT], il fera de même demain matin à la base sous-marine du Trident – suivez votre formation à la non-violence cet après-midi !

En Géorgie, sept activistes de plowshares qui ont manifesté à la base sous-marine de Kings Bay le 4 avril ont comparu devant les tribunaux [le mouvement Ploughshares est un mouvement pacifiste chrétien et anti-nucléaire qui prône la résistance active à la guerre, en particulier en endommageant des armes et des biens militaires NdT]. Le mois dernier, des militants pacifistes du monde entier ont délivré une mise en demeure à la base aérienne de Buchel, en Allemagne, afin que les armes nucléaires y étant illégalement entreposées par les États-Unis soient démantelées comme le prescrit la loi.

Le mois dernier également, la Chambre des Représentants des États-Unis a adopté de nombreux amendements anti-guerre à la loi d’autorisation de Défense nationale, dont deux qui limitent la fabrication d’armes nucléaires, le premier interdisant la violation du Traité FNI [Le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire est un traité visant le démantèlement par les États-Unis et l’URSS d’une catégorie de missiles porteurs de charges nucléaires ou conventionnelles, NdT] et le second qui devrait mettre un terme à la vente d’armes lors de la Foire maritime de Seattle, corollaire de l’interdiction pour Trump de tout nouveau défilé d’armes le 4 juillet.

En outre, des amendements ont été adoptés pour mettre fin à diverses guerres ou en éviter . Pour tous ceux qui pensaient avoir crié dans le désert, voici que la Chambre des Représentants énumère une longue liste de nos revendications. Mais ces demandes doivent maintenant passer devant le Sénat, le Président et les bailleurs de fonds de la campagne électorale. Il vous est facile d’interpeller par courriel votre représentant et votre sénateur à ce sujet à RootsAction.org.

LA PROPAGANDE

Ce n’est pas parce qu’on en parle que c’est positif. Considérons une minute le troisième et dernier problème que j’ai recensé, à savoir la propagande. Voilà des années que l’Iran travaille à la fabrication d’une arme nucléaire. La Russie s’est emparée de la Crimée et a choisi le président des États-Unis. La Corée du Nord représente une menace irrationnelle et imprévisible pour les États-Unis. Les gens respectueux des lois doivent renverser la dictature vénézuélienne et asseoir le président légitime issu d’un coup d’État. Nous avons la responsabilité de poursuivre nos efforts pour faire de l’Afghanistan un enfer parce que les choses pourraient mal tourner si les troupes américaines partaient.

Ce sont vos troupes. C’est votre responsabilité. C’est une occupation étrangère lointaine et défensive, comme on peut le déduire du nom même de l’industrie concernée : l’industrie de la défense. Les États-Unis ne peuvent pas se livrer à l’espionnage ou au terrorisme, seulement au contre-espionnage et au contre-terrorisme – qui sont contre ce qu’ils sont, comme leur nom l’indique. Mais les lanceurs d’alerte américains se livrent à l’espionnage et doivent être jetés en prison pour protéger la liberté de la presse. Personne ne verrait d’inconvénient à ce que des systèmes balistiques de défense soient alignés tout le long des frontières canadiennes et mexicaines – après tout, ils s’agirait de défense.

Mais alors, quel est le problème de la Russie ? Si la Russie continue d’enfreindre les traités d’une manière indéterminée et invérifiable, les États-Unis n’auront d’autre alternative que de continuer à détricoter ces traités dans le propre intérêt de ces traités. Si les États-Unis devaient démanteler leurs armes nucléaires, les Nord-Coréens se cloneraient chacun cinq fois, s’implanteraient ici, occuperaient notre territoire et commenceraient à nous priver de ce qui resterait de nos libertés.

La propagande est l’art de déguiser la paranoïa pour lui faire jouer le rôle d’une conscience vigilante

Selon un sondage récent, un tiers des États-Unis serait favorable à l’atomisation de la Corée du Nord et à la mort d’un million d’innocents – ainsi que probablement de celle d’un nombre incalculable de gens non-innocents. Voilà qui indique le degré extrême d’ignorance des conséquences qu’une telle initiative aurait pour les États-Unis. Elle reflète également la folie sociale générée par une propagande habile.

Pourtant, c’est probablement une avancée par rapport au pourcentage de citoyens américains qui étaient prêts à tuer un million de Japonais pendant la Seconde Guerre mondiale. Et le public américain, dans les sondages, se retourne lentement contre les bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki, ce qui laisse entrevoir la possibilité qu’il pourrait un jour s’opposer à ce que cela se reproduise.

L’éditorial du New York Times du 1er juillet avait pour titre : « L’Iran s’empresse de fabriquer une arme nucléaire – et Trump ne peut y faire obstacle ». Peu importe que Trump ait fait tout ce qui était humainement possible pour que l’Iran construise une arme nucléaire, ce qui se rapproche le plus du titre de l’article est la prédiction spéculative de l’auteur qui affirme que cela « signifie presque certainement qu’il [l’Iran] va s’employer à constituer son propre arsenal nucléaire ».

Si je devais écrire un éditorial spéculant qu’à l’avenir Seattle remplira presque certainement ses rues avec du café et que les gens se déplaceront en gondole, je vous garantis que le New York Times ne produirait pas un titre comme « Seattle s’empresse de construire des canaux de café – et Trump ne peut y faire obstacle ! » Je m’attends plutôt à ce que le titre soit « Un type fait une prévision totalement infondée ».

Les mensonges qu’on nous raconte sur les guerres tiennent souvent de la généralité quand ils ne concernent pas le passé ou encore les guerres de longue durée bien installées. Mais il y a aussi des mensonges utilisés pour déclencher chacune de ces guerres. Ce sont, par nécessité, des mensonges portant sur le caractère d’urgence. Si une guerre n’est pas déclenchée assez vite, il y a un risque que la paix s’impose. Une chose importante à retenir au sujet de ces mensonges est qu’ils répondent toujours à une mauvaise question. L’Irak a-t-il des armes ? Aucune réponse à cette question ne justifie une guerre, légalement, moralement ou autrement.

Une douzaine d’années après cette mascarade, tout le monde à Washington, à l’exception des agences d’espionnage, a convenu à tort que l’Iran avait un programme d’armes nucléaires, et le débat s’est déplacé vers la question d’une guerre ou d’un accord du genre traité. L’Iran a-t-il abattu un drone ou attaqué un navire dans le golfe Persique ? Ce sont là des questions intéressantes, mais sans rapport avec la justification des guerres.

Voici une autre question du même type : Cette guerre a-t-elle été approuvée par le Congrès ? Bien entendu, nous tenons à ce que le Congrès bloque les guerres « présidentielles » chaque fois qu’il le souhaite. Mais s’il vous plaît, s’il vous plaît, je vous en supplie, arrêtez de dire que vous êtes opposés aux guerres non autorisées comme si une guerre autorisée était plus juste, plus légitime ou plus éthique. Imaginez que le Canada écrase Seattle sous un tapis de bombes. Qui se porterait alors volontaire pour éluder la question des bombes et essayer de trouver quelqu’un qui se préoccuperait de savoir qui du premier ministre ou du Parlement était responsable ?

Un des problèmes quand on commence une guerre est qu’elle pourrait dégénérer en guerre nucléaire. Un autre est que toute guerre, une fois commencée, est beaucoup plus difficile à arrêter qu’il ne l’aurait été de la prévenir. C’est une des conséquences de la propagande de soutien aux troupes. Une majorité d’anciens combattants disent que les guerres d’Irak et d’Afghanistan n’auraient jamais dû commencer, comme tout le monde. Et pourtant, certains élus du congrès sont déterminés à continuer les guerres afin de « soutenir les troupes », disent-ils.

La voie à suivre consiste à empêcher les guerres. La guerre contre l’Iran a été évitée à plusieurs reprises, de même que l’escalade en Syrie en 2013.

La prévention des guerres nucléaires est , sans conteste, l’unique voie possible – la seule voie pour rester en vie.

Parce que si nous considérons que toute guerre est susceptible de déboucher sur une guerre nucléaire, alors il nous sera peut-être plus facile de reconnaître que les prétendues raisons avancées pour justifier une guerre ne sont en rien convaincantes. On peut en un sens nous persuader que certains crimes appellent un crime plus grand, mais on ne pourra pas nous persuader qu’ils justifient l’extinction.

En 2000, la CIA a remis à l’Iran les plans (légèrement et manifestement imparfaits) d’un élément clé d’une arme nucléaire. En 2006, James Risen a relaté cette « opération » dans son livre State of War. En 2015, les États-Unis ont poursuivi un ancien agent de la CIA, Jeffrey Sterling, pour avoir censément divulgué l’histoire à Risen. Au cours de la procédure, la CIA a rendu public un câble caviardé qui montrait qu’immédiatement après avoir fait ce cadeau à l’Iran, la CIA avait commencé à faire de même avec l’Irak.

Nous n’avons aucun moyen de connaître la liste complète des pays auxquels le gouvernement américain a remis des plans d’armement nucléaire. Trump transmet maintenant des secrets nucléaires à l’Arabie saoudite en violation du Traité de non-prolifération, de la Loi sur l’énergie atomique, de la volonté du Congrès, du serment de son mandat et du bon sens. Ce comportement est au moins aussi vérifiable que les subventions pour les combustibles fossiles ou le bétail, mais sur quoi s’est portée l’indignation ?

Essentiellement, sur l’assassinat en Arabie saoudite d’un journaliste du Washington Post. Si nous pouvions au moins avoir une politique consistant à ne pas donner d’armes nucléaires aux gouvernements qui tuent des journalistes du Washington Post, ce serait déjà quelque chose.

Dans le même temps, 70 pays ont signé et 23 ont ratifié le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Nous devons continuer d’obtenir l’appui des pays du monde entier y compris des pays dotés d’armes nucléaires. Mais cela ne doit être qu’une partie de nos efforts pour mettre fin à toutes les guerres et pour abolir l’institution de la guerre dans son ensemble. Non par jusqu’au boutisme, mais parce que c’est la seule façon pour nous de réussir.

Un monde sans armes nucléaires, mais conservant le reste de la machine de guerre , n’est tout simplement pas viable. Il y a trois ans Mikhaïl Gorbatchev écrivait que le moment était venu d’éliminer les armes nucléaires, « mais peut-on considérer comme réaliste d’envisager qu’une fois les armes de destruction massive éliminées dans le monde, il reste un pays qui possède plus d’armes classiques que la quasi totalité des autres pays réunis dans le monde ? Et s’il devait avoir une supériorité militaire mondiale absolue ? . . .

Je dirai franchement qu’une telle perspective constituerait un obstacle insurmontable pour débarrasser le monde des armes nucléaires. Si nous n’abordons pas la question de la démilitarisation générale de la politique mondiale, de la réduction des budgets d’armement, de l’arrêt de la fabrication de nouvelles armes, de l’interdiction de la militarisation de l’espace, aucune discussion sur un monde sans armes nucléaires n’aura de chance d’aboutir. »

En d’autres termes, nous devons mettre fin aux massacres absurdes d’êtres humains, indépendamment des armes utilisées, qu’elles soient nucléaires, chimiques, biologiques, conventionnelles ou qu’elles tiennent du soi-disant « soft power » des sanctions et des blocus. La vision que nous avons développée à « World BEYOND War » [World BEYOND War, Le monde au-delà de la guerre, est un mouvement mondial non-violent visant à mettre fin à la guerre et à instaurer une paix juste et durable, NdT], ce n’est pas celle d’une guerre avec des armes convenables, pas plus que nous n’avons une vision d’un viol qui se dirait humanitaire ou d’une maltraitance des enfants qui se dirait philanthropique. Il y a des choses qui ne peuvent pas être réformées et qui doivent être abolies. La guerre en fait partie.

Source : Let’s Try Democracy

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

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12 réactions et commentaires

  • Rémi // 15.06.2020 à 13h48

    L’article contient beaucoup de choses étonnantes:
    Il affirme que le Japon aurait capitulé avant Décembre 1945, mais les plans d’invasion américains démarraient en octobre 1945.
    Ensuite depuis les batailles de Leyte en 1944 le Japon avait perdu la Guerre n’ayant plus de flotte. En 1945 il combattait encore. Rien ne permet d’affirmer que les Japonnais étaient près à capituler.

    Ensuite les tests tactiques ont démontrés dans les années 1950 que les armes atomiques n’apportaient que peu de gain sur le champs de bataille. C’est le projet pentatonique. Même si il y a des armes dites utilisables sur les sous marin, la véritée est que les militaires ont cessé de developper des armes nucléaires tactiques à la fin des années 50 pour ce concentrer sur les armes conventionnelles de précision dont le rendement est bin meilleur. (Retrait de canons atomique, retrait du David Crocket mortier nucléaire…)
    A cet époque les moyens des forces mécanisées ont été adaptés á la menace nucléaire rendant le rendement de ces armes négligeable.
    Alors il reste toujours quelques officiers supérieurs partisant du grand bang et le budget militaire US est suffisement vaste pour que l’on leur fasse plaisir, mais dans la réalité les configurations d’usage d’armes nucléaires sur le champ de bataille ont disparues.

    Enfin, le grand intérêt du nucléaire est qu’il a dissuadé les grandes puissance s de recourir à la force pour régler leurs différents. Il vaut mieux que les armes nucléaires existent malgré les risques que de voir tous les trentes ans une génération décimée dans une guerre mondiale.

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    • fanfan // 15.06.2020 à 15h36

      – Recension d’Hiroshima’s Shadow, Kai Bird et Lawrence Lifschultz, The Pamphleteer’s Press, Stony Creek, Connecticut, 1998, 584 p. (Version courte parue dans Le Monde diplomatique, janvier 1999, p. 31, https://www.monde-diplomatique.fr/1999/01/LACROIX_RIZ/2676)
      – Commentaire de la synthèse de Ward Wilson, « The winning bomb? », International Security, vol. 31, No. 4 (Spring 2007), pp. 162–1792007 (http://belfercenter.ksg.harvard.edu/files/is3104_pp162-179_wilson.pdf http://www.slate.fr/source/105243/ward-hayes-wilson)
      Cette synthèse, nourrie de travaux fondés sur les archives américaines et japonaises, confirme les études antérieures sur le sens de la politique américaine. Elle atteste que la double attaque nucléaire a seulement permis aux États-Unis :
      ‑ de refuser à l’URSS, habilitée en vertu des accords de Yalta à occuper le Japon « dans les trois mois suivant la fin de la guerre [la capitulation allemande] en Europe », « la part décisive » qui lui revenait dans la circonstance. L’auteur, après bien d’autres historiens, rappelle que ni dans ce conflit ni dans tout autre qui suivit (notamment la guerre du Vietnam), les bombardements de terreur, dirigés contre les populations, n’ont été à l’origine de la moindre victoire militaire;
      ‑ de s’imputer l’exclusivité d’une victoire écrasante contre le Japon et d’en guider l’avenir sans que le vainqueur militaire de la Deuxième Guerre mondiale, susceptible d’obtenir dans les meilleurs délais la capitulation japonaise, ait voix au chapitre.
      Cf. http://historiographie.info/warwilson.pdf

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      • Rémi // 16.06.2020 à 11h06

        @fanfan,

        aucune des deux partie n’était claire dans cette histoire.
        Roelvelt voulait l’intervention russe pour faire plier les japonais. Il a payé le prix économique et a accordé aux russes d’importantes concessions pour éviter les pertes de soldats américians.
        Mais les russes ne sont pas intervennus entre Potsdam et Août. Ce n’est qu’après le premier bombardement atomique le 8 Août que les russes passent à l’attaque pour obtenir des concessions alors que hiroschima montre que le Japon va devoir capituler rapidement.
        Il n’y avait aucune autre raison de demander l’intervention russe que de vouloir sacrifier des soldats russes plutot que des soldats américains.

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  • Narm // 15.06.2020 à 14h34

    Remi, j’ai lu au moins deux études qui affirmaient que les japonnais allaient capituler.
    Une bombe, ça pouvait laisser le doute. Mais détruire la deuxième ville démontre la mal honneteté

    sinon, article pour le moins profondément « complotiste »
    sponsorisé par qui ?
    le mythe de Pearl Harbor, il manque la dernière date importante.

    La France ne pourra jamais abandonner l’arme nucléaire. C’est sa seul défense, et encore, peut elle être efficace ?

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    • Rémi // 16.06.2020 à 11h01

      @Narm:
      Vous avez lu des études, moi aussi. La guerre était perdue depuis 1944 et en Août 1945 les Japonais étaient toujours à devoir capituler. Il a fallu les bombardement pour que l’empereur se mette à parler et arbitre en faveur de la Paix. Avant il n’avait rien dit. Même comme cela il y a eu un putsch militaire pour empécher l’appel á la capitulation. Il n’a échoué que parce que les chefs des mutins se sont suicidé pour expier le fait qu’ils avaient du s’opposer à l’empereur.
      Selon toute rationalité les japonais auraient du capituler en 44. Les allemands auraient du capituler après l’échec de Wach am rhein (Offensive des ardennes.) Aucun de ces deux pays ne l’a fait. C’est irrationnel, mais c’est ainsi. Truman devait agir dans le monde réel, pas dans la théorie. Et dans le monde réel terminer la guerre plus tot sauvait la vie d’américains. Je rappelle que la responsabilité d’un président est envers on peuple pas envers les autres. [modéré]

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      • Rémi // 16.06.2020 à 20h05

        J’avais écrit autre chose, j’ai été modéré.
        Je voudrais cependant rappeller même si cela choque:
        Le rôle d’un président est de défendre son pays. On peut trouver cela dommage, mais c’est une réalité.
        Bien évidement il est mieux qu’il parvienne à défendre son pays sans que cela cause de morts et sans recourir à la violence, mais son rôle, non négociable selon moi est que les pertes soient autant que possible du coté adverse si cela doit en arriver là. Il est comptable de la vie de ses concityoens pas de celles de ceux d’en face.
        Rappellez vous se que Patton disait à ses soldats:
        « Votre rôle n’est pas de mourrir pour votre pays mais de faire en sorte que le gars d’en face meure pour le siens. »
        Alors je suis d’accord avec ce que disait Asimov: « La violence est le dernier refuge de limcompétence », mais si cela doit en arriver là, la responsabilité d’un président qui a demandé à conduire son peuple est de protéger son peuple.

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  • Load // 15.06.2020 à 16h33

    La théorie de dissuasion nucléaire MAD (Mutual assured destruction) est censée nous protéger d’un apocalypse nucléaire. Mais sur le papier seulement…
    Il est clair que le réchauffement climatique et l’épuisement des ressources vont amener ce désastre nucléaire.

    Par exemple dans les décennies à venir, à cause du réchauffement climatique, il va y avoir environ 3,5 milliards d’êtres humain qui ne pourrons plus vivre sur leurs terres devenus hostile à la vie : plus de 300 jours par an, le taux d’humidité et la température ne permettrons plus à la transpiration de maintenir les corps à 37°C. D’ailleurs, le Qatar climatise déjà les rues en été…

    Avant que l’on devienne sédentaire, quand le climat changeait, on pouvait toujours suivre le troupeau et aller voir si l’herbe était plus verte ailleurs. Aujourd’hui il y a des frontières et des états.
    Nous sommes engagé dans un processus d’autodestruction et rien ne semble pouvoir faire dévier la trajectoire.

    Si il y a autant de bombe nucléaire en service, c’est bien pour qu’elles servent un jour ou l’autre.

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    • Rémi // 16.06.2020 à 11h00

      @Load,

      ce que je dit est que les bombes servent aujourd’hui même.
      En garantissant l’impossibilité d’une guerre de conquête elles rendent la guerre conventionnelle moins probable. Certe il reste la guerre asymétrique, les conflits basse intensité, mais j’avais vu autrefois une étude dont je n’ai plus la source que le nombre de morts en conflit a notre époque était rapporté á la population le plus bas de l’histoire humaine. C’est cela le gain de la bombe.
      Après la théorie du réchauffement climatique, on la verra lorsque ca sera fait. Vu que jusqu’à présent toutes les catastrophes annoncées par les écolos ne se sont pas réalisée, j’attends de voir. (Oui, vilain je suis climato sceptique vu que l’expérience des données écologistes que je peux vérifier c’est 100% de mensonge ou déclarations frauduleuses)

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  • Rémi // 16.06.2020 à 19h54

    Parce que c’est une conception du rôle d’un président. Si vous ne voulez pas vous salir les mains il ne faut pas exercer la direction d’un pays. un président prête sermentde défendre son pays.

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  • René Fabri // 17.06.2020 à 07h15

    Des armes nucléaires miniatures sont très prometteuses. On en parle très peu.

    Ce sont de nouvelles mines et de nouveaux obus. Ils font plus de dégâts que les armes actuelles.

    Je pense que c’est à cause de la perspective de ces nouvelles armes que les décideurs militaires refusent catégoriquement de mettre fin au nucléaire. Ils savent qu’ils n’utiliseront jamais, heureusement, les missiles nucléaires qui sont de la folie. Mais, ils se préparent à l’emploi du nucléaire pour les petites armes habituelles.

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    • Rémi // 17.06.2020 à 10h03

      Bonjour,

      les armes nucléaires de faibles puissance ont été développées dans les années 50. Ca a été conceptuellement testé.
      La Phrase d’évaluation est: Pour tuer le sniper dans le clocher vous devez raser le village. Les armes nucléaires ont un mauvais rendement tactique.
      Il a donc été préféré d’accelérer les véhicules afin d’avoir des formations plus lâches (Donc une arme touche moins de véhicules), de développer des armes conventionnelles de hautes précision.
      Cela a été fait, le nucléaire tactique est argement mort, les canon nucléaires (Atomic Ann et David Crockett) ont même été retirée des dotations.
      En cas de besoin il existe des armes miniaturisées pour être tirée dans un obus de 155mm (Raison de l’adoption de ce calibre par L’OTAN), mais personne ne pense sérieusement à s’en servir sauf cas ou l’adversaire ferait la faute de concentrer trop de ses forces à un même endroit.

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  • Spiridon // 17.06.2020 à 09h14

    Article intéressant et réaliste. Pourquoi les armes existent-elles? Parceque personne ne s’y oppose sérieusement! Le pire c’est l’attitude des Verts: obsédés par le nucléaire civil qu’ils veulent voir disparaitre au profit d’énergies stupides, ils ne font rien, ne disent rien, ne proposent rien pour la fin des armes nucléaires. Ah il faudrait s’opposer aux puissances. Et à leurs plans, non pas sur les grands pays, mais sur les petits (Syrie, Libye, Soudan). Or là les Verts rejoignent les « humanitaires », ceux qui veulent le bien des peuples contre les peuples…. Donc ils ne chercheront pas le désarmement nucléaire, qui, pour être efficace, doit bien évidemment commencer par les plus gros et non les plus petits. Mais aller faire la leçon aux Américains, c’est aut’chose que d’aller défiler à Fessenheim, où il y a un bon maire souhaitant le développement de sa commune, autrement dit une proie facile!

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