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21.août.202021.8.2020 // Les Crises

WikiLeaks : quand les câbles américains déclenchent le « printemps arabe » et révèlent l’espionnage à l’ONU

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Source : Consortium News, Elizabeth Vos

« Une débâcle politique pour la politique étrangère américaine »

De tous les documents publiés par WikiLeaks, les plus importants au niveau mondial sont probablement le plus d’un quart de million de câbles diplomatiques du Département d’État américain qui ont été divulgués en 2010. Leur publication a contribué à déclencher une révolte en Tunisie qui s’est étendue jusqu’au « printemps arabe », a révélé les intentions saoudiennes envers l’Iran et a mis au jour l’espionnage du secrétaire général de l’ONU et d’autres diplomates.

Ces publications ont été entourées d’une importante controverse (qui fera l’objet d’un autre épisode de cette série), selon laquelle WikiLeaks aurait délibérément mis en danger des informateurs américains en révélant leurs noms. Cette allégation a constitué une part importante de l’accusation portée le 23 mai contre l’éditeur de WikiLeaks, Julian Assange, en vertu de la loi sur l’espionnage, bien que la divulgation des noms des informateurs ne soit pas un crime et qu’il n’y ait aucune preuve que l’un d’entre eux ait jamais été mis en danger.

La publication du « Cablegate » par WikiLeaks, à partir du 28 novembre 2010, a éclipsé les précédentes parutions de WikiLeaks, tant par son ampleur que par son impact. La publication s’élevait à 251 287 câbles diplomatiques américains ayant fait l’objet d’une fuite, que Der Spiegel décrivait, au moment de la publication, comme « rien de moins qu’un effondrement politique pour la politique étrangère des États-Unis ».

Le Cablegate a révélé une histoire jusqu’alors inconnue des relations diplomatiques entre les États-Unis et le reste du monde et, ce faisant, a exposé les positions des États-Unis tant sur leurs alliés que sur leurs adversaires. À la suite de ces révélations, la publication du Cablegate a été largement condamnée par la classe politique américaine et en particulier par la secrétaire d’État de l’époque, Hillary Clinton.

Le compte Twitter Cable Drum l’a appelé,

« … Le plus grand ensemble de documents confidentiels jamais mis dans le domaine public. Ces documents donneront aux gens du monde entier un aperçu sans précédent des activités du gouvernement américain à l’étranger. Les câbles, qui datent de 1966 jusqu’à fin février 2010, contiennent des communications confidentielles entre 274 ambassades dans le monde entier et le Département d’État à Washington DC. 15 652 de ces câbles sont classés Secrets. »

Parmi les documents historiques qui ont été regroupés avec le Cablegate dans la bibliothèque publique de la diplomatie américaine de WikiLeaks figurent 1,7 million de documents concernant Henry Kissinger, conseiller à la sécurité nationale et secrétaire d’État sous le président Richard Nixon, et 1,4 million de documents relatifs à l’administration Jimmy Carter.

Der Spiegel a indiqué que la majorité était « composée d’ambassadeurs, de consuls ou de leur personnel. La plupart contiennent des évaluations de la situation politique dans les différents pays, des protocoles d’entretien et des informations générales sur les décisions et les événements concernant le personnel. Dans de nombreux cas, ils fournissent également des profils politiques et personnels de politiciens et de dirigeants individuels ».

Le Cablegate a complété la production de WikiLeaks en 2010, qui avait vu la publication explosive de fuites précédentes également de l’analyste du renseignement de l’armée Chelsea Manning, notamment « Collateral Murder », les « Afghan War Diaries » et les « Iraq War Logs », le sujet des précédents épisodes de cette série. Comme pour les deux précédents communiqués, WikiLeaks a publié le Cablegate en partenariat avec des médias établis.

Les archives du « Cablegate » ont ensuite été intégrées à la bibliothèque publique de la diplomatie américaine de WikiLeaks, qui contient plus de 10 millions de documents.

L’empire mondial des États-Unis dévoilé

L’impact du « Cablegate » est impossible à évaluer complètement et devrait faire l’objet d’une étude historique pour les décennies à venir. En septembre 2015, Verso a publié « The WikiLeaks Files : The World According to U.S. Empire », avec un avant-propos d’Assange. Il s’agit d’un recueil de chapitres rédigés par divers experts et historiens régionaux donnant une analyse géopolitique plus large et plus approfondie de la politique étrangère américaine telle que révélée par les câbles.

« Les communications internes du Département d’État américain sont le sous-produit logistique de ses activités : leur publication est la vivisection d’un empire vivant, montrant quelle substance a coulé de quel organe d’État et quand. Ce n’est qu’en abordant ce corpus de manière holistique – au-delà de la documentation de chaque abus individuel, de chaque atrocité localisée – que le véritable coût humain de l’empire se révèle », a écrit Assange dans l’avant-propos.

La « révolte de WikiLeaks » en Tunisie

La sortie du « Cablegate » a fourni l’étincelle qui, selon beaucoup, a annoncé le printemps arabe, ce qui a valu à la publication de fin novembre le surnom de « WikiLeaks Winter ».

Finalement, beaucoup attribueraient également à la publication des câbles diplomatiques de WikiLeaks le mérite d’avoir déclenché une réaction en chaîne qui s’est étendue du Moyen-Orient (en particulier de l’Égypte) au mouvement mondial Occupy Wall Street à la fin de 2011.

Le premier des soulèvements arabes a été la révolution dite de jasmin en Tunisie, qui a duré 28 jours, du 17 décembre 2010 au 14 janvier 2011, décrite comme la « première révolution WikiLeaks ».

Les câbles publiés par WikiLeaks ont révélé l’étendue de la corruption de la famille dirigeante tunisienne et étaient largement accessibles en Tunisie grâce à l’avènement de plateformes de médias sociaux comme Twitter. Le président de l’époque, Zine El Abidine Ben Ali, était au pouvoir depuis plus de deux décennies au moment de la publication des câbles.

Un câble du département d’État, intitulé « Secret », disait :

« La famille élargie du président Ben Ali est souvent citée comme étant le nœud de la corruption tunisienne. Souvent qualifiée de quasi-mafia, une mention indirecte de « la famille » suffit pour indiquer de quelle famille il s’agit. Apparemment, la moitié du monde des affaires tunisien peut revendiquer un lien avec Ben Ali par le biais du mariage, et nombre de ces relations auraient tiré le meilleur parti de leur lignée. »

Un câble de juin 2008 disait : « Qu’il s’agisse d’argent, de services, de terres, de biens, ou même de votre yacht, la famille du président [Zine el Abidine] Ben Ali est connue pour le convoiter et apparemment obtient ce qu’elle veut ».

Geste symbolique du majeur représentant la révolution tunisienne et ses influences dans le monde arabe. De gauche à droite, les doigts sont peints comme les drapeaux de la Libye, de l’Égypte, de la Tunisie, du Soudan et de l’Algérie. (Khalid de Doha, CC BY 2.0, Wikimedia Commons)

Les câbles ont révélé que la famille élargie de Ben Ali contrôlait la quasi-totalité de l’économie tunisienne, des banques aux médias en passant par le développement immobilier, alors que 30 % des Tunisiens étaient au chômage. Ils ont montré que la propriété de l’État a été expropriée pour être transmise à des membres de la famille qui en deviennent les propriétaires privés.

« Le laxisme de la surveillance fait du secteur bancaire une excellente cible d’opportunité, avec de multiples histoires de « combine première famille » », a-t-on pu lire sur un câble. « Avec le développement immobilier en plein essor et la hausse des prix des terrains, posséder une propriété ou un terrain au bon endroit peut être une aubaine ou un aller simple vers l’expropriation », a déclaré un autre.

La révolte a été facilitée une fois que les États-Unis ont abandonné Ali. Counterpunch [CounterPunch est un magazine politique de gauche bimensuel. NdT : source Wikipedia], a rapporté que : « La campagne américaine de soutien public inébranlable au président Ali a conduit à une croyance répandue parmi le peuple tunisien qu’il serait très difficile de déloger le régime autocratique du pouvoir. Cette opinion a été brisée lorsque des fuites de câbles ont révélé l’évaluation en privé du gouvernement américain : les États-Unis ne soutiendraient pas le régime en cas de soulèvement populaire. »

L’internet et les grandes plateformes de médias sociaux ont joué un rôle crucial dans la sensibilisation du public tunisien aux câbles et à leur contenu. « Des milliers de vidéos artisanales de la répression policière et de la résistance populaire ont été mises en ligne sur le web. Le peuple tunisien a utilisé Facebook, Twitter et d’autres réseaux sociaux pour organiser et diriger les mobilisations contre le régime », a écrit le site World Socialist Website.

Le magazine Foreign Policy en a fait mention:

« WikiLeaks a agi comme un catalyseur : à la fois un déclencheur et un outil de protestation politique. Ce qui est probablement le meilleur compliment que l’on puisse faire au site de lanceur d’alerte ». Le magazine a ajouté : « Les Tunisiens n’auraient pas dû attendre que Wikileaks apprenne que les États-Unis voient leur pays de la même façon qu’eux. Il est temps que le fossé entre ce que les diplomates américains savent et ce qu’ils disent se réduise. »

Le Guardian a publié en janvier 2011 le témoignage d’un jeune Tunisien, Sami Ben Hassine, qui a écrit : « Internet est bloqué et les pages censurées sont qualifiées de « pages introuvables » – comme si elles n’avaient jamais existé. Et puis, WikiLeaks révèle ce que tout le monde chuchotait. Et puis, un jeune homme [Mohamed Bouazizi] s’immole. Et puis, 20 Tunisiens sont tués en une journée. Et pour la première fois, nous voyons l’opportunité de nous rebeller, de nous venger de la famille « royale » qui a tout pris, de renverser l’ordre établi qui a accompagné notre jeunesse ».

Protestant à Tunis, le 14 janvier 2011, tenant un panneau. Traduction du français : « Ben Ali out ». (Skotch 79, CC0, Wikimedia Commons)

Le premier jour du procès préliminaire de Chelsea Manning en décembre 2011, Daniel Ellsberg a déclaré à Democracy Now :

« La combinaison des révélations de WikiLeaks et de Bradley Manning à Tunis et l’exemple de Mohamed Bouazizi ont conduit aux manifestations, aux manifestations non violentes, qui ont chassé du pouvoir Ben Ali, notre allié, là-bas, que nous avons soutenu jusqu’à ce moment, et ont à leur tour déclenché le soulèvement en Égypte, l’occupation de la place Tahrir, qui a instantanément suscité l’occupation de Wall Street et d’autres au Moyen-Orient et ailleurs. … J’espère que [Manning et Assange] auront pour effet de nous libérer de l’anarchie que nous avons connue et de la corruption – la corruption – que nous avons constatée dans ce pays au cours des dix dernières années et plus, et qui n’a pas été moindre que celle de la Tunisie et de l’Égypte. »

Clinton a demandé à des diplomates américains d’espionner l’ONU

La révélation par câble que le Département d’État américain, sous la direction de la secrétaire d’État de l’époque, Mme Clinton, avait exigé que des fonctionnaires agissent comme espions auprès de fonctionnaires des Nations unies – y compris le Secrétaire général – a été particulièrement embarrassante pour les États-Unis.

El Pais a résumé la bombe : « Le Département d’État a envoyé aux fonctionnaires de 38 ambassades et missions diplomatiques un compte rendu détaillé des informations personnelles et autres qu’ils doivent obtenir sur les Nations Unies, y compris sur son secrétaire général, et en particulier sur les fonctionnaires et représentants liés au Soudan, à l’Afghanistan, à la Somalie, à l’Iran et à la Corée du Nord. »

El Pais a poursuivi : « Plusieurs dépêches, signées Clinton et probablement rédigées par le bureau de la secrétaire d’État, Hillary Clinton, contiennent des instructions précises sur la myriade d’enquêtes à entreprendre dans les zones de conflit, dans le monde des déserteurs et des demandeurs d’asile, dans la machinerie du conflit israélo-palestinien, ou sur le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne, la Russie et la Chine pour connaître leurs plans concernant la menace nucléaire de Téhéran. »

La secrétaire d’État Hillary Rodham Clinton et le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-Moon en 2012. (Foreign and Commonwealth Office/Flickr)

CNN a décrit les informations que les diplomates ont reçu l’ordre de rassembler : « Dans le document de juillet 2009, Mme Clinton demande à ses envoyés aux Nations unies et aux ambassades du monde entier de recueillir des informations allant des données biographiques élémentaires sur les diplomates étrangers aux numéros de leurs cartes de crédit et de voyageur régulier, et même des « informations biométriques sur le classement des diplomates nord-coréens ». Les informations biométriques classiques peuvent inclure les empreintes digitales, les signatures et les données de reconnaissance de l’iris. »

Der Spiegel a rapporté que Clinton a justifié les ordres d’espionnage en soulignant qu’« une grande partie des informations avec lesquelles les agences de renseignement américaines travaillent proviennent des rapports rassemblés par le personnel du Département d’État dans le monde entier ».

Der Spiegel a ajouté : « Le département d’État américain voulait également obtenir des informations sur les plans et les intentions du secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon et de son secrétariat concernant des questions comme l’Iran, conformément à la liste détaillée de souhaits figurant dans la directive. Les instructions ont été envoyées à 30 ambassades américaines dans le monde, dont celle de Berlin. »

Philip J. Crowley, secrétaire d’État adjoint aux affaires publiques en 2010. (Département d’État)

Le département d’État a réagi à ces révélations, le porte-parole du département d’État d’alors, P.J. Crowley, ayant apparemment contesté que les diplomates américains avaient endossé un nouveau rôle à l’étranger.

« Nos diplomates ne sont que cela, des diplomates », a-t-il déclaré. « Ils représentent notre pays dans le monde entier et s’engagent de manière ouverte et transparente auprès des représentants des gouvernements étrangers et de la société civile. Grâce à ce processus, ils recueillent des informations qui façonnent nos politiques et nos actions. C’est ce que les diplomates, de notre pays et d’autres pays, font depuis des centaines d’années. »

En décembre 2010, juste après la publication des câbles, Assange a déclaré au Time : « Elle devrait démissionner s’il peut être démontré qu’elle était responsable d’avoir ordonné à des personnalités diplomatiques américaines de se livrer à l’espionnage aux Nations unies, en violation des pactes internationaux que les États-Unis ont signés. »

Saoudiens et Iran

Un câble diplomatique daté du 20 avril 2008 a clairement indiqué que l’Arabie saoudite faisait pression sur les États-Unis pour qu’ils prennent des mesures contre son ennemi l’Iran, notamment sans exclure une action militaire contre Téhéran :

« [L’ambassadeur saoudien aux États-Unis Abbdel] Al-Jubeir a rappelé les fréquentes exhortations du roi aux Etats-Unis à attaquer l’Iran et ainsi à mettre fin à son programme d’armes nucléaires. « Il vous a dit de couper la tête du serpent », a-t-il rappelé à l’accusation, ajoutant que travailler avec les États-Unis pour faire reculer l’influence iranienne en Irak est une priorité stratégique pour le roi et son gouvernement. 11. (S) Le ministre des affaires étrangères, en revanche, a appelé à des sanctions américaines et internationales beaucoup plus sévères contre l’Iran, notamment une interdiction de voyager et des restrictions supplémentaires sur les prêts bancaires. Le prince Moukrine s’est fait l’écho de ces vues, soulignant que certaines sanctions pourraient être appliquées sans l’approbation des Nations unies. Le ministre des affaires étrangères a également déclaré que l’utilisation de la pression militaire contre l’Iran ne devrait pas être exclue. »

Dyncorp et les « Dancing Boys » d’Afghanistan

Les câbles indiquent que les autorités afghanes ont demandé au gouvernement américain d’étouffer le reportage américain sur un scandale découlant des actions des employés de Dyncorp en Afghanistan en 2009. [DynCorp est une société militaire privée américaine. NdT : source wikipedia]

Les employés de Dyncorp, un groupe paramilitaire ayant un tristement célèbre passé d’implication présumée dans le trafic sexuel et d’autres violations des droits de l’homme dans plusieurs pays, ont été identifiés par Cablegate comme ayant été impliqués dans la consommation de drogues illégales et l’embauche d’un « bacha bazi », ou garçon de danse mineur. [Bacha bāzī est un terme argotique afghan désignant une grande variété d’activités impliquant des relations sexuelles entre des hommes plus âgés et des adolescents ou des enfants. La personne qui pratique cette activité est communément appelée bacha baz ou simplement bach. Cette pratique est liée à l’esclavage sexuel et à la prostitution enfantine. Wikipedia, NdT]

Un câble publié en 2009 par WikiLeaks décrivait un événement où Dyncorp avait acheté les services d’un « bacha bazi ». L’auteur du câble ne précise pas ce qui s’est passé pendant l’événement, le décrivant uniquement comme « un achat de service d’un enfant », et il tente de convaincre un journaliste de ne pas couvrir l’histoire afin de ne pas « risquer des vies ».

Bien que Dyncorp ne soit pas étrangère à la controverse au moment de la publication des câbles, la révélation de l’implication continue de la force mercenaire dans le bacha bazi a suscité d’autres questions sur les raisons pour lesquelles la société continuait à recevoir des contrats financés par les contribuables américains.

Les accusations d’abus sexuels n’étaient pas le seul problème qui hantait Dyncorp. Le Département d’État a admis en 2017 qu’il « ne pouvait pas rendre compte » de plus d’un milliard de dollars versés à la société, comme l’a rapporté Foreign Policy.

Le New York Times a par la suite rapporté que les soldats américains avaient reçu l’ordre de fermer les yeux sur les abus sur mineurs commis par des personnes en position de pouvoir : « Les soldats et les marines ont été de plus en plus troublés par le fait qu’au lieu d’éliminer les pédophiles, l’armée américaine les armait dans certains cas et les plaçait en tant que commandants de villages – et ne faisait pas grand-chose lorsqu’ils commençaient à abuser des enfants ».

L’Australie a menti sur le retrait des troupes

Le Premier ministre australien Kevin Rudd, à gauche, avec le Président américain Barack Obama, dans le Bureau ovale, le 30 novembre 2009, pour discuter d’une série de questions, dont l’Afghanistan et le changement climatique. (Maison Blanche/Pete Souza)

The Green Left a rapporté que les câbles ont révélé le double discours du Premier ministre australien Kevin Rudd sur le retrait des troupes. Malgré les déclarations du gouvernement sur le retrait de toutes les « forces de combat », les câbles disaient que certaines de ces forces pourraient être déployées dans des missions de combat. Un câble disait : « En dépit du retrait des forces de combat, Rudd a accepté de permettre aux forces australiennes intégrées ou détachées dans des unités d’autres pays, y compris des États-Unis, de se déployer en Irak dans des missions de combat et de soutien avec ces unités. »

L’ingérence des États-Unis en Amérique latine

Des câbles ont révélé que les ambassadeurs américains en Equateur s’étaient opposés à la candidature présidentielle de Raphael Correa malgré leur prétention de neutralité, comme l’a observé le Green Left Weekly. [Le Green Left Weekly est un hebdomadaire australien de la gauche radicale. NdT : source wiki]

D’autres câbles ont révélé que le Vatican avait tenté d’accroître son influence en Amérique latine avec l’aide des États-Unis. D’autres câbles ont illustré l’histoire du pape François alors qu’il était cardinal en Argentine, les États-Unis apparaissant comme ayant une vision positive du futur pontife.

Transactions illégales entre les États-Unis et la Suède

Le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, a écrit dans sa déclaration sous serment :

« Par le biais des câbles diplomatiques, j’ai également appris l’existence d’accords secrets et informels entre la Suède et les États-Unis. Les câbles ont révélé que les services de renseignement suédois ont un comportement anarchique en ce qui concerne les intérêts américains. Les câbles diplomatiques américains ont révélé que le ministère suédois de la justice avait délibérément caché au Parlement suédois certains échanges d’informations avec les États-Unis parce que ces échanges étaient vraisemblablement illégaux. »

Réaction militaire

Le 30 novembre 2010, le Département d’État a déclaré qu’il retirerait les câbles diplomatiques de son réseau sécurisé afin d’éviter toute nouvelle fuite. Antiwar.com a ajouté : « Les câbles étaient auparavant accessibles via le SIPRNet, un réseau prétendument sécurisé qui est accessible par des millions de fonctionnaires et de soldats. C’est vraisemblablement par ce réseau que les câbles ont été obtenus et ont fait l’objet de fuites vers WikiLeaks. »

Le Guardian a décrit le SIPRNet comme un « système Internet militaire américain mondial, séparé de l’Internet civil ordinaire et géré par le ministère de la défense à Washington. »

Fureur politique

Le 29 novembre 2010, la secrétaire d’État de l’époque, Hillary Clinton, a parlé de la sortie du « Cablegate » :

« Cette divulgation n’est pas seulement une attaque contre la politique étrangère américaine ; c’est une attaque contre la communauté internationale, les alliances et les partenariats, les conventions et les négociations qui sauvegardent la sécurité mondiale et font progresser la prospérité économique. »

Le lendemain, l’ancien gouverneur de l’Arkansas, Mike Huckabee, a demandé l’exécution de Chelsea Manning, selon Politico.

Certaines personnalités politiques ont exprimé leur soutien à Assange, notamment le leader travailliste britannique Jeremy Corbyn, qui a écrit sur Twitter quelques jours après la publication de Cablegate : « Les États-Unis et d’autres pays n’aiment pas être examinés par le biais de Wikileaks et ils s’appuient sur tout le monde pour clouer Assange au pilori. Qu’est-il arrivé à la liberté d’expression ? »

Parmi les autres révélations notables tirées des câbles diplomatiques, citons les multiples cas d’ingérence des États-Unis en Amérique latine, la demande de la secrétaire d’État de l’époque, Hillary Clinton, pour que le personnel diplomatique agisse comme espion, la documentation concernant les fautes commises par les forces paramilitaires américaines, les retombées de la crise financière de 2008 en Islande, le déploiement d’armement nucléaire en Allemagne et dans d’autres pays européens et le Vatican qui a tenté d’accroître son influence en Amérique latine avec l’aide des États-Unis, le fait que les diplomates américains ont pratiquement espionné la chancelière allemande Angela Merkel, et bien d’autres choses encore.

Der Spiegel a rapporté que Hillary Clinton avait demandé aux diplomates américains d’agir en tant qu’espions :

« Pour justifier les ordres d’espionnage, Clinton a souligné qu’une grande partie des informations avec lesquelles les agences de renseignement américaines travaillent proviennent des rapports rassemblés par le personnel du Département d’État dans le monde entier. Les informations à collecter comprennent des informations personnelles sur les cartes de crédit, et sur leurs numéros client de voyageur régulier, ainsi que les comptes de courrier électronique et de téléphone. Dans de nombreux cas, le département d’État a également demandé des « informations biométriques », des « mots de passe » et des « clés de cryptage personnelles ». »

Der Spiegel a ajouté : « Le département d’État américain voulait également obtenir des informations sur les plans et les intentions du secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon et de son secrétariat concernant des questions comme l’Iran, conformément à la liste détaillée de souhaits figurant dans la directive. Les instructions ont été envoyées à 30 ambassades américaines dans le monde, dont celle de Berlin. »

Elizabeth Vos est journaliste indépendante et co-animatrice de CN Live. [Consortium New live]

Source : Consortium News, Elizabeth Vos, 14-012020

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

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Commentaire recommandé

Jean-Do // 21.08.2020 à 10h42

Bon rappel de l’excellence du travail de WikiLeaks et des raisons que les USA ont de haïr son fondateur-animateur, Julian Assange. Que son saint nom soit béni 😉

Reste que la haine n’est pas une justification juridique pour demander l’extradition d’un journaliste étranger de la part d’un pays tiers. Si cet homme est jamais extradé vers les USA et soumis à ce qu’ils appellent « leur justice », cela signifie que tout journaliste n’importe où dans le monde occidental dépend du « bon vouloir » des autorités américaines pour exercer son travail et y survivre.

12 réactions et commentaires

  • LibEgaFra // 21.08.2020 à 09h09

     » WikiLeaks aurait délibérément mis en danger des informateurs américains en révélant leurs noms. »

    Depuis quand ceux qui suscitent ou sont responsable ou mènent même des activités criminelles devraient-ils échapper à toute sanction ou à toute condamnation?

    Ah, j’oubliais, il y a une loi pour les yankees et il y en a une autre pour les autres!

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  • Omelette // 21.08.2020 à 09h47

    « La famille élargie du président Ben Ali est souvent citée comme étant le nœud de la corruption tunisienne. Souvent qualifiée de quasi-mafia, une mention indirecte de « la famille » suffit pour indiquer de quelle famille il s’agit. Apparemment, la moitié du monde des affaires tunisien peut revendiquer un lien avec Ben Ali par le biais du mariage, et nombre de ces relations auraient tiré le meilleur parti de leur lignée. »

    Je suis en train de lire une saga sur la Guerre des Roses, qui a inspiré Game of Thrones (tout comme Les Rois Maudits d’ailleurs). A bien des égards ça ne fait pas un gros choc de passer du Moyen-Age à la période contemporaine et vice versa : népotisme, intrigues, espionnage, torture, économies de rentes, structure sociale hiérarchisée, gaspillage de vies et de ressources pour la guerre, et cependant le parlement anglais existait déjà !

      +12

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  • Jean-Do // 21.08.2020 à 10h42

    Bon rappel de l’excellence du travail de WikiLeaks et des raisons que les USA ont de haïr son fondateur-animateur, Julian Assange. Que son saint nom soit béni 😉

    Reste que la haine n’est pas une justification juridique pour demander l’extradition d’un journaliste étranger de la part d’un pays tiers. Si cet homme est jamais extradé vers les USA et soumis à ce qu’ils appellent « leur justice », cela signifie que tout journaliste n’importe où dans le monde occidental dépend du « bon vouloir » des autorités américaines pour exercer son travail et y survivre.

      +34

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  • christian gedeon // 21.08.2020 à 11h22

    Comme chacun sait les us sont seuls au monde à avoir ce genre de pratiques. Les autres tous des angelots auréolés de morale. Les Leaks c’est bien. Comment dit on leaks en chinois, en russe en iranien ou en coréen du nord. Ça se dit fais ce que je dis ne fais pas ce que je fais.

      +4

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    • Sara // 21.08.2020 à 14h23

      En russe: утечка. Ne me remerciez pas, tout le plaisir était pour moi.

        +8

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  • LibEgaFra // 21.08.2020 à 12h32

    « Comment dit on leaks en chinois, en russe en iranien ou en coréen du nord. »

    On dit propagande yankee. Exemple tout récent avec Navalny « principal » opposant à Poutine avec…3%. Comme si par exemple en France Dupont-Aignan était le principal opposant à Macron.

    Pas de chance en Russie le principal opposant est le PC.

    En France on dit Canard Enchainé. Qui a grandement favorisé l’élection de Macron.

      +30

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    • EugenieGrandet // 21.08.2020 à 21h53

      tiens, je croyais que c’étaient les supposées malversations (devenues réelles selon les actes de la décision du tribunal) du candidat de Les Républicains qui avaient favorisé l’élection de E Macron.
      .
      il est vrai qu’il plus facile d’accuser le messager (Canard) ou de casser le thermomètre. C’est selon.

        +1

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      • Logique // 21.08.2020 à 23h42

        Vous devriez lire plus souvent les-crises.fr. Qui a sorti l’affaire des « millions consommés » par Macron et dont le Canard n’a pipé mot en 2017. Macron s’est vengé en mettant à l’index Sputniknews et RT qui avaient repris les analyses de Monsieur Berruyer. C’est qu’il a la rancune tenace, le monarque. Et il y a aussi l’affaire de Las Vegas.

        Alors expliquez-nous pourquoi Fillon et pas Macron. Pourquoi ce deux poids deux mesures?

        https://www.les-crises.fr/mot-cle/patrimoine-macron/

          +16

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        • EugenieGrandet // 22.08.2020 à 21h21

          je réagissais à la phrase « En France on dit Canard Enchainé. Qui a grandement favorisé l’élection de Macron. »

          L’affaire Las Vegas a plusieurs fois été évoqué dans Le Canard. Et elle continue de l’être.

          Pour le reste, j’imagine que pour écrire des articles, il faut des billes (du solide/dur, des recoupements, des sources indépendantes fiables et qualifiées, …) auxquelles Le Canard n’avait peut-être pas accès (voir par exemple les articles sur Cahuzac où c’est Mediapart qui a mené le bal) ou qu’elles n’existent pas dans le cas que vous citez. Je n’en sais rien.

          Enfin avec 4 candidats à 18-22%, bien malin (sans doute vous et LibEgaFra j’imagine) qui aurait pu prévoir le résultat !

          Je pense que vous re écrivez un peu l‘histoire en assurant sans preuve que Le Canard a fait gagner Macron.

            +1

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  • Catherine // 22.08.2020 à 08h15

    Les EU n’ont jamais été le pays de la vertu, de la vérité, de la démocratie, de la liberté d’expression, de la liberté tout court.
    Jamais, c’est un fake, de l’intox, de l’hypocrisie.
    L’histoire est toujours complètement faussée à leur avantage. Normal ils contrôlent TOUT, même la vérité.
    Concernant les abus sexuels de toutes natures, bien avant dyncorp, l’armée régulière s’est toujours tristement illustrée, aussi bien pendant la « libération » que pendant l’invasion du Japon. Au japon, ce qui s’est passé est effroyable.
    Le livre de A.B. Abrams :
    https://reseauinternational.net/1945-a-1951-crimes-de-guerre-et-viols-de-masse-de-japonaises-par-les-troupes-americaines-et-australiennes-pendant-loccupation-alliee-du-japon/

    A l’époque Wikileaks n’existait pas…

      +5

    Alerter
  • RGT // 22.08.2020 à 11h10

    « Nos diplomates ne sont que cela, des diplomates »…

    Donc ce sont des barbouzes comme TOUS les diplomates de TOUS les pays de cette planète et depuis que la diplomatie existe.

    Un diplomate qui serait un « Bisounours » serait immédiatement traduit en justice pour haute trahison envers l’état qu’il doit servir.

    Qu’il soit cordial ou méprisant, un diplomate a pour première mission de servir et d’informer son pays.
    Et aussi d’aller dans le « sens du vent » politique, mais dans ce cas ça peut mener à des désastres s’il déforme la réalité pour faire plaisir aux dirigeants.

    Les diplomates n’ont et ne seront JAMAIS des enfants de cœur.

    Même le grand Sergueï Lavrov ne roule que pour l’intérêt de son pays et ne se gênera pas pour recueillir des infos (surtout gênantes ou croustillantes) sur ses « partenaires » étrangers ni de leur « planter un couteau dans le dos » à la moindre occasion.

    Et quand on se contente d’observer en détail les capacités intellectuelles de ses « adversaires » on comprend pourquoi il obtient des résultats impressionnants.

      +3

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  • Jean Paul B. // 30.08.2020 à 09h45

    Ah bon?
    Les USA trichent?
    Afin de combler certaines lacunes (créées et entretenues sciemment par leurs thuriféraires) sur l’histoire récente des guerres « américaines » ouvertes ou couvertes (le fameux « Camp du Bien » tant loué par les caniches Young Leaders ou non, qui sévissent dans « nos » médias !) je recommande vivement la lecture de l’ouvrage de géopolitique de Christian Greiling intitulé « Le Grand Jeu » aux éditions Héliopoles.
    PS: il serait intéressant de connaitre le montant des aides (désintéressées bien entendu!) que les services des gentils USA versent, par l’intermédiaire de leurs faux-nez, aux journaux, ONG ou « terroristes » du monde entier pour déstabiliser les pays qui les gênent (Russie, Chine, Iran, Syrie, Venezuela, etc.).

      +1

    Alerter
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