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25.avril.202325.4.2023
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[Russeurope-en-Exil] Les sanctions économiques contre la Russie ont-elles échoué ? Par Jacques Sapir

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Le présent texte est la version française d’un chapitre qui sera publié dans un livre collectif, publié en anglais sous la direction du professeur Morad Bali (Ph.D), sous le titre Sanctions and the Impact of the Russia-Ukraine Conflict, chez Nova Science Publishers (New York). Je remercie les collègues américains, indiens et russes qui ont relu ce texte. Je suis naturellement seul responsable des erreurs et omissions.

La question de l’effet des sanctions prises contre la Russie depuis le début du conflit en Ukraine a été l’objet de nombreux débats[1]. Elle doit désormais être posée et ce après près d’un an et demi d’application de ces dernières. Cette efficacité doit être évaluée que celle-ci soit économique ou politique, et en particulier il faut répondre à la question de savoir si la Russie a été isolée. De plus, il convient d’envisager les conséquences de long terme d’une action dont les conséquences pourraient être importantes, voire dévastatrices, pour l’organisation géoéconomique du monde.

Des sanctions anciennes

La Russie est en réalité sous le coup de sanctions économiques depuis 2014 et son intervention en Crimée. Ce fait est souvent méconnu dans le débat sur l’application des sanctions actuelles. Cela implique que les sanctions prises en 2022 n’ont pu surprendre le gouvernement russe, et que l’économie s’était déjà en partie adaptée à des restrictions tant financières qu’économiques.

Les Etats-Unis ont décidé immédiatement des sanctions en 2014. Cependant, ils allèrent rapidement plus loin. Le 2 août 2017, le Congrès américain vota le Countering America’s Adversaries Through Sanction Act ou (CAATSA)[2], qui contient le principe de sanctions extraterritoriales[3] et provoqua de ce fait des protestations en Allemagne et en Autriche[4]. Étaient visées les infrastructures pétrolières russes, et en particulier la construction des pipelines et gazoducs. L’Union européenne (UE) a commencé, quant à elle, par viser des personnes. Puis, elle a étendu ces sanctions à des entités financières et des sociétés russes. Ainsi, le 12 septembre 2014, l’UE a interdit l’accès aux crédits européens à plusieurs banques et compagnies pétrolières russes et l’exportation de biens pouvant être utilisés militairement et l’exportation d’équipements pétroliers vers la Russie[5]. Ces sanctions furent régulièrement prolongées jusqu’en 2022.

L’application des sanctions n’a donc pas commencé en février 2022.

Les effets des sanctions prises à cette époque ont été mesurés. Ainsi, pour les mesures prises en 2014 et 2017, elles auraient représenté un manque à gagner de 4 milliards de dollars par mois pour les pays impliqués, dont 52 % des pertes pour la Russie, soit la moitié. Pour l’Union européenne seule, le manque à gagner s’élèverait à 1,5 milliard de dollars chaque mois. On constate que le coût de ces sanctions semble avoir été également partagé entre pays ordonnateurs des sanctions et le pays « cible », la Russie. De plus, comme le prévoyait Peter van Bergeijk[6], la Russie a répliqué à ces sanctions en décrétant un embargo contre les produits agricoles européens, embargo qui se révéla ponctuellement coûteux pour la France, la Grèce, l’Italie et l’Espagne et qui dopa le secteur agricole en Russie. La présence d’un « effet Boomerang » est évidente pour les des sanctions prises avant la guerre et ce en particulier pour les pays de l’UE. Emma Ashford dressait déjà un constat d’échec à ce sujet[7].

Plus globalement, on peut s’interroger si les sanctions prises en 2014 n’ont pas préparé l’économie de la Russie à résister à de nouvelles sanctions. L’effet d’apprentissage sur les acteurs, qu’il s’agisse du gouvernement ou des acteurs privés, n’a pas été négligeable[8]. C’est l’une des raisons pour lesquelles des doutes importants ont été émis quant à l’efficacité des sanctions prises à partir de février 2022[9].

Les sanctions actuelles

Ces sanctions ont naturellement été considérablement renforcées depuis le début des hostilités avec l’Ukraine le 24 février 2022[10]. Le Ministre français de l’économie et des Finances a ainsi pu parler de « guerre économique » menée contre la Russie[11].

Les pays occidentaux ont imposé des sanctions à la Russie lorsqu’elle a reconnu l’indépendance des républiques autoproclamées du Donbass (22 février). Puis, avec le début des attaques contre l’Ukraine le 24 février, des sanctions majeures ont été décidées pour paralyser l’économie russe et aboutir à la fin des opérations militaires. Ces sanctions constituent à ce jour l’éventail le plus large de sanctions prises en temps de paix.

L’Union européenne a ainsi prise 10 vagues successives de mesures visant l’économie de la Russie[12], et en particulier le secteur financier avec l’exclusion de certaines banques russes et biélorusses du système SWIFT, la limitation de l’accès aux marchés primaire et secondaire des capitaux de l’UE pour certaines banques et entreprises russes, l’interdiction des transactions avec la Banque centrale de Russie et avec la Banque russe de développement régional. Ces mesures interdisent de fournir des billets de banque libellés en euros à la Russie et à la Biélorussie, ainsi que tout financement public ou investissement en Russie et dans des projets cofinancés par la Russie.

Ces mesures sont aussi destinées à frapper le secteur de l’énergie en Russie. Elles comprennent l’application d’un plafond de prix lié au transport maritime du pétrole brut et des produits pétroliers, l’interdiction des importations de charbon en provenance de Russie, l’interdiction des importations de pétrole en provenance de Russie, l’interdiction des exportations vers la Russie de biens et technologies dans le secteur du raffinage de pétrole et l’interdiction de nouveaux investissements dans le secteur minier et de l’énergie russe. Enfin, naturellement, des sanctions concernant le secteur des transports, mais aussi celui des capacités industrielles pouvant servir la défense ont été prises. Les mesures, ici, visent à l’interdiction des exportations vers la Russie des biens et technologies à double usage et des matériels à usage potentiellement militaire (moteurs de drones, armes à feu, matériel militaire). On notera, aussi, l’interdiction des importations de fer, d’acier, d’or, de bois, de ciment, de papier, de caoutchouc synthétique et de matières plastiques en provenance de Russie.

Ces mesures sont extensives[13]. Mais, un certain nombre de pays de l’Union européenne ont demandé des exemptions[14], comme la Belgique, la Bulgarie et la Hongrie. Par ailleurs, l’application du gel des avoirs russe a posé de redoutables problèmes de mise en œuvre réelle[15].

Les Etats-Unis ont eux aussi décidé un effort coordonné et global pour étendre la portée et l’intensité des sanctions économiques et sanctions politiques. Le président Biden, de concert avec les dirigeants du G7, a annoncé la révocation des relations commerciales normales permanentes avec la Russie[16]. La Maison Blanche a annoncé l’interdiction de nouveaux investissements dans la Fédération de Russie et de la fourniture de certains services en Russie[17]. Les mesures prises par le département du Trésor comprennent des sanctions de blocage contre les principales banques russes[18], l’extension des restrictions liées à la dette et au capital liées à la Russie aux grandes entreprises publiques et aux entreprises privées, le blocage total des avoirs de la Sberbank et d’Alfa-Bank. Pour la partie industrielle, des sanctions supplémentaires contre le secteur technologique russe ont été prises ainsi que de nouvelles mesures à l’encontre de 70 entités russes essentielles à l’industrie de défense de la Russie et l’interdiction d’importer aux États-Unis de l’or provenant de la Fédération de Russie[19]. En outre, le Bureau de l’industrie et de la sécurité (BIS) du Département du commerce a annoncé l’extension des contrôles à l’exportation, restreignant considérablement l’accès de la Russie à de nombreuses technologies et articles nécessaires pour maintenir ses capacités militaires agressives[20].

Les sanctions prises par l’UE ou par les Etats-Unis ont donc été très importantes. Elles ont été imitées ou reprises en partie par un certain nombre de pays, le Canada, mais aussi le Japon, l’Australie, Taïwan, la Corée du Sud ou Singapour. Mais, elles ne sont pas reprises par tous les pays. Que ce soit en Asie, en Afrique et en Amérique Latine, de nombreux pays – qui par ailleurs pour certains dénoncent la guerre menée par la Russie à l’Ukraine – se refusent à les appliquer. On citera à cet égard la Chine, l’Inde, et la Malaisie, mais aussi le Mexique, le Brésil, l’Argentine, les pays du Golfe Persique, pays des BRICS ou ayant demandé leur adhésion aux BRICS, et la Turquie, pays pourtant membre de l’OTAN. Cela en affaiblit notablement la portée

Quel impact pour les sanctions ?

Ces sanctions ont eu un impact, qui est reconnu par les autorités russes. Le fait que la croissance, qui était de 3,5% avant les sanctions, se soit transformée en une récession de -2,1%, le montre. Mais, l’évaluation de cet effet soulève de nombreuses discussions. Dans un article publié à la fin de l’année 2022, un chercheur russe en analysait les effets et étudiait la grande dispersion des estimations initiales et jusqu’à l’été 2022[21]. Cette dispersion touchait non seulement les évaluations occidentales, mais aussi des institutions russes comme le Ministère du Développement Économique, l’Institut des Prévisions Économiques de l’Académie des Sciences, et la Banque Centrale de Russie.

Table 1

Forecasts and estimates of Russia’s growth under sanctions

Sources : Кувалин Д. Б. (Kuvalin D.B.), « Российская экономика в условиях жестких внешних санкций: проблемы, риски и возможности », in ЭКОНОМИЧЕСКИЕ И СОЦИАЛЬНЫЕ ПЕРЕМЕНЫ: ФАКТЫ, ТЕНДЕНЦИИ, ПРОГНОЗ , Vol 15, n°6, 2022, p. 79-93, table 3.

** https://ecfor.ru/publication/kratkosrochnyj-analiz-dinamiki-vvp-dekabr-2022/

*** https://ecfor.ru/publication/kratkosrochnyj-analiz-dinamiki-vvp-yanvar-2023/

* https://rosstat.gov.ru/storage/mediabank/osn-02-2023.pdf

+ https://www.imf.org/en/Publications/SPROLLs/world-economic-outlook-databases#sort=%40imfdate%20descending

Dmitry Kuvalin, sur la base tant de travaux russes[22] qu’occidentaux, montrait que la résilience de l’économie russe avait été largement sous-estimée[23]. Depuis, tant le Fonds Monétaire International que l’agence russe des statistiques, ont convergé vers une estimation de -2,1% du PIB pour 2022[24].

Des prévisions catastrophistes avaient été faites à l’université de Yale[25]. Mais, le raisonnement, peu ou mal sourcé, semble devoir beaucoup à l’idéologie. De même, l’étude faite à la Direction du Trésor française par Mme Bénassy-Quéré fournit des éléments de réponse mais n’évite pas, elle non plus, le biais de l’idéologie[26]. Enfin, une autre étude, partant de l’hypothèse que les chiffres fournis par l’agence russe des statistiques ne sont plus fiables, ou sont truqués, tente de recourir à des chiffres alternatifs[27]. Cette étude a été menée par deux chercheurs de la Banque Centrale Européenne[28]. Ils utilisent des statistiques partielles, sur la consommation des ménages, dont certaines ont été collectées par des entreprises privées russes. Mais, ces données sont extrêmement fragiles. La consommation des ménages dépend aussi des préférences pour la consommation et l’épargne, préférences qui ont naturellement été modifiées par la nouvelle situation. De plus, l’évolution du PIB est aussi affectée par d’autres paramètres, en particulier en ce qui concerne l’industrie. Enfin, l’hypothèse d’un basculement d’une consommation des ménages centrée sur la consommation individuelle vers une consommation centrée sur des biens collectifs (transports, infrastructures, etc…) n’est pas prise en compte. Cela souligne la fragilité de cette étude.

Nous sommes, de fait, confrontés à des affirmations selon lesquelles les données du système statistique russe (ROSSTAT ou FSGS[29]) seraient systématiquement truquées. Ces affirmations nécessitent une vérification pour discerner ce qui relève de la propagande et ce qui relève de la possibilité (tout gouvernement peut être tenté de jouer avec les chiffres) et du raisonnement de bonne foi. Elles soulèvent, aussi, deux problèmes majeurs, que les partisans de l’hypothèse de ce trucage systématique et régulier des statistiques russes ne semblent pas prendre en compte.

Le premier n’est autre que l’importance de la tâche requise pour truquer un système statistique complet, tout en conservant une cohérence entre les diverses données. Il est certes facile de tirer de son chapeau des chiffres plus intéressants que ceux issus de la réalité. Mais, ceci expose qui s’y livre à se voir détecté du fait des incohérences entre ces chiffres et le reste des données. Un trucage, pour être efficace, implique que la cohérence des chiffres soit maintenue pour l’ensemble du système statistique. Que ceci ait pu être fait en quelques mois, voire en une année, est extrêmement douteux. Notons, de plus, qu’il aurait fallu établir une cohérence entre les dernières données « véridiques » et les données manipulées pour que la manipulation ne soit pas immédiatement visible. Ceci aurait aussi exigé un travail considérable. Assurément, le gouvernement russe ne publie plus certaines des données statistiques, mais ce sont essentiellement des données relatives au commerce extérieur et à sa répartition par pays, qu’ils soient clients ou fournisseurs. L’essentiel des données économiques, sociales et humaines est toujours là. La question de la cohérence se poserait donc inévitablement si, à partir d’une date donnée, les chiffres avaient été manipulés.

Le second est que les données du FSGS ne sont pas premièrement destinées au monde extérieur mais principalement aux administrations et aux entreprises privées et publiques de Russie. Pour ne pas compromettre le bon fonctionnement de l’appareil d’État et des principales entreprises, il aurait fallu, dans le même temps où l’on établissait un ensemble des statistiques truquées, mais cohérentes, produire des statistiques « véridiques » qui auraient été gardées secrètes. Or, compte tenu de la nécessaire diffusion à plusieurs milliers de fonctionnaires et d’opérateurs économiques de ces statistiques « secrètes », certaines auraient dû nécessairement fuiter.

Ces deux problèmes rendent douteuse la thèse d’un trucage systématique des données russes. Il convient d’ajouter les que les statisticiens du Fonds Monétaire International continuent d’accorder leur confiance aux statistiques fournies par le FSGS et que leurs propres estimations convergent assez régulièrement avec celles du FSGS.

Il faut alors comparer les indicateurs du PIB et de la croissance avec l’évolution de la main d’œuvre employée. Le niveau d’emploi, qui avait baissé au début de 2022 soit avant les sanctions, est aujourd’hui supérieur à ce qu’il était en janvier-février 2022 et tend à accélérer avec le temps. C’est une indication importante quant à la santé de l’économie de la Russie. Si l’on compare les chiffres des dix derniers mois de l’année 2021 à ceux de 2022, soit la période allant de mars à décembre qui est celle de l’entrée en vigueur des sanctions, on constate que l’emploi mensuel moyen a augmenté de 0,2% en 2022. Si l’on compare les sept mois allant d’août 2021 à février 2022, soit la période de forte croissance ayant immédiatement précédée l’application des nouvelles sanctions induites par la guerre en Ukraine à la période équivalent de 2022-2023, on constate un accroissement de l’emploi mensuel de 0,4%. Si l’on prend maintenant les quatre derniers mois précédant les sanctions et que nous les comparons aux quatre mois équivalent de 2022-2023, la hausse de l’emploi mensuel atteint 0,8%[30].

On ne connait pas précisément l’évolution du temps de travail moyen, en particulier dans l’industrie et la construction, mais on peut raisonnablement penser qu’Il a probablement augmenté, car les revenus salariaux nominaux ont fortement augmenté et les revenus réels sont désormais au-dessus de 100%. On peut affirmer que la quantité de travail dépensée en Russie est, aujourd’hui, supérieure de 1% à 2% à ce qu’elle était au début de l’année 2022. Or, le PIB, suivant les données du FSGS, aurait baissé de -2,1% en 2022 et, du mois de février 2022 au mois de février 2023 de -1,8%. L’écart entre la quantité de travail et la quantité de la production, autrement dit la baisse de la productivité du travail, serait donc actuellement de 2,8% à 3,8%. Cela semble réaliste. Il est extrêmement douteux que les sanctions aient pu provoquer une baisse de la productivité plus importante. Rappelons que, si l’on se fie aux sources en provenance des Etats-Unis, la Russie n’a pas été coupée de ses sources d’approvisionnements en machines et biens à haute technologie[31]. Les chiffres du FSGS apparaissent donc à la fois crédibles et probablement un peu pessimistes. On ne doit donc pas exclure que quand ces estimations laisseront la place aux chiffres consolidés, ce qui surviendra à la fin du 3ème trimestre de 2023, on soit confronté à une réévaluation de ces chiffres[32]. Cette possibilité a été notamment évoquée par le chercheur russe Oleg Bakun[33].

Une économie qui résiste aux sanctions ?

L’économie russe montre cependant une remarquable résilience. Ceci se voit tant sur les données de PIB qui, après avoir connu une baisse de -2,1% en 2022 pourraient augmenter sensiblement en 2023 et 2024, que pour les données de l’industrie. En ce qui concerne l’évolution du PIB, le Fonds Monétaire International prévoit désormais, dans ses données publiées en avril 2023, une hausse de +0,7%, une prévision qui lui a valu une attaque aussi injuste qu’haineuse dans les colonnes de Time Magazine[34]. Une révision ultérieure à la hausse est d’ailleurs probable. Au rythme actuel de progression de l’emploi en Russie, et si l’on estime que la productivité qui a baissé en 2022 va se remettre à progresser, une hausse de 1,0% à 1,5%, est désormais envisageable. De fait, après avoir subi le choc des sanctions de mars à juin 2022, l’économie est maintenant sur une trajectoire de récupération, tout comme un individu qui a reçu un coup violent et inattendu et qui se remet peu à peu.

Les causes de cette récupération sont multiples. L’État a lancé de grands investissements, une croissance de 5,4% en 2022, qui tirent la croissance[35]. Le commerce extérieur s’est adapté avec l’aide des pays n’appliquant pas les sanctions. Les entreprises ont su faire preuve d’une résilience remarquable. Enfin, la politique du gouvernement semble prendre la direction de ce qu’un sociologue ukrainien a qualifié de « keynésianisme militaire »[36], par une aide importante aux fractions de la population engagées dans l’effort de guerre mais aussi par le volume des commandes publiques au secteur de l’armement[37]. Si l’on ne dispose pas de données précises quant à la production d’armement, les hausses des revenus salariaux dans les régions où sont situées les principales usines d’armement[38], les salaires réels y ont connu des différences importantes sur les 3 premiers trimestres de 2022. L’investissement (FBCF) a lui aussi fortement augmenté avec des pics dans les districts fédéraux d’Extrême-Orient, de l’Oural, de Sibérie et Volga-Vyatka. Tout ceci pointe vers une forte montée en puissance des industries militaires, qui a nécessairement un impact sur la production totale.

Il y a enfin une autre raison, le développement d’une politique de substitution des importations. C’est une dimension qui a été souvent ignorée ou minimisée dans la capacité de l’industrie russe à continuer à bien fonctionner dans le contexte de sanctions qui sont particulièrement sévères[39]. La substitution aux importations ne date cependant pas de 2022 mais de 2014, quand les premières sanctions industrielles ont été prises, voire même d’avant[40]. La principale motivation pour « substituer » les importations est la réalisation que la stabilité économique internationale n’était pas assurée et que les chaînes techniques mondiales pouvaient se révéler des sources de vulnérabilité. Ceci fut mis en évidence par la première vague de sanctions, qui date de 2014-2015, mais fut renforcé par la crise de la Covid-19[41].

Graphique 1

Sources : ROSSTAT and CEMI

Mais, on peut aussi se demander si des impératifs géostratégiques n’ont pas été pris en compte dans ce qui apparait, avec du recul, comme une forte inflexion dans le modèle de développement de la Russie[42].

En fait, la substitution des importations est initialement associée aux années 2000, avant le début de la crise mondiale de 2008-2009[43]. Dans un contexte de forte croissance économique, la Russie a activement attiré les investissements directs étrangers et localisé des productions en utilisant des technologies étrangères[44]. Ceci a permis un début de diversification des exportations, correspondant d’ailleurs au modèle canonique du commerce international[45]. Dans le contexte de sortie de la crise de la Covid-19, la politique russe de substitution des importations s’est déplacée vers la modernisation technologique[46] et une augmentation de l’activité innovante des entreprises nationales.

Le taux d’utilisation des capacités de production[47], qui est un bon indicateur de l’activité industrielle, aurait atteint – suivant les informations communiquées par UNICREDIT[48] – les 86%. Or, en régime « normal » on est actuellement plus généralement autour de 78% à 82% suivant les pays[49]. Cela implique que l’activité industrielle est très élevée actuellement en Russie.

La trajectoire de la production industrielle indique clairement que la croissance devrait revenir dès le deuxième trimestre. L’économie russe pourrait ainsi récupérer d’une partie du choc qu’elle a subi, et retrouver, puis dépasser, son niveau de février 2022 dans le cours de l’année 2024.

Bien sûr, la Russie se transforme aussi qualitativement. La comparaison des secteurs d’origine du PIB est de ce point de vue instructive. L’une des conséquences de la guerre et des sanctions est l’affaiblissement de la part des services dans le PIB et la montée de la part de la « production matérielle » au sein du PIB.

Table 2

Part de la production matérielle dans le PIB de la Russie

2016 2022** 2023***
Industrie 23,1% 28,8% 29,3%
Agriculture 4,8% 4,3% 4,3%
Construction 6,2% 5,2% 5,3%
Transport de l’électricité, gaz, chaleur, eau* 2,6% 2,3% 2,3%
Total 36,7% 40,6% 41,2%

Sources: ROSSTAT and https://rosstat.gov.ru/storage/mediabank/22_20-02-2023.html

*Données de 2016 mises en cohérence avec 2022.

** Estimations

*** Prévisions

La Russie semble donc avoir passé avec succès le test des sanctions.

Des sanctions inefficaces ?

Les sanctions ont été prises pour contraindre la Russie à cesser les combats et à revenir à la situation du 22 février 2022. Nous en sommes loin. De plus, il n’a jamais été dit que si la Russie faisait cela, ces sanctions seraient immédiatement levées. Alors, se dessine un autre motif : affaiblir durablement l’économie russe pour amener le pays à la table de négociation dans un rapport de force favorable. Mais, cette position est-elle crédible ?

Il faut pour en juger revenir sur le principe des sanctions économiques[50]. Ces dernières font partie de l’arsenal de la diplomatie internationale depuis la création de la SDN. La Charte de la SDN disposait, dans son article 16, d’un arsenal de mesures de guerre économique visant à rendre impossible la poursuite d’un conflit[51]. Lors de la guerre entre l’Italie et l’Abyssinie, le manque d’unité sur ces questions[52]., et l’absence des Etats-Unis qui n’avaient pas ratifié leur participation à la SDN, ont rendu inefficaces ces sanctions[53]. Après la Seconde Guerre mondiale, les sanctions économiques fut ressuscitée mais avec la volonté constante d’éviter les erreurs commises par le SDN. La question de l’application et du respect des sanctions par l’ensemble de la « communauté internationale, fut au centre des réflexions[54]. La Charte des Nations Unies, dans son chapitre VII consacré aux « Actions en respect des Menaces pour la Paix, des infractions à la Paix et des Actes d’Agression » reprit la logique de l’article 16 de la SDN[55]. La notion donc de coercition économique, de mesures s’apparentant à des mesures de guerre économique[56], figure donc bien dans droit international Cependant, ces mesures sont strictement liées au Conseil de Sécurité (CSNU). On doit signaler que sanctions unilatérales sont en théorie condamnées par les Nations unies ce qui n’a pas empêché leur utilisation[57], notamment par les Etats-Unis.

L’efficacité des sanctions a dépendu de nombreux facteurs. Le principal étant l’écart économique entre le groupe de pays décidant des sanctions et le pays « cible », ainsi que l’isolement de ce dernier. De fait, au fur et à mesure que les rapports de force économiques ont évolués, les sanctions ont perdu de leur efficacité.

Table 3

Succès et échecs des sanctions économiques internationales

 

Cible 1945-1969 1970-1989 1990-2000
Succés Échec Succés Échec Succés Échec
Ability to change target country policy 5 4 7 10 8 7
Regime change and democratization 7 6 9 22 9 23
Cessation of military operations 2 2 0 6 0 3
Modification of military policy (non-conflict) 0 6 4 10 2 4
Other important policy change 2 13 3 4 5 5

Total

All cases included 16 31 23 52 24 42
Cases where the United States is involved 14 14 13 41 17 33
Unilateral sanctions taken by the United States 10 6 6 33 2 9
Overall success/failure ratio 1,94 2,26 1,75
Success/failure ratio in relation to conflicts or military policies 4,00 4,00 3,50
Overall Success/Failure Ratio for Unilateral US Sanctions 0,60 5,50 4,50

Source : Hufbauer G.C., Schott J.J., Eliott K.A., Oegg B., Economic sanctions reconsidered , Washington DC, The Peterson Institute For International Economics, 3rd ed., 2007

Table 5.1., p. 127

Les sanctions n’ont pas été appliquées uniquement dans le cadre de l’ONU. Il y a eu aussi des pratiques de sanctions unilatérales, essentiellement de la part des Etats-Unis. Les sanctions ont ainsi pris une dimension de « guerre économique » imposée par les Etats-Unis, et globalement par le « monde occidental » [58].

Table 4

Succès et échecs des sanctions unilatérales des Etats-Unis

All cases
1945-1969
Succès 14
Échecs 14
1970-1989
Succès 13
Échecs 41
1990-2000
Succès 17
Échecs 33

Source : Hufbauer G.C., Schott J.J., Eliott K.A., Oegg B., Economic sanctions reconsidered , Washington DC, The Peterson Institute For International Economics, 3rd ed., 2007

Table 5.2., p. 129

L’Irak en 1990 fut le cas le plus important d’application de sanctions et aussi le cas le plus médiatisé de l’après-guerre froide. Mais, les sanctions n’ont pas réussi à forcer les troupes irakiennes à quitter le Koweït. Les sanctions ultérieures ont été un succès dans la mesure où l’objectif était d’empêcher l’Irak de se réarmer[59]. Pourtant, elles ont été présentées comme inefficaces par les États-Unis pour justifier leur propre invasion de l’Irak sans aucun mandat de l’ONU. Le bilan de la pratique des sanctions comme arme diplomatique est donc relativement décevant[60]. Dans l’ensemble, l’efficacité des sanctions a été stable, et faible, au cours du XXe siècle, que ce soit pour les sanctions prises dans le cadre de l’ONU ou pour les sanctions unilatérales hors du cadre de l’ONU. Il était donc prévisible que les sanctions contre la Russie n’aient pas les effets escomptés[61], et que ces derniers tendraient à s’affaiblir avec le temps.

De plus, il convient de rappeler que l’économie de la Russie est nettement plus importante et plus diversifiée que ne l’était celle de l’Irak, de l’Iran, ou de Cuba[62], pays qui ont historiquement résisté aux sanctions. À cela, il faut ajouter que la Russie pouvait, et peut toujours, s’appuyer sur tout un groupe de pays importants, dont les positions allaient d’une neutralité bienveillante (Inde) à un soutien déguisé (Chine). L’Inde, notamment, s’oppose ouvertement aux tentatives « d’isoler » la Russie et considère que la position des pays occidentaux est hypocrite et inefficace[63]. Par ailleurs, l’un des points qui a été oublié lors de la décision de sanctionner économiquement la Russie était que les pays dits « occidentaux » n’ont plus le poids qu’ils pouvaient avoir au sein de la production mondiale il y a vingt ou trente ans. Cette perte de puissance économique, et le fait que les pays occidentaux n’ont pu ou su faire partager leur point de vue au reste du monde, a considérablement affaibli l’impact des sanctions.

De ce fait, l’échec politique des sanctions était inévitable. Leur échec économique se mesurera dans le temps. Non seulement est-il évident que la Russie retrouvera son niveau économique du début 2022 sans doute à la fin de 2023, mais il est aussi clair que les sanctions sont appelées à perdre, dans les prochaines années, de leur efficacité.

Par contre, il est clair que ces sanctions ont provoqué un choc majeur pour l’économie internationale mais aussi pour les économies européennes. Elles ont fait voler en éclat ce qui restait du multilatéralisme, un fait qui est souligné par le FMI comme un facteur supplémentaire de risque[64], et accélérée des phénomènes de repli sur soi ou sur la constitution de groupes de pays réputé « amis », comme le montre le mouvement actuel d’élargissement des « BRICS »[65]. Ces sanctions, et en particulier les sanctions financières et le gel des avoirs de la Banque centrale de Russie, inquiètent de nombreux pays[66]. Elles pourraient, dans les années à venir, accélérer une dédollarisation des échanges[67], même si ce processus sera probablement long[68]. Ces sanctions ont aussi eu un important « effet Boomerang » important sur les pays de l’Union européenne, qui s’est manifesté par une forte accélération de l’inflation et une baisse générale de la compétitivité de ces économies[69].

Alors que les sanctions devaient, dans l’esprit de leurs initiateurs, démontrer la puissance du « bloc occidental » face à un pays considéré comme un « trouble-fête », voire un pays « voyou », elles sont en train de se révéler le catalyseur d’un processus de dé-occidentalisation du monde[70] et de perte majeure de l’influence, politique, économique, mais aussi culturelle, de ce bloc occidental. Cette tendance était déjà présente avant le conflit et l’usage des sanctions. Mais, elle pourrait avoir changé de nature avec la guerre et les sanctions. Le poids des pays n’appliquant pas les sanctions, et en particulier la Chine, l’Inde, mais aussi le Brésil et – paradoxalement – la Turquie (qui est pourtant membre de l’OTAN), en est sorti renforcé. La Russie, par sa capacité à résister à ces sanctions, bénéficie d’un prestige certain au sein des pays opposés au bloc occidental que ce soit en Afrique, en Amérique Latine ou en Asie.

Les sanctions étaient censées contenir un conflit dans un cadre régional et isoler celui qui était considéré par le bloc occidental comme le fauteur de troubles. Elles se sont avérées être le point de départ d’un pivotement du monde qui remet en cause nombre de hiérarchies internationales tenues jusque-là pour acquises.

 

Notes

[1] Carpentier-Charlety E., « Le Mirage des Sanctions » in Fondation Jean Jaurès, March 30, 2022, https://www.jean-jaures.org/publication/le-mirage-des-sanctions-economiques/

[2] https://www.congress.gov/bill/115th-congress/house-bill/3364/text

[3] Ramdani S., « De Biden vice-président à Biden Président : 5 ans de politique américaine contre Nord-Stream 2 », in La Revue Géopolitique, 2 mai 2021, https://www.diploweb.com/De-Biden-vice-president-a-Biden-president-5-ans-de-politique-americaine-envers-Nord-Stream-2.html

[4]Sinha R. and Talmon S., “Germany considers U.S. extraterritorial sanctions illegal” January 8th, 2020, https://gpil.jura.uni-bonn.de/2020/01/germany-considers-u-s-extraterritorial-sanctions-illegal/

[5] Bēlin M. and Hanousek J., “Making sanctions bite: the EU-Russian sanctions of 2014”, April 29th 2019, VoxEU – CEPR, https://www.consilium.europa.eu/fr/infographics/eu-sanctions-against-russia-over-ukraine/

[6] Van Bergeijk P.A.G., “Russia’s tit for tat”, April 25th, 2014, in VoxEU-CEPR, https://voxeu.org/article/russia-s-tit-tat

[7] Ashford E., “Not-so-Smart Sanctions: The Failure of Western Restrictions Against Russia”, in Foreign Affairs, vol. 95, n°1, January-February 2016, pp. 114-120.

[8] Voir, https://qz.com/how-russian-economy-survived-a-year-of-sanctions-1850144335

[9] Voir https://time.com/6150607/why-sanctions-on-russia-wont-work/

[10] https://www.piie.com/blogs/realtime-economics/russias-war-ukraine-sanctions-timeline

[11] https://www.bfmtv.com/economie/economie-social/bruno-le-maire-nous-allons-provoquer-l-effondrement-de-l-economie-russe_AN-202203010131.html et https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-en-ukraine/guerre-economique-contre-la-russie-bruno-le-maire-revient-sur-sa-declaration-et-regrette-un-terme-inapproprie_4987809.html

[12] https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/sanctions/restrictive-measures-against-russia-over-ukraine/#economic

[13] https://finance.ec.europa.eu/eu-and-world/sanctions-restrictive-measures/sanctions-adopted-following-russias-military-aggression-against-ukraine_en

[14] https://www.reuters.com/markets/europe/eu-unity-over-russia-sanctions-falters-europes-economy-wilts-2022-12-16/

[15] https://finance.ec.europa.eu/system/files/2023-03/230309-repo-global-advisory_en.pdf and https://blog.landot-avocats.net/2023/04/08/gel-des-avoirs-russes-si-meme-les-offensives-juridiques-sont-mal-preparees/

[16] https://www.whitehouse.gov/briefing-room/statements-releases/2022/04/06/fact-sheet-united-states-g7-and-eu-impose-severe-and-immediate-costs-on-russia/

[17] https://home.treasury.gov/system/files/126/fr87_26094.pdf

[18] https://home.treasury.gov/system/files/126/14065.pdf et https://home.treasury.gov/system/files/126/fr87_41589.pdf

[19] https://home.treasury.gov/system/files/126/fr87_47621.pdf

[20] https://www.state.gov/imposing-additional-costs-on-russia-for-its-continued-war-against-ukraine/

[21] Кувалин Д. Б. (Kuvalin D.B.), « Российская экономика в условиях жестких внешних санкций: проблемы, риски и возможности », in ЭКОНОМИЧЕСКИЕ И СОЦИАЛЬНЫЕ ПЕРЕМЕНЫ: ФАКТЫ, ТЕНДЕНЦИИ, ПРОГНОЗ , Vol 15, n°6, 2022, p. 79-93.

[22] Belousov D.R., Sal’nikov V.A., Solntsev O.G. et al, “Analysis of macroeconomic trends”, CMASF, 16/09/2022, http://www.forecast.ru/_ARCHIVE/Mon_MK/2022/macro30.pdf

; Belousov D.R., Sal’nikov V.A., Solntsev O.G. et al., “On the dynamics of industrial production in September 2022”, CMASF, ЦЕНТРМАКРОЭКОНОМИЧЕСКОГО АНАЛИЗА И КРАТКОСРОЧНОГО ПРОГНОЗИРОВАНИЯ, http://www2.forecast.ru/_ARCHIVE/Analitics/PROM/2022/PR-OTR_2022-10-27.pdf

[23] Kuvalin D.B., Zinchenko Yu.V., Lavrinenko P.A., Ibragimov Sh.Sh., “Russian enterprises in the spring of 2022: Adapting to the new wave of sanctions and views on the ESG agenda” in Problemy prognozirovaniya, n° 6, 2022, p. 174–187.

[24] https://rosstat.gov.ru/storage/mediabank/22_20-02-2023.html

[25] Sonnefeld J., Tian S., Sokolowski F., Wyreblowski M. et Kasprowicz M., “Business Retreats and Sanctions Are Crippling the Russian Economy”, July 19, 2022, https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=4167193

[26] https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/2022/06/20/russie-le-rouble-qui-cache-la-foret

[27] https://www.finance-gestion.com/vox-fi/les-chiffres-de-croissance-de-la-russie-sont-ils-fiables/

[28] https://cepr.org/voxeu/columns/recession-russia-deepens-evidence-alternative-tracker-domestic-economic-activity

[29] Pour Федеральная служба государственной статистики

[30] FSGS, Sotsial’lno-Yekonomitcheskoe Polozhenie Rossii, vol 8/2022 pp 187-188 and FSGS, Sotsial’lno-Yekonomitcheskoe Polozhenie Rossii, vol 2/2023 pp 193-194, https://rosstat.gov.ru/storage/mediabank/osn-02-2023.pdf

[31] David A., Stewart S., Reid M. and Alperovitch D., “Russia Shifting Import Sources Amid US and Allied Export Restrictions, Siverado Policy Accelerator, January 2023, https://silverado.org/news/report-russia-shifting-import-sources-amid-u-s-and-allied-export-restrictions/ . See too, Russia Semiconductor Imports: Pre- and Post-Invasion Trends, https://silverado.org/news/russia-semiconductor-imports-dashboard-pre-and-post-invasion-trends/ and Monthly Russian Goods Imports: Post-invasion Trends Based on Mirror Export Data, https://silverado.org/news/monthly-russian-goods-imports-dashboard/ . See also, Ribakova E., Reddy C. et Ulku U., « Macro Notes : China Steps In to Supply Russia”, Institute of International Finance, 1er février 2023, https://www.iif.com/Products/Macro-Notes

[32] https://www.les-crises.fr/russeurope-en-exil-interrogations-sur-le-pib-de-la-russie-par-jacques-sapir/

[33] https://dzen.ru/a/Y_efs_g8ijHjSAGZ and https://dzen.ru/a/ZBRF7xiKGw3W6WN5

[34] https://time.com/6270540/imf-pushing-putins-economic-propaganda/

[35] Bloomberg, « Russia Survived a Year of Sanctions by Investing as Never Before”, Feb. 8, 2023, https://www.bloomberg.com/news/articles/2023-02-08/russia-survived-a-year-of-sanctions-by-investing-as-never-before

[36] Ishshenko V. « Russia’s military keynesianism », Al Jazeera 14/02/2023, https://www.aljazeera.com/opinions/2022/10/26/russias-military-keynesianism

[37] Cooper J., Implementation of the Russian Federal Budget During January-July 2022 and the Spending on the Military, SIPRI Background Paper, SIPRI, Stockholm, October 2022, https://www.sipri.org/sites/default/files/2022-10/bp_2210_russianmilex.pdf

[38] Voir le n°17 du Bulletin régional de la Banque Centrale de Russie, mis en ligne le 1er février 2023, https://www.cbr.ru/analytics/dkp/report_02/

[39] Adamovich A., « La Russie passe à un nouveau format de substitution des importations», in Komsomol’skaja Pravda, 10 juin 2021, https://www.kp.ru/daily/27289/4427120/

[40] Berezinskaya, O., et Alexey V., Production import- and strategic import substitution mechanism-dependence of the Russian industryin Voprosy Ekonomiki n°1, 2015, pp. 103–15

[41] Voir Adamovich A., « La Russie passe à un nouveau format de substitution des importations», in Komsomol’skaja Pravda, op.cit..

[42] Mukherjee, S., “Revisiting the Debate over Import-substituting versus Export-led Industrialisation” in Trade and Development Review, 5(1), 2012, pp. 64–76.

[43] Dutkiewicz P. et Trenin D., Russia – The challenges of transformation, New-York University Press, New-York, 2011.

[44] Adewale A.R., « Import substitution industrialisation and economic growth – Evidence from the group of BRICS countries” in Future Business Journal, n°3, 2017, pp. 138-158, p. 142-143.

[45] Krugman, P., “Import protection as export promotion: International competition in the presence of oligopoly and economies of scale” (pp. 180–193). In H. Kierzkowski (Ed.), Monopolistic Competition and International Trade, Londres, Oxford University Press, 1984.

[46] Chernova, V. Yu, et B. A. Kheyfets, “Tools for estimating the effectiveness of import-substituting modernization: Case in the agriculture of Russia”, in European Research Studies Journal n°21/2018, pp. 179–91

[47] Pour la définition qu’en donne l’INSEE, voir https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1275

[48] Chiffre communiqué au Webinaire de l’European Business Association (Moscou) du 17 février 2023.

[49] La moyenne historique pour l’industrie manufacturière en France sur 1963-1989 était de 83,2% (source : Bourlange D., Chaney E., « Taux d’utilisation des capacités de production : un reflet des fluctuations conjoncturelles », In Économie et statistique, n°231, Avril 1990. Dossier: Les degrés d’utilisation des facteurs de production. pp. 49-70) et de 83,9% pour la moyenne des années 2009-2019. Il était tombé à 81,8% en 2022 (https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/001586738#Telechargement ). Aux États-Unis il atteint 79,8% pour 2022 (https://fr.tradingeconomics.com/united-states/capacity-utilization )

[50] See Sapir J., “Wendet sich der Wirtschaftskrieg gegen Russland gegen seine Initiatoren?” in Stefan Luft, Sandra Kostner (Editors): Ukrainekrieg. Warum Europa eine neue Entspannungspolitik braucht, Frankfurt am Main, 2023, Westend-Verlag

[51] Traité de Versailles – Pacte de la Société des Nations, consultable à l’adresse suivante : https://mjp.univ-perp.fr/traites/sdn1919.htm

[52] Marcus H., A History of Ethiopia, op.cit..

[53] Bonn, M. J., “How Sanctions Failed” in Foreign Affairs n°15/1937, (January), pp. 350–61.

[54] Doxey, M.P., Economic Sanctions and International Enforcement, 2d ed. New York: Oxford University Press for Royal Institute of International Affairs, 1980.

[55] https://www.un.org/en/about-us/un-charter/chapter-7

[56] Adler-Karlsson, G., 1968. Western Economic Warfare, 1947–1967: A Case Study in Foreign Economic Policy. Stockholm, Sweden: Almqvist and Wiksell, 1968.

[57] « Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations unies », résolution 2625 (XXV), adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies au cours de sa vingt-cinquième session, le 24 octobre 1970, https://www.un.org/french/documents/ga/res/25/fres25.shtml /https://treaties.un.org/doc/source/docs/A_RES_2625-Eng.pdf

[58] Askari H.G, Forrer J., Teegen H. and Yang J., Economic Sanctions: Examining Their Philosophy and Efficacity, Westport, Praeger, 2003

[59] Cortright D., Lopez G.A., “Containing Iraq: Sanctions worked” in Foreign Affairs, July/August 2004.

[60] George A.L., and Simons W.E.. The Limits of Coercive Diplomacy. Boulder, CO: Westview Press. 1994

[61] Sapir J., “Wendet sich der Wirtschaftskrieg gegen Russland gegen seine Initiatoren?” in Stefan Luft, Sandra Kostner (Editors): Ukrainekrieg. Warum Europa eine neue Entspannungspolitik braucht, Frankfurt am Main, 2023, Westend-Verlag.

[62] See, Sapir J., « Assessing the Russian and Chinese Economies Geostrategically” in American Affairs, vol. VI, n°4, 2022, pp. 81-86.

[63] Rao N., “The Upside of Rivalry” in Foreign Affairs, May-June 2023, https://www.foreignaffairs.com/india/modi-new-delhi-upside-rivalry?utm_medium=newsletters&utm_source=twofa&utm_campaign=The%20World%20Beyond%20Ukraine&utm_content=20230421&utm_term=FA%20This%20Week%20-%20112017

[64] https://www.imf.org/en/Blogs/Articles/2023/04/05/geopolitics-and-fragmentation-emerge-as-serious-financial-stability-threats

[65] https://moderndiplomacy.eu/2023/02/11/brics-reaching-out-to-peaks-the-next-wave-of-expansion/ and https://www.agenceecofin.com/actualites/1301-104424-le-groupe-des-brics-statuera-sur-l-admission-de-nouveaux-membres-d-ici-fin-2023

[66] https://www.agefi.fr/news/economie-marches/les-emergents-cherchent-la-voie-de-la-dedollarisation

[67] https://www.forbesindia.com/article/bharatiya-vidya-bhavan039s-spjimr/petroyuan-or-petrobrics-the-need-for-better-alternative-reserve-currencies-to-break-dollar-dominance/84063/1

[68] https://www.project-syndicate.org/commentary/brics-plus-and-the-future-of-dollar-dominance-by-jim-o-neill-2023-04?barrier=accesspaylog

[69] https://www.delorscentre.eu/en/publications/economic-consequences-ukraine

[70] Sapir J., La Démondialisation, (new publication) Paris, Le Seuil, 2021

Commentaire recommandé

Patrick // 25.04.2023 à 12h27

au contraire , ça a plutôt bien marché.
L’économie de l’UE est au plus mal , l’industrie Allemande est privée de sa source d’énergie abondante et bon marché , et les USA vont rafler la mise . C’était pas un des objectifs ?

7 réactions et commentaires

  • POPOV // 25.04.2023 à 07h35

    La politique de sanctions menée depuis 2014 par l’occident face à la Russie n’a pas eu les effets escomptés, arrêt de l’opération spéciale, effondrement économique, l’isolement international de la Russie, voire son démantèlement.
    Et comme on le constate aujourd’hui, seule la surenchère militaire reste envisagée chez les occidentaux pour faire plier M. Poutine. Attendons les résultats de la fameuse contre offensive ukrainienne pour apprécier ce plan B….

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  • Patrick // 25.04.2023 à 12h27

    au contraire , ça a plutôt bien marché.
    L’économie de l’UE est au plus mal , l’industrie Allemande est privée de sa source d’énergie abondante et bon marché , et les USA vont rafler la mise . C’était pas un des objectifs ?

      +25

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    • john // 25.04.2023 à 23h17

      Ce n’était pas l’objectif avoué !
      Mais l’auto-mutilation par décision des élites au pouvoir en Europe pose question (bêtise, idéologie, corruption,….)!
      Sans parler de leur silence concernant le sabotage du NS 1 et 2.

        +11

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  • Adam Reith // 27.04.2023 à 08h50

    Monsieur Sapir,
    Il est fait état, dans les médias, de l’important déficit budgétaire des pouvoirs publics russes, dû à une baisse des revenus liés aux exportations d’hydrocarbures et à une augmentation des dépenses publiques, pour financer la guerre et soutenir l’activité économique.
    Pensez-vous que ce déficit ne soit que temporaire, ou sinon, qu’il soit tenable au-delà du court terme ? Merci.

      +1

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    • RGT // 28.04.2023 à 13h31

      D’après les informations « complotistes » que l’on peut trouver sur le net (utilisez TOR en passant par l’Iran car certaines info « fèces niouzes » sont censurées en France) la Russie a certes connu une baisse quantitative de ses exportations, mais comme les prix se sont envolés, les bénéfices ont connu une croissance importante.

      Concernant la baisse des exportations, elle n’est pas si dramatique que ça car les exportations à destination de l’€urope on été en grande partie compensées par de nouvelles exportations vers des pays qui importaient beaucoup mois (ex : L’Inde qui désormais importe du pétrole russe à tour de bras et qui exporte ensuite des hydrocarbures raffinés à destination de l’€urope en prenant une grosse commission au passage …).
      Sans compter les pétromonarchies qui importent du pétrole russe pour leur usage interne ce qui leur permet d’augmenter d’autant (voire même plus en mélangeant le pétrole russe à leur propre production)…

      Il faut AUSSI rappeler que les USA, contrairement à leurs vassaux, n’ont PAS boycotté le pétrole russe et qu’ils se réservent le droit de l’utiliser pour leur usage interne ou pour l’exporter comme « Made in USA »…

      Et qui est le dindon de la farce d’après-vous ???

        +3

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  • JPP // 03.05.2023 à 12h58

    Comment peut on sanctionner vraiment un pays immense et immensément riche en matières premières disposant d’une industrie très développée et une agriculture florissante, tout cela permettant de vivre en complète autarcie ?
    Et en plus ce pays n’est pratiquement pas endetté et dispose d’énormes réserves d’or.

      +1

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  • Grd-mère Michelle // 03.05.2023 à 14h18

    À rappeler que, dès le LENDEMAIN des premières sanctions économiques prononcées contre la Russie à l’occasion de l’annexion de la Crimée en 2014, Vl.Poutine a foncé en Chine pour convenir d’accords commerciaux assurant des débouchés pour le pétrole russe.
    (Information diffusée ce jour-là sur les ondes de la RTBF, service public de radio-télévision belge francophone)
    Ce jour-là, et alors que, depuis son accession au pouvoir, il semblait espérer une entente cordiale avec l’UE qui aurait pu assurer une autonomie énergétique et alimentaire du continent européen par rapport aux « grandes puissances » américaines et asiatiques « envahissantes » (selon mes observations régulières et attentives), il a compris que c’était râpé, que les plans établis dès la seconde guerre mondiale, poursuivis pendant la guerre froide, de profonde division des peuples européens, étaient en train de se concrétiser.

      +1

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